23 – LEONARD COHEN : Chelsea Hotel

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Au moment où la portière se referme, je pourrais dire que je suis prise au piège, je sais juste que je n’ai pas le choix, qu’il faut que je le fasse et tout se fait, très mécaniquement, en pilote automatique. Il démarre, me dit que je suis belle, me demande mon nom. Je lui ai à peine répondu qu’il ajoute que j’ai de belles loches pour aussitôt glisser une main entre dans l’ouverture pour malaxer mon sein droit puis torturer mon téton le temps de compter jusqu’ cinq.

Je le laisse faire, lui sourit, même s’il ne peut le deviner alors que nous avançons dans la nuit d’une petite rue. Il arrête sa voiture, je pensais qu’il allait reculer son siège, mais il sort, sans que la lumière ne s’allume, je comprends. J’ouvre ma portière puis m’assois au bord du siège. Le temps qu’il fasse le tour, je réalise que nous sommes loin d’être les seuls. Il se place entre mes deux jambes, pose une main sur ma tête et me dit : « allez suces salope » !

A quoi pouvais-je m’attendre, ce n’est pas une conversation de salon ou un concours de politesse. Alors je défais sa ceinture, ouvre les boutons de son jean, descend le tout avec son sous-vêtement alors que sa main attrape mes cheveux pour attirer ma tête vers sa virilité que je prends dans ma bouche. « Une vraie professionnelle » me dis-je sarcastique ! Juste le temps de le penser alors, car je ne mène pas, c’est lui. Maintenant qu’il a hissé le pavillon, il me baise la bouche. J’ai des haut-le-cœur, j’étouffe, je bave, mais je tiens bon, tout en me répétant « tu peux le prendre » ! C'est ce que je fais en pensant que l’entraînement avec mes doigts n’a pas été vain.

Il n’a bien évidemment pas manqué de mots pour s’encourager, pensant certainement me motiver. Je vais laisser le cerveau de chacun faire son office, il y a déjà du travail, rien qu’avec tout ce qui tourne autour d’avoir quelque chose dans la bouche. C’est sans doute pour cela qu’après l’avoir « purgé » et nettoyé, il a cru bon de me féliciter en me disant : « t’es une bonne salope affamée de bites ».

Il avait déjà tellement prononcé ce mot que, durant le court trajet qui me ramène vers le boulevard, je cherche l’évidence des différences entre salope et putain ? Dans le langage commun, la première aime le sexe alors que la seconde n'est pas censée l’aimer autant, seulement le supporter, surtout en étant si peu payée. Ça me semblait tellement incongru d’avoir ce genre de pensée grammaticale alors que je digérais ce que le conducteur avait déposé dans mon estomac.

Je descends du véhicule et le contourne pour voir mon micheton afficher un grand sourire et deux pouces levés à l’attention de celle qui m’a fait monter. Je me dirige vers elle qui m’accueille avec un large sourire. Elle pose sa main sur mon épaule tout en me souhaitant la bienvenue, puis me donne rendez-vous l’après-midi en terrasse d’un café vers 15 heures pour ensuite me dire de rentrer.

J’ai quelques difficultés à reprendre pieds dans la réalité. Je marche en direction de ma rue, et plus j’avance, plus mon estomac joue au yo-yo. Lorsque je passe l’angle, ne pouvant plus rien retenir, je laisse s’en échapper le contenu dans le caniveau, comme pour rejeter l’endroit d’où je venais. J’ai le souffle court, mon œsophage brûle, mes yeux sont humides.

Une lumière fend l’ombre de son rayonnement. Dans un sursaut de dignité, je me redresse, lisse ma robe puis avance péniblement, les jambes dans du coton. Le véhicule passe, m’ignorant complètement. Je devine ma voiture, ma porte est à côté, je ne l’ai pas encore atteint qu’un nouveau reflux me coupe les jambes. Je suis à genoux dans le caniveau, une main sur le parechoc, l’autre retenant des longueurs de cheveux invisibles.

Un courant d’air, pourtant frais, vient réchauffer et emporter mes sueurs froides. Je suis descendue aussi bas qu’il est possible. Quand on en est là, on ne peut que remonter, non ? Une réaction de mon âme, de mon corps, qui me sort de cette torpeur que je ressentais sans pouvoir m’en extirper. Je viens de toucher le fond de la piscine (sans le petit pull marine), je donne un coup de talon vers un avenir qui se dessine.

Tout est toujours trop haut quand il faut gravir, une douche, je m’enfonce dans une nuit sans rêve…

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