Chapitre 5 : Une colocation d'urgence

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Elisa 

Alors que cela ne fait que quinze minutes qu'il est venu me prévenir qu'on l'avait convoqué, Marvyn sort du bureau. Un simple sourire s'affiche sur ses lèvres. Lorsque nos regards se croisent, mon corps est pris de secousses. Alors que je dévie mon attention, je remarque une femme au fond, un carnet à la main. Les battements de mon cœur ne se synchronisent plus au rythme habituel, provoquant ainsi l'irrégularité de ma respiration.

Elle.

Quand ses yeux commencent à me scruter, je sens la menace, que mon pseudo-petit ami ignore, alourdir le poids qui pèse sur mes épaules. Un grand sourire s'affiche sur son visage, elle fait un petit geste au niveau de la main en guise de salutation. Imperceptible aux yeux de tous, flagrants pour les miens.

« Si tu dévoiles le petit secret qui concerne ton père et moi, je te tue Élisa. »
« Tu as intérêt de garder cette conversation entre nous. » 

Ma gorge se serre, devenant si soudainement déshydratée. Je me sens aspiré, revenant à une partie de ma vie que j'aimerais oublier à tout jamais.

*** 

Je marche, toute heureuse, après la journée que j'ai vécue.

Père à enfin accepter que j'aille chez mon amie Jordana !

Je suis partie une demi-heure plus tôt de chez elle, totalement épuiser par les activités que nous avons faites. Je sais que j'aurai dû prévenir père, mais pour une fois que je peux ne pas me conformer à ses règles, je ne vais pas dire non. Il est dix-sept heures seulement, et pourtant la nuit commence à tomber.

L'hiver s'est installé.

Une fois arriver devant ma maison, je remarque une deuxième voiture garer devant chez moi.

Mère n'est pas encore rentrée.

Puis je me rends compte de ce que je venais de penser. Une tristesse m'envahit, mais je ne la permets pas de rester longtemps et la vire, afin qu'elle parte hors de moi. Je sens mon cœur battre à vive allure.

À croire que je viens de courir un marathon.

Je sors les clefs de ma poche et fais attention à ne pas faire de bruit en ouvrant la porte. Je rentre chez moi et remarque une autres paires de chaussures.

Des talons...
Ne me dites pas que...

J'enlève soigneusement mes baskets, pose mon sac, retire mon manteau et me dirige vers le couloir à ma droite, avec la peur et le besoin de savoir se mélange en moi. Aucune lumière n'est allumée. Je balaye du regard la fente en bas de chaque porte, quand j'aperçois une lueur rouge. Je m'approche à la pointe des pieds, plus ma progression se fait plus des bruits très bizarre surviennent à mon oreille. Une fois arriver devant la porte en question, je retiens mon souffle. Et d'un geste brusque, je l'ouvre, grande ouverte, et y rentre.

Je vois mon père en train d'embrasser une femme. Grande, les cheveux brun, bronzée, elle enlace sensuellement mon géniteur. La main de celui-ci se balade sur son dos, traçant, tout doucement, un chemin menant aux hanches de celle-ci. Je me pétrifie, incapable de bouger ni de hurler, les larmes me menaces et pourtant, je les retiens. Le peu d'espoir que, celle qui me donnait un peu d'amour dès qu'elle le pouvait, convainc mon père de changer, est anéantie. Le goût de la bille me monte à la gorge.

Comment peut-il faire ça à belle-mère ?

Ils se séparent soudainement, à croire qu'ils m'ont vue. La femme arrange ses cheveux, essaye d'enlever le rouge à lèvres étalé sur son visage et sourie. Quant à l'homme qui est censé aimer sa femme et non celle qui se tient devant moi, son visage reste impassible, conscient de l'emprise qu'il a sur moi.

- Comment vas-tu, demande hypocritement la femme ?

Une colère explose en moi.

Comment je vais ?
Comment je vais !
Elle se fout de ma gueule, j'espère !

Je ferme les yeux afin de contrôler les torrents qui se déchaînent en moi, puis les réouvrent, voyant toujours ce cauchemar se passer.

- Comment je vais ? Aussi bien que lorsque j'ai envie de gifler une pute qui se coltine un homme marier, réplique Élisa sanglante.

Mon interlocutrice ouvre la bouche grande ouverte, la colère se peint sur son visage. L'homme à ses côtés me scrute, surpris par cette nouvelle facette, qui n'as jamais connu auparavant.

- Qu'est-ce qui te prend Élisa ? Je t'ai connu plus calme.

Dépasser par la situation, guider par des sentiments que j'ai longtemps repoussés, des émotions provoquer par cet homme qui a failli tuer ma flamme intérieure, un rire cinglant m'échappe.

- « Paternelle », voici ce que tu es à présent pour moi. Père sur le papier et aux yeux de la loi, monstre pour moi et pour le restant de mes jours. Rentre-toi bien ça dans ton esprit.

Je dépose mon attention vers la salope au rouge à lèvres étalé sur le visage.

- Quant à vous, Chère Prostituée, allez vous taper d'autres hommes.

La rage l'envahie.

Je l'avais fait exprès de l'appeler comme ça, car cela signifie que je la considère comme une femme qui ne respecte pas son corps et qui était prête à vendre son corps pour de l'argent.

Bien que je suis consciente que la plupart des femmes qui font cela n'ont pas le choix.

Mais ce n'est pas son cas, les talons, le sac Versace posé sur la table, ses vêtements comme de ses bijoux, indiques qu'elle vient d'un milieu social bien aisée. Par conséquent, être traité ainsi est une insulte pour son ego, sûrement, surdimensionner.

Je fais deux pas en arrière et claque la porte sur elle. Je cours, récupère mes affaires et part dans la seule pièce qui est sécurisé, la chambre d'Axeïl, mon petit frère. Je monte en trombe. L'autre furie suivie de mon géniteur court derrière moi. Je rentre dans sa chambre et la referme à clef. Je me retourne et perçois les iris bleus polaires m'examiner.

Les mêmes qu'a mon père.

Cette pensée me dégoûte.

Faite, qu'il ne devient pas comme mon géniteur.

- Qu'est-ce que tu fais dans ma chambre ?

Je sors à contrecœur les chocolats que j'avais achetés pour moi et le lui tends.

C'est le seul moyen pour qu'il accepte que je me réfugie dans sa chambre.

- Je me disais que tu aimerais bien ça.

Un sourire s'illumine sur son visage, cela me gêne un peu, mais pas au point d'en être répugné. Il se lève, tout joyeux et prend la nourriture dans mes mains. Il me prend dans les bras, je me tends à son contact.

- Merci sœurette !

Je le regarde dans les yeux, surprise.

- Sœurette ?

- Bah oui. Tu es bien ma sœur, non ?

- Oui, je n'ai jamais dit le contraire, mais tu ne m'as jamais appelé par ce surnom-là.

- Disons qu'aujourd'hui, j'en ai envie !

Je le dévisage, septique.

C'est beaucoup trop soudain pour être vrai.

Nous n'avons jamais été proches. Alors pourquoi, si soudainement, il en vient à être affectueux en mon égard ?

- Mmh, si tu veux.

Je m'installe sur son lit, pendant qu'il continue à jouer dans son coin. Je commence à l'examiner et me rends compte avec horreur qu'il a déjà adopté certaines mimiques et gestes de notre père. Je regarde cette chambre, détaillant chaque recoin qui s'y trouve et me rend compte que des choses ont changé depuis la dernière fois que je suis venu ici.

Des livres sont disposés sur une bibliothèque. Les titres qui s'apparentent devant mes yeux, glace mon sang. Les mêmes ouvrages que mon père m'a jetés au visage, lors de ses moments « ​​​​​​​Père Fille ».

Bien qu'elles ont tourné en enfer à chaque fois.

« Je devrais t'attacher sur une chaise, les mains et les pieds lier pour que tu m'écoutes et que tu exécutes ce que je te demande ! » 

Ce qui ne m'a pas empêche de lui cracher toute ma salive à la gueule par ailleurs.

« La noirceur te fera trop souffrir, l'aise moi te faire découvrir ce qu'est la véritable lumière. » 

Il avait dit d'une voix tellement remplis d'amour, que je ne me suis pas posé de question et je l'avais suivi. Sans savoir que l'espoir que portait la petite fille, allait me conduire aux enfers. La bile qui me menace depuis tout à l'heure, s'accentue. Je serre les poings, essayant de me contrôler.

Quelqu'un frappe au niveau de la porte.

- Tout va bien, Axeïl ?

Ma belle-mère est rentrée.

- Oui !

- Tu sais où est ta sœur ?

Il ne prend pas la peine de me demander mon avis et répond :

- Oui, elle est avec moi.

Un soupir se fait entendre.

- Tu peux m'ouvrir ?

Je lance les clefs, il les rattrape et ouvre la porte. Lorsqu'elle apparaît dans mon champ de vison, je me rends compte qu'une silhouette est présente derrière elle.

Père.

Je me pétrifie.

J'ai encore perdu cette bataille.

Un très grand sourire s'affiche sur son visage.

- Élisa, nous devons te parler.

- Nous ?

- Oui, ton père et moi, déclare exaspérée la femme.

Certainement pas, qu'ils aillent se faire foutre !

- Non.

- Comment ça, « non » ?

- Je ne veux pas parler avec ce monstre.

- Élisa ! Tu vas arrêter ta crise d'ado !

Je me lève. Ne pouvant plus garder tant de mots, tant de non-dits, je hurle :

- UNE CRISE D'ADO ! MAIS T'ES CONNE OU ÇA SE PASSE COMMENT ! C'EST UN MONSTRE, UNE ÂME SANS CŒUR QUI TE TROMPE AVEC UNE FEMME, À CHAQUE FOIS QUE TU TRAVAILLES !!! BORDEL DE MERDE !!!

Elle me regarde, aucune émotion ne passe sur son visage.

Non, ce n'est pas possible, ne me dit pas que je suis la seule à trouver ça déroutant !

- Élisa. Ne te mêle pas de ce qui ne te concerne pas.

Mon sang ne fait qu'un tour.

- Tu préfères ton mari que ton bien-être, déclare Élisa d'une voix acide.

- Ne l'écoute pas chérie. Tu sais que je t'aime, hein.

- Oui bien sûr. Elle est sûrement folle.

Mon sang bouilli.

- JE SUIS LÀ, JE VOUS RAPPELLE !

- Va dans ta chambre, tu viendras manger quand tu te seras calmé.

Ma respiration se raccourcit.

Non, pas elle.
Pas la seule personne qui ne me fait pas de mal dans cette maison.

Ma chambre, un lieu qui devrait être un environnement paisible et rassurant. Mais qui pour moi n'est que la boite en or où mes tourments s'y demeurent.

Je me lève, furieuse, descends les escaliers et me diriges vers cette pièce qui me répugne. J'y rentre, referme la porte quand une main attrape mes cheveux et me balance vers mon lit. J'aperçois tout un attirai de torture qui m'encercle. L'angoisse m'envahit. Un sourire sadique s'affiche sur le visage de mon agresseur.

- On va voir, maintenant, si tu ferras toujours la maligne comme tout à l'heure.

***

Je sens une main qui caresse ma joue.

- Élisa. Tu vas bien ?

Je sursaute à son toucher.

Marvyn.

Les picotements au niveau de ma nuque m'informent qu'elle est toujours en train de me regarder. Elle vient de trouver mon point « faible ».

Même si dans les faits, le seul lien que j'ai avec Marvyn est que nous sommes dans la même classe.

- Oui.

Il me sonde du regard, cherchant si mon affirmation est vraie.

- Tu dois encore rester, demande Élisa ?

- Non, on peut partir.

Il me tend la main, je la prends et il m'aide à me relever, il entrelace nos doigts. Surprise, je m'apprête à me mettre en colère. Nos yeux se croisent, la lueur dedans me fait comprendre que je n'ai pas intérêt à me plaindre.

« Jouer un rôle, c'est s'y imprégner complètement. »

Nous commençons à marcher, nous dirigeant vers l'extérieur de l'édifice. Une fois, dehors, nous nous installons dans ma voiture et fermons les portières.

- Alors, comment ça va se passer pour tes frères ?

Je sais qu'il s'interroge. Une inconnue qu'il vient de rencontrer il y a plus d'une semaine, c'est très étrange.

Mais j'ai besoin de savoir, surtout pour Nath.

- Ils vont vivre chez Alonzo.

Je peux percevoir du soulagement dans sa voix.

J'aurais aimé avoir quelqu'un qui se préoccupe autant pour moi, qu'il le fait avec ses petits frères.

Je repousse cette pensée dans ma tête, sachant que je n'ai pas le temps pour ça.

- Et toi ?

- Moi ?

- Tu vas vivre où ?

Son visage s'assombrit.

- Je ne sais pas, je vais devoir me débrouiller.

Et si...
Non, ce serait absurde. Je ne le connais pas.
Oui, mais il peut me mener jusqu'à elle...
Ça ne se fait pas, il ne l'a rien demander le pauvre.

Depuis quand je me préoccupe de ça même ! On n'a pas d'infinité, qu'est ce que j'ai à perdre franchement. Je ne vais pas me priver de prendre une opportunité à cause d'un inconnu.

- Si tu veux, tu peux t'installer temporairement chez moi.

Il tourne sa tête vers ma direction, totalement sidérer.

- Pourquoi tu ferrais ça, alors que nous ne nous connaissons pas ?

Sa question est très pertinente. Je vois bien qu'il trouve ça étrange que je l'aide alors que je n'ai en apparence aucun intérêt à le faire.

Malheureusement pour lui, tous les moyens sont permis pour atteindre un objectif chez moi.

- Si tu ne veux pas, il faut me le dire. Je peux aussi te laisser te débrouiller.

Fuir la question par la confrontation pour que la personne se sente obligée d'accepter.

Oui, je sais que c'est de la manipulation, mais je n'ai pas le choix.

Il est ma nouvelle cible.

Il se tait, se plongeant dans un silence. Le dilemme passe sur son visage. Alors que je pensais qu'il n'allait jamais parler, il prend la parole :

- J'accepte ta proposition, car je n'en ai pas d'autres, sache le.

- Je ne t'ai jamais dit de te justifier. Je te fais une proposition, après tu en fais ce que tu veux.

- D'accord Madame Avdeeva.

Je le regarde avec de grands yeux.

Je m'attendais à tout sauf à ça.

Un sourire étire mes lèvres.

- Tu n'avais vraiment pas d'inspiration pour abdiquer aussi vite.

Un léger gloussement sort de sa bouche.

- Ça te fait rire !

Il me surprend de plus en plus.

Je me serais énervé à sa place.

Pourquoi il pose les armes aussi facilement.

- Je préfère en rigoler que sombrer.

Sa déclaration, très sincère, même trop sincère par ce que j'ai l'habitude d'entendre, me trouble bien plus que je ne le voudrais.

Pourquoi hait-il la noirceur ?
Pourquoi détestes-tu la lumière, souffle sa voix intérieure ?

Je sais que lui non plus n'as pas une vie facile.

La preuve, c'est lui qui a du prendre soin de ses frères et de les amenés à l'hôpital.

Je ne serais pas passé dans cette rue, il aurait comme même fait le chemin à pied pour eux.

- Parce que sombrer, signifie quoi pour toi ?

- On ne se connaît pas Élisa, par conséquent, je n'ai pas à me justifier. C'est très gentil de ta part de m'héberger, mais ce n'est pas pour cela que je te dévoilerai ma vie entière. 

De justesse, je retiens un rire sarcastique.

Si tu le savais...
Je suis tout sauf gentille.

Ce n'est pour autant que je le contredis, gardant alors ce masque impassible sur mon visage.

Nous avons tous nos secrets, les miens doivent être gardés de tous si je ne veux pas qu'ils me précipitent vers le néant.

- Je comprends, déclare Élisa en démarrant.

- T'as besoin de passer chez toi pour prendre quelques affaires, ou je nous amène directement chez toi ?

- T'es parents sont au moins d'accord que tu remmènes un gars dans leur baraque ?

Un rire pur franchit mes lèvres. Lorsque je me rends compte alors que je venais de m'esclaffer non pour jouer un rôle, mais parce qu'il a réussi à toucher une des cordes que j'ai longtemps éteinte, je me fige.

Je viens de rire.
Je viens de goûter à une lumière qui ne m'est pas destiné.
Une lumière qu'il propage.
C'est beaucoup trop dangereux pour moi.

Les klaxons des véhicules derrière moi, me font sursauter, me ramenant à la réalité. Je me reconcentre sur la route, les ténèbres qui me constituent hurlant de m'éloigner de cet être qui bouleverse me réfugiant parmi les ombres.

Bien que mon esprit me hurle de le repousser, de le laisser dans ses problèmes et de partir le plus loin possible de lui, je sais qu'au fond de moi, tout cela m'est impossible.

Je viens de franchir un pas dans la zone du non-retour.

Je sens son regard sur ma peau, observant chaque trait de mon visage.

Faite, qu'il arrête.

Pourquoi je me mets dans des états comme ça ? Il faut que j'arrête d'espérer, je ne suis plus la petite fille que j'étais auparavant.

Contrairement à moi, celle-ci est morte, il y a bien longtemps.

Je prends une grande inspiration, essayant de calmer le désarroi qui grandit en moi. Il m'est à présent compliqué de lui adresser la parole. Après quelques instants, je me rends compte que je nous avais guidé directement chez moi. Je sais qu'il me fixe. L'attention qu'il me porte raccourcie considérablement ma respiration.

- Élisa ?

Je suis incapable de le regarder dans les yeux.

- Élisa ?

Une rage s'imprègne dans mes veines.

Comment je peux être aussi faible, putain !
Comment un homme que je ne connais à peine, peux fissurer une par une les barrières que je croyais solide jusqu'à ma mort !
Comment et pourquoi ?!

Sa lumière, ma hantise, mon gouffre.

Sortez-moi de cette torture.

Je sors de la voiture, une fois l'avoir garé avec une grande urgence de m'éloigner de cet homme. Des larmes me montent aux yeux, je tente de les refoulées comme toutes les rares fois où elles menacent de se déverser. Mais cette fois-ci, elles passent entre les mailles du filet et coulent sur mon épiderme. J'ignore les cris de Marvyn, qui essaye, tant bien que mal, de me rattraper. Des secousses traversent tout le long de mon corps, je cours, connaissant les lieux par cœur, je retrouve très facilement mon bureau.

Je m'y enferme, quelques secondes plus tard, il frappe à la porte, assez fort pour que je l'entende, assez faible pour ne pas me brusquer. Je reste silencieuse, mes pleurs sont les seuls murmures de la pièce. Mes tourments tournent en boucle dans ma tête, ne laissant pas mon esprit voir une once de noirceur. Mes mains tremblent.

J'ai peur.
Il y a beaucoup trop de lumière.

Je veux que les ténèbres m'imprègnent. Tout le monde la repousse, craignant de devenir un monstre, pour moi, elle est mon oxygène. Mes cris, mes larmes, mes peurs, mes traumas, tout passe devant mes yeux. Je pose mes mains sur mes oreilles et me recroqueville sur moi-même, le cœur affoler, le cri de mon âme me déchire. Je me revois, le sang devant ma seconde peau, je n'avais que dix ans et pourtant les yeux du monstre de mon histoire, se planter en moi, m'observant alors la mort m'emporter.

J'avais cru que je vivais mes derniers instants.

Alors que les cauchemars de ma vie tout entière se répètent, je sens des bras m'envelopper. Pendant un millième de seconde, je me pétrifie au toucher de la personne. Puis je laisse mon instinct reprend le dessus. J'attrape le poignet de la personne, le tords légèrement, le ramène vers moi et plaque la personne au sol. Je me mets au-dessus de cet homme, maintenant en califourchon sur mon adversaire. Je rapproche ma tête à la sienne et le maintiens, la main encerclant sa gorge. Il tente difficilement d'avaler sa salive, le mouvement de sa pomme d'Adam chatouille ma peau. Je déglutis face à la chaleur et aux frissons qui se propage partout dans mon corps.

Qu'est-ce qu'il me prend !
C'est à cause de lui que je suis dans cet état !

- Comment tu as fait pour rentrée dans la pièce ?

Ses yeux me scrutent, essayant de comprendre ce qu'il se passe en moi.

- Enlè ... ve, ta...

Avant qu'il ne termine sa phrase, je desserre mon emprise sans pour autant la retirer. Il inspire, ses yeux sont toujours plantés dans les miens.

- Tu avais laissé un double des clefs à l'entrée.

- Et qui t'as autoriser d'entrée, demande Élisa d'une voix glacial ?

Son regard se fait plus intense.

Il porte, en lui, la lumière que j'ai toujours fuie.
Il m'a vue en position de faiblesse.
C'est trop dangereux, beaucoup trop nocif pour moi.

- Je vois.

Je vois ?

Surprise par sa réaction, trop calme à mon goût, ma vigilance baisse. Pourtant, il suffit de ce micro seconde d'inattention, pour me sentir volé dans les airs. Mon dos rencontre le parquet dur et froid. Il me faut quelques secondes pour que je me rende compte de ce qu'il vient de se passer.

Il vient de retourner la situation.

Ses mains posées sur le sol, une de chaque côté de ma tête, ses iris rentre en contact avec les miens. Ce même et long frissons m'envahit partout dans mon corps, atteignant mon échine. Il enveloppe tout mon corps. Je n'ai aucun moyen de sortie.

Putain de merde !
Élisa, reprend toi !

Il fait attention à garder un espace entre nous, évitant que nos corps se touchent. Un sourire étire ses lèvres, dévoilant légèrement ses dents blanches.

Je comprends pourquoi toutes les filles en craquent pour lui.
Même si sa beauté n'est rien comparée à la barrière de glace qui entoure mon cœur.
Ce n'est pas lui qui va la briser.

- Je déteste utiliser la violence, mais si tu m'y forces, sache que je ne m'y gênerai pas.

Sa voix est grave et profonde, sévère, grondant d'un combat intérieur. Sur ses mots, il se relève, dépoussière ses vêtements, me lance un dernier regard puis sort de la pièce. Je me lève, me dirige vers mon siège et me laisse tomber. Je repense à ce qu'il vient juste de se passer. Je détache mes cheveux, les laissant tomber en cascade sur le dos. Je passe une main dans ma poche quand je me rends compte que j'ai laissé mon téléphone dans le salon. Je m'y dirige, le cœur battant. Une fois arriver, je croise son regard, ils ne les détournent pas, contrairement à moi.

Pourquoi il me déstabilise putain !

Son aura, murmure sa voix intérieure.

Je prends le plus vite possible mon portable, quand il m'interpelle.

- Élisa.

Je fais mine de ne pas l'avoir entendu, incapable de le regarde encore une fois dans les yeux, et continue ma route. Alors que je pensais me tirer comme ça, une main prend mon poignet et d'un mouvement, me force à me retourner vers lui. Il installe un contact visuel entre nous, une chaleur qui me dérange fortement, se diffuse de sa peau, rencontre la froideur de mon épiderme et se propage partout dans mon corps.

Je veux que ça s'arrête.
Non, ça doit s'arrêter.

J'aurais dû ne jamais lui proposer de l'héberger. Il est toutes mes peurs en une personne. Il va me causer ma perte s'il me ramène dans l'élément qui m'a le plus détruit dans ma vie.

Reconcentre toi sur tes objectifs, Élisa. Tu es beaucoup trop émotive.

- La prochaine fois, ne me force pas à devoir te prendre le poignet.

Parce que je l'ai forcé. Non mais je rêve !
C'est lui qui est venu installer le contact physique ! Pas moi !

- Et je peux savoir pourquoi, questionne Élisa en se dégageant de son emprise ?

Il baisse la tête devenant silencieux. Je m'apprête à lui tourner le dos, voyant enfin une opportunité de me sortir de là, quand il la relève avec un rictus au coin de ses lèvres.

- Je sens chaque frisson que tu ressens, Élisa.

Je me sens me raidir face à son affirmation.

Bien plus observateur que je ne le pensais pas.
Bien plus dangereux que je le croyais.
Bien plus intelligent que je ne l'imaginais.

Je l'ai sous-estimé.

Je remets mon masque, celui qu'il est en train de fissurer par mes propres peurs.

- Ne prends pas la grosse tête, Marvyn, ce n'est que de dégoût.

Je le vois se crisper.

C'est violent, mais pas autant que ce trouble qui c'est t'immiscer en moi depuis notre rencontre.

- Tu détestes à ce point la lumière ?

Je le regard droit dans les yeux. Ses yeux ambrés me scrutent, attendant une réponse.

Comment a-t-il peut le percevoir en aussi peu de temps ?!

- Pourquoi tu dis ça ?

Je préfère mentir qu'admettre ça à une personne que je ne connais pas.

- La seule fois, que je t'ai vu en propager, elle était glaciale.

Mon cœur commence à battre la chamade, l'adrénaline se propage dans mon sang. Des envies de me battrais et de le virer de ma vie tourne en boucle dans ma tête. Pourtant, c'est moi qui lui suis dit de venir temporairement chez moi, pas lui.

Je ne peux que m'en vouloir.

Je ne le laisserai pas enlever, en quelques secondes, toutes les armures que je me suis construites après tant d'années.

- Tu te trompes Marvyn.

Il hausse un sourcil, sceptique. Je me rapproche de lui, réduisant l'espace qui nous sépare. Bien que cela me côté un très grand effort pour ne pas laisser mes angoisses prendre le dessus. Je pose une main sur son épaule pour ne pas perdre l'équilibre, y prends appui, je me mets à la pointe des pieds et lui chuchote :

- J'ai trouvé ma lumière. Elle juste secrète aux yeux de tous.

Ma noirceur, voilà pourquoi elle ne brille pas dans ce monde bien trop lumineux.

Chaque mot qui sort, arrache ma gorge d'un goût extrêmement amère. Je m'éloigne de lui.

- Tu peux dormir dans la chambre d'ami, y as des vêtements d'homme qui sont rangés dans le premier placard à gauche. Pioche ce que tu veux, tant que tu es habillé, cela m'importe peu. T'as ta douche donc évite d'utiliser la mienne.

Sur ces mots, je pars me réfugier dans mon bureau. Je m'installe et commence à travailler sur des dossiers importants. Je mets mes écouteurs et m'y plonge dedans. Trente minutes passent, le silence régner dans le duplex, jusqu'à le volume d'une mélodie de chanson commence à augmenter. Alors que je pensais que cela n'allait durer que quelques minutes, le bruit continue à croître, m'empêchant d'écouter ma propre musique.

Je vais le tuer !

Je me lève, telle une furie, me dirige vers l'origine du volume sonore excessif. Je monte les escaliers, puis déambule dans le couloir amenant là la fameuse chambre d'ami.

Marvyn, j'espère que tu as profité de ces douces mélodies, car le seul son qui raisonnera dans l'appartement sera ma main qui fouettera l'air pour atterrir sur ta joue !

Je sors les doubles des clefs, et m'apprête à déverrouiller la serrure quand la porte s'ouvre en grand.

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