Seconde 72
Partie 1
La charnière de ton dos se superpose aux brèches du volet comme un set de chair percé de part en part, un mont-gâteau-de-peau qui peut être dégusté sur le précipice d'un soir. Et je considère ces cheveux plumes, libres de tout vent, et ma main tout près, tout près ; mais Morphée est un vieux roublard. Il consomme les garçons si longtemps que je les perds. Hermès, dors-tu ? Ta paupière paraît si frêle, un peu violacée, une toile monochrome délavée et elle frétille comme si l'on t'avait perdu au plus profond d'un rêve. Dis-moi, Hermès, dors-tu ? Car je régale mon imaginaire de ce que je vois mais tu cadenasses le tien, là où je ne peux le prendre par les hanches.
Puis, Morphée t'étire comme de la pâte à modeler. Les formes se succèdent, arythmie de peau, si proche de la mienne, comme une séquence de magnétoscope qui défile en saccades devant un œil fasciné. Je ne saisis pas tout à fait ma pensée comme un surin quand tu déposes quelques idées aux creux de mes reins. Ou toute ta tête, oui, tout un monde, comme le marteau sur l'enclume. Un son flotte à présent, une tonalité grasse, luisante de nos sueurs.
Le vaste champ de ta poitrine est une terre sans culture, et plaine de rien, une apposition ferme contre mon dos de graines. Je l'inspire, tu m'habilles de beige et si je sortais au dehors, l'on me croirait nue, apprêtée, dévergondée, superbe en parure de juillet. Je pense sans honte que si tu m'étais offert, tu trônerais vraiment comme un costume de prêt-à-porter sur un de mes cintres et quelle garre-aux-robes j'aurais ! Un peu de ton cou quotidien comme un médicament de bien-être, de gros morceaux de tes cuisses pour caler l'hiver glouton, un œil puis l'autre pour les jours de faites, c'est cela : fais donc...
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