Jour 3 micro-nouvelle de moins de 650 mots : Et pourquoi donc que les Anglais n’aiment pas les artichauts ?
C’était il y a bien longtemps. Ils avaient déjà étendu leur domination sur tout le continent, sauf une région qui résistait toujours, à l’extrême ouest. Les Anglais, malgré leur humour avaient la manie de tout vouloir uniformiser, sans doute pour assoir encore plus leur souveraineté sur tout le continent. Ils décidèrent donc, un jour, que les artichauts feraient entre 4 et 5 pouces de diamètre et 5 pouces de hauteur (sans la tige). Ils devraient peser moins de1/2 livre.
Les Bretons sont têtus. Ça, on le sait. Mais en plus, ils peuvent être très cons. En particulier quand on leur impose un truc qui ne leur plait pas. Déjà, quand il avait fallu leur faire comprendre que ce chardon pouvait être comestible, eux qui mangeaient principalement des avalou-douar (patates), des irvinenn (navets) des favenn-c’hlas (haricots) et des kignen (de l’ail). Tout le reste est arrivé après… D’ailleurs, tous les noms bretons du reste sont basés sur l’anglais (ce qui prouve que ce que je raconte sur la domination britannique est exact, non ?). C’est le cas des penn-ognon (pour les oignons ou ognons en anglais) des chalotezenn (shallot en anglais pour échalotes).
Bref, tout ça pour dire que le calibrage des artichauts les gonflait sérieusement. Ils appelaient ça artichao ou artichaodenn, selon qu’ils étaient du Finistère nord ou sud (ou l’inverse, je ne sais plus). Ils étaient juste content de faire la nique aux Anglais qui avaient été obligés d’appeler ça artichoke dans leur langue, sans forcément savoir que ça venait de l’arabe ḥáršafa, transformé en hispano arabe en haršûfa, puis en espagnol en alcachofa et enfin dans un dialecte du Piémont en articiocch.
Je m’égare, je me disperse…
Donc, pour faire la nique aux Grands Bretons, les Bretons – se considérant tout de même comme plus grands que leurs voisins outre-Channel – décidèrent que leurs artichao feraient une taille tout sauf réglementaire. C’était d’autant plus facile qu’ils n’en avaient jamais eu rien à faire du système de mesure anglais. Juste pour les emmerder, ils avaient un système très compliqué de mesure des liquides par exemple : la chopine, le tierçon, la bouteille ou pinte, le pot, le pichet, le galon, la jallaye, le setier, le muid, le poinçon, le costeretz, la somme, la barrique, le tonneau et demi-tonneau, la pipe. Parfois le galon valait deux pots, et quatre galons faisaient le setier. Le muid variait de 7 à 30 setiers. La pipe valait 3 sommes, celle-ci était le double du costeretz, et le tonneau valait 2 muids.
Je vous épargne les mesures pour les grains parce que c’est pire. Allez, non je ne vous l’épargne pas : le tonneau qui valait 12 perrées, la perrée qui valait 2 boisseaux ou 4 quarts, le boisseau, qui valait 2 quarts ou 8 godets et le quart qui valait 4 godets. Il y avait une mesure dite « vieille » qui valait les 3/4 de cette mesure.
Tous les moyens étaient et sont toujours bons pour faire ch..er les envahisseurs !
Vous vous doutez bien que le respect de la taille des artichao, ils n’en avaient rien à f…. Au contraire, ils faisaient exprès de les faire systématiquement plus gros que la « norme anglaise ».
Du coup, en représailles, les « envahisseurs » comme les appelaient toujours les Bretons, firent une grande campagne de communication, durant plusieurs années pour expliquer que les artichokes bretons n’étaient pas bons… Depuis ce temps, là, las Anglais n’aiment pas les artichauts et en particulier les artichao bretons.
Annotations
Versions