Amelia (1ère partie)

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 La mère d’Audrey fut opérée en urgence quelques jours plus tard et entama ensuite une lente convalescence, puis contrairement à ce que nous avions tous supposé, mon amie partit comme prévu à Florence en septembre. Je sais qu’elle aurait préféré rester auprès des siens, voire renoncer à son année Erasmus, mais sa mère refusa que sa fille se prive d’une telle opportunité à cause d’elle. Quant à moi, je m’apprêtais à entrer en fac de sciences, mais ce nouveau départ n’en était finalement pas tellement un : Ma famille habitait trop près de Lyon pour que je prenne un appart en ville, d’autant qu’on ne roulait pas sur l’or…

 Audrey partit sur des promesses de correspondances régulières qu’elle tint effectivement. Je recevais quasi quotidiennement des lettres, puis de plus en plus des mails, Internet étant en plein essor en ce début de nouveau millénaire. Mon petit plaisir de la journée était alors de me précipiter chaque soir au cybercafé du coin pour découvrir la dernière livraison d’Audrey.

 Mes premiers mois en DEUG « Mathématiques et Informatique » furent difficiles. Je me retrouvai dans un amphi rempli d’inconnus et dont pas un ne semblait vouloir me connaître. Les profs paraissaient mettre un point d’honneur à ne retenir le nom d’aucun de leurs étudiants. Le rythme de travail n’était pas très intense, mais d’après certains «deuxième année », tout s’accélérerait brusquement à l’approche des partiels.

 J’étais de toute façon en esprit davantage à Florence qu’à Lyon, et je ne nouai donc pas beaucoup de contacts dans ma section. Je voyais beaucoup Luc qui n’était pas dans une situation si différente de la mienne car Sandra était souvent en stage à l’étranger du fait de son école de commerce. Quand il déprimait, il passait me chercher à la sortie des cours et nous allions boire un coup à la santé de nos belles et à nos retrouvailles.

 Et puis un soir de novembre, mon père me tendit un coupon jaune à mon retour de la fac :

 « Il y a eu un avis de passage du facteur… une lettre recommandée pour toi ».

 Je regardai intensément le document comme pour en percer le mystère. Mon père m’observait d’un air suspicieux :

 « C’est quoi ?

 - Comment veux-tu que je le sache ?

 - C’est peut-être cette histoire de l’année dernière ?... une convocation au tribunal ! »

 Mon père faisait allusion à un incident stupide datant de quelques mois : à la fin d’une fête d’anniversaire, une voiture de la BAC avait pilé juste devant nous alors que nous fumions un joint dans la rue avec quelques copains… Nous en fûmes quittes pour la confiscation de la « matière première »… Bien sûr, ma sœur avait jugé bon de mettre au courant mes parents… Du reste, j'étais sceptique sur le fait que la justice française encombre davantage ses tribunaux pour une histoire de joint partagé en soirée...

 Le lendemain matin, à la poste, il y avait bien une lettre à mon nom qui m’attendait… Elle venait d’Italie. Je déchirai fébrilement l’enveloppe et découvrit à l’intérieur un billet de train aller-retour Lyon-Florence réservé pour le 28 décembre, avec retour le 6 janvier… Audrey savait que j’aurais difficilement pu me payer un tel voyage et cette merveilleuse surprise venait évidemment d’elle ! Une difficulté demeurait : J’étais déjà invité par Luc et Sandra le soir du Nouvel An. Lorsque je leur annonçai la nouvelle au téléphone, je découvris qu’ils étaient déjà au courant de tout :

 - « Ah je vois… C’est un véritable complot… Mais alors, cette fête de Nouvel An à laquelle vous m’avez invité ?...

 - C’est du bidon !... C’était juste pour être sûr que tu n’avais pas pris d’engagement ailleurs !

 - Mais du coup, qu’est-ce que vous allez faire le 31 décembre ?

 - On comptera les douze coups de minuit piazza del Duomo avec toi et Audrey !

 - Quoi ?...

 - Rassure-toi… On ne restera à Florence que trois jours ! Ainsi, on n’empiètera pas sur vos retrouvailles ! » s’amusa Luc.

 - Vous êtes de sacrés cachotiers ! Bon, la chose qui me gêne un peu, c’est qu’Audrey ait payé mon billet… Ca fait une somme…

 - Je vais te mettre à l’aise tout de suite : on s’est tous les trois cotisé pour le payer. Ça fait un moment qu’on en parlait avec Audrey, et soit certain qu’on n’attend rien en retour… Ah si ! que tu viennes la semaine prochaine dîner chez Sandra et moi pour ton anniversaire ! J’ai prévu un plat dont tu me diras des nouvelles !

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