Chapitre 6 – La peur du lendemain
Le matin s’est levé sans douceur.
Je suis rentré chez moi avant l’aube, l’esprit encore engourdi.
Je n’avais pas dormi.
Je n’avais pas prié non plus.
J’avais peur.
Peur de ce que je ressentais.
Peur d’avoir franchi une ligne invisible.
Peur de ne plus savoir reculer.
À l’hôpital, tout me semblait différent.
Chaque mot. Chaque regard.
Comme si quelqu’un savait.
Comme si tout le monde savait.
À la pause, je suis passé près de la salle des médecins.
Deux collègues parlaient à voix basse, croyant être seuls :
— Tu as vu Adrien, ces derniers temps ? Il passe beaucoup de temps avec le petit interne…
— Jonathan, tu veux dire ? C’est un bon élément, mais… un peu bizarre, non ? Toujours dans son coin…
Mon estomac s’est noué.
Je n’ai pas écouté la suite.
Je n’ai pas eu la force d’entrer.
Toute la journée, j’ai marché sur des œufs.
J’ai évité Adrien du regard.
Quand il m’a croisé dans le couloir, il m’a adressé un sourire discret.
Je ne lui ai pas répondu.
Ce soir-là, je suis rentré seul.
Et pour la première fois depuis longtemps, j’ai ouvert la Bible posée sur ma table.
J’ai cherché des réponses dans les marges, entre les lignes,
dans les silences de Dieu.
Et je suis tombé sur une phrase que je connaissais par cœur :
« La vérité vous rendra libres. »
Je suis resté figé.
Puis j’ai refermé le livre, le cœur en désordre.
Et si je ne voulais pas être libre ?
Et si la liberté, pour moi, signifiait perdre tout le reste ?
Note de l’auteur — La Voix Qui Écrit
Il y a des vérités qu’on porte comme des chaînes.
Et des silences qu’on chérit, simplement parce qu’ils nous protègent.
Ce chapitre est une fracture discrète, celle où l’on commence à craindre ce qu’on est, plus que ce que l’on fait.
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