Chapitre 2 (3 sur 3)

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 Du coin de l’œil, tu discernes une tringle à vêtement posée à côté de toi. Ça te donne une idée. Tes doigts se referment sur la tige en métal, tu la lèves devant ton visage, et, de ton autre main, tu la tords pour en faire une ligne aussi droite que possible. Cet exercice te permet de sortir de ta torpeur. Tu réussis lentement à te remettre debout et, à pas mesurés, tu progresses dans le dos du vampire hypnotisé. Tu ne comprends pas pourquoi cet enfoiré bloque sur la gamine, mais tu ne vas pas attendre qu’il retrouve sa lucidité pour le savoir.

 Tina et la môme sanglotent doucement devant la créature. Soudain, le vampire tend sa main griffue vers la petite. Il semble attendre qu’elle lui donne quelque chose.

 Tu n’es plus qu’à une enjambée de lui. Tenant ta tringle comme une corde à piano, tu glisses la longue tige de métal sous son cou et serres de toutes tes forces. Le suceur de sang se redresse de toute sa hauteur et commence à s’agiter, alors que, pendu à lui par derrière, tu tentes de l’étrangler.

 Le monstre porte les mains à sa gorge et essaie de te faire lâcher prise. Tes jambes battent dans l’air à un mètre au-dessus du sol. Le vampire tourne sur lui-même pour t’éjecter, mais ta hargne est la plus forte. Tu t’arc-boutes contre son dos et accentues ta pression sur sa gorge avec une plainte désespérée.

 — Tu vas crever, bordel ?

 Le métal trace une ligne sanglante sur le cou du vampire, mais la blessure, peu profonde, ne suffit pas à l’asphyxier.

 — Putain, Gerry ! Réveille-toi !

 Gerry ne réagit toujours pas. En revanche, Tina a saisi le message. Elle se redresse et se dirige vers le pistolet que tu as fait tomber lors de ta chute contre le mur. Pour éviter de se prendre un coup de griffe, elle allume sa lampe à la lumière fatiguée et la braque sur le vampire, le faisant reculer d’un pas. Elle en profite pour se faufiler jusqu’au flingue. Elle arme le chien et vise la tête de la créature, mais le monstre, enragé, gigote en tous sens.

 — Merde ! hurle-t-elle. Stabilise-le !

 — Je fais ce que je peux ! Mais cette saloperie est plus résistante qu’un bœuf !

 Dans un ultime effort, tu tires de toutes tes forces en poussant un cri bestial qui resonne avec rage dans la pièce.

 Tu sens la tringle s’enfoncer plus profondément dans la chair. Le vampire, à bout de souffle, émet une respiration bruyante et finit par plier les genoux. Il tombe à quatre pattes, la langue pendante. Longue d’une cinquantaine de centimètres, elle remue avec fureur d’un côté et de l’autre de sa bouche.

 Tina se baisse pour ramasser ton couteau. D’une démarche affirmée, elle traverse la salle et avec une habileté surprenante, le plante dans l’appendice baveux, le clouant au parquet. Sans lui laisser le temps de se dégager, Tina enfonce le canon de son arme dans la gorge offerte.

 Juste avant la détonation, tu t’écartes sur la gauche afin d’éviter la balle. L’arrière du crâne explose dans une projection de matières grises sur le mur derrière toi. Harassé, tu te laisses tomber sur le côté. Tu as du mal à réaliser, mais cet enfoiré de vampire est mort.

 — Bien joué ! complimentes-tu Tina dans un souffle. Sans toi, on était foutus.

 La blonde ne réalise pas non plus l’exploit qu’elle vient d’accomplir. Elle se fend d’un discret hochement de tête, lâche le flingue, qui chute lourdement à ses pieds. La respiration saccadée, elle contemple la tête explosée du vampire.

 — On l’a eu, hein ? C’est pas un rêve ? demande-telle d’une voix lointaine.

 — Tu l’as plombé, ce fumier. Tu peux en être sûre.

 Tina acquiesce à nouveau, puis s’en va retrouver la môme, toujours prostrée contre le mur du fond.

 Tu te redresses et étires tes muscles malmenés par ton rodéo sauvage, avant de reprendre ton couteau. La lame se retire de la chair noirâtre avec un bruit de succion écœurant. Puis tu t’agenouilles près du cadavre et commences à lui scier la tête. Lentement. Méthodiquement. Même dans la mort, tu remarques que les yeux du vampire sont écarquillés de surprise.

 — Tu pensais pas qu’on te ferait la peau, hein ? dis-tu, le premier surpris d’être encore en vie.

 Dans ton dos s’élèvent des pas incertains. Gerry est enfin sorti du coma.

 — On a gagné ? demande-t-il d’une voix endormie.

 Tu pousses un profond soupir.

 — Ouais, Gerry. Merci du coup de main, d’ailleurs.

 — Eh ! Si tu ne m’avais pas envoyé valdinguer contre le mur, j’aurais peut-être fait ma part !

 — Peut-être ? relèves-tu.

 — Sûrement, même !

 Tu secoues la tête de dépit, puis reprends ta tâche. Gerry apparait dans ton champ de vision ; en voyant ce que tu es en train de faire, il émet une onomatopée dégoutée.

 — Qu’est-ce que tu fiches, mec ? T’es un psycho, c’est ça ? T’as besoin de garder un trophée ? C’est ton délire, les morceaux de cadavre ?

 Tu commences déjà à regretter son réveil.

 — Non, idiot ! Je pense seulement à notre subsistance. Avec la tête de ce connard, on va pouvoir négocier un mois de bouffe. Ça te parle ou pas ?

 Un grand sourire étire ses lèvres.

 — Je rêve ou tu as dit « notre subsistance » ? Bienvenue dans l’équipe, mec !

 Tu réfléchis un instant à une réplique cinglante, mais tu t’avoues rapidement vaincu. Gerry a raison. Tu fais partie d’une équipe, maintenant. Que ça te plaise ou non. Lorsque tu t’es levé ce matin, tu étais loin d’imaginer que ta solitude prendrait fin aujourd’hui.

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