Seconde 73

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Là, j'écoute ta voix mais ne te perçois plus. C'est comme si ma substance cérébrale s'écoulait jusqu'à mes orteils. Elle traverse tout, imprègne chaque tissu comme le ferait la peur, un liquide froid qui parasite chaque nerf, le rendant impotent ou le surstimulant. Comme le ferait la peur, mais ce n'en est pas car je ne crains ni tes mots, ni ton corps, ni ton regard et encore moins ton départ. La punition par l'absence n'est pas une notion qui me bouleverse. Si mes mots te déplaisent, va, qui te retient sinon toi ? Je ne pleure pas pour ce genre de choses, je laisse brûler, n'en retiens jamais la sensation de douleur. J'ai vu les gens aller et venir, trouver refuge ici quelques jours et s'envoler loin dès que le temps devenait plus clément ; je ne suis pas l'impasse, je suis l'abri, l'habit de pluie. Alors si mes mots te démangent, va, qui te retient ?

J'écoute ta voix qui soudain s'apaise, comme face à une enfant qui se serait mal exprimée. Pourtant, l'incompréhension de la candeur ne porte pas d'adage lorsqu'elle concerne l'adulte et je ne serai pas celle qui te sucera le sucre du doigt, sourire aux lèvres.

Dans le ton de ton bref discours, il y eut l'homme. C'est cela : l'homme fut brutalement arraché à mes côtes alors que je ne m'y attendais pas et tu naquis, grossier personnage que je ne trouvais qu'avenant jusqu'alors. Je ne te perçois plus, mon sang s'échauffe, mes nerfs se perdent, je dessine en pensées de grandes images, recouvre d'immenses tableaux bariolés de peintures acides car le son de ta voix est une violence : je n'ai que faire des leçons de mon égal, n'accepterai aucune remontrance de celui qui bourgeonne furieusement comme l'homme sérieux qu'il se croit être, sans crier gare. C'est quoi : l'homme sérieux ? La femme en moi n'a rien d'une enfant, alors, crains la morsure du silence. Mon visage sera ce qu'il est toujours, impassible. Cependant que temps court, mon trouble crée l'effroi à qui ne le connait pas encore. Hier, homme sérieux, tu n'étais rien, tu n'étais pas.

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