93 – BILLY IDOL : Cradle of Love

3 minutes de lecture

Lorsque je suis sortie de l’étude, j’ai cette envie particulière, une fois encore, revenir au point de départ. J’ai cette envie de faire un tour, de revoir. Je retourne marcher dans cette ville, je m’assoie à la terrasse du café où je me suis attablée la première fois, puis je dîne au restaurant chinois dans lequel j’ai pris tant de fois à emporter.

Un air de nostalgie, le mot est certainement déplacé. Dire que tout n’est pas à jeter concernant ceux qui n’y sont pour rien serait plus juste, peut-être. Devant cet immeuble au-dessus duquel j’ai habité, je peux dire que l’endroit était vraiment bien en faisant abstraction de tout le reste. Mes clés ont disparu. Elles seraient de toute façon inutiles, les deux accès ont été murés. Je me demande ce que les bikers vont faire de tous ces immeubles qui leur appartiennent ?

J’espère que je le découvrirais dans tous ce que Pim’s m’a laissé. C’est quelque chose qui a été difficile à digérer, d’apprendre que j’habitais un endroit qui leur appartenaient, que je leur ai payé un loyer. Je me sens bien naïve en pensant que, même dans cet endroit qui était pour moi un sanctuaire, ils ont volé et vendu mon intimité.

J’essaye de réprimer cette colère dans laquelle vient se mêler une part de plus en plus importante de vengeance. Il y a quelques minutes encore, je serais certainement passée sur le boulevard, juste pour les discussions qu’on pouvait. Cependant, je ne peux pas car cette pensée a été remplacée par le John. Le pire, c’est de me rendre compte qu’inconsciemment, j’ai pris le chemin de leur repère. Je souffle un grand coup afin de changer de perspective, mais aussi de chemin pour rentrer à La Passiflore.

Certaines diraient « je gère », ou quelque chose comme ça, j’ai bien dormi. Aussi, c’est sereine que tôt matin je reprends la route vers la Suisse et son aéroport, destination Lyon. Ma réaction d’hier soir me fait dire que ma « gestion » est bien fragile. Il faut, comme me l’a recommandé ma psy, que je poursuive ce qui a été commencé. Je me l’impose comme une des premières tâches à accomplir. Elle ira de pair avec celle de comprendre, de me réapproprier cette vie qui m’a été dérobée.

Lors de l’atterrissage, mon cœur se met à faire autant de bruit que celui des réacteurs. Tout et tous vont trop doucement devant l’impatience de les retrouver, enfin, mes parents. Se parler ou se voir au téléphone, ce n’est rien en comparaison de ressentir l’étreinte, un baiser sur la joue, de pleurer à la joie de se retrouver.

C’est pour cela que je cours en sortant du terminal, un sprint de quelques mètres aux termes duquel mes deux valises s’effondrent au sol. Enfin, ils sont là, je me jette dans leur bras, ils me serrent plus que de raison, mais en reste-t-il de la raison après autant d’épreuves, à ce moment où toute la tristesse s’évanouit pour laisser place à la joie.

Peut-on être rassasiée de bonheur, je ne le crois pas. Il se poursuit alors que nous allons vers la voiture. La boucle sera refermée lorsque nous aurons rejoint la maison. En attendant, il faut suivre la vallée du Rhône. Je me sens stupide à chercher de la main celui qui conduisait la dernière fois que je suis passée ici. Il est là, présent dans mon cœur, à cet endroit où il restera éternellement vivant.

La boucle est bouclée, j’en décide ainsi lorsque le gravier crisse sous l’effort des pneus. Une nouvelle vient de commencer.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Notemorf ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0