Chapitre 30, partie 2 :

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Will Marx :

Je traine les pieds, suis mes coéquipiers d'un pas lent et peu enthousiaste. D'un côté, je suis heureux de reprendre l'entraînement, d'un autre, j'appréhende car j'ai l'intuition que Carter va me prendre la tête. Je ne l'ai pas croisé aujourd'hui, ni lui, ni Marianna. Par contre, j'ai essuyé plusieurs injures et d'autres paroles qui se voulaient sûrement blessantes. Les gens sont visiblement très peu ouvert d'esprit. De plus, je n'ai pas eu le temps de voir Angelo avant l'entraînement. Ses billes brunes et abyssales m'auraient donné le courage qu'il me manque.

— Je pensais te voir plus enjoué à l'idée de remettre les pieds sur un terrain, lâche Pietro en ralentissant.

— Je suis super content, mais je n'ai pas spécialement envie d'en cogner un ou deux pour leur replacer le cerveau dans le bon sens.

— Tu regrettes d'avoir assumé ? s'enquiert Judas.

— Non, pas de tout. Ça aurait fini par se savoir un jour ou l'autre.

— Garde la tête haute, Faucon. Personne ne t'arrive à la cheville, m'assure mon meilleur ami.

Je lui souris, et pénètre dans les vestiaires en inspirant profondément.

— Heureux de te revoir, capitaine, m'accueille Valentin.

— T'es en forme, j'espère ? continue Ethan.

Je leur réponds en levant le pouce, je n'ai pas spécialement envie de parler mais au moins je sais que ces deux là n'ont rien à redire sur ma situation. Je commence à me déshabiller pour enfiler ma tenue, dans un geste las et mécanique. J'évite volontairement de croiser le regard de mes coéquipiers. Je ne ressens aucune honte mais refuse également d'entrer sur le terrain bouillonnant de colère.

— T'attends quoi ? crache Pietro.

Je relève la tête et suis son regard, c'est à Noah qu'il s'adresse. Il est assis sur l'un des bancs, les bras croisés et le menton relevé.

— Que la voie soit libre.

— C'est à dire ?

— Que je sois certain qu'on ne me saute pas dessus quand je serai à poil, me provoque-t-il, toujours le regard rivé sur mon meilleur ami.

Je fais un pas vers lui, les poings serrés. C'est raté pour commencer l'entraînement en étant calme.

— T'as un problème ? demandé-je en baissant la tête pour le dévisager.

— Je n'ai pas forcément envie de me faire bouffer la queue ou m'en prendre une dans le cul quand j'aurais le dos tourné.

— T'es bien trop insignifiant pour ça, ne te pense pas plus intéressant que ce que tu ne seras jamais.

Il se redresse pour me faire face, son visage à quelques centimètres du mien.

— Je t'ai déjà dit que je ne voulais pas d'une tapette comme capitaine.

— Et il me semble t'avoir répondu que je ne lâcherai pas mon équipe pour ta gueule, Carter.

— Ton équipe ? ricane-t-il. Ça fait des semaines que tu n'as pas joué avec nous.

— J'étais blessé du con, tout le monde le sait. Ne fais pas le malin, c'est à moi que tu dois ta place chez les Lions. Je n'ai qu'un mot à dire pour que tu passes les prochains matchs les fesses sur le banc des remplaçants.

Son visage blêmit, il ne sait plus quoi dire. C'est faux, mais ça, il l'ignore. Étant capitaine, j'ai un droit de regard sur qui joue durant nos rencontres, mais c'est notre coach qui prend la décision finale.

— C'est ta nouvelle petite copine qui t'a refait le portrait ? s'amuse-t-il en pointant mon visage, désireux de changer de sujet.

— Nan, c'est ta mère quand je l'ai sauté, craché-je amèrement.

Mes propres sont déplacés, ce n'est pas dans mes habitudes d'injurier de la sorte. Je tuerai le premier qui ose parler ainsi de ma mère, mais Carter dépasse les bornes. Il cherche à me blesser, ce n'est que le revers de la médaille.

Des sifflements s'élèvent dans les vestiaires, mes coéquipiers sont mitigés quant à la façon d'interpréter mes paroles. Judas a ricané, récoltant un regard mauvais de mon vis-à-vis. Je vois le poing de Carter se lever face à moi, le visage crispé et le regard envahi d'une colère noire. Je m'apprête à riposter ou encaisser le coup, j'ignore quelle option choisir. Je mérite qu'il m'en colle une pour avoir prononcé une telle bêtise, mais lui en mérite davantage pour sa stupidité et sa méchanceté gratuite. Je n'ai pas le temps de me décider, Pietro me repousse et se place devant moi.

— Touche-le et je te fais bouffer toutes tes dents, Carter.

— Quoi ? Toi aussi il t'encule ? fulmine-t-il.

— Il serait temps de revoir tes priorités. Au lieu de juger l'intimité des autres, pense à ta gueule et ta place dans notre équipe. Ose lever la main sur mon frère et il ne sera pas le seul à s'acharner sur ton cul, t'as pigé ?

J'aperçois Judas approcher, sûrement aux aguets si la situation dégénère. Jordan se tient près de Noah et me fixe sévèrement. La porte des vestiaires grince alors que la tension est palpable, tendue et survoltée.

— C'est quoi ce raffut ? gronde Murray. On vous entend pester de l'extérieur.

Personne ne répond. Beaucoup continuent de se toiser, de se lancer des regards mauvais et des provocations silencieuses, alors que certains comme Maël ou Valentin restent dans leur coin, attendent que les esprits se calment ou dérapent, qui sait...

— Où est ta tenue, Carter ? On n'a pas la journée. Bougez-vous le cul !

— Marx suce des bites, coach. Je ne me changerais pas le temps qu'il sera là, informe Noah les dents serrées et ignorant Pietro qui l'assassine du regard.

J'ai des envies de meurtres, j'aimerais lui faire regretter toutes ses paroles et insinuations pourries jusqu'à ce qu'il rampe et supplie pour que le supplice cesse. J'ai rarement ce genre de pensées, viles et sournoises mais il m'a mis dans un tel état de colère lors de la soirée, en entendant les idioties répandues dans les couloirs et là, à l'instant, que je n'arrive plus à maîtriser mon self-control.

— Je connais les rumeurs colportées dans les couloirs et peu m'importe de savoir si elles sont vraies ou non. C'est d'ordre privé, et cela ne regarde absolument personne, sermonne le coach. Tu t'es changé et douché un nombre incalculable de fois avec chacun de tes coéquipiers ici présent, dont Will fait parti. T'a-t-il déjà mis mal à l'aise dans sa façon de se comporter ?

— Nan, bougonne Carter, mais nous n'étions pas au courant.

— En quoi ça change la situation ? Si j'entends encore un seul propos homophobe sortir de la bouche d'un de mes joueurs, il sera mis sur la touche pour le reste de la saison et récoltera un blâme visible dans son dossier scolaire pour intolérance. Est-ce bien clair ?

Certains hochent la tête tandis que d'autres râlent. Noah n'est sûrement pas le seul dérangé par le fait que je sois avec DeNil mais s'ils ne se font pas entendre, je m'en moque.

— Me suis-je bien fait comprendre ? insiste Murray en grognant d'insatisfaction.

Les réponses fusent, Noah braille un " ouais " peu convaincant. Sa réaction me fait sourire. Il a perdu à son propre jeu. Pourtant, j'ai bien peur que ce ne soit pas terminé.

— Personne ne sortira d'ici avant que Noah Carter soit apprêté pour l'entraînement, continue le coach visiblement décidé à lui donner une bonne leçon.

Pietro s'éloigne, laisse la place nécessaire à ce connard pour s'habiller. Je l'ignore, il ne m'interesse pas. Il n'y a qu'une personne capable de me faire mourir de désir et elle n'est pas ici en ce moment. Angelo est le seul que j'aimerais admirer se dévêtir jusqu'à la combustion spontanée.

— Nous n'en avons pas terminé, me menace Carter alors que nous rejoignons le terrain.

— Si tu te penses capable de me mettre à terre, débile, regarde-toi dans un miroir et rappelle-toi que je t'ai cassé le nez pas plus tard que la semaine dernière.

— Tu ne seras pas toujours entouré de tes potes.

— Ce que tu peux être con, ricané-je. Je n'ai besoin de personne pour te prouver que tu ne vaux rien.

— Ouais, t'iras pleurer entre les jambes de ton taré de mec quand je te serai tombé dessus.

Je serre les poings. Ça me démange de lui en coller une, mais je me dois d'être plus intelligent que lui.

— Ce n'est pas au programme. Par contre, je peux trouver tout un tas d'occupations bien plus passionnantes en étant agenouillé devant Angelo.

Il peste mais je ne m'en préoccupe pas. J'ai mieux à faire que de me battre avec lui.

Je me déchaîne sur le terrain, déverse ma rage et mon besoin de me calmer sur le ballon. Je plains Judas qui peine à arrêter mes frappes mais, bon sang, ça fait du bien. Je me retrouve enfin dans mon élément, et j'en profite jusqu'à ce que mes muscles brûlent à n'en plus pouvoir.

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