Éveil

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Écho ouvrit les yeux et se redressa dans un souffle, le cœur au bord des lèvres.

Une chambre aux murs recouverts de tentures de satin écarlate.

Un bruit dans une pièce non loin.

La lumière de la lune qui filtrait à travers le rideau entrouvert.

La soif. Acablante. Irrésistible.

Elle se glissa hors du lit et se dirigea vers la fenêtre. Elle écarta le rideau et observa la lune, fascinée.

Elle semblait immense, plus lumineuse qu'elle ne lui était jamais apparue.

Un nouveau bruit résonna dans le couloir et elle trourna la tête précipitamment vers l'origine du bruit.

Elle se déplaça vers la porte avec la délicatesse d'une renarde en chasse, appréciant la facilité avec laquelle ses membres répondaient au moindre de ses désirs.

Pour la première fois depuis longtemps, elle ne souffrait plus.

Au contraire, elle avait une conscience aiguë du moindre de ses muscles, sentait, entendait, voyait mieux que jamais auparavant.

Elle huma l'air et se stoppa net.

Il y avait une proie derrière la porte, proche, à l'odeur entêtante.

Elle entendait le battement lent et régulier de son coeur.

Elle passa sa langue sur ses dents et se rapprocha encore de la porte.

Elle avait tellement soif...

Elle allait poser la main sur la poignée quand elle sentit quelqu'un approcher.

Elle bondit en arrière alors que la porte s'ouvrait à la volée.

La lumière du couloir l'aveugla et elle laissa échapper un feulement animal.

Un de ses semblables approchait, mais ce ne fut pas elle qui attira son attention.

La proie était là, à ses côtés. Elle paraissait si frêle, si fragile.

Si tentante.

Fascinée par le rythme du sang qui pulsait dans ses veines, elle s'approcha lentement.

Les deux individus prononcèrent des mots qu'elle entendit sans chercher à les comprendre.

Le liquide qu'elle désirait tant était là, à portée de main. Il lui suffisait de s'approcher encore un peu...

Soudain, la silhouette la plus grande repoussa sa proie en arrière, faisant barrage de son corps.

«... Tion !.... Affamée... trop dangereuse...

Elle gronda, les dents découvertes, furieuse de se voir priver de sa proie.

Courroucée par son intervention, elle s'apprêta à se jeter sur son semblable. Rien n'importait d'autre que le sang de l'humain qui venait de lui échapper.

Mais celui-ci porta à sa bouche un recipiant de plastique qu'il transperça délicatement de ses dents avant de la tendre devant lui.

L'odeur du sang se répandit dans la pièce et Écho se jetta sur la poche et y planta ses dents avec avidité.

Elle but longuement, savourant le nectar et son goût incroyable.

L'inconnu lui en lança une autre qu'elle attrapa au vol et but avec autant d'empressement.

Finalement désaltérée, elle se lècha les lèvres de la pointe de la langue, récoltant avec délice les gouttelettes qui s'y étaient déposées.

Elle était calme à présent, et le battement de cœur dans le couloir ne l'affectait plus, c'est tout juste si elle l'entendait encore, comme un vague écho.

Lentement, elle revint à elle, prenant conscience de l'environnement qui l'entourait, se rendit compte de sa position, accroupie au sol comme un animal sauvage, les mains encore crispée autour de la poche de sang vide.

Horrifiée, elle se releva précipitamment, fixant ses mains tachées d'écarlate.

Puis elle releva la tête, voyant enfin clairement l'individu face à elle.

Il avait des cheveux blancs, une peau mate et des yeux rouges flamboyants.

Elle le fixa interdite.

Elle l'avait déjà vu quelque part, elle en était certaine.

Le jeune homme la regarda en retour d'un air impavide.

Il s'écarta finalement, laissant pénétrer dans la chambre l'humain qu'il avait auparavant mis à l'abri.

L'homme hésita un instant puis se précipita à l'intérieur, se dirigeant vers Écho qu'il prit dans ses bras.

La jeune fille ne bougea pas, restant impassible, ne pouvant détacher ses yeux du jeune homme qui lui faisait face.

L'homme s'éloigna finalement et se posta devant elle.

Elle le dévisagea un instant d'un air absent avant de de finalement reconnaître son oncle qui la regardait d'un air profondément attristé.

« Oh Écho, je suis tellement désolé. Tout est de ma faute, si j'avais sû...

Echo le toisa avec curiosité. Pourquoi semblait-il si éploré ?

Il avait l'air au bord des larmes, et Écho se rapella vaguement qu'il n'était pas homme à montrer si facilement ses sentiments ordinairement.

« Mon oncle, pourquoi semblez vous si triste ? demanda-t'elle d'une voix atone.

Le son de sa propre voix avait quelque chose d'étranger, de si lointain.

Sage seccoua la tête d'un air affligé.

« Écho... Tu le sens n'est-ce pas ? Tu n'es plus la même...

La jeune fille pencha la tête sur le côté, le regardant avec un intérêt soudain.

Il lui pris doucement la main et elle sentit la circulation du sang sous sa paume, la chaleur de sa peau. Elle entoura son poignet de ses doigts, hypnotisée par le pouls rapide du magicien.

Du coin de l'œil, elle vit le jeune homme se rapprocher hâtivement, et son oncle lui faire non de la tête, lui indiquant de rester où il se trouvait.

Il repoussa finalement la jeune fille d'un mouvement délicat, comme s'il avait peur de la brusquer, l'arrachant soudainement à sa fascination.

Elle se laissa entraîner docilement, et il l'emmena vers la psyché posée là, à quelques mètres seulement.

Mue par un instinct, elle se dirigea lentement vers la glace.

Elle se posta finalement devant et s'arrêta, subjuguée.

Ce qui s'y reflétait était une créature irréelle, à la beauté surnaturelle et effarante.

Elle passa une main sur sa joue, incrédule, et son reflet l'imita à la perfection.

Sa peau, si elle avait toujours été pâle, était désormais d'un blanc laiteux, dépourvu de toutes imperfections. Ses tâches de rousseurs avaient disparues, de même que la petite cicatrice qui entaillait auparavant son sourcil droit, souvenir d'une ancienne chute.

Ses cheveux semblaient tissés de fils argentés et flottaient sur ses épaules en de longues mèches soyeuses.

La vision de ses iris d'une éclatante couleur écarlate, lui evoquèrent le sang qui tâchait encore ses mains, et elle recula, ne pouvant réprimer un rictus horrifié qui découvrit ses dents.

Alors, elle constata les deux canines effilées d'une blancheur de nacre qui brillaient maintenant entre ses lèvres purpurines.

Elle poussa un gémissement, revulsée par cette apparition sortie de légendes macabres, et porta l'index à ses crocs redoutables.

La piqûre qu'elle ressentit acheva de la convaincre de la véracité de ce changement.

Elle s'en rapellait désormais. Elle était morte.

Effondrée, elle se laissa tomber au sol, tremblante, fixant frénétiquement ses mains blanches couvertes de sang.

L'archi-mage s'agenouilla à ses côtés, lui parlant doucement, mais elle n'entendait rien d'autre qu'un bourdonnement insupportable.

Elle était morte.

Elle était maintenant un vampire.

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