77. Retrouvailles sur canapé
Oriane
Je m’arrête devant le miroir et m’observe alors que la porte vitrée se referme derrière moi. Est-ce que j’en ai fait trop ? Non, sans doute pas. Je n’en sais rien. Je m’en fiche. J’ai simplement enfilé ma robe préférée, longue et portefeuille avec un imprimé fleuri dans les tons bleu-vert. Les fines bretelles découvrent mes épaules, le décolleté cache-cœur laisse apparaître le haut de ma poitrine et la fente mes jambes lorsque je marche ou m’assieds. Non, j’ai fait simple, en vérité. J’ai enfilé des compensées confortables, laissé mes cheveux retomber dans mon dos, simplement rehaussé mon regard d’une touche de mascara… Oriane au quotidien. Sauf que j’ai les mains moites et que l’appréhension me file des palpitations.
Le message était pourtant clair, non ? Hugo accepte que nous discutions de ce quelque chose que nous voulons tous les deux. Et les astres sont bien alignés : Robin est parti en vacances dans le sud de la Bretagne avec ses grands-parents ce matin, Louis m’a demandé en début de semaine s’il pouvait caler des visites aujourd’hui avec des parisiens overbookés qui souhaitent établir leur résidence secondaire sur notre côte… C’est comme si tout était fait pour que ce moment de retrouvailles arrive. Alors, j’avoue que recevoir son message hier m’a mise dans un état d’euphorie pas possible.
Le reflet du soleil attire mon attention sur mon alliance et je me retiens de grimacer en l’enlevant. Je déteste voir ma main sur sa peau quand elle est parée de cet anneau. C’est un rappel de mon crime, l’une des façons insidieuses pour que la culpabilité fasse son apparition, et je la glisse dans mon porte-monnaie en montant les marches qui me mènent à la porte de l’appartement d’Hugo.
Un sourire timide se dessine sur mes lèvres lorsqu’il m’ouvre et m’invite à entrer. Je crois que nous sommes tous les deux à la fois un peu gênés et incertains quant à cette rencontre. J’y ai beaucoup réfléchi depuis hier, et si l’envie de me jeter dans ses bras prédominait, j’ai fini par conclure qu’il était préférable, vu la situation, que je laisse Hugo décider du contenu de ce rendez-vous.
— Vous avez fait le grand ménage d’été il y a peu ou c’est rien que pour moi ? souris-je en constatant que l’appartement est rangé.
— Je… j’ai peut-être fait en sorte que tout soit propre pour toi, oui, avoue Hugo en refermant la porte derrière moi. Tu m’as manqué, Oriane, et comme d’habitude, je te trouve superbe.
Je lui souris en faisant courir mon regard sur son corps comme il le fait sur le mien. Est-il seulement possible d’être aussi sexy avec un simple tee-shirt blanc et un short en toile bleu ciel ? Ou est-ce que je suis si mordue qu’il pourrait porter un sac poubelle en paraissant irrésistible à mes yeux ?
— Je te renvois le compliment, souris-je en déposant un baiser sur sa joue après m’être débarrassé de mon sac à main sur la console. David n’est pas là ?
— Non, il avait un rendez-vous, nous avons l’appartement pour nous. Et il me semble qu’avant, quand on se disait bonjour, c’était plutôt comme ça, non ?
Il s’approche de moi et m’enlace avec moins d’assurance qu’avant, comme s’il craignait ma réaction. Je lâche un soupir tout sauf discret en passant mes bras autour de sa taille et niche mon visage dans son cou.
— Tu m’as manqué aussi, tu n’as pas idée, chuchoté-je, lui tirant un frisson qui me fait sourire contre sa peau.
— Alors, on repart comme avant ? me demande-t-il en parcourant mon dos de ses doigts qui descendent jusqu’à mes fesses qu’il empaume. Ou plutôt mieux qu’avant parce qu’on part sur une durée indéterminée ?
— Si tu veux de moi, je n’y vois aucun inconvénient, bien au contraire.
Pour toute réponse, Hugo glisse une main dans mes cheveux pour redresser mon visage et pose ses lèvres sur les miennes avec empressement. Je souris lorsque mon dos heurte presque douloureusement le mur, et ne peux que partager cet état d’excitation qui semble l’avoir gagné. Je ne rêve plus que de me retrouver à nouveau nue contre lui, de partager ces moments de félicité au creux de ses bras.
— Bien entendu que je veux de toi. Je dirais même que je n’ai jamais eu autant envie de toi que là, maintenant, après cette stupide séparation. Je ne sais pas où on va, Ma Douce, mais je sais que nous y allons ensemble, et ça, c’est merveilleux.
Il me soulève dans ses bras puissants et sa bouche s’écrase sur la mienne, sa langue s’immisce et nous nous embrassons comme si nous ne nous étions pas vus depuis une éternité, et c’est un peu comme ça que nous l’avons vécu. Chaque jour sans Hugo était pour moi une absence que j’ai eu du mal à accepter et c’est avec un désir fou que je lui retire son tee-shirt et un plaisir immense que je sens son excitation contre mon bas-ventre.
— J’espère que tu as un préservatif dans ta poche, parce que je ne suis pas sûre de réussir à patienter jusqu’à ta chambre, chuchoté-je à son oreille en ondulant contre lui autant que cela m’est possible dans cette position.
— Je vais te faire une confidence, j’en ai plusieurs… me répond-il en faisant glisser les bretelles de ma robe sur mes épaules, dénudant ainsi ma poitrine qu’il se met immédiatement à caresser et à embrasser.
Sentir sa langue titiller mes tétons, ses lèvres les pincer et les sucer est divin et je suis obligée de fermer les yeux tant il me procure du plaisir. Ce ne sont que de simples préliminaires et déjà, j’ai le sentiment que je suis partie vers une folle jouissance. J’ai été si frustrée ces derniers temps, je m’étais tellement imaginée que jamais plus je ne sentirais ses caresses, que le retrouver ainsi, plein de désir pour moi, me rend folle et me fait gémir sans retenue. Il a l’air aussi pressé que moi car ses mains habiles finissent de me déshabiller et je sens la bosse qui déforme son short et qui est un véritable appel au péché.
Hugo ne me relâche que lorsque je me retrouve allongée sur le canapé, et je ne me fais pas prier pour déboutonner son short et le faire glisser le long de ses cuisses, libérant son érection fièrement dressée que je meurs d’envie de sentir à nouveau entre mes cuisses. Je dépose mes lèvres sur son ventre tout en fouillant dans ses poches, redessine ses abdos du bout de ma langue et lève les yeux dans sa direction lorsque ma bouche effleure sa hampe tendue. Ses beaux yeux bleus sont assombris par le désir, son torse se soulève au rythme de sa respiration plus difficile, miroir de mon propre état à cet instant. Mes mains se baladent sur son torse alors que je laisse glisser son gland dans ma bouche, bien décidée à le rendre fou et à lui faire perdre pied comme il peut le faire avec moi chaque fois que nous sommes ensemble. Je m’applique à la tâche, m’amuse de ses réactions, alternant le rythme et la profondeur à laquelle je l’accueille, me délecte de le voir se contenir tandis que ses mains se crispent dans mes cheveux. Et je jubile quand il me repousse en grondant et enfile le préservatif avec les mains tremblantes. J’en profite pour me défaire rapidement de mes chaussures et glousse quand Hugo m’allonge sans ménagement pour m’enlever mon tanga, seul vestige de ce que j’ai mis trente minutes à choisir ce matin dans mon dressing.
Sentir à nouveau tout son poids sur mon corps me donne l’impression de retrouver l’air que j’avais perdu. Cette bulle qui est la nôtre m’enveloppe toute entière et je lui souris en écartant les cuisses, comblée avant même qu’il ne m’envahisse. J’aimerais prolonger ce moment où nos yeux se trouvent, où nos respirations tentent de reprendre un rythme normal avant la dernière bataille, autant que je veux le sentir au creux de mon corps, et ce dernier décide plus ou moins pour moi quand mes mains descendent sur ce fessier digne d’une pub Calvin Klein pour l’inciter à me pénétrer. Je n’ai pas besoin qu’il glisse sa main entre mes cuisses pour me stimuler, pas besoin qu’il vérifie que je suis prête à l’accueillir, je le suis, je n’attends plus que ça et je lutte pour ne pas fermer les yeux et garder le contact quand il s’immisce entre mes replis et m’envahit enfin avec une lenteur aussi délicieuse qu’insupportable.
Sa bouche cherche et trouve la mienne alors qu’il commence à aller et venir en moi, appuyé sur un coude tandis que sa main libre remonte l’une de mes cuisses contre sa hanche et s’y accroche fermement. Je bouge sous lui, cherchant toujours plus le contact de son corps, avide de côtoyer à nouveau les étoiles en sa compagnie. Je ne cherche pas à étouffer mes gémissements, je ne suis plus que sensations et laisser-aller total. Je crois bien que mes ongles s’attaquent un peu trop vigoureusement à la peau de son dos lorsqu’il accélère la cadence, et je me cambre davantage contre lui quand il immobilise mes mains au dessus de ma tête, nouant ses doigts aux miens tout en prenant d’assaut ma poitrine de sa bouche. Comme à chaque fois, j’ai la sensation qu’Hugo réveille chaque parcelle de mon corps, qu’il stimule tout mon épiderme et déverse le plaisir jusqu’au bout de mes orteils, crispés par l’orgasme qui prend vie au creux de mes reins et monte en moi presque trop vite, trop fort, me faisant exploser sans que j’aie pu contrôler ou retenir quoi que ce soit. Je m’entends prononcer son prénom telle une litanie, mon corps tremblant sous le sien qui se contracte quand il touche aussi au but sans me quitter des yeux.
Ce moment est juste indescriptible tant il est intense. J’ai l’impression que nous échangeons silencieusement à travers nos regards embrumés par l’orgasme, le manque, le plaisir, la joie, le bien-être, et peut-être même bien plus que cet attachement qui nous lie.
Hugo finit par nous renverser sur le canapé pour m’allonger sur lui, et je souris niaisement, peinant à redescendre de notre petit nuage.
— Cela me fait tellement de bien de te retrouver, ma Douce. C’est… juste merveilleux, dit-il le souffle un peu court.
J’embrasse sa joue, descends le long de sa mâchoire et finis par poser mes lèvres sur les siennes sans parvenir à me départir de mon sourire comblé.
— Tu es merveilleux et tu portes très bien ton nom de scène. J’adore tes câlins, beau Lord.
— Il n’y a qu’avec toi que je ressens tout ça… Qu’est-ce qu’on a été bêtes d’arrêter…
Je repousse comme je peux l’image des deux hommes de la maison qui cherche à se faufiler dans mon esprit, faisant monter ce sentiment de culpabilité que je mérite tout en rêvant de le voir disparaître, et glisse une main dans ses cheveux pour libérer son front humide des mèches rebelles qui s’y trouvaient.
— Difficile de le nier après ça, tu as raison… Pardon mais je crois qu’il va falloir que tu te fasses maquiller le dos, si tu danses, ce soir, j’ai marqué mon territoire. Promis, je ne l’ai pas fait exprès.
— Maquiller mon dos ? Non, ça devrait encore plus exciter les spectatrices, un peu comme des blessures de guerre, tu vois ? rit-il. D’ailleurs, je ne vais malheureusement pas trop devoir tarder, David m’attend. On a un show privé, d’après ce qu’il m’a dit. J’aimerais annuler, mais je n’ai pas envie de le mettre dans la galère en le laissant se débrouiller tout seul.
— Hum… Pour ça, il va falloir que tu arrives à me déloger de tes bras, bon courage, pouffé-je en passant mes mains dans son dos pour m’agripper à lui.
— Et on fait quoi si je n’ai pas du tout envie de te déloger ? m’interroge-t-il en reprenant ses caresses et ses baisers sur ma peau nue qui frissonne.
— Excellente question… J’ai bien quelques idées, mais si tu dois partir… on verra ça un autre jour. Tant pis pour les orgasmes. Au moins, Rachel va être contente, pour une fois, je ne serai pas en retard, ris-je en me levant.
— Oh, mais je croyais que tu ne voulais pas partir ! Un peu de retard, c’est si grave que ça ?
— Je te suggère un second round sous la douche, parce que j’ai grandement besoin de me rafraîchir… Et autant lier l’utile et l’agréable, non ?
J’ai un peu l’impression de réveiller un fauve en lui collant sous le nez une pièce de viande en prononçant ces mots. Hugo se lève à son tour du canapé et je fuis rapidement à l’étage du duplex pour gagner la salle de bain. Etant donné qu’il me rattrape dans l’escalier et prend un malin plaisir à me goûter et me torturer comme j’ai pu le faire avec lui tout à l’heure, puis que nous entamons dangereusement le ballon d’eau chaude, je quitte son appartement plus vraiment en avance, et lui non plus, d’ailleurs.
Une seule question me tourne en tête quand je prends ma voiture : comment ai-je fait pour me passer de lui aussi longtemps ?
Annotations