Chapitre 2
Le jour vient de se lever ou alors c'est juste mon réveil qui vient de sonner. Je suis bien obligée de me réveiller. Le bonheur et la joie d'aller en cours. Je rabats la couverture sur elle-même et me lève. Je me dirige vers ma salle de bain où je fais couler l'eau. Je me glisse dessous et me prépare. Je saisis un jean mom bleu foncé et un tee-shirt large noir que je fais bouffer au niveau du bouton de mon pantalon. Je mets un peu de parfum, passe la brosse à coiffer dans mes cheveux et celle de mon mascara sur mes cils. Ça fera l'affaire, ce n'est qu'une journée de cours. Je saisis mon éternelle veste en cuir, mes Converses noires, mon sac de cours à moitié plein et pars, téléphone en main.
Je branche mes écouteurs avant de partir pour le bout de ma rue. Je lance le dernier album de Lewis Capaldi et avance face au doux vent pour rejoindre l’arrêt de bus le plus proche. Dans ma poche, mon téléphone vibre pour m’alerter que je viens de recevoir un nouveau message. Je pense que c’est Ashley ou peut-être Louis pour me prévenir qu’ils ont loupé le bus. Je tire donc mon téléphone pour avoir le dénouement mais il s’agit en fait de mon interlocuteur de la veille, Liam si c’est bien lui.
De :Liam
Je passe te prendre chez toi.
Je relève la tête, c’est un réflexe que j’ai quand je réfléchis à ce que je veux dire. Je ne sais plus vraiment à quel moment j’ai commencé à faire ça, mais je sais pourquoi je le faisais. J’espérais avoir une réponse du ciel, un signe ou une indication. J’ai tellement voulu y croire que j’ai répété ce geste assez de fois pour en faire une habitude.
De :Emma
Je suis déjà partie, une prochaine fois peut-être.
Je n’espère pas passer une journée avec lui tout court, mais je me retiens de lui dire. Je ne veux pas être impolie. Je replonge mon téléphone dans la poche de ma veste cette fois et continue ma marche un peu plus rapidement pour ne pas louper le bus. Je ne sais pas comment je ferais pour aller en cours sinon.
De :Liam
Aujourd'hui on passe la journée ensemble, honey.
Honey, non mais sérieusement. Je vous le disais, Liam est un cliché. Je pourrais relever et lui faire remarquer qu’il s’emballe un peu trop vite mais je m’abstiens. Je vais plutôt lui rappeler comment se déroulera notre journée, ça ne peut pas lui faire de mal.
De :Emma
Aujourd'hui on passe la journée avec nos potes, nos profs et nos bouquins.
De :Liam
Tu joues avec moi je te rappelle.
De :Emma
Je n'ai jamais dit que je jouais.
Cette fois je range mon téléphone dans le fond de mon sac. Il pourra m’envoyer des messages autant qu’il veut, je n’y répondrais pas et je ne les verrais même pas. Je m'arrête pour traverser à l'angle de la seconde ruelle quand une voiture s'arrête à ma hauteur. C'est bel et bien Liam, qui prend une tout autre route que celle du lycée, bon, au fond, je m'en doutais. Il descend la fenêtre du côté passager pour pouvoir me parler. Je m’approche et pose mes deux coudes sur le rebord pour mieux l’entendre. J’attends qu’il dise quelque chose mais il me lance juste un signe de la tête pour m’inviter à monter. Je l’ignore et lui demande plutôt :
— T'attends quoi de moi ?
— Que tu montes dans ma voiture pour qu’on puisse jouer.
— C’est quoi le principe ?
— C'est un jeu, Emma. Tu perds ou tu gagnes. Tu trouves une stratégie ou tu te laisses emporter. C’est toi qui vois comment tu veux jouer, comment tu peux gagner.
— Qu'est-ce que je gagne ?
— Vingt-quatre heures avec moi.
J’esquisse un sourire. Encore une fois, cette réponse lui va bien. Il m’envoie un sourire charmeur à son tour avant que je le remette à sa place.
— Je te parlais de récompense.
— Toutes les filles du bahut en rêvent, s’offusque-t-il avec ironie.
— Je ne suis pas toutes les filles, Liam.
— Je sais, t'es bien plus...
Je roule des yeux, son petit numéro est ridicule. Mais il rigole avec le cœur en voyant ma réaction. Quel abruti.
— Mmh, bien sûr. Sinon, c'est quoi le principe du jeu. Explique-moi tout.
Il ouvre la porte et, sachant que je n’y échapperai pas, je m’installe à côté de lui, une moue boudeuse tout de même greffée sur le visage. S’il pense avoir gagné en me faisant accepter de monter à ses côtés, il a tout faux. Je peux être très gentille mais tout aussi méchante quand j’en ai envie. Il redémarre et répond enfin à ma question :
― Pendant vingt-quatre heures ce sera toi et moi, rien que nous deux. Tu devras me séduire, je devrai te séduire. Après ces vingt-quatre heures, je pars, si t'es tombée amoureuse alors t'auras tout perdu. Si tu gagnes, c'est que je suis tombé amoureux de toi, et tu décides de ce que tu fais de moi. Mais je gagne toujours. Et elles perdent toutes, tout le temps.
— C'est quoi ce jeu pervers ?
— Un jeu, avec une règle, rien qu'une. N'en parles à personne. Tu acceptes ?
Il me lance un regard pendant une seconde pour voir ma réaction. Je pense qu’on peut très distinctement voir l’horreur et le dégoût dans mes expressions. Puis je réfléchis, je me remémore de mes derniers mois, des derniers jours. Je me rappelle comme ma vie était vide et dénué de plaisir. Je ne pense pas que ce jeu soit très sain mais j’ai besoin de ressentir les frissons et l’adrénaline. Ça fait bien longtemps que je n’ai pas ressenti et fais les choses avec passion et en ressentant le danger. Je trouvais ça bête avant, mais maintenant que je suis sur le point d’accepter de jouer à ce jeu idiot, cette quête de l’inattendu me tend les bras.
— Je n'ai rien à perdre.
— Crois-moi, tu pourrais tout perdre.
Sur ces mots, la conversation s’arrête. Quitte à passer vingt-quatre heures avec lui, autant en faire du bon temps, alors je connecte mon téléphone à la radio de sa voiture. Je lance une playlist et zappe les musiques jusqu’à en trouver une qui me convienne. À côté de moi, Liam me lance un regard en coin d’abord sérieux puis il se déride et son expression est bien plus détendue. Il va même jusqu’à tapoter le cuir de son volant avec ses longs doigts. Pendant que nous rejoignons un endroit dont je ne sais rien, une question surgit dans mon esprit.
— Mais en fait, comment tu connais mon adresse ?
— Comment ça ? il détourne le regard de la route quelques instants à peine.
— Ce matin tu m’as dit que tu venais me chercher chez moi et je t’ai retrouvé au coin de ma rue. Comment tu sais où je vis ?
— D’ailleurs tu pars tôt de chez toi ! Tu arrives avec combien de temps d’avance au lycée ?
— Je prends le bus, donc j’arrive juste à l’heure. Mais tu changes de sujet, là. J’aimerais bien avoir une réponse.
— Et si je n’ai pas de réponse à te donner, on fait comment ?
— Je descendrais et tu aurais perdu ton petit jeu. Ça te va ? Et d’ailleurs, comment est-ce que tu ne pourrais pas avoir de réponse ?
— Non, le jeu serait tout au plus reporté, ça serait dommage mais c’est toi qui vois.
— Tu m’énerves à détourner les questions ! Réponds-moi.
— C’était quoi déjà la question ? me redemande-t-il avec un air innocent.
— Comment tu sais où j’habite ?
— T’es naïve, Emma ! Je connais ton adresse parce qu’on me l’a demandé. Tes copines ne sont pas très dures à convaincre.
Mes copines ? Je n’en ai pas des tonnes, mes amies les plus fidèles se comptent sur les doigts de deux mains. Ça m’étonne qu’elles
— C’est laquelle qui a balancé ? Et contre quoi ?
— Je ne suis pas comme elle, moi. En plus elle m’a promis qu’elle me ferait la peau si je te disais ! Et crois-moi, je tiens à ma vie.
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