1 – BENJAMIN BIOLAY : Raté
Si je dois faire un peu d’histoire, je dirais que je suis née dans une famille dite de « français moyens ». Mes parents gagnaient bien leur vie, aussi je n’ai jamais manqué de rien. Ils m’ont bien éduqué, m’ont inculqué des valeurs, et je le leur ai rendu en étant une jeune fille sage qui travaillait bien à l’école.
J’ai bien fait quelques bêtises, mais ça s’est limité au niveau de ce que peut faire tout enfant ou adolescent, et qui ne puisse se sanctionner par une fessée, une punition ou une paire de baffes. Certains vont peut-être dire que j’étais une enfant « normale », c’est à peu près ça, enfin presque…
J’ai bien évidemment fait ma crise d’adolescence, le besoin de dire « non », de se confronter aux adultes, un peu de rébellion pour se dire qu’on existe quoi ! C’est resté très gentillet, sauf s’agissant des garçons, de ceux qui vous donnent des étincelles dans les yeux et remuent vos hormones.
Avant que je n’oublie, je me prénomme Poéma, ce qui signifie « perle des profondeurs » en tahitien, parce que j’aurais été conçue lors d’un voyage à Tahiti… et donc, alors que j’avais treize, j’ai rencontré Corentin, qui lui en avait seize.
Bien évidemment j’étais amoureuse !
Bien évidemment, c’était un garçon super, malgré les mises en garde de mes copines…
Bien évidemment, j’ai dit « oui » quand il m’a demandé de coucher, j’aurais tout fait pour lui.
Bien évidemment, ça s’est mal passé.
Bien évidemment, il m’a quitté dès qu’il a eu ce qu’il voulait…
Les « non, il n’est pas comme ça » se sont transformés en « enfoiré », pour rester polie, depuis ma chambre d’hôpital suite à une hémorragie. Il n’a pas fait avec la tendresse dont j’avais pu rêver pour ma première fois, mais à quoi s’attendre quand on vous baise dans les toilettes du lycée. J’étais d’accord pour ça après tout, enfin jusqu’à ce qu’il continue alors que je lui demandais le contraire. « Ça va passer » me disait-il, et plus je lui demandais d’arrêter, plus il en remettait.
Je ne me souviens pas de la « fin », mais je peux vous parler pas du regard des autres élèves quand on vous retrouve évanouie, la culotte sur les chevilles et du sang entre vos jambes.
Je vous laisse imaginer, médecins, infirmières, mes parents, les policiers, mais je n’ai pas dit qui, je ne voulais pas déposer plainte, que mon amoureux ait des problèmes car j’étais d’accord… enfin au début. Il en aurait peut-être été autrement si j’avais su que, dès le lendemain, il sortait déjà avec une autre… merci les ragots des copines !
Il y a quand même quelque chose de très surprenant, même si tout le monde sait, ça n’empêche les filles de vous traiter de salope, et les garçons de fille-facile. Je ne compte pas les regards explicites ou les propositions… Mais vous savez quoi, ça ne dure que le temps qu’autre chose vous remplace, ne dit-on pas que les nouvelles vont vites, et avec les réseaux sociaux… Les filles se sont concentrées sur le dernier truc super-génial, et les garçons ont trouvé une nouvelle « salope » à harceler, même si parfois, « faute de grive... ».
Autant vous dire que je n’ai plus approché un garçon, je les fuyais comme la peste, « chatte échaudée… » (et oui, j’aime bien les citations !).
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