Chapitre 7
Le commissaire Richet la contacta pour lui annoncer la fouille des données des gares de péages. Le concessionnaire avait pu fournir les historiques de paiement associé à des plaques d’immatriculation et l’une d’elles correspondait à une BMW Série 5 de 2015. L’heureux propriétaire de la berline était un homme du nom de Michel Herbault qui résidait à Orléans. Marlène prit le temps de tout noter puis demanda à son supérieur s’ils devaient rendre visite à cet homme et il répondit par l’affirmative. Lorsque Laurent apprit la nouvelle, il était content, mais cela l’ennuyait de ne pas rentrer tout de suite à Toulouse.
Cette fois, ils prirent un vol Air France pour Roissy-Charles-de-Gaulle et reprirent une nouvelle voiture de location pour aller dans le Loiret. Marlène conduisait nerveusement leur Skoda de location. Tout semblait la crisper, elle s’énerva contre les motards remontant les files de voitures dans les embouteillages de l’A86. A plusieurs reprises, elle tapa violemment le volant et cela lui arrivait d’avoir les talons de ses bottes qui glissaient des pédales. Tout commençait à l’énerver. Agostini aussi perdait la patience, mais savait se contenir. Herbault habitait dans un immeuble qui donnait une belle vue sur les bords de la Loire. Marlène frappa à la porte et un homme approchant de la cinquantaine lui ouvrit.
- Nous venons vous voir parce que votre voiture a été impliquée dans une histoire de meurtre dans le sud de la France, expliqua Agostini
- On m’a mis au courant de votre visite, répondit Herbault en levant la main pour faire taire son interlocuteur.
- Elle a été volée, vous aviez fait une déclaration de vol ?
- Cette jeune femme que vous voyez, commença-t-il en pointant sa compagne du doigt, devait s’en occuper, mais je vois que cela n’a pas été fait. Je suppose qu’à présent, on m’accuse d’être le meurtrier d’une gamine de dix-neuf ans dans les Pyrénées, c’est ça ?
- Où étiez-vous ce 21 octobre ? Demanda Marlène
- Je bouge très peu d’Orléans, je me rends parfois chez des amis à Chambord ou Paris, c’est là où je me déplace. Quel intérêt aurais-je à descendre dans les Pyrénées avec ma voiture ?
- Comment se fait-il que vous n’ayez pas fait de dépôt de plainte pour vol ? Normalement, une voiture comme la vôtre, c’est suffisamment cher pour vouloir la récupérer. Quand bien même vous vous en fichez de votre caisse, vous n’avez pas cette impression qu’un de vos biens les plus précieux aient été volés ?
- Vous savez, je n’ai pas d’attaches sentimentales à une simple BMW comme vous aimeriez que ça soit le cas. Cette jeune fille à mes côtés, Sophie, est une personne qui m’est beaucoup plus précieuse parce que j’ai pu tisser de réels liens, expliqua-t-il en regardant sa compagne qui lui tenait sa main tendrement.
Pendant ce temps, Agostini profita de cet interrogatoire pour prétexter un passage aux toilettes. En se levant, il en profita pour rentrer dans la chambre à coucher du couple pour fouiller dans leurs effets personnels. La chambre avait l’avantage d’être très propre et la penderie séparait les affaires de Michel et de sa compagne. Laurent observait la minutie du rangement de chaque vêtement, de chaque paire de chaussures et ce qui retint toute son attention était la présence d’une boîte en carton au-dessus d’un rayon de chemises rangées sur des cintres. Il posa la boîte sur le lit et fouilla à l’intérieur. Le premier objet était un album photos et en dessous se trouvait un grand carnet avec une couverture en carton. En l’ouvrant, le contenu commençait déjà à l’inquiéter, il était rempli de schémas de corps humains dessinés à la main avec tout au long des pages des exemples de dissections, de systèmes nerveux, de dessins représentant des jeunes femmes avec un membre en moins et ce qui le perturba le plus étaient des dessins représentant ce que pourrait représenter plusieurs parties du corps découpés une fois cousues entre elles.
Le contenu de l’album photos était encore plus glauque. La première partie était appelée « 1986, Biarritz » et montrait successivement les photos d’une jeune femme en robe et escarpin, le visage larmoyant, le maquillage coulant sur le visage et une expression de repoussage. Les photos suivantes montraient un visage effrayé puis le crâne défoncé par un coup de pelle, une mare de sang sur le sol et le bras sectionné. L’arrière de chaque photo était légendé avec la date de la prise de la photo. Les dernières indiquaient « 2016, Lannemezan ». Il y avait au tout début la photo d’une Sarah Larrieu, souriante avec ses amies et Sophie en train de boire dans son verre, puis les dernières la montrait en train de pleurer, la suivante la montrait en train de s’écrouler sur les genoux avec une forme floue derrière lui donnant un coup de pied dans les jambes, une autre avec le couteau planté dans le coeur et avec un bras en moins. Laurent reposa l’album, écoeuré, la nausée.
Sa fouille continua, il alla dans le bureau voisin où dans un placard se cachait des grandes photos prises en noir et blanc montrant la mise en pratique des schémas, c’est-à-dire des parties de corps qui étaient cousues pour faire un nouvel être vivant. L’une d’elles montrait un buste d’homme avec des jambes de jeunes femmes dont les pieds étaient dans des sandales à talon, les bras mélangeaient ceux d’un homme avec des mains de femmes et le visage était coupé en deux. Au moment où il se retourna, Sophie était derrière lui avec un fer à repasser et lui en donna un violent coup sur la tête.
Marlène s’inquiétait de ne pas voir son collègue revenir des toilettes et Sophie se leva pour voir où était Laurent. Elle entendit le violent coup et se leva. Herbault se leva lui aussi pour lui faire signe de s’asseoir. Sophie revint puis fit un sourire amusé à Marlène. Son collègue tenta de la frapper au visage, elle l’esquiva. Elle tenta de se défendre, Sophie sortit une bouteille de vin et tenta à maintes reprises de lui frapper la tête, Michel attrapa un couteau à pain, mais la policière lui donna un violent coup de chaise dans le nez. L’homme cria de douleur en tombant par terre. Il était sonné par le choc, le nez en sang. Sophie tenta d’éclater la bouteille dans le visage, mais la policière ne fut pas assez rapide au second passage de la bouteille. La bouteille s’éclata violemment sur la tempe droite de Marlène qui fut projetée par le choc sur la table en verre qui se brisa en mille morceaux.
Sophie se leva pour aider son acolyte à se lever. Elle chercha des serviettes et de l’essuie-tout pour lui éponger le nez. L’homme s’installa sur une chaise puis contempla le corps de la jeune femme sur l’armature de la table. Il la retourna, puis lui caressa tendrement les cheveux. Sophie était mignonne, mais elle ne serait jamais aussi belle que cette policière. Son assistante était brune aux yeux marron et depuis le temps qu’il s’occupait d’elle, c’était devenu une véritable femme élégante. Ce couple bizarre avait appris à séduire leurs victimes en s’infiltrant dans n’importe quel milieu social. Michel était le plus expérimenté, Sophie était son assistante depuis 2012 et elle apprenait vite. Tous les deux avaient un travail rangé, lui était banquier, elle était une architecte.
Sophie revint avec deux cannettes de Coca puis demanda à son compagnon « Et maintenant qu’allons nous faire d’eux ? »
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