7 - Sugar Water, Cibo Matto

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Tina et Rachel discutaient dans la cour du lycée, assises à une des tables de pique-nique qui jonchaient la cour au bon vouloir des installateurs qui, pour d’obscures raisons connues d’eux-seuls, ne pouvaient pas en mettre à certains endroits mais plus à d’autres. Une question de poulets noirs égorgés à minuit sous la pleine lune certainement… Le Soleil brûlait agréablement leur peau et pour la énième fois Tina jalousait Rachel de sa belle peau cuivrée. Les filles parlaient des dernières mésaventures de Rachel et Tina racontait comment, enfin, elle avait réussi à ce que Paul lui demande de sortir avec elle.

  - Ca me rappelle le temps où nous dormions ensemble pour nous raconter nos secrets. Hé ! Si tu venais ce soir ? Ca fait longtemps. Tu verras ma nouvelle chambre. J’ai tout redécoré. Appelle ta mère et viens dormir.

  - Tu as redécoré ta chambre ? Avec quoi ? Des têtes de mort et des corbeaux empalés ? Tina lui fit une grimace qui fit éclater de rire les deux filles. Attends je l’appelle.


  A la sortie du lycée, la mère de Tina fut prise d’assaut par les deux copines et dut céder à la pression. L’argument le plus convainquant vint de Tina qui promit de faire la vaisselle pendant un mois. Ce qui consistait à remplir et vider le lave-vaisselle de la maison. Quand à Sarah, elle vint déposer des affaires pour la nuit, prit un café pour parler cinq minutes, et repartit au bout de deux heures et six cafés.

  Pendant ce temps les filles étaient allées dans la chambre de Tina.

  - Alors ? Qu’en penses-tu? Demanda Tina fière d’elle.

  Devant les yeux de Rachel, une chambre spatiale venait d’apparaître. Les murs étaient bleu nuit et des planètes énormes étaient représentées. Le lit avait une couette avec une fusée et des étoiles. Un planétarium avait remplacé la traditionnelle lampe de chevet. « Ca projette des constellations, mais ça éclaire assez pour que je puisse lire. » Mais le plus surprenant était le sol. Le stratifié avait aussi été choisi dans des teintes bleutées ce qui donnait l’impression d’être dans l’espace partout où vous regardiez. « Attends ce n’est pas tout ! » Tina tira les volets et éteint les lampes. La chambre était désormais dans le noir. Enfin, pas vraiment, car Rachel vit scintiller des dizaines et des dizaines de points phosphorescents sur les murs, au plafond et au sol. « Là il y a Cassiopée, là Orion, là le Dauphin… » Tina énumérait toutes les constellations qui apparaissaient sous leur yeux. « C’est moi qui ai tout installé. C’est un faux plafond et un faux plancher. J’ai percé des centaines de petits trous et disposé dessous des leds. Elles sont solaires, ce qui fait que dans la journée elles chargent et le soir elles restituent la lumière. »

  La mère de Tina vint porter un matelas gonflable, donna les dernières recommandations de bêtises interdites et les laissa tranquilles.

  Lorsque les filles eurent fini de discuter et qu’elles décidèrent de s’endormir, il était deux heures du matin. La dernière chose que Rachel vit fut des centaines de petits points lumineux, quelques étoiles filantes et Jupiter.


  Où est-elle à présent ? En tout les cas, une chose est certaine ce rêve n’a rien à voir avec l’expérience bizarre de la veille. Il a même quelque chose de rassurant. Jamais de sa vie elle n’aurait rêvé de station spatiale mais avec la chambre de Tina c’était logique qu’elle y pense.

  Et manifestement elle est dans une station spatiale… Non dans un centre spatial plutôt. Oui un centre. Côté tour de lancement. Pourtant si ce rêve peut s’expliquer quant au contexte de la chambre quelque chose la gêne de nouveau.

  Elle ne s’est jamais intéressée à l’espace et encore moins aux locaux de la NASA. La seule version qu’elle en a est Apollo 13 et elle n’est pas sûre ni que ce soit la réalité, ni que la représentation du film soit la plus récente. Or, le rêve qu’elle fait, semble particulièrement bien documenté sur l’organisation américaine.

  Elle est dans un grand hangar maintenant où reposent des morceaux de fusées, ou des camions élévateurs. Des techniciens s’affairent à faire des réparations dans un coin. Et soudain elle aperçoit…

  - Tina ! Ca va? Tu portes une combinaison d’astronaute ?

  - Ah ! Rachel ça va ? Oui je pars dans moins de trois heures. Salut Jim ! On a fait les derniers contrôles, tout est bon.

  Tina venait de s’adresser à un technicien. Le dénommé Jim les salua de la main.

  Tina enfile une combinaison à Rachel et peu de temps après, les rêves sont comme ça, on met en vitesse rapide les passages laborieux, elles sont assises dans la fusée.

  Le lancement s’est bien passé. Puis une avarie survient. Tina donne les ordres à Rachel, mais cette dernière ne comprend rien et appuie sur n’importe quoi. Tant et si bien qu’un incendie finit par se déclarer dans la fusée et que celle-ci prend feu de toute part. Et alors que la fusée explose, Rachel se réveille en sursaut le coeur battant !


  Dans la seconde qui suivit la lumière du planétarium s’alluma. Elle entendit très nettement Tina respirer de manière saccadée.

  - Ca va, Tina !

  - Oui j’ai fait un cauchemar ! Je rêvais que l’on était cosmonaute toutes les deux et que l’on montait dans une fusée et en plein milieu de l’espace…

  - Elle a explosé après un incendie ? Finit presque à voix basse Rachel au pied du lit.

  - Tu… Etais… Avec moi ?… Dans mon rêve ? Articula Tina dans un souffle.

  Les filles échangèrent un regard mal à l’aise.


  Le lendemain fut aussi horrible pour Rachel que l’avant-veille. Non pire, car en plus de ses interrogations à elle, elle devait subir celles de Tina. Et son libre arbitre ? Et depuis quand elle se promenait dans la tête des gens ? Et si elle avait rêvé de choses plus… Intimes… ? Les rêves étaient personnels… Quelque part elle lui manquait de respect… Non mais se rendait-elle compte de ce qu’elle avait fait ? … Et pourquoi elle ne l’avait pas prévenu que ces choses-là arrivaient ? Et…

  Rachel la laissait déverser son flot d’irritation. Elle regardait Tina dans les yeux, son amie n’avait pas peur d’elle. Elle était juste choquée. Sous le coup de l’émotion. Mais au moins elle n’avait pas peur d’elle. Jamais. Elle voulait juste quelques explications. Mais Rachel n’avait aucune explication à lui fournir parce qu’elle-même ne comprenait ce qui s’était passé.

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