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— Et bien… Sans votre aide, je crois pouvoir affirmer sans me tromper qu’il n’y aurait plus grand monde de vivant ici…
Morad fixait avec admiration le guerrier qui se tenait dos à lui. Se saisissant de sa hache, ce dernier la retira du corps dans lequel elle était plantée, avant d’en chasser le sang d’un mouvement balayé pour ensuite la poser de manière nonchalante sur son épaule et se retourner, son ton froid contrastant avec son air détaché.
— J’ai fait ce que vous attendiez de moi, non ?
— En effet. Et avec maestria. Vous étiez redoutable ! Un vrai démon ! Rark le Démon.
Andreìs se crispa de tous ses muscles à ce nom avant de répondre en dévisageant le vieil homme par-dessus son épaule libre.
— Pas Rark le Démon. Rark le Rouge. Et je vous demanderais de ne plus me comparer à lui, s’il vous plaît.
— Bien sûr, pardon. Vous n’êtes en rien comparable…
Andreìs ne put retenir un murmure tandis que son regard se perdait dans les limbes du passé.
— Si vous saviez…
— Je vous demande pardon ?
Secouant lentement la tête pour sortir des souvenirs qui l’assaillaient, Andreìs répondit.
— Non, rien…
Morad fit une moue dubitative avant de hausser les épaules.
— Bien… Si vous le dites…
Le vieil homme donna ensuite quelques ordres à sa caravane qui commençait déjà à récupérer le matériel réutilisable sur les assaillants, avant de reprendre.
— D’ailleurs, pourquoi Rark le Rouge ?
Andreìs ferma les yeux quelques instants avant de répondre.
— Lors de la campagne en Europrussie occidentale, un guerrier s’est démarqué des autres en ramenant les troupes au combat lors d’un repli que nous qualifierons d’erratique et de désespéré… Il chargea comme une furie, tuant plusieurs centaines d’ennemis à lui tout seul… Sur la fin de l’assaut, sa hache tronçonneuse était endommagée, et les corps de ses ennemis faisaient ce bruit quand la lame les frappait… Rark, rark, rark… Et le rouge, c’est parce qu’il était recouvert du sang de ses ennemis… Car oui, les Arkols avaient un sang de la même couleur que le nôtre… Alors il a été surnommé Rark le Rouge… Et c’est lui qui a dirigé la trahison des Génos… C’est pour ça que je vous demanderais de ne plus me comparer à lui, s’il vous plaît…
Morad fronça les sourcils tout en baissant la tête, pensif et gêné à la fois, avant de répondre.
— Je… Je comprends… Je crois...
Dévisageant discrètement le géant, Morad se faisait une parfaite représentation de la scène en fixant Andreìs couvert de sang de la tête aux pieds, ce dernier commençant à sécher à et s’effriter sur son torse nu dont les muscles saillants semblaient cuivrés. Son pantalon en tissu bleu n’avait plus de cette couleur que le nom, et même ses cheveux noirs comme la nuit viraient au rouge sombre.
— Je pense que je comprends même très bien… Comme va votre épaule ?
Observant sa peau qui commençait déjà à cicatriser, Andreìs leva les mains au ciel.
— Elle ne s’infectera pas… Je crois pouvoir dire que j’ai connu pire…
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