9 – KELLY CLARKSON : Breakaway
Ma décision est prise, quelle qu’en soit les conditions. Je n’ai plus qu’à m’y tenir pour aller jusqu’au bout. C’est bien facile à dire alors que je ne sais pas à quelle sauce je vais être mangée, dans quoi je me suis fourrée ? Ça ne doit pas casser trois pattes à un canard, ils n’enverraient pas une novice risquer sa peau. Je me demande si je ne serais en train de chercher tous les prétextes possibles pour me rassurer ? Pourtant, je trouve que tout va trop vite, inhabituellement trop vite, une impression fugace.
L’expression peut sembler déplacée dans ce contexte, mais, je mets mes affaires en ordres dans la mesure où je vais être absente pendant une année au moins. Mes parents ne comprennent pas, pas plus que mes frères, mes belles-sœurs ou mes neveux et nièces. Je n’ai pas le cœur à leur expliquer ma bévue, je leur mens, plus par omission, alors que ma mauvaise conscience me travaille.
Est-ce qu’il y a une bonne manière d’annoncer à sa famille qu’on va disparaître de leur vie durant plusieurs mois, qu’on ne donnera aucune nouvelle, qu’ils ne pourront pas me joindre. Je me rends compte de ce que je leur demande, si ce n’est que de croire en moi, mais que c’est difficile. Même si je ne suis pas très communicative, même je ne viens pas souvent, il y a un fossé entre quand on veut ou peut, et ne pas pouvoir.
Une fois encore, je trouve plein d’arguments pour me rasséréner, que c’est l’affaire de quelques mois vite passés, que tout et tous seront encore là. De l’égoïsme, oui, certainement, je plaide pour ma carrière. J’ai rendu mon appartement lyonnais, ma voiture a rejoint ma moto dans la remise, j’ai donné mes meubles. Cette phrase revient encore et tourne dans ma tête, je mets mes affaires en ordres. Est-ce cela que fait une personne qui sent que la fin est proche, je ne vais pourtant pas mourir ! Ou alors est-ce ce que fait une personne qui quitte tout pour disparaître. C’est un peu tout cela, sans doute.
En fait, je ne trouve rien de comparable. Comment puis-je leur infliger ça, je me promets de rattraper ce temps, mais je me mens encore, ça ne se récupère pas le temps, il passe et s’écoule, inexorablement. Alors, à mon retour, je serais plus présente avec un commissariat plus proche à Bagnols su Cèze, Orange ou Carpentras et je placerais ma famille avant mon travail.
Le temps des embrassades est arrivé sur le quai de la gare T.G.V d’Avignon. Nos yeux sont rouges et les larmes hydratent nos mouchoirs, à quoi pensais-je lorsque j’ai accepté, comment font les autres ? Je ne peux que me raccrocher qu’à ce qu’il me reste, ce que j’emporte dans mon cœur, et ces mots de mon père, « on ne se dédit pas de sa parole », prononcés à l’oreille lors de notre dernière étreinte.
Il sait, je lui ai tout raconté. Il le dira sans doute à ma mère, qui le dira certainement à mes frères. Ils m’en voudront… peut-être moins ou différemment, je ne sais pas. Il faudra surtout que je sois meilleure pour les miens, et je me le confirme, beaucoup plus présente. Dernières mains qui s’agitent, des sourires de circonstance, le train quitte la gare en même temps que le sel de mes larmes termine de corroder mes dernières barrières.
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