Aldo parmi les hommes

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Je menais une vie paisible au bord de la rivière quand un jeune chien se jeta sur moi en jappant tout excité. Je me mis à gonfler pour le dissuader de me mordre, mais la pauvre bête n’en fit pas cas et planta ses crocs, libérant ainsi le venin, que je gardai sur le dessus de ma peau, dans sa gueule. Je l’entendis gémir et le vit s’enfuir.

J’étais sous le choc de la morsure et peiné pour le pauvre animal, quand je fus attrapé par des mains zumaines.

Je fermais les yeux, persuadé que la mort approchait. À ma grande surprise, j’entendis une voix douce et je me sentis tout de suite en confiance. J’ouvris alors un œil, puis les deux, et je vis le plus doux des visages que la terre m’ait permis de rencontrer : Ses cheveux brillaient sous le soleil et les étoiles dansaient dans ses yeux. Elle semblait lumineuse, presque irréelle, telle un ange.

Je ressentis comme une sorte de torpeur et je me laissai porter hors de mon territoire sans la moindre résistance, confiant et paisible. Puis la torpeur devint plus lourde et je m’endormis d’un sommeil profond.

À mon réveil, j’avais retrouvé toute ma vigueur et je sautai comme un jeunot. Mon premier réflexe fut de m’enfuir de chez les zumains mais une sorte d’instinct inexplicable me fit rester auprès de la zumaine que je considérais, à partir de cet instant, comme mon ange gardien. Je décidai donc de l’appeler Ange

Je vis le jeune chien gambader allègrement, il paraissait aller bien. Il jappa à ma vue et resta à bonne distance.

Ange me présenta à deux autres zumai

– Regardez le joli petit crapaud que j’ai soigné ! Il s’appelle Aldo.

Prune et Hervé s’avancèrent et me regardèrent :

– Oh ! Comme il est mignon ! Regarde Hervé, on dirait un prince ! s’exclama la zumaine que je baptisai Prune à cause de sa couleur de cheveux et de son odeur sucrée.

Le zumain aux cheveux couleur de blé, qui s’appelait Hervé, la regardait, comme un crapaud regarde sa femelle.

Tandis que je le fixais avec défi, il affirma :

– Aldo le crapaud météo, ça sonne bien, je trouve.

Adopté à l’unanimité, Ange me posa dans un abri qui me parut bien confortable et c'est ainsi que mes trois zumains entrèrent dans ma vie.

Certains jours, je grimpais sur un arbre minuscule avec de drôles de branches qu'ils appelaient échelle et j’entendais alors des rires et des exclamations de joie.

– Il va faire un soleil radieux !

Mais parfois, je n’avais pas envie de grimper et me cachai sous les feuilles et j’entendais l’un des zumains s’exclamer :

– Ah, il va pleuvoir aujourd’hui. Mes champs vont enfin être arrosés !

En fait, quoi que je fasse, mes zumains étaient toujours ravis.

Après un temps d’observation, je compris que je leur indiquais la pluie le soleil et tout ce qu’un crapaud bien éduqué maîtrise. Je ressentis alors à quel point j’étais important et utile. C’est donc avec entrain que, chaque jour, je les renseignais à ma manière sur le temps qu’il faisait.

Après ce dur labeur de météorologue, Ange me sortait du bocal et me laissait sautiller sur l’herbe tendre pour quérir ma pitance. Il y avait toujours ce jeune chiot qui jappait autour de moi, à la fois curieux et méfiant. C’est qu’il avait retenu la leçon !

J’aimais bien le taquiner ; nous passions de folles journées : Lui à se rouler dans l’herbe, moi à essayer de grimper sur son dos. J’entendais alors les rires des zumains et leur joie de vivre.

La vie était belle, les journées coulaient paisibles, je ne manquais de rien, jusqu’à ce terrible jour…

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