Aloysius (1ère partie)
Le temps passa très vite jusqu’aux vacances de Noël sans que je trouve l’occasion –ou peut-être l’envie- de révéler à Audrey ce qui s’était passé avec nos amis. Nous nous retrouvâmes donc le 28 décembre au soir, Sandra, Luc et moi, à la gare de Lyon-Part-Dieu, tout excités par la perspective du voyage en train de nuit. Traverser pendant son sommeil villes, paysages, pays, m’a toujours semblé un peu magique. Nous découvrîmes notre cabine, si exigüe que s’y changer à trois pour se mettre en vêtement de nuit ressemblait à ces numéros de cirques où des contorsionnistes enfermés dans un boîte minuscule parviennent à se débarrasser de leurs chaînes. Sandra tenta de retirer discrètement son soutien-gorge en se tournant vers la cloison, sans parvenir à cacher complètement ses formes avantageuses cependant…
Nous arrivâmes à Florence au petit matin. J’avais encore très peu voyagé à l’époque et c’était seulement la deuxième fois que j’allais en Italie. Tout me semblait extraordinairement exotique. « Santa Maria Novella » ! Même le nom de la gare me ravissait ! Nous tombâmes dans les bras d’Audrey qui nous attendait sur le quai … Je me surpris à penser qu’elle n’avait pas changé alors que nous n’avions été séparés que trois mois…
Nous nous mîmes en marche vers la « locanda », notre amie habitant l’une de ces auberges typiquement italiennes, ses logeurs en étant les propriétaires. Elle payait ainsi un loyer modeste pour un logement en plein cœur de la vieille ville, et ce en échange des menus services qu’elle rendait aux hôteliers et qui consistaient essentiellement à répondre au téléphone et à prendre les réservations en leur absence. L’auberge était d’ailleurs fermée pour les fêtes, les propriétaires étant chez leurs enfants en Lombardie. Audrey ne cessait de parler, nous interrogeant sur notre voyage et répondant aux questions que nous lui posions sur sa vie en Toscane.
Florence ne correspondait pas à l’idée que je m’en étais faite. Je m’étais imaginé une ville baroque toute en courbes et volutes. Or c’était tout le contraire : des palais semblables à des forteresses, des églises à des donjons médiévaux, des rues pavées tranchant comme autant de saignées l’océan des toits et de chaque côté, des édifices austères couronnés par de larges avancées de charpente, ne permettant que rarement au soleil de pénétrer jusqu’au sol ; toute une architecture solennelle et symétrique proclamant par tous ses frontons, chapiteaux, lourds appareillages en pierre de taille, son tribut à la sévérité majestueuse de la Rome antique. Et puis, soudain, entre deux bâtiments, colossal et gigantesque, tel une muraille verte et rose irisée par la faible lueur du soleil d’hiver : le duomo ! A Florence, tout ramène à lui. Tel un sémaphore dont les fondations irrigueraient toute la ville, il aimante les pas du promeneur qui ne déambule jamais très longtemps dans la cité sans tomber à nouveau sur sa phénoménale verticalité. Quand on croit s’en éloigner en gravissant les collines qui entourent la ville, passant sans transition du lacis de ruelles presque étouffant à un paysage de coteaux inchangé depuis l’époque où la Toscane s’appelait l’Etrurie, on le retrouve plus massif et impressionnant que jamais, car c’est de loin que l’on mesure le mieux le caractère gigantesque de ce paquebot de marbre blanc surmonté d’un dôme aux proportions inhumaines. Pas étonnant que les maîtres d’œuvre du chantier prirent Brunelleschi pour un fou quand il leur annonça les dimensions qu’il comptait donner à cette coupole !
Nous arrivâmes enfin à la locanda Orchidea, sise dans le palais Donati, une de ces «maison-tours » florentines flanquées d’un lourd donjon médiéval. La solennelle majesté des lieux, sensible dès l’entrée voutée aux amples proportions, rappelait partout que nous étions dans un palazzo du XIIème siècle. En temps habituel, Audrey occupait une pièce de l’appartement des propriétaires, mais pendant la fermeture, nous pûmes loger dans l’une des chambres de la locanda. Ma belle nous avait réservé la plus impressionnante, avec son plafond perché à une hauteur démesurée et sa fenêtre bordée de « coussièges », ces bancs en pierre taillés de part et d’autre de l’embrasure.
Audrey semblait parfaitement épanouie et je la trouvais plus resplendissante que jamais. D’ailleurs, contrairement à l’impression que j’avais eue en sortant du train, il y avait bien quelque chose qui avait changé chez elle. Il émanait d’elle une aisance indéfinissable… Mon amie s’était-elle déjà à ce point adaptée au pays ? En somme, j’avais quitté une fille, et je retrouvais une femme…
La fatigue de la courte nuit commença à se faire sentir. Notre amie nous proposa donc de nous reposer une heure avant de mettre au point le programme des journées à venir. Je m’allongeai sur le lit étonnamment haut perché dans lequel je m’endormis immédiatement. Je fis un rêve : Je suivais Audrey à travers une cité étrange à l’architecture grandiose et tarabiscotée. Plus tard, et sans aucune cohérence, je me retrouvais à lui faire l’amour devant Sandra et Luc qui non seulement regardaient attentivement la scène, mais me prodiguaient des conseils sur la façon de m’y prendre ! Ils m’invitaient ainsi à ralentir la cadence, mais emporté par une montée irrépressible du plaisir, j’en étais incapable… Je me réveillai alors, Audrey agenouillée entre mes jambes et mon sexe durci dans sa bouche, au moment où un orgasme fulgurant tendait mon corps comme un arc, les lèvres de ma belle comme soudées à ma queue et ne s’en détachant qu’une fois les giclées de ma jouissance terminées !
« Hummm !... Ça m’avait manqué ! susurra-t-elle en me regarda avec gourmandise.
- Le séjour commence bien ! » soufflai-je d’une voix encore ensommeillée.
Audrey se releva et me jeta mon caleçon au visage en riant :
« Habille-toi, paresseux ! On sort ! »
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