Chapitre 17

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Anton

- Ça t’a fait du bien de la voir ? te demandé-je lorsque ta mère retourne chez elle.

- Oui, beaucoup, me réponds-tu, nichée dans mes bras.

Le repas s’est déroulé dans la bonne humeur. Laura est une femme joviale, et si elle n’a jamais eu de véritable histoire d’amour après avoir perdu ton père, cela ne l’empêche pas de rencontrer des hommes, de flirter, d’avoir quelques aventures. Les détails sur sa dernière conquête ont provoqué l’hilarité générale ; il y avait longtemps que nous n’avions pas passé une aussi bonne soirée.

- J’ai toujours du mal à comprendre comment ma mère a pu s’enticher d’un homme aussi matérialiste.

Ce Marc dont elle nous a parlé semble effectivement être un type un peu particulier, attaché à ses vêtements griffés – tous, sans exception -, à sa grande maison de campagne, à son appartement au bord de la mer et surtout, à sa voiture de luxe, qu’il ne quitte apparemment presque jamais des yeux.

- Je ne sais pas. Je suppose que, comme nous, elle a besoin d’amour et qu’elle a pensé pendant un moment qu’il pouvait le lui apporter.

- J’aimerais qu’elle trouve un homme aussi attentionné que toi. Elle le mérite.

- Tout comme toi.

Jacinthe

Les semaines passent, juillet s'est lentement écoulé, quelques crises se sont produites. Deux semaines après la fin de mon hospitalisation, nous sommes retournés chez le psychiatre, qui nous a expliqué que la crise d’angoisse survenue dans le magasin – de même que les quelques suivantes, au supermarché - était peut-être due à un isolement prolongé. Il est vrai que, depuis ma fausse couche, en février, je n’ai eu envie de voir personne, à part toi. Il y a six mois déjà. Un mois encore, et le bébé aurait été là. Je serais devenue maman et toi, papa. J’y pense sans arrêt. Ma vie serait entièrement différente avec un enfant. En même temps, je repense aux paroles de maman. «Ce n’était peut-être pas le bon moment. Tu dois déjà prendre soin de toi. » Elle n’a pas tort. Je vais guérir, pour moi, pour toi et pour l’enfant qui nous rejoindra plus tard. Je suis certaine qu’il y en aura un autre.

Le mois d’août débute dans la chaleur. Je reste seule à la maison, puisque tu as dû reprendre ton travail. Je me sens coupable de t’avoir privé de tes vacances, même si tu m’as assuré que ce n’était pas un problème pour toi. Je me sens si reconnaissante d’avoir trouvé l’homme de mes rêves. Qui a dit que le prince charmant n’existait pas ?

Après un peu de ménage, j’entre dans mon nouveau cocon. Un frisson parcourt mon corps. C’était censé être la chambre du bébé. Il faut que j’élimine cette pensée, que je ne me laisse pas abattre. Je me concentre sur l’odeur. J’ai fait brûler une bougie à la vanille dans la pièce ce matin. Cela lui confère une atmosphère réconfortante, conviviale, douce. L’association du rose pâle et du blanc, couleurs dominantes dans la décoration, y contribue également. Quelques objets dans des tons pastel sont disséminés un peu partout. Il est vrai que tout cela me ressemble. J’ai l’impression d’être dans un autre monde, moins gris, moins terne et plus reposant. Je ne supporte pas l’ambiance électrique, la course constante, le stress autour de moi. Tout cela m’angoisse. Pour le moment, je ne peux me résoudre à sortir seule. J’ai besoin de toi. Chaque fois que l’on quitte la maison, la peur envahit mon corps et mon esprit, chaque personne croisée semble être une tornade prête à m’emporter au loin.

Je me pelotonne dans le fauteuil poire blanc et continue ma lecture de Jane Eyre de Charlotte Brontë. Je n’avance pas très vite dans ma lecture, mais suis passionnément l’histoire de cette jeune orpheline. Sa force de caractère m’impressionne et m’inspire.

Après une vingtaine de minutes, la sonnerie du téléphone m’oblige à faire une pause. Je me lève, trouve rapidement mon portable et regarde le nom de l’appelant. Éléonore.

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