64 – DEF LEPPARD : Photograph

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Avec Pim’s, c’est toujours pareil, les semaines passent, et pas moyens de faire progresser les choses, j’aimerais qu’il m’emmène chez lui, j’y trouverais certainement de quoi faire progresser mon enquête. Si, il y a quelque chose qui a changé, ce Monsieur a une préférence, il aime passer après les autres, il apprécie à tremper son biscuit dans un abricot qui a déjà bien servi. C’est pour cela qu’il vient me chercher, après…

Il a voulu monter d’un cran. Parfois, quand ça le grattouille, il m’envoie un message pour m’informer qu’une ou deux de ses connaissances viendront me remplir avant son passage. S’il fallait le dire, ça sous-entend sans préservatif tout comme ne rien nettoyer… Dans le genre on se sent comme un objet, sale, pour quelqu’un qui en plus de ses autres « qualités », aime le crade.

Je ne sais pas comment exprimer ce que je ressens, même en me disant que je fais ça pour mon enquête. Quand bien même, le temps faisant, j’en viens à me demander si elle existe vraiment, cette investigation, n’ayant jamais eu ni réponse ni instruction depuis mon arrivée. De plus, mes messages ne sont plus que très rarement relevés. J’ai pourtant avancé, mais rien ne se passe, jusqu’où vais-je devoir aller dans la perdition pour y arriver ?

Si j’écris cela, c’est que quelque part, je commence à me faire peur à moi-même, que mon corps me jouait un vilain tour puisque nous étions le premier avril. J’ai reçu un texto, puis les copains de Pim’s sont arrivés, c’était la première fois qu’ils étaient plusieurs. Ces quatre messieurs, puisque c’est le nombre, y sont allés de leurs oboles gluantes.

Leur mandant est arrivé dans son fracas habituel, éclairant l’arrière train d’une pauvre fille, jupe relevée, à plat ventre sur le capot d’une voiture qui attendait que le dernier convive vienne lui faire son affaire, lui passer dessus comme le vulgaire paillasson qu’elle était, puisque c’est ainsi qu’il aimait la prendre. Le contexte ? D’être regardée ? Les vulgarités de ces cinq bouches à mon endroit ? Le bruit particulier de son membre pompant le mien ? Aucune idée, mais j’ai joui, et bien qu’en silence, ce n’est pas passé inaperçu : « t’as aimé salope, t’es une vraie pute, alors retournes d’où tu viens » et il m’a poussée à terre, dans le caniveau.

Ils sont partis, hilares alors que j’en voulais à mon corps de m’avoir trahi, seulement cette fois il n’y a pas eu de pleurs. Il y avait à la place, de la colère, contre moi d’abord, contre ceux qui venait de m’avilir encore un peu plus, mais aussi contre cette mission. Il faut qu’elle s’achève, rapidement, avant que je ne termine de me corrompre moi-même, que je ne sois totalement brisée.

Je me suis ramassée, avec mes oripeaux, pour rentrer tout en ruminant, parfois des choses délirantes, comme cette question, est-ce que ça existe la grivèlerie de pute, ses potes sont partis sans payer. C’est lorsque j’arrive chez moi que je décrète qu’aussi bas je tomberais, je remonterais toujours plus haut, pour rester fière de moi. Puis après tout, il n’y a rien qu’une bonne douche ne puisse laver ou qu’un lave-linge ne puisse nettoyer…

En ce dimanche matin, j’ai profité de la douceur de la journée pour aller courir puis faire quelques exercices, notamment pour travailler ma souplesse, mais aussi, ma flexibilité. C’est là où mes cours de yoga me viennent en aide. Dans mon activité d’escorte, les clients apprécient que je sois particulièrement souple.

Depuis quelques jours, à plat-dos, j’arrive à passer mes jambes derrière mes épaules. Ce n’est pas encore naturel, aussi il me faut un peu de temps avant d’y arriver. La vision de mon intimité sous cette perspective est assez surprenante, puisque je peux toujours toucher, mais surtout voir ce que je fais, tout autant que regarder ce qui peut y rentrer. Avec cette réussite, j’ai commencé une autre position, mais cette fois debout, d’arriver à passer mes épaules toujours derrière mes jambes bien droite, j’en suis encore loin…

Assez régulièrement je renouvelle mes annonces. Je le mets au pluriel dans la mesure où j’ai remarqué qu’un même site peut avoir plusieurs faux jumeaux, certainement afin de balayer plus largement, je fais donc de même. Seulement cette fois, il y a du changement, je me suis offert une séance photo chez un professionnel.

Je dirais que je suis plutôt bien tombée, le photographe était très professionnel, il a su me mettre plus que largement en confiance. Je me suis donc laissée mener par ses directives pour enchaîner les pauses. Le premier impératif auquel je tenais, c’était que les photos conservent un côté « amateur ». Le second, celui auquel je tenais, c’est qu’on ne puisse rien deviner de mon visage.

Sur ce dernier point, j’en suis la première surprise, je me suis totalement lâchée. Je me sentais bien, belle, il ne me regardait pas comme un objet, mais comme une femme, une personne désirable qui voulait être vue telle qu’elle était. S’il y a bien évidemment eu le thème lingerie, il y a aussi eu la working-girl, l’écolière, une nouveauté, la soubrette et puis, parce qu’il y tenait, la tenue de prostituée.

Il connaissait le but de ses photos, aussi je crois qu’il s’est permis d’assouvir un fantasme, alors, j’ai fait dans le cliché. Un porte-jarretelles avec des bas résilles rouges, une jupe en pvc noire, un simple caraco rouge à fines bretelles et des escarpins à plateforme aux talons de douze centimètres. Avec un maquillage à la truelle, plus un chewing-gum et la mythique cigarette, je crois c’était réussi, à en croire la bosse derrière sa braguette.

Se sentir belle en tenue de travail, j’ai apprécié, je crois même que ça a quelque peu changé ma perspective de moi-même, j’y apporterais encore plus de soins qu’à l’accoutumé. Selon notre contrat, les photos m’appartiennent, j’ai donc récupéré la carte mémoire après qu’il ait retravaillé les images. Je pense qu’il aurait apprécié à les conserver.

Est-ce que je recommencerais, très certainement, mais pas avec lui depuis qu’il est devenu un de mes réguliers du boulevard. Il a très certainement souhaité mener son fantasme jusqu’au bout, se sentant en confiance avec moi, mais de fait, il a brisé celle que je lui avais accordée.

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