80 – PSYCHEDELIC FURS : Torture
Le produit qui m’est administré a rapidement évolué. Désormais je prends simplement une gélule tous les matins, à heure fixe. De plus, je suis un peu moins bête, je fais de meilleures associations, je réponds quand on me dit bonjour, je cris quand on me frappe, ce qui est nécessaire quand on me cravache, ne sentant rien, sinon ça énerve trop le client. Mais c’est certainement dû aussi au fait qu’on me dise quoi faire quand, ou de régir comme ça si on me dit quelque chose.
Depuis combien de temps suis-je en Belgique, je n’en ai aucune idée, mais il fait toujours chaud, je fais un shift ici, l’autre là, mais je ne vois ni le jour ni la nuit dans mes images, ni le temps qui s’écoule, parfois je retourne dans le passage. Le plus souvent je suis dans les vitrines, je sais qu’on me fait dormir, je fais aussi la plupart des soirées privées.
Le plus souvent, ils sont trois au quatre, ou à peine plus, c’est arrivé deux ou trois fois qu’ils soient une dizaine, je suis seule, à chaque fois. Généralement, je suis plutôt « abîmée » quand ils partent. Lorsqu’on dit à des hommes qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent, rien qui ne laisse de traces, ils n’ont plus de limites. Un changement dans ce qu’on me fait avaler, aucune idée, je sais seulement que mes yeux se sont voilés à plusieurs reprises, mon corps a dû réagir instinctivement en pleurant.
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C’est difficile de vous écrire tout cela, car en fait, je ne raconte cette période que par procuration, par les images que m’a restitué mon cerveau. Comment décrire ce que j’ai pu ressentir, dans la mesure où je n’éprouvais rien de rien, ni douleur, ni sentiment, rien. Je suis restée sous emprise constamment, mais je ne peux pas m’ôter ce qui est gravé dans ma chair, ce que toute ces images provoquent.
Je ne raconte pas tout, j’essaye seulement de vous le faire toucher du doigt. De mon côté, je pleure à chaque image que je vous raconte de manière très édulcorée. Je détremperais chaque feuille de papier s’il n’y avait pas de clavier. Mais je vide chaque jour ma corbeille des mouchoirs dont je l’ai remplie, parce qu’il y a aussi tout ce que je passe sous silence, mais que je vis revis, les mains suspendues au-dessus de mon clavier, bloquée, attendant que ça se termine.
Mon écriture est peut-être détachée, mais j’espère que vous comprenez pourquoi.
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Même si Monsieur Alphonse arrivait toujours à me caser quelque part, une fois que j’ai été marquée et ferrée, dans la mesure où je lui rapportais en ne lui coûtant que le gîte et le couvert, il n’a pas tardé à me faire tourner quelques films pornos. C’était principalement avec des messieurs d’un certain âge, qu’il ne devait pas payer ou peu, trop heureux de se trouver avec une jeune femme, mais je m’avance sans doute…
Le patron a finalement décidé de me louer à l’extérieur, la gélule semblait fonctionner à merveille. Il n’était même plus nécessaire de me surveiller, je me déplaçais seule d’un endroit à un autre. J’ai donc à nouveau endossé une tenue d’escorte-girl, mais en tailleur-pantalon et chemisier à manches longues et foulard afin de masquer mes fers.
Des clients « classiques », mais aussi des adeptes du bdsm ou du bondage, les incidents se limitant à quelques bleus et une petite touffe de cheveux arrachées. Puis il y a eu cette nuit-là, celle où tout a basculé. Ce n’était pas inhabituel qu’Henry m’emmène à ces rendez-vous, il me laisse devant l’hôtel puis vient me récupérer, parfois c’est chez des particuliers qui disposent de leur propre salle de tortures.
Ce jour-là, il m’a amené jusqu’à une petite maison un peu à l’écart dans la proche banlieue. Je l’ai regardé au moment de descendre de son SUV, j’ai vu de l’inquiétude, de la peur, du regret dans ses yeux. Je ne pouvais bien évidemment pas savoir que c’était la dernière fois que je le voyais. J’ai retrouvé Alphonse à l’intérieur, ainsi que plusieurs autres personnes, hommes et femmes dont la plupart portaient des masques.
J’ai été conduite au sous-sol. Dans la cheminée de celui-ci couve un brasero d’où sortent deux tiges métalliques. Des fauteuils sont disposés face à l’espace réservé où il y a deux ancrages écartés au sol et une chaîne qui descend du plafond. Mes chevilles sont attachées, puis mes poignées, un palan est actionné afin que je sois bien en tension, mes pieds touchent à peine le sol.
Par la suite, le maître de céans a commencé les enchères pour savoir qui de la cravache, qui du paddle, qui de la badine, qui de la queue de dragon, qui de la canne, qui de la pagaie, chacun a droit à dix coups. Certains doivent être novices tant ils sont hésitants, d’autres y mettent tout ce qu’ils ont, car Monsieur Alphonse l’a précisé, c’est une séance pour faire mal, pas une séance de bdsm contrôlée, limite de la torture.
Je crie à plein poumon comme on m’a demandé de le faire, mais bien évidemment, je ne ressens rien, sauf que le corps lui, sait. Mais yeux se sont donc mis à pleurer, je ne sais dire à quelque moment ni avec quel instrument, les enchères se poursuivant pendant que le gagnant consomme son achat. Cette première partie terminée, les convives profitent du buffet à leur disposition.
La deuxième partie est limitée à cinq enchères, le martinet en cuir puis celui en métal, puis le fouet du dragon, celui du taureau puis enfin le chat à neuf queues. Je ne sais rien de l’état de mon dos, ni pendant, ni après, je ne le vois pas. Je me rappelle d’un participant portant la main à sa bouche, puis c’est le trou noir.
On me réveille avec un truc puant sous le nez, je suis proche du sol, attachée sur une croix. C’est le moment des deux dernières enchères, le marquage au fer rouge. Monsieur Alphonse explique que la persistance de ce marquage dépend du temps où le fer reste appliqué et des soins prodigués ensuite. En résumé, plus on retarde la cicatrisation, plus ce sera boursoufflé et visible, sinon, ça s’estompe avec le temps.
Les enchères commencent, pour grimper à plusieurs milliers d’euros chacune, le total de la soirée dépassant les 50 000 euros. Je sens l’odeur de la chair brûlée dans mes narines malgré l’état qui est le mien. L’intérieur de mon avant-bras gauche est désormais orné d’un « SLAVE » carbonisé, mais pas assez long pour que ce soit persistant. J’ai à nouveau perdu connaissance quand le fer s’est posé côté droit.
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