Shopping et Tourisme

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Deux heures.

Deux heures qu'elle attendait le Héros, assise, sur la fontaine de la ville noble du pays, le Sanctuaire.

Sa plus grande envie, actuellement, était de lui taper dessus pour tous les retards qu'il avait à chaque putain de fois qu'elle voulait le voir. Toutefois, elle n'arrivait pas à oublier la vision du corps calciné de cet humain après le combat contre la reine, sa difficulté à sortir de son lit ou à parler...

Elle n'allait pas quand même lui reprocher son retard au vu de sa situation actuelle, elle devrait plutôt se préoccuper de sa santé. Elle devrait faire preuve de miséricorde envers son retard, surtout qu'il s'était proposé de devenir son champion sans même lui en parler, juste en entendant qu'elle risquait de se faire disqualifier, et cela lui avait valu d'être à l'hôpital.

C'était un peu sa faute, finalement... Mais énormément, celle du Héros, quand même !

La Fée ne voulait pas seulement le voir parce qu'elle voulait le préparer à son futur combat, mais aussi parce que son père lui avait proposé de faire venir le Héros chez eux pour faire sa rencontre. Niselios et Méa tenaient à rencontrer cet humain qui avait la charge de la vie de leur fille, de leur avenir, mais surtout de son rêve. Ils n'étaient pas encore au courant qu'il était le héros de la légende, et surtout, ils n'étaient pas au courant de son physique.

Il était vrai qu'ils ne s'intéressaient pas vraiment aux affaires de l'État – ils ne s'intéressaient nullement à cette course entre nobles pour s'attirer les faveurs de la reine (et vu qui était la reine, la compétition était encore plus rude que la normale, regrettant les anciennes régentes...) –, ils savaient juste que leur fille allait devenir potentiellement la nouvelle reine de Sylvania, et si elle ne le devenait pas, ils s'en ficheraient. Tant qu'elle était bonne élève et bonne personne, cela les satisfaisait. Si elle n'avait pas pour but de devenir reine, elle serait sûrement devenue architecte, elle aurait construit de jolies maisons pour les habitants de toutes les parties de la ville. Elle avait encore des designs dans les tiroirs des commodes ou des bureaux de sa chambre, peut-être que lorsqu'il viendrait chez lui, elle lui montrerait, pensa-t-elle en se tortillant les jambes et en souriant.

Pour présenter le garçon, Princesse avait longuement fait l'éloge de cet Homme en disant qu'il était incroyable, incroyablement beau, incroyablement séduisant, un charmeur, un tombeur, qu'il avait un charisme des plus remarquables... Non je rigole ! C'est totalement faux !

En vérité, elle avait dit à ses parents qu'il était effectivement une personne formidable quand on le connaissait un peu plus et qu'on ne devait pas se fier à la première impression qu'il pourrait nous faire, qu'il connaissait des tas de choses grâce à ses pérégrinations et qu'il avait réussi à vaincre un gigantesque homme-lézard à la seule force de son épée – en omettant que cette épée provenait du Némésis et que sa force était due à son titre de héros de la légende, de sa malédiction et sûrement d'une partie (?) des pouvoirs du Némésis...

Une personne incroyable, en somme !

Juste de repenser à tout cela, la Fée avait autant hâte de faire le tour des boutiques que de le présenter à sa famille ! Surtout que Mina serait là ! Elle se demandait comment son nouvel ami serait perçu par sa meilleure amie. Et elle se demandait aussi comment le trouverait Beneltig, après tout, il l'avait défendu et soutenu lorsqu'il combattait Tarkus. Elle remerciait aussi le Héros d'être son nouveau champion car cela épargnait la vie de son amoureux, elle se sentait un peu coupable car elle pensait l'utiliser à son profit, mais il était si fort qu'elle avait moins d'inquiétude sur ses chances de victoire lors de ce tournoi – il avait quand même affronté l'arme de destruction massive du royaume ! Elle avait été vraiment impressionnée par lui.

Ici, elle n'avait pas vu quelqu'un d'aussi imprudent et d'aussi impertinent parmi les jeunes filles et jeunes garçons de sa génération qui étaient un peu frileux et peu courageux, bien qu'ils prétendissent le contraire en voulant des combats à mort alors qu'ils n'ont jamais tué parce que « c'est la tradition », mais elle pensait qu'en voyant ce que c'était de se battre à mort, ils finiraient par prendre conscience qu'ils n'avaient pas besoin de vouloir perturber la paix de ce royaume.

Elle se demanda, par la même occasion, si rester à Sylvania serait bénéfique pour le Héros. Après tous les malheurs qu'il a vécu dans sa vie, bien qu'il lui sourît et qu'il était prévenant, dans une moindre mesure, il restait une boule de haine pouvant éclater à tout moment. Et il le savait lui-même, c'était bien pour ça – et à cause de ses contusions qu'il ne parvenait à oublier – qu'il restait plutôt à distance d'elle, rendant le voile de mystère autour de sa personne encore plus grand. Mais de manière générale, bien qu'il soit ouvert à la discussion et qu'il ait retrouvé la capacité de parler, il restait plutôt fermé si la conversation dérivait sur sa propre personne.

Une véritable anomalie parmi ses contemporains...

Elle avait hâte de découvrir qui il était vraiment.

Elle n'avait pas été aussi intriguée par quelque chose depuis bien longtemps, à cause de la monotonie de ce pays. Comme si le temps était coincé dans une boucle infinie qui faisait passer les jours sans grand changement. Cela l'ennuyait grandement, et la venue de cet Homme lui serait, peut-être, salvatrice.

Donc elle ne serait pas franchement exigeante envers ses retards s'il lui amenait cette bouffée d'air frais tant attendue.

Balançant ses jambes au-dessus du vide qu'il y avait entre ses pieds et le sol, elle regardait ce ciel artificiel magiquement dénué nuages et sans soleil. Il avait juste été créé par les premiers Rois-Combattant une sorte de dôme recouvrant le sommet du royaume de Sylvania et placé à la vue de tout ce ciel d'azur.

L'avantage avec ce faux ciel fait de magie, c'était qu'il leur offrait toujours la saison d'été et qu'il y avait presque toujours un beau temps – il faut bien nourrir les plantes et se reposer un peu, c'était un peu leurs jours fériés supplémentaires.

La Fée fut interrompue dans sa rêverie par un tapotement qu'elle sentit sur son épaule gauche, elle se retourna et vit le Héros, accroupi, juché sur le rebord de la fontaine où était assise la princesse, la saluant. Elle le regarda et observait qu'il portait des habits plutôt ternes, se confondant avec sa peau noircie par cette malédiction. Il aurait pu demander des vêtements beaucoup plus beaux aux couturiers royaux, mais il ne semblait pas vraiment intéressé par les biens matériels - en même temps vu son ancien mode de vie lamentable... Il préférait se cacher sous ce vêtement à capuche qu'il aimait porter comme à son habitude.

- Ça fait combien de temps que tu es là ? lui demanda la Fée.

- Je ne sais pas. Depuis la nuit des temps ou moins d'une seconde.

- N'importe quoi, rit la Fée

- Je voulais juste ne pas te stopper dans ton admiration de ce faux ciel bleu sans nuages qui surplombe nos têtes, précisa le Héros.

- Tu aurais préféré qu'il y en ait ?

- On m'a, un jour, dit que les nuages, à une époque lointaine, n'étaient pas méchants et qu'on pouvait nager dedans.

- Ah bon ? dit la princesse aptère en plissant les yeux et en fronçant les sourcils.

- Oui, oui, affirma le Héros en hochant la tête.

- Tu penses vraiment que je vais croire une histoire aussi délirante ? Nager dans les cieux...

- Les fées ne nagent-elles pas dans les cieux lorsqu'elles volent ?

- Déjà, elles n'atteignent pas les nuages, mais de plus, je n'en sais rien, je n'ai pas d'ailes ! Mais vraiment tu penses que je vais croire ça ?

- J'en sais rien, dit le garçon en détournant son regard de la princesse et en observant le ciel, et toi, tu penses que les choses ont toujours été comme ça ?

La Fée eut une expression remplie d'interrogation, elle se toucha le menton et regarda devant elle. Le Héros l'observa du coin de l'œil, il devait avouer que, malgré quelques aspérités, il la trouvait mignonne. Elle n'était pas vêtue de ses habits d'officiels – de princesse quoi –, elle s'accoutrait de simples vêtements, beaucoup plus décontractés qui n'entachaient en aucun cas sa beauté naturelle. Elle avait un teint plus naturel que lorsqu'elle était vêtue de sa robe de princesse, même si elle gardait son teint rosé, c'était comme si le sirop s'était beaucoup trop dilué dans l'eau.

La voir ainsi la rendait un peu plus « normale », plus une princesse issue de conte de fées, un peu plus... mortelle..., s'il pouvait dire...

- Non, il est sûr que le monde n'était pas ainsi avant l'Ère des Ténèbres, mais est-ce que les gens étaient différents ? Je ne crois pas. Mais les nuages, non, ça, ça n'existait pas. J'en suis certaine.

Le Héros sourit et secoua la tête.

- Si tu le dis. Tu as peut-être raison. Et pour le fait qu'on puisse quand même voir la Lune parfois à travers les nuages, une réponse ? dit-il en faisant semblant de lui tendre un micro.

- Comme on dit « C'est dans la sève d'Alinia qu'est écrite notre vie alors attendons que ses feuilles tombent pour la connaître » !

- C'est joli cette façon de dire « tout vient à point à qui sait attendre », complimenta le Héros.

- Merci !

- Sinon, pourquoi tu m'as réveillé de bonne heure ? lui demanda son jeune protecteur en ayant une mine austère et en baissant les yeux vers elle.

La princesse se leva et s'étira avant de se pencher vers le jeune homme en ouvrant de grands yeux et avec un large sourire.

- On va faire des emplettes.

- Tu me lèves aussi tôt pour faire du shopping ? dit le Héros hésitant entre la colère et la stupéfaction.

- « Aussi tôt » ? Il est bientôt onze heures ! N'outrepasse pas l'absurdité ! s'emporta la Fée, et ce n'est pas simplement pour faire du « shopping », comme tu dis, mais pour te préparer à tes futurs combats.

C'était la première fois qu'il voyait la princesse se mettre en colère, et avec une telle intensité dans la voix. Il ne s'y attendait vraiment pas, bien que cela avait été de courte durée, elle n'avait jamais eu l'air d'avoir ce genre de tempérament.

- T'es en colère ?

- Non, absolument pas, dit-elle sèchement en ronchonnant.

- C'est bon, je sais que je suis en retard, céda-t-il, mais cette fois-ci, ça n'avait rien à voir avec un manque de sommeil ou autre, mais parce qu'on m'a donné un logement en dehors du château et qu'il était bien loin de celui-ci.

- Ah bon ? sauta la Fée.

Son comportement changea du tout au tout, on aurait dit qu'elle venait d'oublier ce qu'il venait de se passer il y a quelques secondes.

- C'est quoi ? Une maison en bois type humaine, une fleur, même si les fleurs doivent être plantées dans des endroits spécifiques, une cabane, une maison de briques, une hutte-cabane...

- Calme-toi ! l'arrêta le Héros en prenant ses épaules avant de retirer ses mains immédiatement, tu changes d'humeur aussi facilement ? Ou tu faisais simplement semblant d'être en colère ?

- Qui sait ? dit-elle avec un sourire malicieux, bon, tu me raconteras tout ça sur le chemin, d'accord ?

L'humain roula des yeux en soupirant et en se levant de la fontaine, il la suivit en mettant les mains dans les poches, pendant que sa protégée gambadait joyeusement devant elle. Une fois à bonne distance, elle se retourna et nota le visage bandé du Héros, il avait dû noircir tant bien que mal les rubans de soin pour qu'ils se fondent avec la couleur de la tâche qui recouvrait sa face. Son observation finit sur un constat amer : il n'avait aucune compétence pour se maquiller.

S'il était noble et qu'il avait tenté le maquillage, il serait tombé en disgrâce.

Cela lui offrait l'opportunité de lui montrer qu'elle était aussi bonne architecte que bonne maquilleuse.

- Pourquoi tu souris aussi bêtement ? lui demanda le Héros.

- Pour rien ! dit la Fée en renchérissant avec un plus grand sourire éclatant.

La Fée lui prit le bras et accéléra le pas, le faisant presque trébucher. Elle le traîna dans tous les coins d'Haute-Ville, montrant au garçon les lieux les plus emblématiques du royaume : la statue du héros – qu'il avait vue, il y a deux soirs –, la gravure des faces des souverains de Sylvania sur l'une des faces du château, la Grande Fontaine de Kililu se trouvant à la grand-place de la ville – elle aurait eu sa place dans un parc aquatique... Tout le long, le Héros remarqua les regards qu'on leur jetait. Reconnaissaient-ils son humanité ou c'était du fait de la princesse sans ailes ? Dans tous les cas, elle ne paraissait pas y faire attention, ou, peut-être en faisait-elle abstraction...

La fée aptère les fit entrer dans l'une des boutiques qu'elle avait en vue depuis qu'ils étaient descendus dans le centre-ville, elle comptait lui trouver des nouveaux vêtements.

- Mais j'ai pas d'argent ! s'exclama le Héros en secouant les bras.

- T'en fais pas, c'est moi qui gère ! Je te dois bien ça ! lui répondit-elle.

Il voulait refuser, mais elle lui prit la main, détournant son attention de la gêne qu'il ressentait qu'une fille puisse lui acheter des vêtements, pour la rediriger vers ce contact physique. Même si elle l'avait lavé, il n'arrivait vraiment pas à s'y faire à ce qu'on le touche, la reine, il pouvait rien dire – même s'il savait qu'elle aurait été compréhensive, après tout, il l'avait autorisée à lui caresser directement les cheveux –, Astéron, il n'arrêtait pas de lui mettre des grandes frappes dans l'épaule ou dans le dos, ou des « accolades viriles », et elle, elle était si avenante avec lui qu'il ne se voyait pas exprimer son désaccord pour qu'elle puisse le toucher.

- Mon héros ne peut pas se permettre de porter des haillons ! lui dit-elle en lui faisant un clin d'œil.

Encore une fois, il était gêné par cette douceur et cette gentillesse dont elle faisait preuve avec lui. Il se posait vraiment la question de savoir comment il avait fait pour tomber sur un être aussi doux et sympathique qu'elle, alors que sa vie n'avait fait que voguer sur les sillons du sang et de la violence avec quelques courts moments de répit.

Il se laissa alors entraîner à l'intérieur de la boutique par la douce fée.

La première chose qui lui frappa l'œil fut la beauté de l'établissement, il n'y connaissait rien en architecture, il arrivait juste à dire que l'endroit était « joli » et que le bois rendait bien – il était incapable de s'exprimer sur le bois utilisé dans cet établissement. Ensuite, cela fut la somptuosité des vêtements qui lui tapa dans l'œil, ils ressemblaient à ceux qu'il avait vus à la Bibliothèque Universelle de Vicenti. C'était l'une des choses qu'il trouvait réellement fascinant chez (certains) Féériques, sans avoir un goût ou un attrait très prononcé ou juste particulier pour la mode : la pluralité des habits qu'ils arrivaient à concevoir pour toutes les races – incluses humaines. Il reconnaissait le talent des stylistes Féériques.

Il était évident que la diversité des vêtements était de mise dans cette boutique, il y en avait vraiment pour tous les goûts, toutes les races ou toutes les cultures, allant des fées, des elfes aux thérianthropes des plus fragiles aux plus brutaux comme les ogres, les Mosternzas, les Chegirii ou même les Treemen, et encore plein d'autres. Cette diversité de vêtements plaisait énormément au Héros - même si, en vérité, il n'en avait que faire.

Juste savoir que chacun pouvait trouver son bonheur avec quelque chose d'aussi futile que les vêtements, lui donnait un peu de baume au cœur.

La Fée s'adressa aux commerçants, le plus grand d'entre eux trois, un Pertasith, un Féérique disposant de quatre longs bras qu'il posait sur son comptoir en écoutant la Fée, de quatre yeux, d'un corps svelte mais assez imposant et d'une longue queue de cheval brune – en résumé, vous voyez les Hécatonchires ? Bah la même chose avec moins de membres, moins de yeux et une amicalité beaucoup plus présente que chez leurs homologues.

Ils étaient issus de la même race, mais l'un avait muté et l'autre était resté un monstre sauvage assoiffé de sang.

Le Pertasith écouta attentivement la princesse en hochant la tête à presque chacun de ses mots avant de lui faire « ok » avec ses quatre membres et de sauter par-dessus son comptoir et de venir à la rencontre du Héros. Il lui fit de brèves salutations, apprenant qu'il s'appelait « Tertinos » et qu'il avait cinquante-cinq ans - en gros, il avait déjà atteint la moitié de sa vie depuis quatre ans.

- Tertine pour les intimes, ajouta le responsable.

Tartine pour les moqueurs et les médisants.

Ensuite, d'un seul coup, sans prévenir, il se mit à le palper. Le Héros ouvrit de grands yeux et voulut le repousser violemment, il ne supportait pas qu'on le touche, surtout des gens qu'il ne connaissait pas. Mais la princesse sans ailes lui fit signe de se laisser faire. L'humain, bien qu'il ait une grande connaissance du monde, n'était pas au courant que les Pertasith avaient un sens du toucher beaucoup plus poussé que n'importe quel être vivant sur cette planète, ils étaient plutôt destinés à la médecine puisqu'ils étaient capables de ressentir tous les maux du corps qu'ils touchent.

Mais Tertinos n'avait pas besoin de le toucher en profondeur, le simple fait de l'effleurer lui donnait les informations qu'il voulait obtenir, ces informations lui étaient importantes puisqu'avec il pourrait lui confectionner des vêtements qui lui iront comme un gant. Il n'avait même pas besoin de lui toucher directement la peau, il pouvait avoir ce qu'il voulait avec ce simple effleurement, son toucher était bien plus précis que nombre de ses congénères grâce à un entraînement qu'il s'était fait subir à cause de son dégoût d'être au contact avec les autres – c'était ce qui lui avait fermé sa carrière dans la médecine, mais c'était aussi le fait de ressentir les maux et la souffrance des autres qui lui avait fait rejeter cette voie.

Il préférait apporter son bonheur aux autres à sa manière.

Une fois le travail fini, il se releva et demanda au Héros s'il avait quelques précisions à vouloir apporter à ses vêtements.

- Je voudrais qu'ils soient noirs...

- Ah non ! protesta la Fée, tu ne vas pas porter des habits aussi ternes tout le temps, fais un effort.

- La Dame ne semble pas être en accord avec vos choix.

- Mais c'est moi qui vais les porter, non ?

- Oui, mais porte des habits plus colorés. Tu ne vois pas le nombre d'habits que tu pourrais porter ?

- Si mais...

Tertinos fit cesser le débat et prit le garçon à part.

- Pourquoi tu tiens tant à porter des vêtements noirs ?

- Pour qu'ils se fondent avec mon visage.

Le Pertasith le fixa plus attentivement et vit que son visage était recouvert d'une membrane noire qui devait être dûe à une malédiction – elle puait la magie.

- Mais surtout mes blessures pourraient se rouvrir à tout moment et je ne voudrais pas que la princesse m'achète des vêtements que je salirai en moins de deux jours et qu'ils soient, en plus, inutilisables.

Le vendeur prit conscience d'à qui il avait affaire et frappa dans ses deux paires de paumes de main.

- Ah mais tu es l'humain qui est entré dans l'arène et qui a terrassé un homme-lézard ! s'écria-t-il.

- Oui ! Mais parlez moins fort, lui intima le Héros.

- J'ai dû mal à prendre conscience de ton humanité, en même temps, nombreux sont ceux qui sont dénués de magie qui viennent dans ma boutique.

Il ne l'avait pas remarqué au premier abord, mais le Héros découvrit que l'homme auquel il faisait face était aveugle. C'était pour ça qu'il n'avait pas su en le voyant qui il était, mais alors pourquoi l'avoir fixé comme ça ? Se moquait-il de lui ?

- Si tu ne l'as pas remarqué avant c'est bien parce que tu ne regardes pas les gens, droit dans les yeux.

Le Héros sursauta en entendant cette vérité à son égard. Il pourrait le nier en faisant l'arrogant, mais cela ne changerait rien, si un aveugle a pu le voir...

- Nous, les Pertasiths, pouvons sentir les émotions des gens qui se trouvent en notre présence, il n'y aura rien que tu puisses me cacher, mais je ne vais pas trop lire en toi, cela risquerait de m'affecter. Et je déteste ça. Mais pour tes vêtements, ne t'inquiète pas, je les enchanterai pour que ce genre chose ne se passe pas, rappelle-toi que les femmes ont ce genre de soucis, elle aussi. Enfin, les mammifères !

Tertinos s'en alla auprès de ses employés et la Fée vint voir le Héros pour savoir ce que lui avait dit le vendeur.

- Que tu avais carte blanche pour me vêtir de tout ce qu'il te plaît, lui répondit le Héros.

Les yeux de la Fée s'illuminèrent, elle se mit à battre le pavé d'excitation et s'en alla dans les rayons de vêtements, avant de revenir aussi rapidement qu'elle était venue.

- En fait, je n'arrive pas à choisir.

- Mais c'est toi qui t'es excitée pour choisir mes vêtements ! la sermonna-t-il, choisis-les toi-même !

- Non viens ! protesta-t-elle en lui agrippant le bras.

Et alors qu'elle essayait de faire cesser les réticences du Héros, ils assistèrent à un spectacle ahurissant : des vêtements se mirent à voler, dansant dans les airs et se baladant à travers tout l'établissement, sautillant comme si le textile avait pris vie. La Fée semblait subjuguée par ce qu'elle avait sous les yeux, elle trouvait cela d'une beauté envoûtante. Le Héros, lui, y semblait hermétique à cette petite fantaisie... Non, il s'en méfiait, il n'avait jamais vu une chose pareille se dérouler sous ses yeux et pour lui tout ce qui lui était inconnu et qui provenait d'une personne qu'il ne connaissait pas, ne devait sûrement présager rien de bon. Et cette crainte était amplifiée par le fait qu'il ne possédait pas d'armes sur lui – il aurait tiré dessus comme tout bon nord-américain qui se respecte. Toutefois, en voyant l'expression ravie de la Fée, il se décrispa et apprécia cette étrange scène digne d'un conte de fée.

À la fin du spectacle, ils purent sélectionner les habits que leur proposait le vendeur, la princesse en choisit une bonne quantité et son champion en refusa une autre bonne quantité, récupérant, à la fin, au moins quinze tenues moins laides que les torchons qu'il portait sur lui.

Tertinos les invita à aller voir la caissière. Arrivés là, la dite-caissière n'était pas là. Quelques minutes d'attente pendant lesquelles la princesse se mit à froncer les sourcils, le Héros reconnaissait là un comportement digne de sa défunte mère – elle détestait attendre, jugeant que c'était de l'incompétence de faire attendre ses clients.

Une fois la caissière revenue, la princesse lui donna l'argent et emporta les sacs avec elle sans lui adresser un au revoir, c'est le champion qui la salua avant de s'en aller.

Dehors, il lui fit remarquer ce comportement qu'il ne trouvait pas trop poli.

- On est pressé et elle se tourne les pouces quelque part dans la boutique, dit-elle d'un ton bougon.

- T'en sais absolument rien, lui contredit le Héros, on dirait ma mère qui jugeait les gens sans se renseigner sur leurs raisons.

C'était la première fois qu'il parlait de lui – en excluant ses anecdotes qui ne racontaient rien sur lui, voire ne racontait rien. Elle se rappela que l'un de ses objectifs durant cette sortie était d'apprendre à mieux le connaître, alors elle en profita justement pour lui poser des questions sur sa mère qu'il aimait tant.

« Vous m'avez pris ma mère, les miens, moi... Je vous prendrais ce monde ! »

Ce regard de fou qu'il avait eu à ce moment-là, ce regard rempli de désespoir et de rage, ses crocs qui grinçaient à chacune des syllabes de cette phrase.

- C'était une femme aigrie, lui révéla le Héros, elle était de nature paranoïaque, malgré le fait qu'elle soit confiante en ses capacités et elle me prodiguait une éducation spartiate, dit-il en mettant ses mains derrière la tête, pensif.

« Spartiate » ? Ça doit être sans doute un synonyme de dur, pensa la Fée.

- Je n'aurais pas imaginé qu'elle soit comme ça vu comment tu avais à cœur sa mort...

- Après, même si elle était une personne rude, je ne vais pas me satisfaire que la personne qui s'est occupée tout le long de ma vie soit morte ? lui demanda-t-il rhétoriquement.

- Ce n'est pas ce que je voulais dire ! s'écria la fée aptère en agitant les mains, les yeux exorbités.

- Je le sais, j'ai compris, ma Dame, se moqua le Héros en réceptionnant les courses qu'elle avait lâchées en levant les bras, tes parents ne sont pas durs avec toi.

- Oh non, ils sont super gentils. Bien sûr, mon père est un bourreau du travail et est très exigent sur tout ce qui concerne le travail et les études, mais ce sont des personnes très sympathiques que je voudrais que tu rencontres.

- Finalement, tu as parlé de moi à tes parents..., soupira le garçon.

- Tu crois que je pourrais leur cacher qu'une majorité de mon temps j'ai dû le passer avec toi parce que j'ai demandé à la reine de t'accorder sa clémence, bien qu'on ait su plus tard que tu avais Ymir sur toi, ronchonna-t-elle faussement en mettant ses poings sur ses côtes en faisant une mine boudeuse.

Puis elle souffla du nez en abaissant ses bras, en souriant et en le regardant du coin de l'œil.

- Tu n'aimes pas qu'on parle de toi, hein ?

- On parle tellement mal de moi que je préfère qu'on ne parle pas de moi...

- ... que cela vienne des autres ou de toi.

- Exactement.

- Ne te fais pas trop de soucis à propos de cela, on parle aussi mal de moi mais je le assez vis bien... je pense.

Le Héros se rappela le moment où elle s'était mise à pleurer sur lui lorsqu'elle lui avait avoué son plus grand désir. Elle se la jouait dur-à-cuir, « tout me passe au-dessus de la tête », mais ce n'était qu'une façade, comme pour la reine qui avait tout fait pour se débarrasser de sa réputation. Si elle le pouvait, elle aussi se serait débarrassée des méchancetés proférées à son encontre.

- Ils sont au courant que je suis le héros de la légende ? la questionna le Héros.

- Non, non.

- Que je suis un criminel recherché ?

- Non plus.

- Mais qu'est-ce que tu leur as raconté ? l'interrogea l'humain devenu, de plus en plus, consterné, ils vont voir un humain débarquer chez eux et...

- Ce n'est pas comme si c'était la première fois qu'ils en verraient un.

- Hein ? dit le Héros, étonné, vous avez déjà vu des humains ?

- Mis-à-part ceux que nous envoie la prison d'Oranas, et, au passage, d'autres prisons, oui. Nous ne sommes pas la plus riche famille du coin mais on peut se permettre de voyager.

- Voyager pour aller où ? lui demanda le Héros.

- Au-delà d'Europea !

« Au-delà d'Europea ! », cette phrase se répéta dans l'esprit du Héros. Il avait déjà été au-delà des frontières de son continent par devoir, mais il n'avait jamais pris le temps de visiter un pays étranger à cause de sa poursuite du Némésis. Peut-être avait-il une fois pris le temps d'admirer le paysage sur l'Ile Verte, Irlande, au nord de Franca, il ne s'en souvenait plus. Il se rappelait juste qu'il s'y trouvait de magnifiques filles rousses.

- Donc tu as quitté le continent, toi aussi ? Pour faire quoi ?

- Ouaip. Pour partir en vacances.

Le Héros gloussa.

« Partir en vacances »... quelle idée absurde ! Le monde était en ruine, la malveillance avait envahi chaque parcelle de cette planète, il n'y avait nul endroit où elle aurait pu se prélasser.

- Je te vois douter, pourtant c'est vrai, il reste de magnifiques endroits éclairés à la lumière du jour, artificiellement, magiquement ou non. Mais le plus souvent, ce sont des voyages diplomatiques pour obtenir des ressources ou enseignements rares. Mais on n'a pas vraiment besoin de voyager en petit groupe puisque nous déménageons très souvent.

- Comment ça ?

- Je te montrerai plus tard, lui dit-elle en lui faisant un clin d'œil.

- Et les Bibliothèques Universelles ne sont pas suffisantes ?

- Oh non ! Pour en apprendre un peu plus sur le passé, oui, mais en ce qui concerne nos besoins actuels, c'est une autre paire de manche. Qu'est-ce que tu veux que je fasse de « panneaux solaires » ? gloussa-t-elle.

Elle marquait un point. Le soleil qui les avait abandonnés ne leur serait d'aucune aide en ces jours sombres.

Le Héros, devant les explications de la Fée, se dit qu'une seule chose : « Qu'est-ce qu'elle cause bien, aujourd'hui ? ». Cela changeait des jours où elle parlait comme un charretier – il exagère, elle pouvait parfois dire des expressions de beaufs, mais ça n'allait pas plus loin.

- Dis-moi, si tes parents sont si gentils, pourquoi ne t'ont-ils pas nommée ?

La Fée s'arrêta nette, immobile, elle devint interdite. La question du Héros lui fit serrer ses poings. Le Héros sentit une certaine tension monter en elle, mais elle souffla un bon coup et retrouva son visage égayé.

Une frustration passagère, en somme.

- C'est la condition sine qua non à ma survie.

- Comment ça ?

- « Sine qua non » ? C'est un mot du passé qui veut...

- Non mais je sais, la coupa le Héros, mais pourquoi ?

- Tu le sais, non ? Si nous n'avons pas de nom, nous n'existons pas, et c'est ça qu'attendent les Anciens, les Ministres et les Nobles. Je finirai oubliée des registres et je n'aurai jamais vécu, contrairement à la Sorcière Traîtresse qui marqua l'Histoire de ce pays, alors que nous sommes similaires aux yeux de tous, je vivrai à travers elle.

- Tu y crois à cette ressemblance ?

- J'imagine que s'ils le disent, c'est qu'il y a une part de vérité...

Il réfléchissait à ce qu'il pourrait faire pour lui retirer cette réputation sans défaire la magie de la reine qu'il était, de toute manière, incapable de la désensorceler. Elle allait devoir se débrouiller toute seule, étant donné ses lacunes en magie.

- Elle était aussi mauvaise que ça, cette ancienne reine ?

- Pas au début, lui répondit la Fée, on dit même qu'elle était la plus tendre des reines, et bien évidemment, plus encore que les Rois-Combattants. Sa gentillesse et son intelligence dépassaient la normale, à peine la technomagie créée qu'elle réussit à la pousser au maximum de son potentiel façonnant à l'aide des meilleurs forgerons-nains du royaume et ceux de l'Ile Verte l'épée légendaire du héros de Sylvania, Torn.

Torn ? Mais ne serait-il pas le père de Sawyer ? réfléchit le Héros, plus de cinq cents ans les séparent de l'ère de la Félonne comment pourrait-il être son fils ?

- Mais sa quête inlassable de savoir l'a fait tomber dans le blasphème, la découverte d'arts occultes et son affiliation à des forces démoniaques l'ont fait trahir les siens, au point d'être à deux doigts de provoquer la chute du royaume et peut-être même d'Europea, voire du monde dans son ensemble.

- Elle était si puissante ?

- À ce qu'on dit, elle aurait pu rivaliser avec la fée de la légende, haussa-t-elle les épaules.

Quelqu'un n'étant pas issu de la légende pourrait rivaliser avec les héros de celle-ci ? C'était insensé ! À quel point pouvait-elle être aussi forte ? Lui qui se trouvait déjà si faible face au Némésis... Si d'autres êtres sont capables de le rattraper et de le dépasser, que se passera-t-il lorsqu'il retrouvera le chevalier qui lui a pris les siens ?

- A bien y regarder, je trouve qu'elle ressemble à la reine dans un certain sens.

Tu n'imagines pas à quel point.

Ils n'imaginent pas à quel point.

Pendant qu'ils discutaient de tout et de rien, un groupe composé de deux jeunes fées adultes et un jeune centaure adulte passa à côté de la princesse et de son champion et l'un d'eux voulut en profiter pour lui tripoter les fesses, mais à trois centimètres du postérieur de la jeune fille, le Héros lui brisa le poignet en un coup de poing.

- Qu'est-ce qui te prend l'étranger ? lui demanda l'un des garçons, tu défends une sans-aile ?

Il lui mit un coup de pied dans la joue l'envoyant contre le mur d'une maison, ses deux autres camarades voulurent s'en prendre au Héros, celui-ci utilisa la tête de son premier assaillant comme appui pour leur mettre, à eux deux, un coup dans le nez, les faisant s'étaler par terre, pleurant leurs nez cassés.

Le Héros constata qu'effectivement le sceau qu'on lui avait apposé sur le ventre faisait bien effet. Il s'interrogeait même sur le fait si le sceau n'entravait pas, aussi, sa force héroïque.

La Fée s'approcha de lui et l'emmena ailleurs, elle avait remarqué qu'une foule commençait à se créer autour d'eux.

- Qu'est-ce qui te prend ? lui demanda le Héros se laissant entrainer dans la course de la princesse aptère.

Elle s'arrêta en entrant dans une ruelle et souffla un bon coup. Il lui était difficile de pouvoir courir correctement dans cette tenue, même si elle n'avait que trottiné. Elle regarda le Héros et le remercia de l'avoir défendue.

- Mais il ne faut pas que tu te battes en dehors de l'arène, tu es désormais un champion, donc tu fais partie de mon image.

- Et tu aurais voulu qu'il te pince les fesses.

- Bien sûr que non ! Mais vu ta force et ta..., je voudrais éviter que tu tues quelqu'un.

Il s'approcha de la fée et posa ses mains sur ses joues.

- Gamine, je sais me retenir quand même, ne me prends pas pour une bête sauvage toi aussi.

- Je veux juste que tu n'agisses pas violemment avec les autres... Ça... m'effraie.

Le Héros s'était déjà aperçu que la fée n'appréciait pas franchement la violence, elle avait de grands yeux à chacun des coups que se donnaient les combattants à l'intérieur du tournoi, ou se les cacher – c'est sans doute pour cela qu'elle acceptait la lâcheté de son amant : parce qu'il n'y avait aucune once de violence chez cet individu. Elle avait bien vécu paisiblement pour ne pas se rendre compte que la violence était l'une des choses les plus abondantes en ce monde voué à la ruine.

- D'accord, j'éviterai au maximum d'utiliser la violence, accepta-t-il, après tout, moi aussi je serai tenté de peloter tes formes rebondies, plaisanta-t-il en tirant les joues de la fée avant de s'en aller hors de la ruelle pour voir s'il n'y avait personne qui les suivait.

- « Rebondies » ? Tu veux dire « grosses » ? Parce que je sais que je suis grosse, je compte bien maigrir.

- Évite de dire de la merde, s'il te plaît. T'es absolument pas grosse, je crois que tu as jamais vue une fille grosse pour dire ce genre de conneries.

- Pfff, souffla-t-elle, tu ne peux pas comprendre, tu es un homme.

- Et heureusement ! souligna le garçon, ça m'évite d'être aussi chiant.

La Fée reprit la tête de la balade pour les emmener au dernier endroit de cette journée.

- Les gens de cette ville sont sans gêne, tout de même.

- C'est parce qu'on approche des Basfonds, un endroit où le taux de criminalité est le plus élevé, mais c'est aussi parce que je suis une sans-aile.

- Quel est le rapport ? ne comprit pas le Héros.

- On peut dire que je fais partie des gens considérés comme sans magie, donc je suis considéré comme « pas très utile » à la nation, bien que je possède de la magie, ce qui est très rare pour une sans-aile, étant donné que la majorité des choses ici fonctionnent à la magie, donc on est considéré comme des citoyens de seconde zone qu'on soit issu de la lignée de sang royal ou non.

- Et la reine ne fait rien pour endiguer cela ? s'étonna le Héros.

- Elle y travaille justement ! Mais bon avec les vieux qui ne veulent pas bouger du statu quo de ce pays parce qu'« il est très bien comme il est ! Le bouger ne ferait que dérailler la machine ! » sans se rendre compte que même si de là-haut ça a l'air tout rose en haut, en bas, les gens crient famine.

Effectivement, bien qu'il ait des airs d'oasis, le royaume de Sylvania est comme les autres endroits de ce monde, des disparités existent ici et là...

- Normalement la technomagie est censée servir de béquille pour palier à ce genre de situation.

- Faudrait avoir l'argent pour pouvoir en utiliser, lui rétorqua la Fée, notre technomagie est super bien développée donc tu n'imagines pas le coût de ces bijoux et même la camelote se vend à prix d'or. Justement, en parlant et en vadrouillant n'importe comment, on est presque arrivé à l'endroit où je tenais absolument à t'emmener.

Ils s'arrêtèrent et le Héros leva les yeux sur une échoppe où il était inscrit « Le Bazar du Forgeron Fokatino » avec un double FF juste en-dessous de l'enseigne et sur la porte d'entrée. La Fée se tourna vers le Héros et lui dit :

- Je compte bien te faire goûter à la magie.

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