Chapitre 29, partie 2 :

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Angelo DeNil :

— J'ai deux choses pour toi, m'informe Will.

— Je n'aime pas les surprises, bougonné-je en fronçant les sourcils.

— Hum... je m'en doutais, mais tu te tais, et tu acceptes, ok ?

— Je n'en sais rien, tout dépend de ce que tu entends par " choses ".

Une main quitte son dos et apparaît sous mon nez. Je fixe la boite en carton rose qu'il secoue tout doucement.

— Qu'est-ce que c'est ? demandé-je avec méfiance.

— Ouvre-la !

Je récupère le paquet que je soupèse. Ce n'est pas lourd, on dirait même qu'il est vide. Je défais les bouts de ruban adhésif de chaque côté et l'ouvre avec précaution. Le souffle coupé, je scrute les six macarons colorés qui se présentent à moi.

— Tu te souviens de ça ? murmuré-je, ébahi.

— Bien sûr, c'était le nom de ton chien.

Je cherche son regard pour ne plus le lâcher. J'ai presque envie de pleurer. Je n'ai pas mangé ces petits gâteaux depuis un long moment. Ça fait bien longtemps que nous n'avons plus les moyens d'en acheter.

— Merci, Will, dis-je sincèrement, le cœur lourd de gratitude.

— Avec plaisir, s'enthousiasme-t-il. Bon, maintenant tu dois me promettre de ne pas t'énerver.

Je fronce les sourcils. Lorsque quelqu'un prononce cette phrase, il y a justement une forte chance pour qu'on se mette en colère.

Il me montre sa deuxième main sans me laisser l'occasion de répondre. Je fixe d'un mauvais œil la boite rectangulaire qu'il me montre.

— Hors de question ! m'écrié-je en secouant la tête.

— C'est un cadeau, tu n'as pas d'autre choix que de l'accepter.

— Je refuse. Je ne veux pas de ta charité.

— Charité ? répète-t-il comme si ce mot n'avait aucun sens. Ce n'est pas ça, crois-moi.

— Pourquoi tu m'apportes ça ? Tu dois bien te douter que je ne le prendrais pas.

— J'avais prévu cette réaction, acquiesce-t-il en pointant son index sous mon nez.

— Alors pourquoi tu l'as fait ? m'agacé-je en regardant à nouveau la boite qu'il tient dans sa paume.

— C'est un cadeau.

— Que je n'accepterai pas. Je ne sais même pas me servir de ces trucs.

— Je le sais, s'amuse-t-il, mais tu vas apprendre.

— Non.

— Bien sûr que si.

Il récupère ma main et dépose son présent dedans, m'incitant ainsi à l'accepter. Je le pose sur la marche du perron, juste à côté de lui en secouant la tête.

— C'est pour toi, Angelo, dit-il frustré.

— Pourquoi tu m'offres un téléphone ?

— C'est surtout pour moi que je le fais, en réalité.

— Comment ça ?

— Je veux pouvoir m'assurer à n'importe quel moment que tu vas bien.

— Je ne suis pas fait en sucre, marmonné-je un peu vexé.

— Je veux bien te croire, mais j'aurai l'esprit plus tranquille si je peux te joindre lorsque j'en ai envie.

Un vacarme provenant de l'interieur de la maison nous interrompt. Je grogne d'agacement.

— Putain, elle a recommencé, me lamenté-je en frappant mon front du plat de la main.

— C'était quoi ce bruit ?

— C'est ma mère, elle nous prend pour des cibles mouvantes.

— Quoi ? s'exclame-t-il horrifié.

J'éclate de rire, non pas parce que la situation est amusante. Elle ne l'est définitivement pas, c'est simplement que l'expression sur le visage de Will est hilarante.

— Elle fait ça souvent ?

— Ça arrive quelquefois.

— C'est une raison de plus pour que tu acceptes le téléphone !

Je roule des yeux, il ne me lâchera pas avec cette histoire. Je me lève sans répondre, glisse deux doigts sur le bord de mes lèvres et siffle puissamment. Un instant plus tard, le visage de Simona apparaît à travers la fenêtre de sa cuisine.

— Que se passe-t-il, mon chat ? demande-t-elle en me souriant.

— Bérénice pète un plomb, tu peux tenter de la calmer ? Je n'arrive à rien et Loli est enfermée dans sa chambre.

Je la vois soupirer plus que je ne l'entends, puis ses yeux se posent sur Marx. Elle l'observe un instant avant de disparaître pour nous rejoindre sur le perron en à peine trente secondes.

— Vous n'êtes pas blessés ? s'enquiert-elle en attrapant mon visage pour l'examiner sous tous les angles.

— Non, Loli a failli se prendre une assiette sur la tête et moi j'ai évité le verre de justesse. Enfin ouais, heureusement que j'ai des réflexes.

Mona secoue la tête, visiblement mécontente. Elle a l'habitude d'entendre ce genre de propos mais je n'ai pas songé au fait que Will écoute tout ce qui sort de ma bouche. Il me fixe avec intérêt, ses yeux retranscrivent toute l'angoisse qu'il ressent. Ça a le don de faire battre mon cœur.

— Je vais bien, dis-je en le regardant.

C'est à cet instant que Simona se tourne vers lui.

— Qui es-tu jeune homme ?

— Will Marx, un ami, répond-il en lui tendant la main.

— Pas un ami, contré-je.

Will semble déçu, mais ne dit rien. Simona quant à elle, me regarde en attendant que je sois plus précis.

— On est ensemble, c'est ce qui a fait vriller la camée, grogné-je en repensant à la violence de ses réactions.

— Ensemble ? Tu veux dire que...

— Oui, réponds-je avant qu'elle finisse sa phrase.

Elle rit et semble réellement heureuse alors qu'elle m'attire dans ses bras. Simona m'enlace avec force puis réitère le même geste avec Will qui sourit en tapotant son dos.

— Félicitations, s'émerveille-t-elle. Je suis si contente pour toi !

J'embrasse sa joue en me disant que j'aurais apprécié avoir la même réaction venant de ma mère.

— Si tu lui fais du mal, déclare la voisine en levant son doigt sous le nez de Will, je t'émascule.

— Bien madame, répond-il en souriant.

Son sourire est légèrement crispé, ça m'amuse.

— Bon, je vais calmer le fauve, finit-elle par dire avant de nous quitter.

Je reprends place sur les marches, suivi de Will qui s'était également levé quand Simona est arrivée. On peut clairement l'entendre hurler et réprimander ma mère. Cette femme m'épate.

— Elle a l'air d'avoir un sacré caractère, s'amuse Will.

— En effet, approuvé-je. J'ignore ce que je ferais sans elle.

— Hum... j'imagine, oui.

Je laisse tomber ma tête contre son épaule alors que son bras passe dans mon dos pour m'approcher davantage. Je récupère la boite de gâteaux qu'il m'a apporté, attrape un macaron rose et lui en propose un. Il refuse en me disant que tout est pour moi.

Malgré le bordel que fait Bérénice et tout ce que je vais avoir à ranger ensuite, je me sens léger. C'est agréable, un peu de repos dans le brouhaha de mon esprit.

Heureuse de pouvoir t'aider, murmure Lumière.

Je souris comme un crétin.

— Accepte le portable, insiste encore Marx.

— Je te rembourserai, capitulé-je.

Will est obstiné, je l'ai rapidement compris. Même si je persiste à refuser, il fera en sorte que le téléphone soit en ma possession, quitte à le glisser dans mon sac au lycée.

— Un cadeau ça signifie que c'est gratuit, s'amuse-t-il.

Je tape sa cuisse en soupirant. Il est têtu également.

— Pourquoi tu m'en apportes un neuf alors que le tien est cassé ?

— Il n'est pas neuf, c'est celui que j'utilisais l'année dernière. Et le mien n'est pas cassé, l'écran est simplement fissuré, je le remplacerai plus tard.

— Mouais, montre-moi comment ton engin fonctionne dans ce cas, pas que je fasse n'importe quoi avec.

Pendant la demi-heure qui suit il se réjouit de m'apprendre à utiliser l'appareil. Finalement, ça n'a pas l'air si compliqué. Son numéro est déjà inscrit dans le répertoire, accompagné d'une photo sur laquelle ses joues sont gonflées d'air alors qu'il louche face à l'objectif.

— Est-ce que je vais voir cette tête à chaque fois qu'on parlera ?

— Exactement, ricane-t-il. Je suis beau n'est-ce pas ?

— Tu ressembles à un demeuré mais ouais, tu gardes ton charme légendaire, m'amusé-je.

Il me pince le bras en riant et pointe son propre téléphone devant mon visage.

— Tu fais quoi ?

— Quoi ? Je n'ai pas le droit de voir ta photo illuminer mon écran à chacun de tes appels ?

— Je ne sais pas, qui te dit que je t'appellerai ?

— T'as plutôt intérêt à le faire, sinon ça n'a pas de sens que je t'offre un téléphone. Allez, sourit.

J'obéis en ajoutant mon majeur devant mon visage à l'instant où il prend le cliché. Il l'examine pendant un instant, semble hésiter à râler pour finalement hausser les épaules en souriant.

— On la garde, conclut-il. Ça te ressemble parfaitement, j'aime bien.

La porte d'entrée s'ouvre, Loli s'assoit près de moi en soupirant.

— Mona va finir par l'assommer.

Je ricane face à son exasperation. Notre pauvre voisine doit probablement en avoir ras-le-bol de notre famille de dégénérés.

— Salut, Will, dit-elle en lui faisant un petit signe de la main.

— Oh euh... salut.

— Ne prends pas peur, en général elle dort.

— Il en faudra plus pour m'impressionner.

Il semble sincère mais je ne suis pas idiot, évidemment que tout ce dont il est témoin est loin d'être normal. Je suis étonné qu'il ne soit pas encore parti en certifiant ne plus vouloir de moi. J'ignore combien de temps cela va durer mais je vais en profiter jusqu'à ce qu'il comprenne être trop bien pour le type dérangé que je suis.

— Tu es tombé dans une maison de fous.

Marx me jette un regard en tentant de déceler ma réaction. Je hausse les épaules en souriant. Je suis réellement malade mental, elle ne fait qu'énoncer les faits, et venant de ma petite sœur ce n'est pas une insulte ou un quelconque reproche.

— Je peux gérer, affirme-t-il en posant sa main sur ma cuisse.

— Oh, des macarons !

— Pas touche ! C'est seulement pour moi, feins-je.

— Sers-toi. Je t'en apporterai d'autre, murmure Will à mon oreille.

Je fais glisser le carton vers Lolita en lui offrant un clin d'œil. J'avais prévu de lui en donner, je ne me voyais pas me goinfrer sans partager avec elle.

— Je t'adore toi, lance-t-elle à l'intention de Will, la bouche pleine.

Son sourire fait naître le mien. Il est beaucoup trop beau lorsqu'il me regarde de cette façon.

Il tape sur ses cuisses et se relève. Une fois debout, il m'offre sa main pour que je le suive.

— Je dois me sauver, déclare-t-il en avisant l'heure sur sa montre.

— Ouais, soufflé-je avec déception, et moi j'ai une baraque à ranger.

Il m'effleure d'un regard plein de compassion avant de me souhaiter bon courage. Je hausse les épaules pour feindre la désinvolture.

— Utilise le téléphone, m'ordonne-t-il.

J'acquiesce en roulant des yeux. Il jette un coup d'œil vers ma sœur qui continue de manger, puis dépose un baiser sur ma joue. Mes doigts s'enroulent autour de son poignet alors qu'il amorce un mouvement pour s'éloigner.

— Tu as oublié un truc.

— Ah ? Quoi ? demande-t-il en tâtant ses poches.

Je ris, puis m'approche jusqu'à ce que son souffle chaud cajole ma peau. Je me dresse sur la pointe des pieds pour atteindre son visage. Cet homme est beaucoup trop grand. J'aime sa hauteur, je me sens invincible lorsqu'il me surplombe.

— Embrasse-moi.

Il ne perd pas une seconde et dépose ses lèvres contre les miennes pour un baiser rapide et appuyé. Je ne ressens aucune gêne face à ma sœur qui doit probablement nous fixer avec émerveillement, et visiblement, Will non plus n'y vois aucun inconvénient.

Je suis heureux qu'il soit si naturel et qu'il me rende tactile. Je pourrais errer dans un gouffre d'obscurité, mourir brûlé par les flammes infernales pour apprécier le goût de ses lèvres. Si je hais toujours le reste du monde, mon cœur bat désormais pour lui.

Will s'éloigne, pose son front contre le mien quelques secondes et fait plusieurs pas en arrière. Il lève son téléphone et l'agite près de son oreille.

— Je veux voir ta tête clignoter sur mon écran, m'informe-t-il, alors ne m'oublie pas.

— Ça ne risque pas.

Il m'éblouit de son sourire et part sans plus se retourner.

— Tu as tiré le jackpot, Lolo. Il est carrément beau, s'émerveille ma sœur.

— Je le sais, je ne le mérite pas.

La main de Loli atterrit sur ma tête en une petite tape.

— Arrête tes conneries, vous vous assemblez parfaitement.

— Mouais, on verra d'ici quelques temps.

Elle râle que je suis trop pessimiste alors que Simona sort enfin de la maison.

— La voie est libre les enfants. Elle dort et j'ai tout ramassé.

— C'était mon taffe, ça.

— Pas pour cette fois, va te reposer, Lolo.

Je la remercie et pour la première fois depuis un long moment, lui obéis. Lorsque je rejoins ma chambre, je me laisse tomber sur le lit qui grince bruyamment sous mon poids et la vitesse à laquelle j'ai atterri dessus. Je soupire en souriant au plafond comme un abruti, puis récupère le téléphone dans la poche de mon jogging. Je le déverrouille, observe la photo de Will pendant un long moment puis tente de rédiger un sms que je modifie à plusieurs reprises à cause de la saisie prédictive. J'ouvre le repertoire et ricane devant l'écran en voyant le nom qu'il s'est choisi.

Sms de Angel à WillLeMagnifique :

Merci pour ça, Will le magnifique. Comment m'as-tu nommé ?

Il répond très vite, à tel point que je me demande comment il fait pour taper si rapidement sur son clavier alors que j'ai mis cinq minutes pour un texto de si peu de mots.

Sms de WillLeMagnifique à Angel :

Merci à toi pour ce compliment, je sais que je suis irrésistible. Angel. ;)

Sms de Angel à WillLeMagnifique :

Prends pas la grosse tête, on appelle ça de l'incitation, connard. T'as oublié le " o ".

Sms de WillLeMagnifique à Angel :

Je n'ai rien oublié, je t'assure.

Sms de Angel à WillLeMagnifique :

A. N. G. E. L. O. Crétin !

Sms de WillLeMagnifique à Angel :

Relis sans ce fameux " o ", c'est beaucoup mieux, tu verras. Tu es parfois très lent. X)

Bordel, ce que je peux être con par moments. Je me surprends à rougir devant l'écran, ce qui me fait me sentir toujours plus idiot.

Sms de Angel à WillLeMagnifique :

J'ai capté.

Sms de WillLeMagnifique à Angel :

Enfin. ^^

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