#24
Les jours se ressemblent et se fondent dans un amalgame indistinct. Les semaines passées durant ce confinement finissent par former une masse étrange dans laquelle le temps se dissout mollement. Pourtant, nous observons ces changements graduels qui marquent le passage d’une saison à l’autre. Nous ressentons les températures monter petit à petit. Nous voyons la reverdie partout autour de nous. Nous entendons le chant perpétuel des oiseaux qui a remplacé le bruit incessant du trafic automobile.
Et pourtant, le temps s’écoule lentement. De report en report, le confinement semble durer depuis toujours et s’étendre à l’infini dans une sorte de mélasse absurde. On voudrait s’échapper, mais même la littérature ne permet pas de s’extraire de cette angoisse permanente qui vient battre à nos oreilles. Partout, le monde tourne au ralenti. Et nous, nous avons l’impression que le temps s’est arrêté.
Les jours se ressemblent. Ils perdent leur nom. Seul aujourd’hui compte. C’est ce temps qui n’est pas encore demain mais qui n’est déjà plus hier. Si au moins les lumières s’éteignaient dans nos villes tentaculaires, peut-être au moins pourrions-nous fondre cet ennui dans la nuit. Si seulement nous croyions encore à des divinités, peut-être pourrions-nous les prier pour donner un sens à nos journées. Malheureusement, les dernières idoles qu’il nous restaient se murent dans leur silence, ne nous laissant que des murs à regarder.
Lorsque nous sortirons de tout cela, nous ferons de chaque être humain un dieu perdu au milieu de l’immensité absurde de l’univers. Et nous contemplerons l’étendue des dégâts, à l’époque où nous tuions tout : les humains et le monde dans lequel ils vivaient.
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