Chapitre 12
Le monde est bien plus vaste que l’on ne peut l’imaginer. Au-delà de ces montagnes et prés qui nous sont familiers, certains d’entre nous trouvent le courage de s’y aventurer. Aucun corps de caste n’est à même de structurer ces esprits libres et bien souvent sans foyer. Femme, homme, enfant, de leurs propres mains, ils tracent nos routes de demain. Ils viennent de tout horizon, de toute la société, ce sont ceux que l’on appelle les Aventuriers.
Pour avoir croisé leur route plus d’une fois, je peux affirmer qu’ils ne sont jamais en manque d’histoire à raconter. Si certains fabulent quelques aventures épiques pour amuser la galerie, d’autres les vivent réellement. De ces rencontres et périls incroyables, ils reviennent parfois en héros triomphant. De la société ils sont alors reconnus ; les privilèges des castes ordinaires leur sont ainsi rendus. Mais pour les autres, bien d’entre eux sombrent dans l’oubli. Rien n’est fait pour les soutenir, les encourager : les Aventuriers n’ont rien de plus que les autres Désalignés.
Extrait de Castes et autres orientations
par Tuì Wollensberg
- Je crois que je me suis encore trompée.
Mon corps s’immobilise. Un soupir m’échappe. Me voilà face à un énième carrefour. Des pentes, des avenues, des volées de marches dans tous les sens. Des indications partielles ; il existe tellement de possibilités pour simplement tourner à droite. J’ai beau me débattre, retourner sur mes pas, rien ne semble changer à ma situation. C’en est presque risible d’être perdue à ce point. Il n’y a pas à dire, Tarn a une architecture extraordinaire ! Si grandiose avec ses passerelles et ruelles à ne plus savoir où donner de la tête. Vraiment extraordinaire… À combien de passants ai-je demandé mon chemin déjà ? Cinq, huit, quinze ?
- Ah… vraiment.
Pour préserver mon égo, je préfère croire que tout ceci n’est rien d’autre qu’un grand complot mené contre moi ! Par je ne sais trop quelle sorcellerie, mon ennemi juré métamorphoserait la ville selon sa volonté. Il paverait mes pas de tronçons que j’ai déjà empruntés. Recréerait des espaces où mes yeux se sont déjà posés. M’enverrait même des complices pour être sûr de m’égarer.
- Ah ! Quelle idée ridicule.
Je crois que la fatigue fait des ravages dans ma tête. Un sourire se dessine sur mes lèvres. Mais au moins, cette idée fantasque a le don de me détendre un peu. Depuis que je suis sortie de l’Étoile de Minuit, mon corps m’envoie des cris d’alarme spectaculaires : de la fatigue musculaire. Je ne pense pas pouvoir clopiner comme ça encore longtemps. Malheureusement pour moi, cette journée ne semble jamais se finir. Débarquer dans une ville inconnue, apprendre qu’une filature est en cours sur ma personne, menacer de faire exploser ma tête devant une pauvre adolescente… La simple idée d’un bon lit où m’enterrer me fait baver d’envie.
Par excès de nervosité, mes doigts plient et replient encore et encore un petit morceau de papier. Une adresse griffonnée à la hâte alors que j’interrogeais maladroitement les passants croisant ma route. Regards suspicieux, condescendants. Haineux. Me balader avec marqué sur le front «étrangère» n’aurait pas suscité de meilleurs résultats. Les gens sont méfiants de nos jours.
- Mais il faut bien le dire : des nouveaux arrivants, cela n’arrive pas tous les jours. Encore moins quand on sait que les régulations des zones de travail sont d’autant plus strictes de nos jours. La grande majorité de la population vit et meurt dans celle qui l’a vu naître.
Renforcées, hein ? Trouver du boulot ici s’annonçait déjà périlleux avant, alors maintenant… Soupir. Je secoue la tête pour chasser ces pensées déprimantes. Demain est un autre jour, n’est-ce pas ? Rester plantée là à remuer toute cette bouillasse ne m’avancera à rien. Je me remets en marche. Mes pas me guident, mes pas hésitent. Les rues défilent, les rues me quittent. Encore combien de temps avant de parvenir « Chez Martha et Luther » ? Je ne le sais point. Soupir. J’ai bien fait de les appeler pour réserver leur unique chambre. Mais existe-t-elle seulement ? Plus je marche, plus mes doutes grandissent. Cette maison d’hôte me paraît comme un rêve lointain.
Grrmblbl !
Mon estomac proteste. Peut-être est-ce les prouesses culinaires que l’on m’a vantées qui l’ont ligué contre moi ? Mais à quoi cela servirait de bien manger si les rumeurs me suivent jusque là-bas ? Il se tordrait tant qu’il me serait impossible d’avaler la moindre bouchée. Mes lèvres se pincent.
Il faut que je fasse une bonne première impression.
Je m’éclaircis la gorge.
- Enchantée… non, ravie de faire votre connaissance. Je me présente, Solfiana Dorlémon. Je vous remercie… non, ça fait trop rigide. Merci de m’accueillir chez vous. Je vous remercie… Merci…
Je ne sais pas lequel est le meilleur ! Et puis, je devrais peut-être inverser les remerciements et les salutations : ça sonne mieux je crois. Ah et il ne faut pas oublier de sourire et avoir une posture d’ouverture quand je me présente : le corps est la vitrine de tes pensées. Pas de bras croisés, faire face à la personne.
- Il faut que tu aies un air posé en tout temps. Ni trop confortable, ni trop supérieur. Juste ce qu’il faut pour paraître polie, mais ne pas montrer tes réelles intentions. Voilà comment tu entretiens une relation d’échange, ma fille.
Mes lèvres s’étirent, je tente tant bien que mal d’évaluer mon reflet dans une vitre à portée de regard. Non non non, ça ne va pas. Essayons un peu plus large.
- Gênant…
Il n’y a rien de naturel dans cette grimace que j’arbore. C’est peut-être parce que l’on voit mes dents ? Ou bien mes yeux sont trop plissés ? Mon visage trop figé ?
-…
Je n’arrive pas à croire que je suis en train de faire ça. Et surtout… Mes yeux rencontrent mon reflet dans la glace. Appliquer les conseils d’Oncle Orléo, mais quelle idée. Lui si savant dans tant de domaines techniques, qu’est-ce qu’il pouvait bien savoir de ce que recèle le cœur des gens ?
Une porte s’ouvre violemment.
- Tu n’écoutes vraiment rien !
- Lâche-moi ! J’ai rien fait !
- Je t’avais dit de ne plus t’approcher de ce garçon !
- Arrête ! Tu me fais mal !
Des bruits de pas qui s’éloignent.
- Je… Ah… je suis vraiment désolé, ma chérie. Ça ne se reproduira pas. Tu me pardonnes ?
- …
- Qu’est-ce que je peux faire pour que tu arrêtes de m’en vouloir ?
-… Pourquoi tu n’aimes pas Hari’ ? Il est gentil avec moi.
- Je le sais bien, c’est juste que…
Soupir.
- Écoute, je sais que ça peut être difficile à comprendre pour toi à ton âge, mais ce garçon…
- Hari’. Il s’appelle Hari’.
- Très bien, Hari’, il n’est pas quelqu’un qui te rendra heureuse, ma chérie. Loin de là. Tu peux me croire sur ce point-là.
- Tu n’as pas toujours raison, mon oncle.
Si je n’avais pas eu Hari’, qui d’autre aurait été là pour moi après ta mort ?
- Sol’ !
Quoique, tu pourrais arguer qu’il n’a pas fait un bon travail vu mon état actuel. Mais peux-tu vraiment lui mettre tout ce qui s’est passé sur son dos ? J’inspecte mon apparence dans la vitre. Soupir. Et moi qui m’inquiétais de faire bonne impression avec mes mots, je suis un fouillis total. Mes tresses blondes ne sont pas loin d’imiter un tas de foin à la perfection ; elles laissent s’échapper tellement de mèches folles par dizaine. Mes yeux rougis, mes joues pâles. Pour peu, on pourrait croire que je suis sur le point de vomir mes entrailles. Et mes vêtements n’en ressortent pas plus beaux : ils sont sur le point de finir en lambeaux. Vaincus par les traces d’usure. Et de brûlure.
- Accroche-toi Allie ! On y est presque, je vois la sortie !
Vertige. Je recule de quelques pas. Mon esprit est plongé dans le chaos.
Un visage. Des flammes.
Des cris.
Un immeuble, des débris.
Des yeux d’ambre.
Les images se succèdent, se superposent. Et ces voix.
- Allie ! Allie, lève-toi !
-…
- Eh regarde-moi ! Regarde-moi, Allie. Allie, tu es plus forte que ta peur. Plus forte que ces flammes. Alors, lève-toi et partons d’ici !
- J-je… Je peux pas, Sol’.
- Si tu le peux, Allie. Non ! Non, regarde-moi. Ne regarde que moi. On va sortir d’ici, je te le promets !
- Allie…
Ce nom roule sur ma langue avec tellement de facilité. Comme familier.
- Je suis Aldena Dorlémon et je vais conquérir le monde entier !
Comme un sentiment de nostalgie.
- Tu es la fille la plus courageuse que je connaisse, petite sœur !
Comme une vieille photo jaunie.
Qui passe de main en main.
Jusqu’à qu’il ne me reste plus rien.
- Ah…
Les bribes dont j’ai cru me rappeler disparaissent soudainement. Filandreuses. Mais insaisissables. Seul leur goût amer me reste en bouche. Je tente de me les remémorer, de m’y raccrocher, mais rien ne me revient. Le vide a déjà pris leur place. À l’image d’une ardoise sur laquelle on aurait fait place nette, il ne demeure que de la poussière éparpillée au hasard. M’acharner à en tirer un quelconque sens serait bien futile. Soupir. Cette journée n’a que trop duré.
Mon cœur lourd, la solitude posée sur mes épaules, je me remets en marche. Au milieu de ces enchevêtrements de rues, j’étouffe. D’instinct, pour y échapper, mon regard se dirige vers le ciel. Cette étendue bleue sans fin. Sans limite. Virant du clair au sombre du soir au matin. Invariable. Lui et ses grandes majestés se poursuivant dans un bal sans fin. Tournoyant et virevoltant autour de cette terre. Que l’on vive sur le Continent ou sur les Îles, on peut les apercevoir. Au milieu de toutes ses étoiles, de ce silence impénétrable. Briller jusqu’à n’en plus pouvoir. Une vie paisible, une vie simple.
Mais ce n’est pas en les contemplant que je ne pourrais nier la vérité.
Autour de moi, l’agitation retombe, les rues se vident. Peu à peu, je semble être la seule âme qui vive. Mes pas seuls semblent résonner dans cette ville. Au milieu de cette immensité de briques, de tôle et de verdure, que je dois paraître insignifiante. Abandonnée de tous.
Mais les apparences sont parfois trompeuses.
Tac ! Tac !
Faibles, mais présents. Des bruits de pas me filant. Ils me suivent, me poursuivent depuis quelque temps. Plus exactement, depuis que je suis sortie de la pâtisserie. Clochette faisant du zèle ? Mais je ne l’ai pas aperçu depuis un moment. Ma mâchoire se contracte. Si cela se trouve, il s’agit d’un tout autre individu. Suffisamment prudent pour ne pas se montrer. De peur d’être mal accueilli ? Mon humeur s’assombrit. Ou pour m’agresser ? Un autre Silenceur ? Mon esprit se chauffe à ébullition d’idées sombres. Cependant mes inquiétudes sont en vain : avant même que je n’essaie de le débusquer, l’individu se dévoile à moi.
- Excusez-moi, mademoiselle. Vous semblez perdue, puis-je vous… oh ! Vous êtes la jeune fille de tout à l’heure.
Ah. Ce n’est qu’un civil.
- Pardon, nous sommes-nous…
En me retournant vers la voix, je manque de reculer de quelques pas.
- … rencontrés ?
Un géant. D’une tête et demie plus grand.
- Non, ah ah ah. Rencontrés serait un bien trop grand mot pour cela. Disons plutôt… croisés.
Oh…
- Vous êtes… le jeune homme qui me dévisageait au café, non ?
Un grand sourire.
- C’est exact. Je suis surpris que vous vous souveniez de moi. Même si j’imagine que mon impolitesse a dû vous importuner.
Trop lumineux.
- Mais croiser la route d’une jeune fille aussi heureuse ne pouvait que retenir mon attention.
Poli.
Dans son trench élégant sur-mesure, l’inconnu me dresse le portrait de notre première rencontre. S’il ne m’avait pas interpellé à l’instant, son existence aurait été effacée de ma mémoire à jamais. Ah. Je le vois clairement maintenant. Son visage surpris alors que je galope loin de Clochette après lui avoir arraché une pièce d’information. Un figurant. Normalement, un simple passant. Mais non, le voilà tout fringant devant moi.
Et cette façon de s’exprimer…
- J’imagine. Vous me trouvez gênée d’apprendre que l’on ait pu assister à mon manque de maîtrise.
- Il ne faut pas : il est toujours bon de voir qu’il existe encore du bonheur dans ce bas monde.
Vraiment charmante.
Mais… mes sourcils se froncent. Cet homme me met mal à l’aise. Sa stature impressionnante et son crâne rasé pourraient facilement appartenir à un bandit des grands chemins. Mais ce regard… Il y a quelque chose qui me dérange dans ses yeux bridés. Comme une lueur étrange qui refroidit son sourire chaleureux.
Et il ne s’agit pas d’un masque.
- Oh, mais je crois que j’ai fait un nouvel impair : je ne crois pas m’être présenté, veuillez me pardonner. Trần Hoàng Liêm, enchanté. Mais vous pouvez m’adresser sans problème comme Liêm.
- Enchantée, je m’appelle Sofia Mieux. Vous pouvez m’adresser simplement comme mademoiselle Mieux.
Léger flottement.
Cependant, il ne se formalise pas de ma réponse. Au contraire, ses yeux semblent pétiller davantage de malice.
- Très bien, mademoiselle Mieux, puis-je réitérer ma proposition ? Je vous promets de faire de mon possible pour vous aiguiller sur le bon chemin.
- Avec plaisir. Je dois me rendre au « Pavillon des cinq senteurs » au plus vite.
- Oh, dans ce cas, il vous suffit de tourner à droite dans cette rue là-bas et de continuer tout droit jusqu’à apercevoir des guirlandes de lanternes rouges. Vous verrez, elles sont difficiles à rater tellement elles sont grandes.
Mon corps se raidit au rire dans sa voix. Sourd et railleur. Comme ayant percé à jour tous mes mensonges.
- Je vous remercie pour votre aide, Liêm.
- Avec plaisir, mademoiselle Mieux. Passez une bonne soirée.
- … Vous de même.
Sans attendre une seconde de plus, je commence à m’éloigner. Pas à pas, accélérant de plus en plus alors que j’en sens le besoin grandir. Je le sais loin pourtant, cet énergumène ; dans mon dos, pas un bruit de pas ne me fait écho. Pourtant, impossible de mettre mon cœur au repos. Comme une impression d’avoir un regard collé à la peau.
Ƹ§Ʒ
- Effectivement, impossible à rater.
Une gargantuesque statue de chat me fait un clin d’œil. Tout de noir poli, sa surface reflète la lumière artificielle des lampadaires. Un à un, ils s’éveillent. Leur carcasse de métal s’animant au fil du chuintement de la Brume s’y déversant. Elle qui ne laisse aucune trace s’évapore en un instant. De sa contribution, on ne retiendra que l’éclairage agressif qu’elle laisse derrière elle. Ainsi sont illuminées les rues et, pour les plus fortunés, les porches inanimés. Comme un projecteur de choix pour l’extravagante décoration le tapissant. C’est ainsi que je rencontre le chat de «Chez Martha et Luther». Culminant à plus de deux mètres de haut, il tient entre ses griffes une pièce porte-bonheur plus grosse que ma tête.
- Serait-ce de l’obsidienne ?
Mon poing tapote la surface réfléchissante. Au téléphone, l’hôtesse me l’avait indiqué pour trouver la bonne maison, mais… Franchement, qui peut bien avoir assez d’argent pour investir dans un chasse-démon aussi démesuré ?
Tac ! Tac !
Des pas résonnent le long de la rue.
- Ah…
Tac !
Je ne pensais pas croiser leur route si tôt.
À l’oreille seule, distinguer les deux individus est impossible. Discipline, coordination parfaite, des années d’entraînement et de dur labeur pour en arriver là. Leurs bottes hautes frappent le sol à l’unisson. Leur long manteau gris claquant dans la brise. Au coin de leur cœur, la même broche : une Surkane renifleuse, la tête haute, le corps partant en fumée. Pincement au cœur. Instinctivement, ma main vole à ce même emplacement sur ma veste. Déserté.
- Service, patrie et honneur. Pour la gloire de notre monde…
Cette devise quitte mes lèvres avant même que je m’en rende compte.
Tac ! Tac ! Tac !
Le bruit se rapproche, je les vois débarquer au coin d’un bâtiment. Un homme et une femme. Flamboyant dans leur uniforme impeccable. Je les observe. Eux qui travaillent chaque jour dans l’espoir de contribuer à la société. Eux qui s’exténuent chaque jour parce qu’ils croient en cet avenir que leur promettent les autorités. Ils rendent le monde meilleur ! Ah… Je me mords la lèvre. Mes mains tremblent alors que je pose mes yeux sur elles. Elles sont remplies de souvenirs.
Des gestes, des mouvements de routine.
Régler, compter charger. Lunettes MECA, pièges et fléchettes.
Tant de nuit, de clairs de lune passés.
Mes mains me paraissent bien démunies maintenant.
Tac ! Tac !
Mon regard revient sur les deux Gardes en approche. Ils sont si fiers. J’imagine que l’on devait avoir la même allure, moi et ma coéquipière.
Coéquipière ?
Nausée.
Vertige.
J’ai la tête qui tourne. Danger. Le décor tangue. Danger. Je manque de me noyer. Mais, mes mains s’ancrent au chasse-démon, me retient d’être emporté par les flots. Je suis sauve. Pour l’instant. Aucune image ne me revient. Aucune voix, aucune sensation. Rien. Il n’y a que ce vide qui spirale et menace de m’engloutir. Mes pensées s’entrechoquent, le monde que j’entrevois entre mes paupières à demi-fermées y déborde. Tout devient un méli-mélo de sons et de lumière entrecoupé parfois d’une brève accalmie. Ma tête… ! Je la prends dans mes mains. Si je ne le fais pas, je crois que je vais…
La patrouille approche. Je le sais, je le sens. Mais la force de bouger m’a quittée.
-… !
Mon corps est soudain ébranlé. Leur regard. Un vent de panique se soulève en moi. Les deux Gardes me dévisagent. Leurs yeux plissés, leur main posée la garde de leur rapière. Non, non non, je ne dois pas… Mon cœur bat à tout rompre. Piquer leur intérêt est la pire chose qui pouvait arriver. Là, avachie contre cette statue de chat, j’ai tout sauf l’air normale.
- Elle a tué sa propre famille.
- Meurtrière !
- ASSASSINE !!!
Mes yeux vagabondent sauvagement pour trouver une échappatoire. Gauche, droite, dans les ruelles adjacentes, derrière les jolis pots de fleurs. C’est alors que je la trouve.
Miaou miaaouuuuu !
Cette drôle de sonnette.
Mais rien de ce que j’aurais pu imaginer n’aurait pu me préparer à ce qui allait suivre.
- J’arrive, j’arrive !
La porte s’ouvre.
- Vous voilà enfin ! On vous attendait avec impatience.
Une femme, la cinquantaine. Des boucles brunes enveloppant voluptueusement sa joue droite, un crâne rasé de l’autre pour souligner sa balafre en dents de scie. Et cette boucle d’oreille. Une dent aux bords dentelés. Celle d’une Charybde.
- J’ai bien cru qu’une sirène vous avait emportée au loin et que je n’aurais jamais eu le plaisir de faire votre rencontre. Appelez-moi Martha, tout simplement.
Devant moi se tient la seule et unique Pourfendeuse des Mers, l’Aventurière de légende : Martha Vollenzosky.
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