Chapitre 25 - ASTRID
- Nous voilà enfin seuls, soupire Willer.
En quatre mots, il m'assène une gifle plus puissante que tous les coups reçus.
Je me réveille brusquement.
Mon esprit se transforme, laisse place à l'autre Astrid, celle qui a vécu à l'Organisation et qui a été formée là-bas.
Mes pensées se clarifient.
Ma vue se précise, dans tous les sens du terme.
J'ai de nouveau cette vision d'ensemble qui me rappelle ma mission, son importance, et surtout ce que j'ai à faire pour la remplir.
Mes doutes s'envolent, et Alexy avec eux.
Je dois être subtile. Je sais déjà exactement ce que je dois faire, et comment je sauverai ma couverture. Il ne me reste plus que la partie pratique : mettre en oeuvre mon plan. Il y a quelques heures, ma gorge se serait nouée rien qu'à y songer, et mon coeur se serait arrêté quelques instants. Mais maintenant, je suis parfaitement calme. Ce don que j'ai pour devenir quelqu'un d'autre, ou plutôt pour endosser mon ancienne personnalité, me laisse toujours perplexe, mais quand il s'empare de moi, de mon esprit, de mon corps, j'ai appris à ne plus le repousser. Au contraire, je le tourne à mon avantage et je sais à présent comment l'utiliser. Comme quand je me suis échappée une première fois des griffes de la DFAO. Aujourd'hui, la situation est un peu différente, mais en soit, les enjeux restent les mêmes.
Je me crée une expression terrifiée, même si dans mon coeur, la tempête s'est évaporée. J'ai vaincu ma peur, du moins pour le moment, et rien ne m'entravait plus qu'elle.
Willer s'avance vers moi, je recule. À chaque pas qu'il fait dans ma direction, j'en fais le même nombre en arrière, à l'opposé, jusqu'à ce que je finisse par heurter le mur. Ou plutôt, la paroi qui protège le lit. En quelques secondes, je me retrouve dans la même position que quelques heures auparavant, sauf que ce ne sont plus les mains de Sacha qui entourent ma tête. À cette pensée, son image emplit ma tête, son odeur s'engouffre en moi, son accent si particulier m'enveloppe. Tout s'efface autour de moi. Même les lèvres brutales de Willer qui s'abattent sur les miennes. Je ne réponds pas à ses avances, je ne les repousse pas non plus. Il est peut-être capitaine de la DFAO, mais il n'a pas confiance en lui, je l'ai senti dès la première fois que je l'ai vu. C'est d'ailleurs ce défaut qui le pousse à tout résoudre par la force et les menaces : sinon, il se sent impuissant et il a peur d'échouer. La résistance que je lui ai offerte depuis le début le frustre et le confirme dans ses impressions encore plus, et c'est pour ça que me posséder, m'anéantir, est devenu son but ultime. C'est pour ça que sa rage est si intense à son égard : me dominer signifie dominer son défaut.
Or, je sais que je n'obtiendrai rien de lui par la force, ou par la menace. Il n'est pas si haut placé pour rien. Mais ça ne m'empêche pas d'exploiter ses faiblesses : le laisser avoir ce qu'il veut, endormir sa méfiance, le faire se reposer sur ses lauriers. Une fois qu'il sera persuadé que je ne représente plus aucune menace, il sera bien plus enclin à me donner les réponses que je veux. Il me suffira alors de le manipuler suffisamment finement pour qu'il lâche exactement les informations qui m'intéressent. Et une fois qu'il se rendra compte de son erreur... il sera trop tard.
Mais ce plan risqué implique un sacrifice.
Le mien.
Celui de ma dignité.
Celui de toutes mes convictions.
Celui de ma résistance.
Et même si je sais que c'est une étape essentielle à la réussite de ma mission, les choses n'en sont pas moins dures à supporter.
*
Je lance une dernière prière avant de me jeter à l'eau. Si Allen s'est trompé dans ses calculs, je m'apprête à signer mon arrêt de mort. Il ne me reste plus qu'à espérer.
- Trois mois ont passé, et tu es toujours aussi pitoyable, je lâche.
Ça y est, j'ai prononcé les mots.
Comme j'aurais dû m'y attendre en lui révélant mon plan, Allen n'a pas accepté de me laisser partir sans quelques précautions qui me sont à présent bien plus qu'utiles. Je dois avouer que s'il n'avait pas été là, je n'aurais pas réfléchi au problème du micro avant le moment fatidique, ou du moins quand il aurait été déjà trop tard. Certes, faire croire à la DFAO que nous ne nous doutions de rien était facile sur le moment, mais après ? Ce micro posait de nombreux problèmes. Mais grâce à Allen, je suis partie équipée pour la réussite : mon frère m'a effectivement fourni le brouilleur que nous avons utilisé pour converser sans danger la première fois, mais avec quelques modifications en plus. Ainsi, le seul moyen de l'activer et de le désactiver est devenu ma voix, et une combinaison de mots bien précise : trois mois ont passé. J'ai pris soin de les éviter rigoureusement depuis que le dispositif est en place sur moi, indétectable, implanté dans la même joue que le micro. Une fois activé, il modifie le fonctionnment du micro, couvrant toutes les voix humaines pour ne laisser filtrer que les sons naturels, ce qui est bien plus discret qu'un simple brouillage.
De plus, pour que je n'aie pas besoin de contacter l'Organisation une fois ma mission accomplie, il a ajouté au brouilleur une fonction bien plus simple mais tout aussi utile : une fois hors de la zone sécurisée que le Quartier du Gouvernement représente, un traceur directement relié aux ordinateurs de l'Organisation se met en marche pour les conduire directement à moi. Il me suffit donc de m'évader et de tenir le temps qu'ils viennent à mon secours. D'après mon frère, je serai repérable quel que soit l'endroit où j'irai me réfugier, et il ne leur faudra que quelques heures. Mais ça n'en reste pas moins bien plus facile à dire qu'à faire.
Je me reconcentre sur la réalité pour observer le visage dérouté de Willer. Il s'est tourné vers moi avec un sursaut, les paupières lourdes, le regard endormi. Et ce regard perdu qu'il me lance a au moins le don de me réconforter : je ne me suis pas souillée pour rien. J'ai atteint mon objectif, la première phase de mon plan retorse est achevée.
Enfouie sous les couvertures, ses mains posées sur moi, je me sens plus sale que jamais. Jamais je n'avais baissé mes défenses aussi bas. Jamais personne ne m'avait touchée ainsi. Evidemment. Comment aurait-il pu en être autrement ? Et aujourd'hui, l'impensable vient de m'arriver. Pire encore, je l'ai volontairement provoqué, et je veux dire par là que je ne me suis pas défendue. Je l'ai laissé faire comme si mon corps lui appartenait. Cet acte répugnant que je viens de commettre ne cessera jamais de me hanter, je le sais. C'est même une certitude. Tout comme le fantôme de l'Organisation ou les tortures subies pendant trois mois, il deviendra une autre de ces images omniprésentes dans mon esprit. Et le pire, c'est que je me rappelle de tout. J'aimerais tant pouvoir oublier ne serait-ce que la moitié de ce que je viens de subir. Mais, ironiquement, le moindre détail est gravé dans ma mémoire, le moindre souffle, la moindre odeur, le moindre bruit... Chacun de mes sens a tout enregistré à sa propre manière pour créer une combinaison effroyable qui jamais ne s'effacera.
Bien sûr, il ne répond rien, trop abasourdi par cette remarque je viens de lancer. Je peux lire sur son visage qu'il ne comprend pas ce que je viens de dire. Depuis une heure maintenant, je me montre docile et obéissante. Je n'ai pas résisté. Je n'ai pas protesté. Je n'ai pas montré ma douleur une seule fois. Et voilà que je le défie à nouveau ? Son cerveau étriqué ne lui permet pas de comprendre cette nouvelle question, et cette conclusion m'apporte un certain réconfort. Je dois me rappeler de ne pas trop attendre et me forcer à continuer, même si ces émotions stupides sur son visage m'aident à oublier, même si en ouvrant la bouche je brise le charme et je permets aux démons de revenir à la charge.
- Tu es pitoyable, je répète. Tu ne te rends même compte que tu es manipulé.
Et soudain, un doute effroyable me saisit. Et s'il ne savait pas ? Je n'y avais jamais réfléchi avant, je partais du principe que la DFAO était assez importante pour que son capitaine connaisse l'existence des puces. Mais après tout, rien n'est moins sûr. Et même si j'ai raison, ça ne signifie pas forcément qu'il est également au courant de l'emplacement du CCP. Je frémis tout en visualisant une image de Sacha dans mon esprit pour me calmer. Même si j'ai honte de recourir à cette technique, je n'ai pas vraiment le choix : son visage, ses expressions, il est le seul à pouvoir apaiser mes doutes. Je réfléchirai aux causes et conséquences de ce phénomène plus tard, quand j'aurai réussi... ou échoué. Parce que pour l'instant, je n'ai qu'une seule option : foncer. Continuer de tracer mon chemin droit devant moi. Je n'ai pas le droit d'abandonner avant d'avoir eu la confirmation de la bouche de Willer qu'il ne sait rien. Ce n'est qu'alors que je pourrai me morfondre et réaliser que tout ça n'aura servi à rien. Pour l'instant, l'heure n'est pas au désespoir. Il reste encore une chance...
Un sourire finit par étirer ses lèvres et je devine que j'ai atteint mon objectif.
Il croit qu'il maîtrise la situation, qu'il va m'anéantir définitivement avec des révélations trop lourdes de conséquences pour ma petite tête de femme. Alors qu'en réalité, il tombe dans mon piège sans se douter de rien. Je dois me rappeler les risques, que tout n'est pas encore gagné.
- Tu penses honnêtement que je - il insiste particulièrement sur le "je" - suis manipulé ? J'ai plus de pouvoir que tu ne pourrais jamais en rêver. Et contrairement à toi, je sais tout.
- Qu'y a-t-il de plus à savoir que ce que je connais déjà ?
Je prends un air hautain.
Je dois lui présenter un nouveau défi sur un plateau, un de ceux qu'il est sûr de pouvoir gagner.
Il doit penser qu'il me domine à nouveau de toute sa puissance.
- Tu inverses les rôles, c'est tellement risible! s'exclame-t-il.
Ses mains font pression sur moi pour me rappeler son pouvoir, mais je ne me laisse pas abattre. Je ne dois pas y penser. Me concentrer sur le présent. Je suis en train de gagner.
Alors pourquoi ai-je l'impression d'avoir perdu depuis le moment où j'ai accepté de lui vendre mon corps pour des informations, sens même une confirmation que j'aurai ce que je veux ?
- C'est toi qui es pitoyable, 97.
- Je m'appelle Alexy, je siffle, tout en priant pour qu'il tombe dans le piège.
Et c'est ce qu'il fait.
- Comment peux-tu te tromper même sur ça ? Ah, j'oubliais... tu ne te souviens de rien, Astrid.
Je laisse planer intentionellement le silence.
- Et toi ? j'attaque de nouveau après cette courte pause. Tu ne te souviens même pas de tes précédents lavages de cerveau!
C'est de loin la partie la plus risquée de mon plan.
Le moment où tout peut basculer.
Celui qui révèlera la direction de mon destin.
En lui disant ça, je lui fais indirectement comprendre que je suis au courant de l'existence des puces, et par là-même que je ne suis pas celle que je prétends être. Soit son besoin de domination prend le dessus et je pourrai le guider pour qu'il parle, soit il se rend compte de ma manipulation et il court prévenir le reste de la DFAO avant que je n'aie le temps d'agir. Honnêtement, je sais depuis le début que la deuxième solution est celle que tout homme sain d'esprit privilégierait. Mais ce qui me fait espérer, c'est que, justement, je ne sais pas à quel point Willer est sain d'esprit. Son cerveau tordu pourrait très bien être capable de tout pour prouver sa prétendue puissance. Et dans ce cas, il remplira parfaitement mes attentes.
Mon interlocuteur fronce les sourcils, cette fois complètement perdu. Et je peux voir dans ses yeux qu'il croit deviner de quoi je parle, même s'il trouve ça complètement délirant. Comment pourrais-je être au courant pour les puces ? Voilà ce qu'il se dit sûrement. Mon coeur est libéré du poids immense qui le maintenait fermement cloué au sol. Je sens mon esprit s'envoler de soulagement.
- Tu...
Très bien.
Il ne sait même plus quoi dire.
Et maintenant, il me suffit de jouer sur son orgueil, comme j'ai joué sur ses plus intimes faiblesses, comme il a joué sur les miennes. Je lui rends simplement la pareille, je ne suis ni cruelle ni sadique.
Je lève les yeux au ciel pour appuyer mes propos, puis me fige, comme si une révélation venait de me frapper. J'aggrandis les yeux et entrouvre légèrement les lèvres tout en le regardant par-dessous mes cils.
Le perturber un maximum.
Tout ce que j'ai appris dans les Résidences pour faire avouer quelque chose à quelqu'un me revient, même si ce ne sont que des souvenirs implantés. Et aujourd'hui, j'ai quelque chose en plus que je ne possédais pas les dernières fois : mon corps de femme. Mes charmes. Même si ça me donne envie de vomir.
- Noooon...
Je laisse traîner mon exclamation pour bien marquer mes propos. Comme si j'étais ahurie.
- Ne me dis pas...
J'éclate de rire.
- Alors comme ça, la stupide Alexy en saurait plus que le capitaine Willer lui-même ? Ne me dis pas que tu...
Je pars d'un fou rire forcé, mais l'allégresse de toucher au but me donne des ailes. Ma joie déteint et je ricane véritablement sous ses yeux ébahis. J'ai rapidement compris que plus un mensonge est proche de la vérité, plus il est difficile à démasquer. Les sentiments présentent les mêmes complexités et les mêmes règles.
- Ne me dis pas que tu...
Je fais exprès de m'arrêter exactement au même endroit pour faire monter sa frustration tout en redoublant d'hilarité.
- Tu ne sais même pas que tu te fais manipuler depuis le début, c'est ça le plus drôle.
Je plisse les yeux et prends un air indécis monté de toutes pièces. Sauf que cette fois, je rends mes expressions si exagérées qu'il ne peut que se rendre compte qu'elles sont fausses. Tant mieux, c'est le but. Plus je l'énerverai et plus je le déstabiliserai, plus il aura de chances de laisser filtrer une information par simple excès colère.
- Tu veux peut-être que je t'explique ? Mais le truc, c'est que je ne suis pas sûre d'en avoir le droit. Christian risque de m'en vouloir si je trahis son petit secret. Et les autres Leaders aussi.
La vérité, c'est que je fais ça pour l'énerver, mais je le teste également. Même si ça paraît clairement ironique, je ne sais vraiment pas ce qu'il connaît de toute cette histoire.
- Voyons...
Je hausse le menton malgré ma répugnance à m'exposer ainsi et le quitte des yeux un instant pour regarder plus haut.
- Le dire, ne pas le dire ? Après tout, en dehors de Christian, c'est aussi amusant pour moi de savoir...
Mais je n'ai pas le temps de finir ma phrase que déjà il explose. Je suis même surprise qu'il ait mis aussi longtemps, mais mentionner ma propre satisfaction est la goutte d'eau qui fait déborder le vase.
- Tais-toi, sale chienne, m'insulte-t-il. J'en sais bien plus que toi!
- Vraiment ? Je n'en ai pourtant pas l'impression...
Je me fais l'effet d'une orque qui joue avec sa proie avant de l'achever, mais ce n'est qu'une image. Nous sommes à armes égales dans ce combat : il peut me tuer aussi bien que le contraire, la seule différence c'est qu'il est trop aveuglé par la colère pour s'en rendre compte.
Je me pince les lèvres et lui accorde un sourire dévastateur à la mode Allen. J'en fais peut-être un peu trop, mais je n'en peux plus d'attendre. Il me faut mes réponses. Tout de suite! Plus le temps passe et plus ceux qui surveillent potentiellement mon micro risquent de se rendre compte que quelque chose cloche.
- Ne parle pas comme si tu savais tout! gronde-t-il, menaçant.
- Ohhh, mais je sais tout.... mais je ne suis pas sûre que ça soit ton cas...
Je commence sérieusement à paniquer. Ça dure beaucoup trop longtemps, je n'arrive pas à le faire craquer, et mes moyens de pression sont de moins en moins efficaces. Depuis quelques minutes, je ne fais plus que répéter la même chose de manières différentes, mais ça ne l'affecte plus parce que ce n'est pas nouveau. Il me faut un déclencheur.
Rester calme.
Analyser.
C'est au moins quelque chose que je sais faire. Quoique, je n'en suis plus aussi certaine à présent. Je suis en train de perdre mes moyens, et également une occasion en or. Je ne dois pas oublier que ce n'est pas juste une information que je joue là, mais aussi ma liberté. Même si je le voulais, quelque chose en moi m'empêche de revenir à l'Organisation sans avoir réussi.
Je me concentre sur le visage plein de sueur de Willer. Lui aussi est sur le bord de nerfs, et ce n'est pas négligeable. Qu'est-ce qui pourrait bien le faire plier ? Mais j'ai déjà épuisé mes plus précieuses ressources : son sentiment d'impuissance et son égo surdimensionné. Qu'y a-t-il d'autre sous le masque ? Une famille ? Des gens à protéger ? J'en doute. Et même si, je ne les connais pas : je n'ai pas assez d'éléments précis pour lui faire peur. Et puis soudain, la solution m'apparaît.
Sacha.
D'après son profil, Willer est tout à fait le type d'homme à se comparer sans cesse aux autres. Or, Sacha est son exact opposé... et aussi précisément celui qu'il voudrait être. L'idéal masculin. Et c'est aussi sûrement pour ça qu'il le hait autant, ça au moins, j'en suis sûre. Ce douloureux sentiment de vengeance brûlait en lui assez fort pour que je le perçoive au bal, mais à ce moment là, j'étais trop concentrée sur ce qu'il venait de faire pour en chercher la cause. Maintenant, je comprends. C'est bien plus qu'une rivalité entre lui et moi. Cette guerre que nous menons est en grande partie liée à Sacha. C'est à qui me fera craquer le plus vite, à qui m'arrachera les informations que la DFAO convoite. Le fort et le faible sont en compétition, mais Willer possède quelque chose qui équilibre le rapport de force : l'approbation du Gouvernement, que Sacha n'arrive pas à obtenir malgré tous ses efforts.
Et il est aisé de déduire de cette situation compliquée que Sacha est un des plus grands points faibles de Willer, bien plus encore que ses complexes d'infériorité.
C'est un pari risqué. Ne pas en faire trop et dévoiler mon dernier attout, ne pas non plus faire durer les choses encore plus longtemps.
Mais tout me pousse à croire que j'ai une chance, et de toute manière, je n'ai pas d'autre idée. Alors je tente le tout pour le tout :
- Dommage que Sacha ne m'ait pas réservée avant. Lui au moins...
Je sèche. Lui au moins... m'aurait révélé ce que je veux savoir ? Certainement pas. Je ne dois pas attirer l'attention sur moi, sinon il va tout comprendre. Surtout continuer de centrer la conversation sur lui.
- ... n'est pas qu'un pathétique mouton. Il fait partie des loups, il ne se contente pas de suivre. Et il sait le prouver, pas comme toi.
J'ai enfin touché la corde vraiment sensible.
Quand je le regarde de nouveau dans les yeux, ils brillent d'une telle fureur que, l'espace d'un instant, j'ai peur. Willer n'est plus lui-même, on dirait plutôt une bête assoiffée de vengeance, de sang.
- Sacha... ne... sait... rien. Comme... toi.
Il serre les dents et détache chaque mot comme si parler lui coûtait un effort immense.
- Il n'est même pas au courant de l'existence des puces. C'est lui qui se fait manipuler depuis le début. Son père est le Leader de Chicago, et il ne sait même pas qu'il a grandi à quelques mètres du Centre de Contrôle....
Il s'arrête net dans sa phrase, comprend tout.
La flamme de rage dans ses prunelles redouble de vigueur, mais cette fois, j'en suis la cible.
Ses mains s'abattent sur mon cou.
Annotations