"REVELE-TOI, HEROÏNE DE SYLVANIA !"

56 minutes de lecture

La première phrase qui vint à l'esprit du Héros fut : « Bordel de merde, c'est quoi cette sorcellerie ? ».

Mon garçon, je pense que tu as assez vécu pour ne plus être choqué par le fait de voir de la magie.

Cependant, il avait bien raison d'être étonné par ce qu'il voyait puisqu'étonnamment, ce n'était pas de la magie !

C'est ce qui consterna tout le public présent au stade ou depuis chez eux.

À la maison Grave, tous les enfants étaient extatiques en voyant leur protectrice voler au-dessus du Héros. Lelelitio, portant le bébé orc du nom Hir'kra, fut exalté de voir sa maîtresse et amie se rendre capable d'un tel acte.

- Liline, je suis si fier de toi.

Néanmoins, pour les autres habitants de la partie haute de la ville, surtout les fées... quelle humiliation venaient-ils de subir !

Il n'était pas rare que certaines personnes recourent à des sorts de lévitation, bien que cela fût formellement interdit dans les régions les plus peuplées du royaume afin d'éviter tout accident. En réalité, il y avait peu d'individus dans tout le royaume ayant le niveau nécessaire pour utiliser un sort de lévitation à des fins de vol.

Toutefois, ce qu'avait utilisé Malalalivia pour voler n'était en aucun cas de la magie, aucune incantation, aucun cercle magique, aucun glyphe, aucune amulette ou aucune autre magie étrangère.

Les gens se souvinrent aussitôt ce que cela signifiait d'être une Grave, d'appartenir à la lignée du quatrième Roi-Combattant, celui qui a été déchu. Malalalivia Talemilia avait en elle du sang humain et donc, possédait en elle un attribut génétique.

Ils pouvaient l'accepter d'un humain comme le Héros, mais jamais, au grand jamais, une fée, particulièrement de sang royal, ne saurait user des pouvoirs d'un être humain en territoire inhospitalier envers ces dits-humains.

Mais la plus troublée et la plus humiliée ici était bien sûr la Fée-Sans-Ailes.

Elle n'en avait rien à faire qu'elle ait un attribut génétique, qu'elle ait du sang humain ou de je ne sais quelle autre race. Non, ce qu'elle vît, c'était le déshonneur qu'elle venait de lui faire subir, un opprobre si violent qu'il lui donnait envie de ne plus exister.

Elle qui ne voulait que le trône pour obtenir des ailes pour être semblable à ses pairs, bien qu'on lui fît remarquer à de nombreuses reprises l'égoïsme dont elle faisait preuve à cause de son absurde souhait, avait sous les yeux une femme qui s'était décidé à ne pas dépendre du trône pour acquérir la capacité de voler. Et c'est à cet instant précis qu'elle se rendit compte que ce n'était pas le fait d'avoir la capacité de voler comme ses compères mais de pouvoir parader comme elles.

A quoi bon voler si elle ne pouvait se pavaner avec de magnifiques ailes ?

Malalalivia ne sentait pas l'atmosphère pesante qui naquit autour d'elle et dans tout le royaume. Elle n'était fière que de l'impression qu'elle donnait au Héros, son expression époustouflée la ragaillardit.

- Épatant, n'est-ce...

Soudain, la fée reçut une pierre dans le dos.

Elle se retourna pour voir d'où cela pouvait venir. Puis en reçut une deuxième en plein visage lui blessant le front et laissant ruisseler son sang sur son visage.

Elle ne comprit pas ce qui venait de lui arriver, et elle n'eut pas le temps d'y réfléchir qu'elle reçut d'autres projectiles qui dévièrent de leur cible comme par magie.

Elle voulut les renvoyer mais elle fut distraite par un bruissement étrange qui résonnait parmi les spectateurs. Puis ce bourdonnement devint assez audible pour devenir une parole : « Hérésie » pouvait-on entendre. Ce mot était répété et scandé par tous les spectateurs, le crachant au visage de Malalalivia sans aucune pitié. Que ça soit le bas peuple, les riches ou les nobles, tous lui vomirent leur haine à la figure, sans aucune vergogne.

Malalalivia ne savait que répondre. Les lèvres tremblantes, elle baissa la tête, honteuse de l'exploit qu'elle venait de faire. Honteuse d'être ce qu'elle est. Elle essayait tant bien que mal de se retenir de pleurer mais les injures et les projectiles – que ça soient des cailloux, des briques ou de la nourriture – qui fusaient de partout l'empêchait de se contenir.

Lelelitio, voyant le tumulte qui se créait au stade, enrageait de ne pas pouvoir intervenir. Le poing serré, sa colère ne pouvait être contenue. Il fallait qu'il intervienne mais qui pourrait s'occuper des enfants en son absence, s'il y avait quelqu'un pour les garder, il serait là-bas.

- Bande de...

- Pourquoi ils disent ces méchancetés à Livia ? lui demandèrent les enfants.

- Je... je ne sais pas. Ce sont juste de stupides histoires de grandes personnes...

Brusquement, quelqu'un vint à toquer à leur porte.

Le bébé dans les bras, Lelelitio vint à la rencontre de ce visiteur impromptu. Il ouvrit et vit Cassandre, la mulière qui était aidée par Malalalivia lors des services de cantine.

- Euh... désolé mais si vous cherchez Malalalivia, elle est...

- Je suis au courant, c'est toi que je viens voir.

- Pourquoi ? s'étonna l'elfe.

- Ta princesse a besoin de toi.

- Je le vois bien, se désola Lelelitio.

- Et c'est pour ça que nous sommes venus ! dit une autre voix derrière Cassandre.

- Nous ? dit Lelelitio en haussant un sourcil.

Lelelitio regarda au-dessus de l'épaule de la mulière et vit une tripotée de civils des Basfonds qui étaient derrière Cassandre.

- Il faut que tu la rejoignes, dit l'un des habitants.

L'elfe hésita, mais les enfants l'y poussèrent aussi. Voyant qu'il n'avait pas le choix, il se mit en course pour l'arène.

Dans l'arène, les insultes perduraient venant de tous sans exception. Malalalivia essayait de tenir, mais la peur et la honte s'enracinaient dans son esprit, elle perdit tout envie de se battre et se préparait à déclarer forfait. Une reine dont le peuple rejette la légitimité ne peut pas être une bonne reine.

- César, ma reine, je vou...

- LA FERME ! hurla le Héros.

Tous ces cris de bêtes affreuses cessèrent sous la colère du Héros, avant que l'un d'eux reprit de plus belle en l'insultant « d'Abomination », un autre de « démon » ou encore un autre d'« engeance de la Félonne », et tous finirent par s'en prendre autant au Héros, lors de son arrivée à Sylvania, qu'à son adversaire.

C'est alors que le Héros, se laissant aller à sa fureur, leva la main au ciel pour l'appeler, celle qui, entravée par des chaines, des sceaux et quelques autres joyeuses précautions magiques, accompagnait le Héros dans son périple meurtrier s'évada aisément de toutes ces sécurités, transperça le sous-sol du château Yggdrasil et traversa son sommet pour atterrir au cœur de l'arène dans la main du Héros, sous un horrible brouhaha et une bourrasque infernale.

Le Héros venait de reprendre en sa possession l'arme offerte par son ennemi juré, l'ignoble Némésis, le Bras du Titan Ymir.

- Arrête-toi ! lui cria la reine.

Mais celui-ci n'avait que faire des avertissements de sa tutrice. Il allait régler cette histoire aussi vite qu'elle avait été provoquée.

Il se dirigea vers l'individu qui avait lancé la pierre au front de Malalalivia, créant un iceberg d'un simple coup d'épée dans les airs avant de se confronter à celui qui avait osé projeter l'objet. D'un puissant coup de poing en plein visage, il l'envoya valser à l'autre bout de la foule. Avant même qu'il n'atteigne le sol, le Héros lança l'épée maudite dans sa direction, se téléportant et atteindre son projectile vivant avant qu'il atteigne un spectateur malchanceux, puis le saisit par le col de sa veste pour le plaquer au sol. D'un geste menaçant, il écrasa sa botte sur sa poitrine avant de simuler l'intention de lui trancher la gorge en appuyant la pointe de sa lame sur sa trachée.

- En l'honneur de la promesse que j'ai faite à la reine, je ne vous tuerai pas. Mais sachez que je vous méprise plus que tout. Pour qui vous vous prenez pour l'insulter ? Est-ce que l'un d'entre vous peut prétendre avoir accompli autant qu'elle ? Vous êtes là à crier sur elle que c'est un monstre, une hérétique ! Vous voulez observer c'est quoi un monstre ?

Le Héros ôta sa capuche, son haut, se débarrassa de ses jambières et arracha le tissu qui se situait au niveau de ses tibias, puis, fit rétrécir sa maudite tache au point qu'elle ne recouvre que ses épaules, son cou et son visage. Toutes ses blessures étaient à la vue de tous, allant de ses cicatrices suppurantes sur son bas ventre, des nodules qui naissaient au milieu de son torse, des alopécies qu'il avait au niveau des cheveux, que ça soit au sommet de son crâne ou à l'arrière de sa tête...

Tous les habitants de Sylvania, tous sans exception, en incluant la reine et la Fée qui lui avaient pourtant donné le bain, découvraient avec frayeur et dégoût les ravages de la maladie inconnue avec laquelle le Héros devait vivre. Sous les regards remplis d'écœurement à son égard du public et de son entourage, les membres du Héros se crispaient, ses poils se hérissaient, ses intestins lui tiraient le ventre, il se sentait horriblement humilié, les regards de bête de foire l'angoissaient au plus haut point, son esprit lui criait de fuir le plus loin possible, loin de cette masse de regard qui se transformait en un monstre horrible s'apprêtant à déchiqueter son esprit. Toutefois, il se devait de tenir bon. Il n'allait pas laisser une fille aussi admirable et brave que Malalalivia être insultée sans raison aucune hormis sa différence et son handicap.

Il reprit son courage et s'adressa la foule belliqueuse :

- Vous appelez Malalalivia Talemilia Grave, hé oui j'ai bien prononcé ce nom maudit, d'abomination, de démon, de déchet... tout ça parce qu'on lui a amputé ses ailes. Vous avez pas honte d'être la source de son handicap parce que vous vous gaussez des pauvres ? Où étiez lorsqu'elle criait à l'aide à l'autre bout du pays ? Où étiez-vous lorsque des centaines de fées allaient servir de prostituées, de danseuses de cabarets ou d'aphrodisiaques ? Si elle est dans cette situation c'est de la faute de ce système que vous avez mis en place, de traditions sans queue ni tête ! Et d'ailleurs, il y en a même qui sont nés sans ailes qui haussent le ton avec les geignards..., dit-il en jetant un effroyable regard noir à la Fée.

Lelelitio en ria.

- Maintenant que vous savez la source de mon surnom de Démon-Sans-Visage, osez m'insulter ! Osez me jeter des pierres ! Si l'un d'entre vous permet que cela arrive, je vous réduirais en cendres avec l'arme de l'homme qui vous a condamné à vivre sous un ciel de plomb ! leur cria-t-il, que la reine me combatte ou non, moi je vous survivrai car lui seul et Dieu peuvent me tuer.

Vouloir réduire en cendres Sylvania avec une arme qui projette de la glace, t'en as de ces idées, gamin...

Le Héros descendit des tribunes pour rejoindre le terrain de combat et poursuivit ses menaces.

- Que celui qui se sent les couilles d'être encore un fils de pute à l'insulter se lève, descende et m'affronte ! Que vous soyez dix, vingt, cent, mille, un million ou un milliard, je vous tabasserai et vous tuerai tous. Si vous voulez m'affronter tous en même temps, bah venez ! On s'affrontera comme dans une putain de battle royale !

« ...comme dans une putain de battle royale ! », cette dernière phrase aussi avait été prononcée le jour du combat d'Audisélia lors du précédent du tournoi par Elena, pensa la reine Audisélia II, ils n'avaient pas le même sang, mais ils arrivaient quand même à se ressembler.

Cela ne lui fit pas oublier l'horreur du corps du Héros.

C'était de ça qu'Elena devait s'occuper depuis qu'elle l'avait recueilli ? Quel travail acharné avait-elle dû faire ? Quel niveau de souffrance devait vivre le Héros sans les différents traitements qu'on lui prodiguait à l'hôpital ? Sa peau devait être complètement inflammatoire. Tous les combats qu'il a faits... La douleur qui devait en résulter devait être inimaginable. Comment pouvait-il garder le sourire ?

Puis la reine se souvint que lors de sa venue, il ne l'avait justement pas. Les descriptions d'Helmir et ce que lui racontait la Fée montraient à quel point le Héros souffrait. Et pourtant, il s'est tenu là, chaque mois pour défendre l'honneur de sa princesse. Chaque jour aux entraînements de Sawyer, et, jusqu'à ce jour, restait obsédé par la poursuite de l'assassin de sa mère.

- C'est tout bonnement...

- ... Invivable, finit par dire la recrue des Saints de la Reine, comment un p'tit gamin de quinze lazterge pouvait supporter cela ?

Le Héros réétendit son maléfice sur tout son corps et revint auprès de Malalalivia et lui tendit la main pour la relever.

- Gamine, le combat continue, hein.

- Mais je ne peux pas te combattre dans cet état, dit la fée des Basfonds complètement horrifiée par ce qu'elle venait de percevoir.

Elle n'osait même plus regarder son adversaire dans les yeux.

- Qu'est-ce que tu racontes ? s'agaça le Héros, on a affronté des fantômes ensemble et j'ai mis à l'amende tous mes adversaires jusque-là, ne sois pas arrogante l'aptère. J'aurai juste plus aucune chance avec une quelconque nana de ce royaume, rit tristement le Héros.

- Tu es sûr de toi ? s'inquiéta Malalalivia.

- Livia, tu veux me montrer que tu es digne d'être l'héroïne de légende ou non ? s'exclama à gorge déployée Nalo.

- Bien sûr ! Mais...

- Alors reprends l'état d'esprit avec lequel tu es venue de battre aujourd'hui parce que moi, malédiction, blessures ou maladies, je serai sans pitié !

Malalalivia hocha la tête et elle accepta la main qui lui était tendue. Tous les deux se mirent à une distance raisonnable avant que César ne sonne la reprise du combat. Le Héros jeta Ymir contre l'un des murs du stade et dit aux mages présents de mettre leur bâche de protection magique autour du public pour les protéger du dernier affrontement menant à la finale du tournoi.

- Tu ne vas pas utiliser cette épée ?

- Tu es venue affronter le héros de la légende ou le Démon-Sans-Visage ?

La princesse des Basfonds ne répondit qu'avec un léger rictus en coin.

La Fée en avait encore pris pour son grade. Cette fois-ci, il n'y avait pas de malentendu : elle avait très bien compris ce qu'il lui reprochait et l'avait fait à la vue de tous. Comme elle l'avait dit plus tôt, il s'amourache tout le monde et les traite avec la même déférence peu importe leur statut. Désormais, elle s'était retrouvée à la place des médisants alors qu'hier c'était elle qui était protégée par le Héros. Elle ne pouvait lui reprocher qu'il eût changé puisqu'il avait fait la même chose pour elle, alors peut-être... était-elle égoïste non pas seulement en vue de son rêve, mais tout simplement par nature ? Alors cela voulait-il dire qu'elle était gênée par la nature du Héros ?

La reine était tout de même ébahie par le fait que le Héros avait pris sur lui pour ne pas causer de soucis diplomatiques en assassinant un ressortissant de son royaume. Quelques mois auparavant, elle ne saurait pas s'il aurait eu la même résilience, peut-être ne pas aller jusqu'au meurtre mais le blesser, elle pouvait être sûre qu'il aurait un bras en moins – le coup de poing c'est léger.

- Qui est ce garçon pour que vous le laissiez s'en prendre à votre population ainsi ? demanda l'un des ambassadeurs, ne critique-t-il pas votre régime ?

- Oh laissez ! C'est mon fils, dit-elle avec arrogance et fierté, il est un peu colérique, leur sourit-elle, et pour le régime... Il a raison. Nous avons mis en œuvre de nouvelles politiques en nous débarrassant des éléments indésirables comme l'autre malvenu qui a tenté de s'en prendre à nous.

Les dignitaires étrangers furent étonnés et murmurèrent entre eux. Leurs palabres n'intéressaient pas le moins du monde la reine, mais ils trouvèrent pertinent et intéressant que le monstre dépeint à travers tout le monde humain était capable d'une telle autocritique de ses institutions.

Après avoir remis les « choses en ordre », le Héros n'était obsédé que par une seule chose : le mystérieux pouvoir de la fée aptère des Basfonds qui lui permettait de voler et de dévier les trajectoires. Comme ils l'avaient dit : ce n'était pas de la lévitation, mais il ne pensait pas que cela soit de la psychokinésie ou télékinésie, la déviation était abrupte. D'habitude, dans tout ce qu'il avait pu observer, les manipulations de ce type créaient des mouvements circulaires et non rectilignes, surtout que...

- Tu te demandes quelle est la nature de mon pouvoir, gamin ?

- Hein ? Euh ? Ouais. Genre tu vas me le dire ?

- Pourquoi pas ? Après tout, tu m'as défendue, je veux bien te faire une faveur.

- Soit, tu me sous-estimes, soit, tu es assez conn... bête pour me laisser le savoir, souffla le Héros avant de se raviser, soit... tu as une confiance totale en celui-ci !

- D'après toi ? dit la fée aptère des Basfonds.

Malgré la confiance qu'elle affichait, les insultes ne semblaient pas s'être dispersées dans son esprit. Il était vrai que le choc devait être assez violent puisqu'elle se devait de rester dans les Basfonds avec les parias toute sa vie en ayant la stricte interdiction formelle de monter à Haute-Ville avant la mise en place du tournoi ou sous ordre de la reine en personne.

- Livia, si tu veux m'affronter, il va falloir que tu fasses le vide dans ton esprit et que tu oublies ce que ces gens pensent de toi, sinon tu ne pourras répondre à la question que je t'ai posée.

- Quelle question ?

Le Héros s'élança vers la fée et l'attaqua.

- « Pour qui et pour quoi tu te bats, Malalalivia Grave ? », voilà la question pour que je te confie la Volonté Héroïque.

La fée le repoussa et le visa avec sa double joute.

- Alors avant de répondre à celle-ci, je vais te répondre à la question de mon pouvoir...

Brusquement le javelot avant se projeta sur le Héros, il l'esquiva de justesse avant qu'il ne le heurte.

- Mon attribut génétique concerne... la manipulation des vecteurs ! dit-elle jouasse.

Cela se voyait qu'elle avait très... TRES envie de le dire à d'autres personnes que Lelelitio.

- Quoi ? écarquilla-t-il les yeux rempli d'incompréhension.

Le Héros n'avait pas remarqué qu'il y avait une chaine attachée au javelot et il se retrouva avec le javelot qui s'enroulait autour de la taille.

- C'est pas possible ! s'énerva le Héros, tu vas me dire que tu maîtrises tous les vecteurs ?

- Pas tous, rectifia Malalalivia, les vecteurs chaleurs et d'autres qui ne me servent pas au combat ou qui peuvent me perturber, je ne les emploie pas, mais effectivement le vecteur gravité m'est bien utile.

Soudain, le Héros sentit tout son corps peser extrêmement lourd, au point que cela lui fit fléchir les genoux. Il en avait rencontré des choses absurdes dans ce royaume, mais il ne s'attendait aucunement à rencontrer un tel pouvoir ici.

Le champ – sans mauvais jeu de mots – des possibilités avec le pouvoir des vecteurs était infini ! Cependant, la bonne nouvelle pour Nalo-vace, c'est qu'elle ne maîtrisait pas complètement son pouvoir et que, par conséquent, il était encore jouable pour lui de la vaincre. Toutefois, il lui fallait quand même comprendre les limites de ce dernier.

Nalo était assez fort pour tenir face à une gravité plus pesante que celle terrestre mais il fallait qu'il se dégage de l'emprise de la fée pour pouvoir se mouvoir hors de la portée de son attribut génétique, et pour cela, il fallait qu'il se détache des chaînes de l'arme de Malalalivia.

Heureusement pour lui qu'il avait apporté des modifications à ses gants...

D'une simple pression au niveau du poignet, les gants se transformèrent en brassard et des lames de feu sortirent de ses coudes, il scia les chaines, retransforma ses brassards métalliques en gants et décolla, avec la plus grande des qualités, hors de la zone de pression de son vecteur. Il atterrit lourdement en s'éclatant le visage à s'en cassant une dent contre le bouclier de protection mis en place par les mages.

Malalalivia savait qu'elle ne maîtrisait pas encore son pouvoir assez puissamment pour maintenir un être aussi fort que le héros de la légende mais cette tentative lui apprit qu'il n'était pas complètement hors d'atteinte. Elle allait devoir plus jouer sur la déviation des objets et autres pour pouvoir le vaincre. Bien heureusement pour elle, ce n'étaient pas ses seuls atouts. Maintenant, c'était son heure de briller et de prouver que tous ses efforts durant toutes ces infames années allaient payer. Elle allait prouver qu'elle est digne d'être le héros de la légende.

Le Héros, se relevant de son vol plané et de son crash inattendu – pour lui, en tout cas – contre la protection des spectateurs, redécolla pour foncer sur son adversaire en lui mettant un coup de pied bien placé dans les côtes, mais Malalalivia le dévia de sa trajectoire et envoya valser le Héros contre l'un des murs du stade, cependant, le Héros réussit à réattérir sur ses pieds, et non la tête la première contre ce mur derrière elle. Il comprit rapidement que le pouvoir de Malalalivia ne serait pas une mince affaire à régler. Il fallait qu'il identifie correctement le fonctionnement de cet attribut génétique avant de se faire piéger une nouvelle fois par celui-ci.

Malalalivia partit reprendre l'autre bout de son arme et le réemboîta pour qu'elle ne refasse plus qu'un. Elle ne pourrait plus utiliser la chaine pour le capturer alors il faudra qu'elle fasse attention lorsqu'elle le relancera.

Le Héros voulut tenter une expérience.

Il refonça sur elle en volant à ras du sol, mais encore une fois, elle dévia sa trajectoire. Pourtant, au moment où il passa près d'elle, elle ne vit pas que Nalo avait détaché l'un de ses gants, et celui-ci vint percuter le menton de la fée aptère des Basfonds qui perdit sa concentration et retira l'emprise de son pouvoir sur le Héros. Le champion de la fée aptère s'envola pour récupérer son accessoire avant qu'il ne rejoigne les cieux. Ensuite, il redescendit sur Terre comme si de rien n'était, satisfait de ce qu'il venait de voir.

Son expérience fut fructueuse puisque ce qu'il soupçonnait se révéla vrai : le pouvoir de Malalalivia marchait réellement avec les règles des vecteurs. Ce n'était pas tout son corps qui était soumis au pouvoir de Malalalivia mais simplement le milieu de son corps, donc s'il se détachait d'un objet lorsqu'elle usait de son pouvoir, celui n'était plus soumis à son influence.

- A voir ton visage ravi, tu penses avoir bien compris mon attribut génétique...

- Exact !

- Si tu le penses... Commençons alors !

Le Héros lui envoya un faisceau dense de feu qu'elle écarta, il lui fonça dessus et lui asséna un coup de pied qu'elle contra avec son bouclier, Nalo s'aida de son bouclier pour passer derrière elle et lui mettre un double coup dans le dos de la fée lui provoquant une intense douleur qu'elle supporta puis se retourna pour lui mettre un coup de javelot, il se propulsa en arrière pour l'esquiver. Alors, la fée incanta un sort pour faire naître une mer de rochers tranchants dans la direction du Héros, celui-ci courut jusqu'au mur derrière lui, le gravit avant de faire un salto en arrière et de se propulser sur le côté avec l'un de ses gants répulseurs tombant maladroitement sur le sol.

Il a fait un salto ? se stupéfia la Fée, il a vraiment réussi ?

Oui. Le Héros avait effectivement continué ses entraînements de souplesse et d'agilité bien qu'ils ne s'étaient plus vus et malgré ses blessures, il avait réussi à atteindre une assez grande souplesse pour pouvoir arrêter d'encaisser les coups.

- Terre, toi qui fus poussière et qui redeviendra poussière, sois mon arme pour défaire mes assaillants ! Magie Sablonneuse : Piloris des Dunes.

Un jet de sable à haute pression sortit du sol et fonça sur le Héros, il l'esquiva de justesse en faisant une roulade, mais d'autres naquirent du sol et partirent le percuter. Il contra ses coups en leur envoyant des faisceaux de feu et les transforma en poteaux visqueux de verre. Elle répéta ses attaques de façon incessante en le poursuivant tout en volant jusqu'à lui. Le Héros, plus rapide, l'encercla alors en créant un cercle de feu au tour d'elle qui cristallisa le sable au sol, l'enfermant dans une prison de verre liquide qui allait s'abattre sur elle. La fée ne devait en aucun cas effleurer ne serait-ce qu'un morceau de ce verre chatoyant, car elle risquait de se retrouver face à ce sable liquide, fondu à une température dépassant les 1700 degrés. Une chaleur si intense qu'elle aurait pu la brûler instantanément, transformant ses habits en cendres et incinérer son corps.

- Si tu crois que c'est suffisant pour m'arrêter. La gamine dont t'as parlé Lelelitio n'est plus. Mes pouvoirs et ma magie ne se limitent plus qu'à la pierre mais à tous les minéraux.

D'un revers de main, elle gela le verre qui se trouvait d'elle et le brisa en mille avant d'envoyer ces dits-morceaux sur le Héros. Celui se retrouva contraint d'esquiver les projectiles de la fée sinon il finirait déchiqueter par ceux-ci. En l'observant, deux choses lui sautèrent aux yeux, contrairement à ce qu'il pensait auparavant, elle n'a pas qu'un seul point de vecteurs, elle a l'air d'en avoir une centaine au moins ! Mais si c'était vraiment le cas, pourquoi n'a-t-il pas fait s'agiter ses deux lances à son encontre ? Quelque chose lui échappait. Les deux choses qu'il comprit sur son pouvoir vectoriel : elle se devait de s'arrêter pour pouvoir l'utiliser.

Alors, en guise de représailles, il lui tira une myriade de boules de feu qui firent fondre le verre en gouttelettes de verre. Ses boules de feu n'étaient pas seulement destinées aux attaques de la fée, mais aussi à elle. Cependant, elle les esquiva en bougeant à peine son corps, et au lieu qu'elles percutent le sol, les boules de feu stagnèrent en l'air avant de retourner à l'envoyeur. Le pouvoir de Malalalivia allait plus loin que de simplement dévier les projectiles ou d'augmenter la gravité autour d'une personne, elle maîtrisait bien plus les vecteurs que ne l'aurait pensé le Héros : dès qu'un objet se trouvait sous son regard, peu importe sa position, elle pouvait l'envoyer où elle voulait. C'était comme si elle avait un checkpoint sur les objets où elle avait placé un point vectoriel. Du moins, c'était ce qu'avait pu analyser le Héros.

La combattante généra d'énormes rochers qu'elle envoya sur le Héros qui tournoya sur lui-même pour esquiver le premier avant de courir sur le deuxième et de s'élancer sur son adversaire à la pointe de celui-ci, mais il fut pris par surprise par le retour de ces deux rochers qui le percutèrent dans le dos et le renvoyèrent au sol au pied de Malalalivia. Il se releva en faisant un salto carpé puis fit face au dos de la fée.

Putain, les attaques à distance face à elle, c'est mort, pensa le Héros, il n'y a que le combat rapproché qui fonctionne sur elle... Alors accélérons la cadence.

Il sortit un cristal de magie, le mit dans le réceptacle de son gant et se mit à produire de la foudre, mais pas n'importe quelle foudre, celle de la reine Audisélia. Néanmoins, la reine l'avait averti que comparé au feu, ses éclairs étaient instables et que s'il ne faisait pas attention, lui-même subirait des dégâts. Cependant, pas le temps pour être précautionneux ! Il devait la battre coûte que coûte, et si elle voulait répondre à la question, il devrait monter à cent pour cent de sa force pour qu'elle trouve la réponse qu'il souhaite entendre.

Malalalivia n'en voulait pas à la reine de le soutenir puisque c'était elle qui avait financé son arme actuelle. Toutefois, elle savait qu'entre les mains du Héros, un tel pouvoir ne serait sûrement pas à prendre à la légère.

Sans plus attendre Nalo chargea Malalalivia avec un coup de pied sauté qu'elle esquiva de justesse, mais ce n'était pas fini, le Héros revint à la charge en tourbillonnant sur lui-même, lui attrapa le bras et la renversa au sol avant de revenir sur ses pattes. Malgré le fait qu'il était plutôt dégourdi avec son attirail technomagique, se déplacer en ayant comme moteur magique du feu était différent que d'avoir de la foudre. Il était beaucoup, beaucoup plus rapide qu'auparavant.

La fée se releva difficilement, n'étant pas préparée à une telle vitesse, la célérité avait exponentiellement augmenté, s'il ne se mettait sur sa vitesse, elle serait prise de court et perdrait assurément. Le seul moyen de contrer cette fulgurante vitesse était de lui créer des obstacles pour le stopper dans sa course puisque n'étant pas encore habituée à cette vélocité.

Dès lors qu'elle discerna les intentions du héros de la légende de reprendre sa course, elle fit surgir un champ de pierre entravant la progression de Nalo. Celui-ci heurtait alors les rochers, restant ainsi privé de toute avancée vers sa cible. À chaque tentative de capture par ce moyen, la fée réitérait inlassablement le processus, jusqu'à ce que Nalo se lasse de sa propre témérité à foncer tête baissée contre ces obstacles.

Blessé, dégoulinant de sang, le Héros explosa de colère et réduisit tous les obstacles qui se dressait face à lui en cendre sous une pluie de décharges électriques qui s'abattait partout sur le terrain. Malalalivia parvint à esquiver toutes les attaques, mais ne se rendit pas compte de l'écran de fumée que Nalo venait de créer sous le prétexte d'une fausse crise de colère. Prise au piège de sable et de poussière, elle chercha du regard, étant donné qu'elle ne pouvait percevoir grâce à sa magie, la présence du Héros, alors que les éclairs continuaient de fondre sur elle. L'un d'eux manqua sa cible, mais ce n'était là qu'une diversion pour l'empêcher de remarquer que, dans la confusion de la poussière, Nalo préparait une attaque d'une puissance inouïe. Sous la pression de cette énergie déchaînée, la poussière se dissipa, révélant alors à Malalalivia une image saisissante : le Héros, les mains jointes, tenant une boule de feu bleue d'où jaillissaient des éclairs se croisant dans le creux de ses gants, lesquels s'étaient allongés pour devenir des gantelets.

- Voyons voir si tu survis à cela !

Qui lui avait appris une telle manœuvre ? se demanda la reine.

La boule d'énergie qui grandissait dans les mains du Héros était bien trop puissante pour que quiconque le lui ait appris à Sylvania. Mais la Fée la reconnut, enfin, elle reconnut la position dans laquelle s'était mise le Héros et la description qu'il lui avait faite lorsqu'il lui parla d'un livre avec des images, une histoire à propos de boules de cristal éparpillées à travers le monde.

Plus le temps de réfléchir, un gigantesque faisceau de lumière et d'énergie fut projetée contre la fée aptère adulte, mais c'était oublier son pouvoir vectoriel qui lui permettait de faire changer de trajectoire tout corps physique. Cependant, le Héros, malgré sa satisfaction d'avoir réussi à utiliser l'attaque d'un héros qu'il admirait, se doutait bien que cela ne représentait qu'une simple diversion, une tactique visant à prendre Malalalivia par surprise et à la mettre en difficulté. Alors qu'elle dévia l'attaque vers le ciel avant de la faire redescendre au sol pour ne pas encore créer de pluie abondante pendant une semaine, le Héros apparut de derrière la colonne de lumière, propulsé par son gantelet gauche, sourire aux lèvres, content que son stratagème ait fonctionné, il fonça sur la princesse et lui décocha une droite dans la joue l'envoyant valser au sol avec plusieurs rebonds jusqu'à percuter le mur. Le choc fut si violent que ses cheveux se défirent laissant sa chevelure s'étendre sur tout son corps et qu'elle se mit à cracher du sang.

Il souffla un bon coup avant de mettre ses mains sur les hanches, déçu par ce début de combat.

- Si c'est tout ce que tu as à m'offrir autant abandonner maintenant le rôle de reine, de fée et d'héroïne de la légende...

- Et puis quoi encore ? beugla Malalalivia un filet de sang sortant de sa bouche, je me dois d'honorer ma promesse...

- Quelle promesse ? l'interrogea le Héros avec un ton dédaigneux.

- Celle d'honorer les deux femmes à qui j'ai emprunté les noms !

- C'est donc cela ta réponse ?

- Oui, dit la fée en se relevant, c'est ma conviction profonde. Je protégerai ceux des Basfonds, en honorant la mémoire de ces deux personnes.

Grâce au magnétisme procuré par la magie de la reine, le Héros attira son épée à lui et se rapprocha de la princesse en la faisant virevolter devant lui.

- Désolé de te le dire mais ça n'est pas suffisant.

Il lui asséna un violent coup d'épée sur le côté qu'elle arriva à bloquer de justesse, la force du coup fit vibrer tout son corps. Il frappait bien plus violemment qu'au début du combat. Avec le silence du stade à cause de leur rancœur vis-à-vis des propos envers le Héros – silence qui était juste perturbé par les commentaires mélodieux de César –, les coups sonnaient de façon plutôt sinistre, mais aucune personne mis-à-part la reine et la sainte chevalière n'eurent pitié de la situation de la fée.

- Aveline..., dit le Héros.

- Ce n'est plus mon nom !

- Avelinélia ! répéta-t-il encore plus fort avec son nom complet en lui donnant un coup d'épée encore plus fort, si tu n'agis qu'à travers la promesse que tu t'es faite en mémoire des tiens, tu finiras par les maudire ! Peut-être tu l'as déjà fait quand ces abrutis t'ont lancé des pierres et t'ont craché dessus, hein ?

Malalalivia serra les dents avant de lui cracher :

- Qu'est-ce qu'un gamin humain de quinze ans saurait de comment doit être un adulte ?

- Qu'est-ce qu'une gamine fée de vingt-six ans qui a toujours vécu ici saurait de ce que cela impute ce genre de mode de pensée, hein ? lui rétorqua-t-il en lui envoyant un coup de pied dans le ventre.

Elle finit contre le mur de l'arène crachotant encore du sang.

César jeta un œil à la reine pour lui demander s'il devait déclarer le Héros gagnant de l'affrontement avant que cela tourne mal. La reine refusa, elle connaissait son apprentie, elle était bien plus robuste que cela, mais surtout qu'en dehors du royaume, à part la reine, Sawyer, Globox, Lelelitio et Morvian, le Héros n'avait aucune concurrence. Seule la Fée pouvait peut-être lui tenir tête en termes de magie mais jamais, au grand jamais, elle pouvait l'avoir sur la stratégie de combat ou le combat en lui-même. C'est pour cela qu'il fallait qu'elle affronte le Héros : pour voir jusqu'où elle pouvait aller.

Malalalivia se releva en s'appuyant contre la barrière magique, foudroyant du regard le Héros.

- Tu crois vraiment que je pourrais le faire, Nalo ? l'invectiva-t-elle.

- Oui, lui répondit-il sèchement, lors de ces moments d'incertitude quand tu ne sais pas où ces incessants combats te mènent, où tu te demandes si ton choix est le bon, où tu te demandes, le corps encore meurtri, s'il ne vaut mieux pas se laisser mourir... Oui, Avelinélia, toutes ces questions, je me les suis posées. Attristé, affaibli, je maudissais ma mère et le premier héros de me faire vivre un tel calvaire. Et j'en suis ressorti avec ma décision. Maintenant, toi tu as le choix, et de tes motivations profondes dépendra ton choix. Alors dis-moi quelles sont-elles tes motivations ?

La princesse guerrière se mit en garde.

- Je te l'ai déjà dit : j'honorerai mes parents d'avoir pris soin de moi en prenant soin des autres.

Le Héros lui fonça dessus et tenta de lui mettre un coup, mais la princesse fut sauvée de justesse par le rebond de l'épée sur la barrière magique. Cela ne l'arrêta pas, bien au contraire, il enchaîna immédiatement avec une série de coups d'épée, les assénant sans relâche, créant ainsi un martèlement incessant et implacable à l'encontre de la protectrice des Basfonds. La Fée n'arrivait pas à contrattaquer à cause du désarçonnement qui la démunissait provoqué par l'interrogatoire du Héros.

- Alors c'est tout ce qu'ils valent ? demanda le Héros.

- Qui ?

- Ces gamins que t'as sous ta responsabilité. De Lelelitio qui prend soin de toi autant que toi de lui. De ces gens crados qui crèvent la dalle, de ces pauvres types maltraités par les riches qu'ils habitent chez vous ou dans la merde et la boue ou dans les hautes sphères de cet état féérique... Est-ce qu'ils méritent d'être simplement sauvée à cause des conséquences d'une promesse que tu t'es faite ?

- Mais qu'est-ce que tu racontes ? dit la fée aptère des Basfonds troublée.

- Tu les protèges et prends soin d'eux à cause de ta promesse ou parce que tu tiens à eux, Avelinélia ?

Cette dernière question résonna dans l'esprit de la princesse des Basfonds.

Pourtant, le Héros lui avait déjà posé la question, mais jusqu'alors, elle n'avait jamais dissocié les deux choses parce que pour elle, cela revenait au même.

Mais avec cette interminable question de Nalo, elle en vint à comprendre son raisonnement : est-ce que si le lien entre sa promesse et le bien-être des habitants se faisait de moins en moins tenu, les abandonnerait-elle à leur sort ? La difficulté de combattre jusqu'à maintenant était palpable, détestée malgré ses efforts, elle finirait bien par injurier la source de cette promesse et recommencer à se morfondre en abandonnant une nouvelle fois, en abandonnant tout lien avec le monde extérieur de sa maison, abandonnant toute envie de s'exprimer, d'exprimer ses envies... Elle retournerait dans la solitude et la monotonie qu'elle avait vécues après l'amputation de ses ailes.

« Tu penses que Lilivia va nous ramener des poissons grillés, aujourd'hui ? ».

Cette voix, se dit la princesse, ne serait-ce pas la voix d'Etino ? Je lui avais promis qu'on mangerait du poisson dans la semaine.

« Vous verrez Malalalivia, c'est la plus forte ! Une fois je l'ai vu arrêter un buffle dans l'élevage dAl'Warrof, à main nue ! »

Qu'est-ce que tu racontes, Jasazir ? J'ai seulement ralenti sa course, rit Malalalivia.

« Malalalivia a toujours été une fille adorable. Il a de la chance d'avoir cette gamine-là... ce... ce... Lelelitio ! Espérons qu'il arrive à temps. »

Qu'est-ce que tu racontes, Cassandre ? Leleli est avec les enfants.

Puis soudain, elle entendit dans son esprit la respiration haletante du garçon. Elle l'entendait courir jusqu'à l'arène. Jusqu'à elle. Traversant les Basfonds à toute allure.

« Attends-moi, Lili, j'arrive ! »

Ensuite, elle reçut une floppée de voix qui l'encourageait, qui la complimentait, qui la remerciait, qui l'observait sur l'écran installé dans les Basfonds. Pas directement, mais ils parlaient d'elle et la soutenaient. Il ne pouvait s'agir que d'une seule personne pour pouvoir être capable de faire cela : la reine Audisélia. Bien qu'elles aient eu des désaccords – et peut-être avec l'aide du Héros sur l'état mental de la reine ou parce qu'il lui avait suggéré, on ne sait pas, hein ? –, elle n'en restait pas moins sa pupille et si elle avait besoin d'encouragements, elle saurait y faire.

En entendant toutes ces personnes qui la félicitaient et l'encourageaient, elle comprit que cela faisait bien longtemps qu'elle ne se battait plus pour la promesse faite en reprenant les prénoms de la mère de Lelelitio et de celui de sa mère, mais bien pour eux. Elle n'avait plus besoin de ses béquilles pour se battre. Elle enserra sa poitrine de sa main et fixa le Héros avec un large sourire et les yeux embués de larmes.

- Je le sais maintenant. J'en ai eu la confirmation !

Elle releva la tête, vaillante, sûre d'elle, elle repoussa les assauts du Héros et lui planta sa double joute dans l'épaule avant de le jeter au centre du terrain avec un tour sur elle-même avant de le faire rouler sur le sol. Le Héros ne s'attendait pas à une telle riposte, et il n'eut pas le temps de se remettre sur patte que des mains faites de sables l'entourèrent et le firent prisonnier ne laissant échapper que sa tête, compressant son corps de son cou à ses orteils.

- C'est de la magie maîtrisée ? s'interrogea la princesse Mananélia Diasiré en écarquillant les yeux.

- Ça m'en a tout l'air, lui répondit la princesse Roxannélia.

- C'est impossible ! s'écria la princesse Marinanélia, aucune princesse ne peut atteindre ce niveau sans avoir validé ses évaluations.

La reine ricana en entendant le désarroi des autres princesses.

Et dire que tu oses me reprocher de te traiter de génie...

La fée aptère des Basfonds fonça sur le gamin en volant, et ce dernier répliqua en explosant des mains de sable. Leurs avant-bras s'entrechoquèrent dans un bruit sec. Leurs regards pétillants d'excitation se croisèrent avant qu'ils n'échangent une série de coups : des coups de pied sautés, des clés de bras, des coups de genoux bloqués par leurs bras... Chacun de leurs mouvements exprimait leur détermination et leur volonté de se battre et de l'emporter.

La Fée ne savait pas pourquoi, mais dans sa poitrine, en observant ces deux combattants se battre avec autant d'intensité et d'exaltation, alors qu'elle se battre la répugnait, elle ressentit une pointe de jalousie.

Que ça soit les champions, les princesses ou les spectateurs lambdas, tous restaient bouche bée devant la démonstration de force et de dextérité dont faisaient preuve la fée et l'humain. Ils pouvaient observer les années d'entraînements et de combats qu'ils avaient enduré pour arriver à ce niveau. Un seul mot leur venait en bouche : prodigieux.

Avelilinélia n'appréciait pas non plus se battre mais savait que c'était son devoir d'être forte et ressentir cette force qui s'imprégnait en elle l'animait d'une énergie folle. Elle se sentait de plus en plus en confiance de pouvoir défendre les autres et prendre le titre de héros de la légende à son adversaire, mais surtout à enfin le reporter...

- Nalo, moi, Avelilinélia je deviendrai la reine de Sylvania parce que je veux aider ces gens à vivre mieux, nous vivrons mieux, tous ensemble. C'est pour ça que je me bats et rien d'autre.

- C'est cela ta détermination ? lui cria-t-il le sourire aux lèvres.

- Ouais.

- Très bien...

Le Héros s'écarta de la fée et se craqua le cou.

- Voyons voir où tu mèneras cette courageuse détermination fixée, Avelinélia... Si tu ne me vaincs pas, je tuerai tous les habitants des Basfonds.

Pendant ce temps, sur son chemin, Lelelitio trouva Sawyer et Morvian qui trimbalaient un cadavre.

- Où tu vas comme ça ?

- Et vous ? Vous n'étiez pas censé arrêter les fanatiques qui tuaient des enfants ? leur rétorqua Lelelitio.

- Hé bien comme tu peux le voir on a eu leur chef, lui répondit Morvian.

Lelelitio reconnut la marque sur le torse du cadavre, il l'avait bien vu lorsqu'ils étaient partis espionner le lieu de culte de ces fous, mais il ne pouvait reconnaître Globox puisque son cadavre avait été dépossédé de toute appartenance distinctive pour n'être qu'un vulgaire et ignoble monstre, à l'image de ses actes odieux.

- Là, on se rend auprès des autres personnes liées à l'assaut. Mais toi, tu n'as toujours pas répondu ? Pourquoi cette course effrénée en direction de Haute-ville ? Tu t'es trouvé un billet pour assister au combat de ta princesse ?

- Non, mais je dois y aller ! Elle a besoin de moi ! Vous qui avez le pouvoir de téléportation, vous pouvez m'y amener, non ?

- Cela aurait pu être le cas si je n'étais pas épuisé comme maintenant, se justifia Sawyer, mais je dois sûrement pouvoir te faire rentrer dans le stade. Morvi amène-le aux autres, je m'occupe du gosse.

- Ça marche, chef.

Encore une fois, le chevalier et le servant repartaient à la poursuite de la princesse en danger qui à ce moment précis avait plus que besoin de son aide.

Le Héros avait décidé de se battre à main nue et ses coups se faisaient de plus en plus violents contre la princesse. Elle bloquait les attaques de celui-ci qui étaient d'une pression ahurissante, capables de déformer son bouclier, puis il enchaîna avec un coup de talon retourné propulsé qui fit ployer le genou de Malalalivia. La résistance de la fée était mise à rude épreuve face à ce sauvageon. Il ne lui laissait aucun moment de répit, à peine s'était-elle redressée qu'elle subit un revers du talon dans les côtes qui la projeta sur le sable brulant de l'arène.

L'amphithéâtre de l'arène était méconnaissable, cela ressemblait plus à un terrain de guerre miniature qu'à un véritable lieu de combat : des bouts de rochers de partout, du verre brisé, des cailloux juste au-dessus de la tête des spectateurs... Nalo et Avelilinélia se battaient avec toute leur vigueur mais malheureusement pour la princesse, le Héros la désarçonna en lui disant qu'il exterminerait tous les Basfonds si elle perdait. Au début, elle ne le pensait pas sérieux, mais ses yeux rougeoyants et son air austère semblaient indiquer tout le contraire.

La peur se remit à reprendre le dessus dans l'esprit de la princesse des Basfonds.

Le fait d'imaginer perdre et condamner les Basfonds à une extermination de masse la fit devenir livide. Le Héros paraissait très au sérieux au sujet sa menace, et elle savait que les gardes de Sylvania ne feraient rien puisqu'ils n'avaient rien fait lorsqu'une centaine de fées des Basfonds allait se faire kidnapper.

Sawyer et Lelelitio arrivèrent au stade plus rapidement que prévu grâce aux raccourcis que connaissait le chevalier et se retrouvèrent devant la grande entrée de l'arène « côté spectateur », bloqués par deux gardes.

- Vous vous foutez de moi ? demanda Sawyer, comment ça vous ne nous laissez pas entrer ? Je n'aime pas user de ce genre de phrase, mais savez-vous à qui vous vous adressez aussi imprudemment ?

- Nous le savons Saint Sawyer mais nous ne pouvons vous laisser entrer avec ce crasseux garçon.

- Même s'il m'accompagne ?

- Même s'il vous accompagne. La loi est immuable et inviolable.

- Je vais t'en donner des lois immuables et inviolables, ronchonna Sawyer.

Alors que le Saint de la Reine se disputait avec les deux gardes, Lelelitio s'éclipsa quelques secondes, le temps d'activer son sort Silencio et de se faufiler derrière les gardes. Une fois à l'intérieur, il fit signe à Sawyer que c'était bon et partit trouver l'entrée des sièges spectateurs. Sawyer leurra encore quelques minutes les gardes le temps que Lelelitio ne soit plus vu.

Dans le stade, le Héros se calma avant de s'avancer lentement vers son adversaire.

- C'est bien d'être déterminé, d'être motivé, mais maintenant, il faut prouver que tout ça, c'est pas que des chimères. Si tu doutes de ma menace, rappelle-toi de ce que Tadzi a dit à mon propos et tu sauras au fond de toi que je suis sérieux.

- Pourquoi ?

- Tu penses réellement que je vais te laisser te battre sans entraves ? se gaussa Nalo, les héros ont tant de choses à protéger... Crois-tu que de là-haut nous avons une belle vue ? Il n'y a que dans le cœur des « croyants » que nous sommes sur un piédestal alors que comme eux nous prions nos dieux pour la bonne réussite de la mission qui nous a été conférée. Nous voyons juste les gens que nous avons été et que nous sommes encore incapables de protéger les nôtres et le monde, et malgré toute notre détermination, cela ne changea rien puisque le ciel est encore noir. Alors si tu veux devenir l'héroïne, il faut que tu prennes conscience, en cet instant, de cette épée de Damoclès qu'il y a et qu'il y aura toujours au-dessus de ta tête.

La fée se releva une nouvelle fois, mais encaissa aussi une nouvelle salve de coups de la part du Héros qui finit par briser la protection de Malalalivia en mille morceaux. Bien qu'elle ait réussie à aller au-delà de ses capacités actuelles et user de la magie de classe maîtrisée, cela n'était toujours pas suffisant pour battre le Héros, car elle était épuisée par les attaques incessantes et destructrices de ce dernier.

Je ne crois pas pouvoir aller plus loin, se lamenta Avelilinélia, il est un mur infranchissable que je ne saurai dépasser. Désolée, maman et maman Malalalivia, je n'ai pas su maintenir ma promesse.

- Si c'est tout ce que tu peux offrir, autant en finir immédiatement avec tes vieilles promesses et ta vieille détermination ! lui hurla le Héros.

Et alors que le Héros allait la mettre hors-jeu, il reçut un coup inattendu sorti de nulle part dans la joue qui l'étala au sol. A l'écoute de l'impact du coup, la princesse Avelilinélia releva les yeux et vit Lelelitio debout, devant elle, après la droite qu'il avait mise au Héros. Il avait sauté depuis les loges princières – il avait réussi à se perdre alors que c'était le lieu où il s'entraînait auparavant avec la reine et Sawyer – pour se jeter dans la bataille et protéger sa princesse. César allait appeler les gardes et sonner la disqualification d'Avelilinélia lorsque Audisélia et le Héros lui dirent de laisser faire.

- Sale gamin puéril ! l'injuria Lelelitio, pour qui te prends-tu pour remettre la détermination de notre princesse à tous dans les Basfonds ? Non seulement tu ne sais rien mais en plus tu prends tes grands airs comme si tu avais tous les droits.

Le Héros se releva tranquillement en dépoussiérant son bas déchiré et son corps meurtri puis se tourna vers son interlocuteur.

- Parce que je mens peut-être ? rit le Héros de façon ironique avec un rictus en coin.

- Ouais.

- Alors, vérifions ça ici et maintenant avec toi pour exemple.

Nalo s'élança vers lui et lui asséna un coup de poing dans le ventre qui le fit reculer de quelques pas, avant que le Héros poursuive son attaque avec un enchainement de coups de poings tout en le gardant près de lui, écrasant son pied sur le sien.

La princesse était impuissante devant le déchaînement de violence auquel s'adonna le Héros.

- Arrête-toi..., supplia la princesse, arrête-toi...

- Non ! refusa l'elfe, je ne te laisserai pas t'en prendre à ma princesse impunément. Elle est le joyau des Basfonds, parmi toutes les ordures qu'on peut y trouver, elle est la chose la plus resplendissante, la plus adorable, la plus belle qui s'y trouve et je ne te laisserai pas l'abimer alors qu'elle incarne tous nos espoirs et rêves.

- Ah bon ? pouffa le Héros.

- Oui !

Avelilinélia tenta de se relever, mais ses membres cédèrent sous son poids. Elle avait enduré trop de dégâts pour ne rien ressentir, ou pour que son corps ne lâche pas sous les assauts du Héros.

- Abruti d'elfe ! Lelelitio, arrête-toi, il est trop fort pour toi...

- Alors lève-toi au lieu de faire la morte ! lui hurla Lelelitio en encaissant les coups du Héros et tentant de lui rendre coups pour coups de façon inefficace, tu agis comme si ce combat était digne des enfers alors qu'on a vécu bien pire et qu'on a affronté bien pire ! Ce n'est pas un gamin humain prépubère de quinze ans qui va y changer quoi que ce soit ! Si je suis venu, c'est bien parce que je m'inquiète et que j'ai honte de ne pas accomplir mon devoir correctement à cause de ma faiblesse que ça soit aujourd'hui ou le jour où tu t'es fait arracher les ailes. Alors, relève-toi pour toutes les voix qui te supportent depuis les Basfonds.

Avelilinélia, par l'intermédiaire de la reine, put entendre toutes les personnes pour qui elle se battait, l'appeler, l'encourager à continuer le combat à travers les différents noms et surnoms dont ils l'avaient affublé.

Lelelitio esquiva avec agilité l'un des coups précis du Héros, profitant de l'ouverture pour lui décocher un violent coup de poing directement à la mâchoire. Cependant, malgré cette riposte inattendue, le Héros, doté d'une perception aiguisée, remarqua bien plus d'opportunités chez son adversaire que chez sa maîtresse. L'observation de l'inaptitude de Lelelitio au combat lui donnait l'illusion que le temps s'étirait, comme s'il voyait chaque mouvement au ralenti, lui permettant ainsi de prévoir les prochains gestes de Lelelitio. Il contra le coup de l'elfe et lui rendit par un violent coup de poing dans l'abdomen faisant cracher ses tripes au servant de la princesse Grave.

- Je t'en supplie... arrête...

- Le Némésis ne s'est pas arrêté lorsqu'il réduisit mon village en cendres ! Lorsqu'il tua ma mère ! Il ne s'est pas arrêté pour tous les crimes qu'il a commis envers la population de cette planète et les autres héros ! Me supplier ne changera rien, Avelinélia. Concernant Lelelitio, aucune règle ne m'interdit de tuer ici et maintenant un habitant des Basfonds. Alors, autant en profiter.

Avelilinélia vit au ralenti le coup de poing fatal qu'allait donner le Héros sur son servant, sur son ami. Elle allait une nouvelle fois finir seule, elle... elle se devait d'agir, ici et maintenant. Alors que le Héros comptait terminer son matraquage fictif – il lui donnait de réels coups, mais n'allait en aucun cas le tuer ! Il n'a pas été élevé comme ça, messieurs, mesdames –, la fée aptère des Basfonds se dressa face au Héros et reçut l'attaque à la place de son servant elfe en plein front. Le Héros ne l'avait absolument pas vue venir, sa rapidité d'action était surprenante. De tout le combat, elle n'avait jamais été aussi rapide. Le front de la fée se mit à ruisseler de sang, coulant sur le poing du Héros, de s'égoutter sur le menton de la princesse et sur les phalanges de l'humain.

- Qu'est-ce qui te donne le droit de t'en prendre à Lelelitio, hein ?

La peur d'Avelilinélia avait disparu fut échangée au détriment de perdre l'être le plus cher qui lui restait. Devant la fureur de la fée-combattante, l'Homme retira son poing de son front et eut un pas de recul, puis deux, puis trois... Il avait vraiment réussi à la mettre en rogne.

La fée chargea le Héros en lâchant sa double lance, et lui rendit coup pour coup ce qu'il avait osé donner à son ami et à elle-même. Le Héros ne pouvait que les encaisser en mettant ses bras en croix et en plissant les yeux devant la surcharge d'attaques de la prétendante au trône. Ce qui fit qu'il ne la vit pas voler à ses pieds, lui attraper la jambe et le jeter comme un vieux sac poubelle contre la barrière protectrice de la reine. La projection fut si violente qu'une partie de la barrière céda et se brisa sous le poids – ? – du Héros. Elle se retourna vers Lelelitio et lui dit de marcher vers elle puis elle le saisit, elle le renvoya dans les gradins princiers. A peine l'avait-elle installé là-bas que des gardes vinrent pour s'en saisir, mais lui n'avait pas remarqué leur venue mais la Fée prit sa défense en mentant qu'il était son invité.

- Nous savons tous que vous mentez.

- Prouvez-le, leur rétorqua-t-elle.

Les gardes ne pouvaient que ronger leur frein puisque ce n'était pas deux gardes minables qui allaient remettre en question la parole d'une princesse issue de Java-Aleim.

- Ce n'est pas en prenant sa défense que tu vas te racheter auprès de ton protecteur, souligna Mananélia d'un ton railleur.

La Fée ne répondit pas et se rassit.

Durant ce court laps de temps, Lelelitio continuait à soutenir, seul, celle qu'il aurait voulu protéger. Tous les citoyens de Haute-ville le fixèrent, l'observant hurler à corps et à cris son soutien à Avelilinélia, les champions le raillaient d'être incapable de protéger sa princesse, les princesses se moquaient ouvertement de lui et ces moqueries s'étendirent à toute la foule, jusqu'aux dignitaires étrangers. Mais l'elfe n'en avait rien à faire, il continuait à la soutenir contre vents et marées.

- Bats-le ! Et rentrons festoyer de ta victoire à la maison avec les autres, reine Avelilinélia ! l'exhorta-t-il.

La foule éclata de rire encore plus fort.

- BIEN ÉVIDEMMENT ! lui répondit aussi violemment Avelilinélia.

L'énergie avec laquelle cette phrase était sortie de la bouche de la princesse fit taire tous les médisants et tous les moqueurs

L'énergie avec laquelle cette phrase était sortie de la bouche de la princesse fit taire tous les médisants et tous les moqueurs. Même la reine était époustouflée par la force de la voix de sa protégée. Avelilinélia était métamorphosée : la fille qui craignait d'être impuissante face à sa faiblesse, aux insultes et aux railleries démontrait là une puissance renouvelée. Jusqu'à l'extérieur du royaume son cri résonnait. Dans les Basfonds, leur volonté de voir Avelilinélia gagner fut revigorée.

Le Héros qui avait été sonné par l'attaque surprise de la princesse-fée fut réveillé par le cri de son adversaire. Il s'était attendu à une riposte de sa part, mais pas aussi violente ! On aurait dit que sa force avait doublé... non, elle avait été décuplée ! Pourtant, il ne l'avait pas vue user d'un quelconque renforcement fortifiant magique, et penser qu'elle débloqua un quelconque boost de puissance à cause de l'énervement relevait de la fiction. Non. Il s'agissait simplement de la confirmation des doutes du Héros : consciemment ou inconsciemment, Avelilinélia s'était retenue tout le combat. Il se souvenait du fait qu'elle avait arrêté son coup lors de la fête organisée par la reine, elle s'était peut-être aidée du coup de l'opposant du Héros, mais si elle n'était pas forte, elle serait devenue une crêpe fromagère à la viande.

Nalo essaya de se relever mais à chaque fois qu'il poussait avec son bras droit, son membre poussait dans le sens inverse, il guetta ce qui lui arrivait et découvrit que son bras droit était retourné. Il aurait pu l'arracher pour en régénérer un autre, mais étant donné qu'Avelilinélia était « déchainée », ou plutôt, allait se battre sans retenue, il ne pouvait s'affaiblir « inutilement ». Le Héros tenta ce qu'il essayait à l'hôpital avec l'aide des médecins : manipuler sa régénération pour remettre ses membres à l'endroit. La majorité de ces tests étaient infructueux, mais en ce jour, il se devait de réussir. Il concentra ce pouvoir qu'il avait en lui et fit tournoyer son bras dans un sens jusqu'à que son bras se remette à l'endroit. Il serra le poing et vit que ses nerfs et ses muscles fonctionnaient correctement.

Subséquemment, il put se relever et se confronter à la princesse.

Il ne s'était pas senti aussi poussé dans ses retranchements depuis longtemps. Peut-être depuis son affrontement avec la reine, voire depuis son premier combat contre Némésis Prime. Son sang bouillonnait, imprégné d'adrénaline, et une furieuse envie de tester la force d'Avelilinélia le saisit. Comme à chaque fois qu'il ressentait cette excitation au combat, son corps se mit à émettre de la vapeur alors que son esprit se conditionnait à se surpasser pour vaincre son adversaire. Pourtant, pour la première fois, contrairement aux autres occasions, cette montée en puissance se produisit avant même le début du combat – même s'il avait déjà commencé, comme s'il considérait les instants précédents comme un simple échauffement. Quoi qu'il en soit, cela signifiait que le Héros devenait sérieux, et cette tension était palpable pour tous les présents.

Il sortit du mur et s'avança vers son opposante en se craquant une nouvelle fois le cou.

- Qu'est-ce que toute cette vapeur ? lui demanda Avelilinélia.

- Rien de bien important, lui répondit le Héros, juste la conséquence de l'une de mes innombrables maladies chroniques.

Roh, l'abuseur ! Il n'en a qu'une liée à son attribut génétique inconnue.

La fée se mit en garde l'avertissant que le combat allait reprendre dès qu'il serait prêt.

Quel fair-play ! se moqua le Héros.

Elle semblait vouloir un combat à main nue alors il lui laissa ce privilège de choisir les armes. Dès qu'ils furent tous les deux prêts à reprendre le combat, tous les deux s'élancèrent dans une violente bataille à coups de poings et de pieds. Cependant, à contrario que ce que c'était imaginé le Héros, la princesse n'avait jamais dit qu'elle n'userait que de son corps pour le combattre : la polyvalence du sable était bien trop opportune pour ne pas en user et abuser. Ayant atteint la magie maîtrisée, elle pouvait donner différentes formes au sable jusqu'à lui redonner sa forme rocheuse.

Alors que le Héros avait fait un grand saut pour esquiver l'un des coups d'Avelilinélia et qu'il allait retomber, celle-ci créa un bloc de pique en roche sous lui. Il activa ses podo-propulseurs et s'envola mais il devenait une cible facile pour la princesse qui pouvait combiner ses pouvoirs vectoriels avec sa magie du sable et de la roche qui rendant toutes ses attaques imprévisibles. Esquiver les jets de sables compressés devenait difficiles mais si en plus à travers ces jets, elle pouvait lui tirer dessus des jets de boules de sables à haute densité, cela rendait toute esquive incongrue.

La seule solution pour lui était la plus simple de toute : l'attaque. Et cela, Avelilinélia le savait bien et connaissant la force du Héros qui pouvait déchirer le corps d'un Fenrir à main nue, il n'y avait aucun doute qu'il pouvait éclater ses jets de sables, alors autant l'affronter sur un terrain où elle avait l'avantage par rapport étant une fée : les airs !

S'éclaboussant de sables, les oreilles trop concentrées sur la magie de son adversaire, le Héros ne perçut pas son arrivée dans les airs et reçut un violent coup de pied dans le ventre, malheureusement pour elle, le Héros réussit à saisir sa jambe et la renvoya loin de lui. Il la poursuivit, mais celle-ci esquiva aisément ses assauts. Malgré ses deux mois d'entraînements, le Héros ne pouvait rivaliser avec un être volant malgré sa perte d'ailes. Il lui envoya une salve de boules de feu qu'elle arrêta une par une pour les renvoyer toutes en même temps, il contourna la pluie de flammes et tenta de lui mettre un coup de pied à la tête qu'elle bloqua avec son bras.

Mais il eut ce qu'il voulait : se rapprocher d'elle.

C'est là que débuta un véritable bras de fer entre les deux combattants, elle pouvait voler autant qu'elle le voulait avec son pouvoir vectoriel, elle ne pouvait pas réchapper au Héros qui ne comptait pas la lâcher. Alors elle alla dans son sens, s'il voulait la jouer brutal alors elle aussi allait se mettre à son niveau.

Elle esquiva l'une de ses attaques puis le frappa avant un furieux coup de pied dans le ventre dont la force était démultipliée grâce à son pouvoir vectoriel, le pliant en deux. Elle l'envoya dans les airs, puis le suivit, arriva avant dans le ciel et lui asséna un coup avec les mains jointes qui le renvoya au sol et avant qu'il y arrive, elle le réceptionna en lui enfonçant son poing dans la poitrine. Malheureusement, ce dernier coup, le Héros l'a vu venir et l'arrêta à la dernière seconde, elle sentit ses propres phalanges s'enfoncer dans la paume de ce dernier.

Tenant fermement son bras, il la fit pivoter et lui infligea un coup de coude agressif descendant dans le bras. Elle parvint à se libérer de son emprise en lui assénant un coup de tête, profitant de son désarroi pour lancer son sort qui rendit ses poings aussi solides que le fer, et elle le frappa d'un crochet du gauche dévastateur. En moins d'une seconde à peine, le Héros lui répliqua avec un crochet du droit tout aussi puissant. C'est à ce moment précis que les deux adversaires se retrouvèrent au sol, s'engageant dans une série de coups fulgurants.

Avelilinélia lui décocha un coup de poing descendant, que le Héros esquiva en inclinant sa tête sur le côté. Il tenta alors un coup direct, mais la fée pivota sur elle-même, lui adressant un revers de poing en pleine face alors qu'elle lui tournait le dos. Le héros de la légende fit un léger mouvement de recul, puis revint à l'attaque avec un coup de poing sauté. Avelilinélia contra en frappant dans son poing, puis renvoya l'impact de son coup grâce à un vecteur inverse, blessant le bras du Héros qui se régénéra immédiatement par réflexe.

Mais cela n'allait pas le stopper. Il se rua de nouveau vers la princesse, qui fit de même, et tous deux s'affrontèrent dans un barrage de coups de poing saisissant, remplissant l'air de l'arène de l'écho de leurs échanges de coups.

Le public était sceptique sur ce qu'il observait, de tous les combats auquel ils avaient pu assister, il était bien le seul où on pouvait assister un déchainement de violence et une dextérité aussi grande qui n'était pas unilatéral. Les tactiques, mises en place par les deux combattants pour défaire leur adversaire, étaient saisissantes. Personne n'aurait parié un copeck sur la fée aptère des Basfonds et pourtant, là, à dix heures vingt-six du matin, ils étaient face à un véritable miracle.

Qu'ils soient des Basfonds, de Haute-ville, du Sanctuaire ou habitant à Java-Aleim, tous étaient subjugués par ce combat ou scotchés à leur écran face à la possibilité que le Héros puisse perdre.

Que ça soit la férocité de l'envie de victoire de la princesse et l'excitation du combat qui envahissait le corps du champion, ces émotions étaient transmises à tous.

Les enfants dans les Basfonds ne juraient que par le nom d'Avelilinélia et s'autoconvainquaient de sa victoire absolue : « Elle ne peut pas perdre, c'est Livia, après tout ! », « Dame Malalalivia est trop forte pour perdre contre un humain ! », même les gazouillis du bébé dont s'occupait Lelelitio étaient en faveur d'Avelilinélia.

D'autres spectateurs se joignirent aux gens du Basfonds, ce n'était autre que le groupe d'invasion de la planque de la secte de Marrynélia qui s'installèrent avec les pauvres gens des Basfonds. Épuisés, aucun d'eux n'avait la force de monter jusqu'en haut pour assister bien chez-soi ou dans l'arène au plus grand combat de tout Sylvania. Ils furent bien accueillis et bien installés avec les nécessiteux. Min et Mina s'installèrent avec le groupe des enfants car tous les sièges pour adulte étaient pris.

- Monsieur, vous êtes pour qui ? demanda un enfant à Min.

- Pour le garçon.

Tous les enfants se tournèrent vers lui et Mina le railla en sifflant.

- Tu t'attendais à quoi ? C'est la fée sans ailes des Basfonds qui est leur mascotte ici.

- Malalalivia est pas une mascotte ! s'interposa une petite fille.

- Du calme ! Je disais pas ça méchamment, dit-elle avec un sourire en coin.

- Les enfants, arrêtez d'embêter nos invités, intervint Cassandre, ces jeunes gens font partie des sauveurs des Basfonds. Ceux qui ont combattu les ravisseurs des Basfonds et vous ont sauvé la vie.

Les enfants vinrent alors entourer Mina et Min, les étoiles plein les yeux.

- Vous les avez vraiment battus ?

- Un p'tit peu qu'on les a battus, se vanta Min, on a même sauvé l'un de nos amis.

- Incroyable, dirent-ils à l'unisson.

- Mais ça change pas que Malalalivia reste la meilleure et qu'elle va gagner ! reprécisa le premier garçon.

Il m'a l'air d'avoir raison, pensa Mina, le champion de Princesse est en bien mauvaise posture.

C'est sur un cross-counter que le Héros perdit le contrôle : son corps, trop éprouvé, se sentait trop bien acculé. Il lui fallait requérir à sa pleine puissance pour se confronter à Avelilinélia. Alors, dans un geste instinctif, le corps du Héros brisa la moitié du sceau qui retenait sa puissance héroïque et celle de sa malédiction. Des éclairs violets, sans électricité, jaillirent du sceau qui se désagrégeait. Mais cela ne fit pas reculer la fée qui combattait avec encore plus de hargne en sentant que le Héros gagnait en force.

Sous les assauts du Héros, elle n'entendait que cette phrase répétée sans cesse : « Dépasse-toi ! Dépasse tes limites ! Tu es en train d'accomplir l'impossible, gamine ! ». Ces mots, amplifiés par les encouragements qu'elle percevait dans son esprit, la poussaient à donner le meilleur d'elle-même, à repousser ses propres limites dans un combat d'une intensité hors du commun.

Avelilinélia repoussa le Héros à distance d'elle, réalisant que les simples coups de poing ne suffiraient pas. Dans un geste de magnétisme, il appela son épée à lui, la préparant pour un nouvel assaut. La fée, de son côté, créa un petit monticule sous ses pieds, se préparant également pour le prochain affrontement.

Le Héros eut une révélation en observant le geste de la princesse. Il associa cette information à d'autres détails qu'il avait remarqués au cours du combat : elle ne pouvait utiliser son pouvoir vectoriel que sur des objets ou des êtres vivants en mouvement. De plus, elle ne pouvait l'appliquer que sur un système à la fois, peu importe sa vitesse. Selon la puissance ou le poids du système, son pouvoir mettrait plus ou moins de temps à s'activer.

Cependant, malgré ces limitations, la fée parvenait à les contourner avec une habileté déconcertante. Son intelligence et sa magie lui permettaient de pallier ces défauts, tout comme son corps athlétique lui offrait une agilité sans pareille. Le Héros comprit alors l'ampleur de son défi : s'il voulait la vaincre, il devait redoubler de vitesse et de stratégie.

Chaque mouvement devenait crucial dans ce combat intense. Plus le Héros retrouvait sa force héroïque, plus le retour d'impact serait violent. De plus, elle avait la capacité d'amplifier ce retour d'impact avec son pouvoir, créant un défi supplémentaire. Cette réalisation le poussait à se surpasser encore davantage, conscient que chaque seconde pouvait changer le cours du combat.

- Finissons-en.

Tous les deux s'élancèrent à corps perdu dans une bataille qui fit résonner et étinceler le fer de leurs armes. L'épée du Héros virevoltait, voltigeait, tournoyait, cherchant à percer les défenses de la princesse. De son côté, la double lance d'Avelilinélia s'efforçait de percer la garde du Héros.

Dans un mouvement rapide et habile, le Héros tenta une frappe latérale, mais la fée l'arrêta net avec son pouvoir vectoriel, retournant l'attaque à l'envoyeur. Cela offrit au Héros une ouverture pour tenter un coup de poing avec son bras libre, se laissant emporter par le mouvement de contre d'Avelilinélia. Cependant, elle anticipa son mouvement, attrapant son bras et le projetant loin d'elle d'un geste puissant.

De retour sur pied, il fonça sur elle à la vitesse de l'éclair mais elle généra une nouvelle fois des rochers pour gêner sa course mais cette fois-ci le Héros arrivait à s'arrêter avant de percuter un rocher. Il atterrit sur le rocher à l'aide de griffes qui n'étaient plus au dos de sa main mais sur le bout de ses doigts et s'y agrippa, puis s'écarta de son opposante. Ce petit interlude permit aux deux d'examiner l'état de l'un et de l'autre, tous els deux se tournant autour, avec ce rocher au milieu d'eux.

Avelilinélia voyait que le Héros devenait de plus en plus fort, mais elle percevait qu'au fil du combat, bien que ses capacités soient hors du commun et qu'ils supportaient assez bien la douleur, son endurance s'amenuisait. Ressentir autant devait énormément jouer sur son physique. Et cette vapeur qui s'échappait de lui était aussi le signe de sa fatigue puisque plus le combat avançait, plus elle était visible – ou bien était-ce relié à sa force ? Elle n'avait pas vraiment le temps de pouvoir douter. Si, malgré sa force, la reine a réussi à le mettre inconscient, alors elle aussi le pourra.

Bel esprit, commenta la reine.

Le Héros percevait aussi la fatigue de sa concurrente et selon ce qu'il avait appris de son pouvoir, son prochain coup ne subirait pas de déflection mais il devrait le faire d'en haut pour s'assurer d'une victoire complète.

- Je pense qu'on en est venu à la même conclusion, Nalo, lui dit Avelilinélia, tu ne retrouveras pas toute ta force avant de t'évanouir.

- Ouaip, hocha-t-il la tête, et toi, tu tiens à peine sur tes jambes.

- Alors réglons ça, ici et maintenant !

- Va au-delà de toutes tes limites et montre-moi ce que tu vaux !

Le rocher commença lentement à se dissoudre, se réduisant en poussière sous l'effet du sort. Le Héros, saisissant l'opportunité, bondit sur un autre rocher en face de lui. De son gantelet gauche, il tira des lasers sur la princesse, puis se mit à courir à la verticale du bloc.

Avelilinélia, ne voulant pas le laisser s'échapper, s'enveloppa le bas du buste de sable pour le rattraper. Les deux combattants se propulsèrent dans les airs, mais le Héros se trouvait à une altitude supérieure. Il en profita alors pour déclencher une pluie de flammes et d'éclairs sur la princesse, espérant la submerger sous cette attaque intense.

Bien qu'Avelilinélia aurait pu dévier ou esquiver ces éléments, elle savait que chaque mouvement du Héros comptait, que c'était un combat où la moindre erreur pouvait être fatale. Alors, elle encaissa cette pluie infernale comme elle le pouvait, développant une sorte de bouclier vectoriel pour parer certaines des attaques qui pleuvaient sur elle.

Au sommet de l'arène, au moment où il perçut que la magie de la fée était juste bien alignée derrière lui, il actionna ses propulseurs pour se retourner et enjoignit une nouvelle fois ses mains pour charger cette même attaque que la fée avait dévié mais à un tout autre niveau. La foudre et les chaleurs qui émanaient des mains du Héros ravageaient tout le terrain, s'abattant contre le mur de protection et le fissurant – il restait tout de même le pouvoir de la reine Audisélia. Une énorme masse d'énergie s'accumula entre ses mains et il prononça ces mots :

- KA...ME...HA...

Avelilinélia, après avoir encaissé cette pluie de feu, fut prise au piège devant l'attaque du Héros, sa seule alternative n'était que de stopper cette attaque de toutes ses forces, mais épuisée, elle ne pouvait s'avouer vaincu... somme toute, c'est ce que j'aurai dit si le Héros ne venait pas de se faire duper par la princesse.

Le Héros fut saisi par l'expression sur le visage de la princesse, puis découvrit avec stupeur que son corps se désagrégeait, se transformant en poussière. Cette Avelilinélia n'était rien d'autre qu'un clone de sable coloré, semblable aux statues qu'elle offrait aux enfants des Basfonds. Le Héros réalisa qu'il avait été trompé, mais il était trop tard. La véritable Avelilinélia, encore électrisée par les éclairs que le garçon lui avait envoyé et qui jaillissaient de son corps, et son armure, ses vêtements, ses cheveux et sa peau calcinés par les flammes, était juste derrière lui.

Il ne put que tourner la tête pour la voir préparer son coup de poing le plus puissant. Son regard améthyste perçant, ses cheveux roses et bleus flottant dans les cieux, les muscles de son bras tendus à l'extrême, les veines gonflées à leur paroxysme, témoignant de l'intense circulation sanguine qui irriguait son corps.

En un instant, il comprit qu'il venait d'être défait, que cette dernière attaque serait celle qui le vaincrait. Le Héros se retrouva figé, impuissant face à la puissance déployée par Avelilinélia.

- Aujourd'hui, je ne serai pas seulement l'héroïne des Basfonds, mais aussi celle de tout Sylvania ! déclara-t-elle avec courage.

La princesse, serrant les dents avec une détermination féroce, décocha un direct du droit d'une force phénoménale dans la mâchoire du Héros. Ce coup était amplifié par son attribut génétique, ajoutant une puissance dévastatrice à l'impact !

Le Héros tenta de résister à la descente du poing d'Audisélia en utilisant ses propulseurs, mais même ces gants renforcés n'étaient pas suffisants contre la force surhumaine de la princesse. Audisélia, positionnée en hauteur, avait clairement l'avantage, dominant la confrontation de sa présence imposante.

Finalement, il allait être vaincu même en ayant récupéré une partie de sa force héroïque.

N'était-ce pas la preuve qu'elle était toute désignée à être le héros de la légende ? Elle avait le soutien de toutes les personnes à qui elles tenaient, qui l'encourageaient, qui criaient son nom... Lui était seul face à son destin. En définitive, comme sa mère et les autres prédécesseurs, ils n'avaient été que des vaisseaux vers celle qui deviendrait véritablement l'héroïne de la légende. C'était sûrement cette immense solitude que devait ressentir les autres héros...

« Bats-toi ! » entendait-il. « Bats-toi ! ».

Ces cris, ça devait être sa princesse qui lui hurlait de continuer à se battre pour qu'elle obtienne ses ailes.

Je suis désolé, gamine, je ne pourrai pas exaucer ton sou...

- ­Tu n'es absolument pas seul ! Si tu te crois seul, alors je suis quoi moi ? lui cria-t-elle, n'abandonne pas ! Ne m'abandonne pas !

Avait-elle entendu ses pensées ? La reine lui avait-elle envoyé ? C'est vrai qu'il l'avait elle, cette gamine insupportable, égoïste, au comportement absurde et indécent, qui pouvait parler comme un charretier, mais à la candeur et la bonté si douce comme de la barbe à papa. Mais avait-il la force de continuer ?

- La force de continuer à me traquer ? lui demanda le Némésis en pensée.

A l'entente de ces paroles, c'était comme si le temps s'était arrêté. Il percevait cette énergie maléfique qui l'entourait, ce regard ténébreux qui le fixait de nulle part et de partout à la fois. Où se cachait-elle ?

- On dirait que non, se désola faussement l'ennemi juré du Héros, tous nos échanges, nos combats, nos insultes pour que tu finisses par confier la Volonté à une lépreuse, ricana-t-il, c'est elle qui va venger ta mère l'incapable ou retrouver Zelda ? Tout ça à cause de ta faiblesse ? Je ne m'attendais presque à rien de toi mais je suis quand même déçu.

- Roh ! Toi..., lui répondit-il la bouche close.

- Si tu as quelque chose à me dire, gagne et viens me retrouver, vil chenapan !

Cette pause temporelle prit fin et la victoire d'Avelilinélia semblait imminente. Mais ragaillardi par l'intervention de Némésis, qui l'avait plongé dans une haine féroce, le Héros agit avec une détermination sans précédent. Il saisit le bras de la fée, et elle sentit son pouvoir vectoriel disparaître au simple contact du Héros. Cette soudaine perte de contrôle surprit Avelilinélia, permettant ainsi au Héros de prendre le dessus.

Dans un mouvement puissant, le Héros se propulsa vers le sol, entraînant la fée avec lui dans une chute vertigineuse. Leurs corps se heurtèrent violemment, créant un immense nuage de poussière qui enveloppa l'arène.

Une fois le sable retombé, le public put enfin découvrir le vainqueur des demi-finales du tournoi de succession : le champion de la princesse Fée-Sans-Nom-Et-Sans-Ailes, Nalo !

Ils les avaient peut-être insultés, mais les spectateurs ne purent qu'applaudir devant la performance des deux participants, ils crièrent de joie d'avoir assisté à un tel match. Le Héros, au-dessus du corps de la princesse, lui maintenant le visage au sol et lui tenant le bras, n'était pas autant jouasse que la foule en délire.

Avelilinélia se mit à sangloter.

- Tu avais gagné, Aveline..., dit le Héros d'une voix dépitée, tu avais gagné...

Il se releva et partit en direction des loges princières. Bien qu'il soit acclamé, il ne semblait nullement en joie d'avoir gagné. Il rejoignit sa fée, elle voulut sauter dans ses bras mais il la repoussa, il lui chuchota :

- Je t'ai fait gagner donc t'as intérêt à faire quelque chose pour les Basfonds.

Elle hocha vivement la tête, à la fois consterné par le comportement de son héros et la joie de pouvoir accédé à la finale des princesses.

Alors, il lui tapota l'épaule puis s'en alla sans adresser un regard à qui que ce soit malgré leurs félicitations.

Dans les couloirs de l'arène, hors d'atteinte de la lumière des torches ou des gastéropodes bioluminescents, il s'assit au sol et se tint la tête.

- Pourquoi avoir fait de moi le héros alors que je ne mérite rien, maman ?

Quelle mère laisserait mourir son fils face à elle, idiot...

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire ImaginaryFlame ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0