Chapitre 13 – Le feu et le masque

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Le samedi matin, nous fûmes tous convoqués pour une “formation spirituelle” organisée par le département.

Une salle étroite. Une vingtaine de chaises. Une croix au mur. Une Bible ouverte. Et, debout derrière un pupitre, le Dr Kambale, médecin respecté, ancien pasteur, figure d’autorité dans l’hôpital.

Je m’étais assis tout au fond, à côté d’une collègue.

Adrien n’était pas là.

— Nous sommes ici, déclara le Dr Kambale, pour parler de ce qui compte vraiment. Pas seulement la médecine. Mais l’âme. La morale. La vérité.

Mon ventre se contracta.

Je reconnaissais ce ton. Celui qui précède toujours les coups déguisés en prières.

— Aujourd’hui, nos jeunes sont égarés. On confond liberté et perversion. On parle d’amour, alors qu’on nage dans l’impureté.

Certains hochèrent la tête. D’autres, comme moi, se raidissaient.

— L’homosexualité, mes frères, n’est pas une orientation. C’est une attaque. Un poison. Un désordre. Et je sais que dans ce même hôpital… certains ferment les yeux.

Le silence devint glacial.

Puis des regards. Subtils. Fuyants. Mais assez nombreux pour que je comprenne : le feu était là. Sous mes pieds.

Je ne dis rien. Je ne bougeai pas.

Mais mes mains tremblaient.

Le Dr Kambale continua, implacable :

— Si vous êtes témoins de ce genre de comportements, vous avez le devoir moral d’agir. Le silence est une complicité.

J’étouffais. J’avais chaud. Trop chaud.

Puis soudain, une voix s’éleva.

Calme. Inattendue.

— Et si aimer un autre homme faisait moins de mal que cracher sur lui en invoquant Dieu ?

Tous les regards se tournèrent.

Je me retournai lentement.

Un jeune homme se tenait debout, au fond de la salle.

Je ne le connaissais pas.

Il portait un simple t-shirt noir, et son regard brillait d’une colère tranquille.

— Qui êtes-vous ? demanda le Dr Kambale, blême.

— Quelqu’un qui sait ce que ça coûte de se taire.

Et qui n’a plus envie de regarder ses frères mourir à petits feux pour sauver des apparences.

Je sentis mes yeux se remplir.

Je ne pouvais pas parler. Pas encore.

Mais cet inconnu, cet Alain, venait de briser la vitre.

Il n’était peut-être qu’une étoile filante dans ma nuit.

Mais ses mots, eux, resteraient.

Gravés.

Quelque part en moi, une voix murmurait :

Tu n’es plus seul.

Tu ne l’as jamais été.

Note de l’auteur – La Voix Qui Écrit

Ce chapitre est un cri silencieux.

Quand la peur colle à la peau, quand l’amour devient une faute, il suffit parfois d’une voix même d’un étranger pour fissurer les murs.

Merci à ceux qui lisent avec l’âme ouverte.

Merci à ceux qui, quelque part, tendent la main sans bruit.

— La Voix Qui Écrit

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