Chapitre 2 : Iram : Le royaume de Seran

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Quand ma sœur fut partie, je me décidais à faire de même. Après un petit voyage sensoriel fort agréable, j'arrivais à Seran, le royaume des Hommes.

Je regardais autour de moi avec émerveillement. Soline également. Par politesse, je saluais les mages, qui semblaient fatigués par leur prouesse. Je les remerciais et, une fois que le Prince nous eut rejoint, ils prirent congé en se téléportant.

Soline et moi, ayant vécu presque la totalité de notre vie dans notre maison, étions époustouflés par la beauté du monde extérieur. Des champs s'étendaient à perte de vue, un village se dessinait au loin. Quelques reliefs au Sud du royaume et une église se trouvaient à proximité. Les bêtes broutaient paisiblement dans les prairies et les gens passaient à côté de nous, et se rendaient à la Porte-à-Monde.

Waouh ! Je n'arrive pas à croire que c'est réel ! J'ai bien fait de convaincre Soline !

Riham badina en nous voyant réagir comme des enfants à leur premier Nelö°. Soline se mit à faire la tête, mais ne put résister au plaisir d'être dehors. Nous avançâmes jusqu'à la calèche qui nous attendait. Nous devions arriver au château royal dans l'après-midi. Curieux de nature, j'entamais la conversation avec notre compagnon :

  • Dites-moi, prince, quel âge avez-vous ?
  • Je t'en pries, tutoies-moi. Je ne suis pas si vieux que ça, plaisanta-t-il en faisant un clin d'œil. J'ai vingt-trois Fartoste°°, et j'en aurais vingt-quatre d'ici trois mois.
  • Pouvez...euh... Peux-tu me présenter les environs ? Nous ne sommes jamais sortis de chez nous, nous ignorons tout de ce monde.
  • Avec plaisir ! Notre monde se nomme Serc, en référence aux noms de chaque royaume qui, une fois assemblés, forment le mot "Monde" en language des Dieux. Seran est le royaume des Hommes, il prend tout le Sud-Est de ce monde. Enfin, si on oublie la Frontière Aqueuse.
  • Vous parlez de la Rivière Infinie ? demanda Soline.

Intriguée, elle s'était relevée de son siège.

  • Oui. répondit calmement Riham. Cette rivière sépare le Serc en quatre et délimite les royaumes. En réalité, Serc s'étale sur la moitié du globe. Sur l'autre moitié, nul ne sait ce qui se passe, personne n'a réussi à en revenir vivant.

Il frissonna.

  • Et les différents peuples ? Où habitent-ils ?
  • Les Nains au Nord-Ouest, les Mages au Nord-Est et les Elfes au Sud-Ouest. Comme partout, chaque royaume a sa politique, sa population et ses coutumes. Mais aussi leurs mœurs et leurs petits problèmes. Par exemple, Crafort, royaume Nains et Roagan, royaume Elfe, sont...
  • Ennemis ? tentais-je.
  • Non, pas aussi loin... Mais ils ne s'entendent pas, c'est vrai.
  • Je sens que je vais bien m'entendre avec les Nains, lâcha Soline.
  • Tu n'apprécies pas la compagnie des elfes ? s'étonna Riham. Je reconnais que les Nains ont raison sur leur arrogance, mais beaucoup d'entre eux restent très doux et ouverts d'esprits.

Il y eut un blanc. Normalement, Soline évitait le sujet. Pourtant elle répondit vaguement :

  • Disons que la seule visite que j'ai faite à Roagan ne s’est pas passée comme prévu.

Cette réponse laissa Riham perplexe, mais il continua :

  • Comme vous le savez, il existe une multitude de monde en dehors du notre. Et pour les explorer, marchander, ou juste pour les missions diplomatiques, un système s'est mit en place : la Porte-à-Monde. Certains Mondes, comme le notre, connaissent parfaitement leur existence. D'autres, comme Terre, n'en savent rien. Seuls quelques élus y ont accès. Parfois, nous envoyons des ambassadeurs discuter de tout : arts, culture, nature... Nous avons renoncé à ça avec Terre, ce ne sont pas des sujets qui les passionnent. Ils préfèrent parler armes et argent. Nous y allons pour le commerce.

Il sembla un peu triste. Soudain, son visage s'éclaira :

  • Mais je me rappelle la fois où notre ambassadeur nous avait ramené du Jus d'Oranges ! C'était piquant, un peu acide et sucré, mais qu'est-ce que ça donne d'énergie !

Je l'écoutais, fasciné. Comme ça devait être génial de passer d'un monde à l'autre. Nous discutâmes tellement que nous ne vîmes pas le temps passer. De temps en temps, des marchands, des paysans et des nobles passaient à notre hauteur et saluaient le prince, qui répondait d'un hochement de tête poli.

Quand nous arrivâmes au palais, ma sœur et moi fûmes impressionnés : il était immense, avec quatre tours, des remparts énormes et des centaines de fenêtres. Il était tout blanc avec des toits dorés. Des drapeaux, plantés aux sommets des tours, affichaient le blason de Seran. Je reconnus un Ruop°°° en train de hurler à la lune.

À l'intérieur tout n'était qu'or et argent : des salles de bal ayant des lustres de cristal, des salles à manger possédant des tables fait dans un bois d'une valeur inestimable. Il y avait des salons où s'étalaient de magnifiques tapis, des étagères débordant de livres venus de tous les mondes.

Nous finîmes par atterrir dans un couloir au mur couvert de tableaux. Riham nous expliqua qu'il s'agissait d'anciens rois :

  • Ici nous avons Sarcan le Doux, il est connu pour avoir offert la quasi-totalité de ses vêtements au peuple lors d'un Descrif des plus froid. Là c'est Crofictarus IV, célèbre pour être le fondateur de l'église de Saint-Oméranum°°°°, que vous avez vu tout à l'heure. Et ici, nous avons Le Banni. C'était un roi cruel et horrible. Les paysans et les nobles ont finis par se révolter et, au bout de cinq ans, le roi est parti. On n’a plus entendu quoique que ce soit à son sujet.

Il nous montra encore quelques tableaux, puis nous arrivâmes à la salle du trône. Il y avait un énorme tapis rouge qui menait aux sièges royaux. Les murs étaient d’un blanc immaculé. Mais la plus grande surprise fût de voir les parents du prince. Il leur ressemblait tellement. Les yeux noisette, la peau pâle et les cheveux bruns. Le roi prit la parole et parla en ces termes :

  • Fils, ta mère et moi sommes ravis de te revoir. Je vois que tu as retrouvé les Uniques. Comment vous nommez-vous, jeunes gens ?
  • Je suis Soline, répondit ma sœur.

Je lui donnais un coup de coude discret.

  • Votre Altesse. rajouta-t-elle.
  • Je me nomme Iram, votre Altesse. Nous sommes enchantés de vous rencontrer et nous vous remercions pour votre accueil chaleureux.

Le roi nous regarda d'un œil interrogateur. Il se tourna vers son fils et reprit :

  • Quel âge ont-ils ?
  • Ils ont 16 ans, père.
  • Sont-ils prêts pour cette aventure ? s'enquit-il. Elle est extrêmement dangereuse.
  • Il me semble qu'ils sont prêts. Sinon ils ne seraient pas là.

Le roi se tourna vers nous :

  • Si partir à l'aventure est votre souhait, hâtez-vous. Durant l'absence de notre fils, les ennemis ont approché nos villes. Il s’agit de Malaka, des créatures mi-orques, mi-gobelins. Ils tuent tout le monde : hommes, femmes et enfants. Ils ne font jamais de prisonnier. S'ils vous attrapent, ils vous emmèneront à leur roi, Tonn et il vous poussera à l'aider dans ses plans de conquête du monde.
  • Et bien, cette quête n'était pas prévu dans notre programme, mais nous ferons de notre mieux. Et puis, ce n'est pas comme si nous avions le choix... Le Prince ayant trouvé notre cachette, rien ne nous assurait que nous étions encore en sécurité là-bas... Majesté. ajoutais-je précipitamment.
  • Point de "Majesté" entre nous. Dit-il. Vous pouvez nous tu...

Le cri de la reine se coupa. Il se tourna vers sa femme et éclata de rire. Sekram venait de sortir de je-ne-sais-où et voletait autour de celle-ci.

  • Ne vous inquiétez pas, majesté, ce n'est que Sekram, notre Corchat. Il est avec nous depuis des années. Sekram, au pied ! rajouta Soline.

L'animal quitta les genoux de la reine à contre-cœur. Puis il se lova sur la tête de Soline, en repliant ses ailes. Il commença à ronronner paisiblement. Je jetais un regard noir à ma sœur.

  • Soline, pourquoi l’as-tu emmené ? demandais-je.
  • D'abord, je n'allais quand même pas le laisser seul à la maison. Ensuite, si je ne l'avais pas emmené, il nous aurait suivi en cachette. Pour finir, ne te plains pas, tu es aussi content que moi de le voir.

Je déteste quand ma Soline a de meilleurs arguments que moi. Je me tus et observais la petite frimousse de Sekram, qui me fixait de ses yeux jaunes. Je capitulais.

  • Bien. Il peut rester. Mais excuses-toi au moins.

Soline sourit et se tourna vers la Reine, la mine un peu plus déconfite.

  • Veuillez me pardonner, ma Reine.
  • Vous êtes tout pardonné. Il suffit qu'une telle frayeur n'arrive plus. Et cessez de nous vouvoyer, voulez-vous bien. C'est très désagréable. Vous devez être épuisés... Nous discuterons de votre mission plus en détails demain, quand vos compagnons de voyages arriveront.
  • Riham, conduis donc nos invités à leurs chambres, qu'ils se reposent avant le dîner, ordonna son père.
  • Tout de suite, père.

Nous remerciâmes les Altesses royales et prîmes congé. Riham nous mena à nos chambres, qui étaient l'une à côté de l'autre. Elles étaient à l'image du château : magnifiques.

Les draps rouges et blancs étaient frais et une tenue de soirée était posée sur le lit à baldaquins. Riham nous proposa de nous emmener à la bibliothèque quand nous nous serions changés. Nous acceptâmes sa proposition et il nous laissa. Je m'installais sur le lit, trop épuisé par toutes ces émotions pour faire autre chose. Je replaçais chacun des événements dans l'ordre et, une fois que ce fut fait, je partis me laver.

Il s'agissait d'un maillot fait dans une étoffe des plus douces et d'un pantalon dans les mêmes matériaux. Le tout dans les tons noirs, accompagnés d'une ceinture brodée d'or.

Je finis par retrouver Riham et ma sœur et nous nous rendîmes à la bibliothèque. C'était un endroit magnifique avec des étagères recouvertes de livres rares et précieux. Les rayonnages en bois précieux abritaient les livres reliés de cuir. Une épaisse moquette rouge annihilait le son de nos pas. Pour compléter le décor, de gros fauteils moelleux étaient placés en cercle au centre de la pièce. Nous discutâmes et lûmes jusqu'à ce qu'un domestique nous annonça que le diner allait être servis. Le repas fût délicieux et nous pûmes parler avec le roi, la reine et quelque uns des invités.

La nuit vint et nous finîmes par être raccompagnés dans notre chambre. La nuit semblait calme et je dormis d'un sommeil sans rêve, mais ce ne fût pas le cas de Soline.


°Nelö : fête célébrant la naissance d'Oméranum. C'est une sorte de Noël.

°°Fartoste : il s'agit de l'une des quatre saisons de ce monde. Il y a Fartoste, puis Gevar, Enfirte et enfin Okidals.

°°°Ruop : sorte de loup.

°°°°Oméranum : Il s'agit du Grand Dieu de ce monde. Le Néant s'ennuyait et il créa Oméranum, la Lumière, pour avoir un ami. Oméranum était né.

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