Chapitre 68

8 minutes de lecture

Luc aiguisait sa lame machinalement comme si ça ne faisait pas des jours qu’il le faisait. Quasiment un mois était passé, l’Imposteur comptait attaqué aujourd’hui et les armées se trouvaient prêtes. Pour ne pas se trahir lui-même, Luc avait dû révéler certains plans de l’armée pour paraître honnête. Il les avait choisis avec l’aide d’Aaron et Laurène en essayant d’épargner au maximum leurs amis et un grand nombre de personnes. Malheureusement à l’approche de l’attaque finale, Luc ne se sentait pas du tout confiant. Il avait peur que tout se passe mal, que leur plan ne fonctionne pas, que l’humanité soit perdu.

Le jeune Dresseur n’entendit pas Nicolas qui avait frappé plusieurs fois à la porte. Le père de Luc s’avança et se saisit de l’arme que son fils tenait pour la poser délicatement sur la table. Il lui offrit un petit sourire alors que Luc l’observait.

– C’est normal d’appréhender et d’avoir peur. Les prochaines heures seront loin d’être faciles. On va devoir garder la tête froide mais j’ai confiance en toi. Je sais que tu peux y arriver, je sais que tu es capable.

– Mais si ce n’était pas le cas ? Et si je ratais ? Si je condamnais tout le monde ?

– Luc, tu ne condamneras personne, assura Nicolas en le faisant s’asseoir sur le lit. Ce fardeau, tu n’es pas le seul à le porter et si jamais tu as l’impression que c’est trop lourd, partage le. Je suis là pour Laurène, je suis là pour Lucas et je suis là pour toi aussi. Je ferais n’importe quoi pour t’aider. N’importe quoi.

– Papa, souffla Luc en séchant une larme. Merci pour tout. Merci d’avoir fait ce rapprochement et de te souvenir que tu avais un fils. Merci de m’accepter.

– Évidemment que je t’acceptes ! Et je ferais tout ce que je peux pour t’aider.

– Je sais.

Le père et le fils passèrent un moment dans la chambre du jeune homme. Pour rester serein pour l’attaque qui se préparait, Luc se confia sur ses craintes à son père. Ils avaient tous deux trouver un équilibre dans leurs relations et aucun des deux ne changeraient pour rien au monde. Ils auraient juste voulu s’être retrouvés plus tôt ! Mais Luc savait qu’il voulait rester en vie, pour rester avec sa petite sœur et son frère. Pour rester avec son père, quelqu’un qu’il avait idéalisé longtemps avant de le retrouver. Nicolas avait surpassé donc ses espoirs et pour une fois dans sa vie Luc se sentait chanceux.

***

– Je ne veux pas que tu ailles sur le champ de bataille, répéta pour la millième fois Damien.

Le jeune homme se rassit sur le lit qu’il partageait avec Dylan. Ce dernier commençait à s’habituer à sa prothèse mais le Dresseur estimait que son ami n’était pas encore assez habitué pour risquer à se jeter dans un champ de bataille. Ça faisait des jours qu’il débattait et Damien ne parvenait pas à convaincre Dylan. Le jeune homme comptait déjà veiller sur Aaron, il préférait savoir Dylan en sécurité pour qu’il ne se fasse pas un sang d’encre pour une personne en plus. Mais Damien savait aussi que son ami tenait à se racheter et qu’il ne tentait en vain…

– Ta prothèse n’est pas encore parfaitement réglée, continua-t-il. Elle pourrait te trahir sur le terrain.

– Alors elle me trahira sur le terrain.

– Dylan !

– Damien, je sais que tu essayes de me protéger et je t’en suis reconnaissant. Mais je ne peux pas rester les bras croisés alors que la bataille va éclater. Encore moins en sachant que tu es là-bas et que je ne peux pas garder un œil sur toi.

– Tu pourrais participer à l’infirmerie, je suppose qu’ils seront vites en surcharge et qu’ils auront besoin de main en plus, proposa Damien. Ta jambe sera peut-être moins éprouvée…

– Mais je ne pourrais pas garder un œil sur toi, le coupa Dylan. Et je ne veux pas te laisser seul.

– Je ne serais pas seul !

– Tu ne seras pas avec moi ! Et je ne serais pas rassuré. Je te jure que tu n’es pas le seul à vouloir garder un œil sur l’autre ! Je ne te laisserais pas partir au front sans moi, c’est hors de question !

– Dylan écoute…

– Non ! Non, Damien toi écoute ! Tu es tout ce qui me reste, d’accord ? Il n’y a que toi dans ma vie et je ne veux pas perdre la seule personne qui compte pour moi. Alors si tu vas au front pour aider les autres membres de l’organisation, je viendrais avec toi.

Le Dresseur soupira même s’il laissa échapper un petit sourire. Ça faisait toujours du bien de sentir toute l’affection d’une personne à son égard. Damien capitula. Il ne voulait pas se disputer avec l’ancien ennemi à l’aube d’une dangereuse bataille. Il se replaça correctement sur le lit et attira son ami à lui pour qu’il repose sa tête sur son épaule. Non, ils ne se disputeraient pas aujourd’hui.

***

Clara contemplait Lucas qui s’assurait d’avoir récupéré tous ses poignards. Le jeune Lié n’avait pas énormément d’expérience, cependant il maîtrisait le partage désormais. Pourtant la jeune fille redoutait toujours de le savoir sur le champ de bataille bien qu’ils seraient côte à côte. Heureusement la jeune Dresseuse savait se tempérer : Lucas avait plus de raison de s’inquiéter qu’elle. Ce n’était pas lui qui avait subi deux arrêts cardiaques après une grave blessure lors de l’attaque précédente. Clara ne pouvait le blâmer et de toute manière elle ne l’aurait pas fait.

– Tu ne t’éloigneras pas trop, d’accord ? déclara-t-il soudainement en la regardant à travers le miroir de sa salle de bain.

– Promis, assura Clara qui avançait derrière lui pour l’enlacer. Je dois comprendre, mais j’essayerais de rester le plus proche possible. Je te le promets.

– Je ne veux plus de perdre. Je ne veux plus revoir ton corps agonisant dans mes bras. Je ne peux plus de ça…

– Je sais et je veillerais que ça n’arrivera pas.

– Tu ne peux pas me le promettre…

– Je ne te l’ai pas promis, j’ai dit que j’essayerais. Toi aussi, essayes. Ce n’est pas parce que tu n’as pas été blessé la dernière fois que ça ne peut pas arriver bientôt.

– Je sais Clara, je sais.

Lucas se retourna pour l’embrasser. Il avait tellement rêvé de cette fille, de leur futur. Il ne pouvait pas penser que ça ne puisse pas arriver. Il voulait une maison et des enfants avec elle. Il voulait l’entendre rire alors qu’elle s’amusait avec eux ! Lucas ne pouvait pas croire que ce rêve puisse se faire détruire dans les heures à venir. Cette possibilité n’existait pas pour lui, ni pour Clara. Cette dernière imaginait déjà Lucas bercer leurs enfants le soir et leur raconter des histoires d’héros qui sauvaient le monde à dos de dragons. Non, il n’y avait pas de possibilité pour que ce futur soit détruit, elle le refusait.

Lucas la prit par la main et l’entraîna jusqu’à son lit, la jeune fille se laissa tomber en douceur sur le matelas tout en entraînant le jeune homme avec elle.

***

– Bon, d’accord, je peux faire une concession pour le chien, je ne te laisserais pas mourir d’allergie, déclara Valentine. Mais on emménage dans le sud c’est non négociable !

– Va pour le sud !

Valentine reposa sa tête sur la poitrine d’Anna. La Persévérante laissa échapper des soupirs alors que les doigts de la rouquine massait avec précision son crâne. Oui, Valentine se sentait toujours autant chanceuse que la Soigneuse ait pu être amoureuse d’elle en retour. Ca l’avait toujours étonné qu’Anna fasse le premier pas mais elle ne s’était jamais sentie aussi heureuse ce jour-là : bien que sûr d’elle, l’adolescente n’avait jamais eu le courage d’avouer ses sentiments à sa copine alors qu’ils étaient présents depuis la première fois qu’elle l’avait vu. Valentine se souviendrait toujours de la rentrée en sixième lorsque son regard était resté dix minutes bloqué sur une petite rouquine qui lui avait offert un sourire timide mais si craquant. Elle avait croisé les doigts pour qu’elles se retrouvent à côté dans certains cours et son vœu avait été exaucé ! Anna et elle à côté, devenue amie et Valentine avait tellement voulu plus.

– A quoi tu penses ? murmura Anna à son oreille déposant un baiser sur sa tempe.

– A nous. Juste à nous. J’aimerais que ses moments-là s’étendent pour l’éternité. Juste toi et moi, rien d’autre.

– Moi aussi… moi aussi. Après la guerre, si on s’en sort, on pourra profiter.

– Bien sûr que l’on va s’en sortir ! s’écria Valentine. Je ne laisserais rien nous barrer le chemin.

– Parfois j’aurais aimé que tu ais choisis de rester Soigneuse. On serait resté ensemble et tu aurais couru moins de danger.

– Anna, tu seras là pour me soigner si je suis blessée. Tu serais capable d’oublier ton patient pour venir à mes côtés.

– Évidemment que je lâcherais mon patient pour venir à tes côtés, affirma Anna avec ferveur. Mais ce n’est pas pour ça que je peux tout guérir. Je ne suis pas une magicienne. Si tu es blessé gravement, je n’aurais peut-être pas le temps de faire quoique ce soit.

– J’ai confiance en toi, toujours, je sais que tu feras ton possible même si tu ne parviens pas à me sauver. C’est moi qui suis inquiète, si tu es blessée, je ne saurais rien faire pour t’aider.

– Tu pourras rester avec moi ou m’escorter à l’infirmerie. Mais pourquoi je serai blessée ?

– Tu es directement sur le champ de bataille et non à l’arrière. Je… reste avec moi, d’accord ? Reste toujours à proximité.

– C’est ce que je comptais faire. Tu n’as pas à t’en faire pour moi.

En vérité Valentine s’en faisait toujours pour Anna lorsqu’elles étaient en pleine bataille mais ça la rassurait de savoir que sa copine aussi angoissait à l’idée de la savoir en pleine bataille. Les deux jeunes filles se redressèrent et Valentine déposa un baiser dans la nuque d’Anna qui l’enferma dans ses bras. Bientôt, elle allait devoir bouger. Bientôt ça serait le moment. Mais les deux jeunes filles comptaient bien rester dans leur petit cocon pour un moment.

***

– Qu’est-ce que l’on fait ?

– C’est toi qui décides. On peut aller les rejoindre et se battre, ou alors on peut partir au Canada comme on l’avait prévu.

Joyce tergiversait. La jeune Liée avait entendu l’annonce de la guerre. L’adolescente s’inquiétait évidemment pour ses amis, elle se demandait s’ils allaient réussir, survivre. Elle aurait voulu les aider mais la jeune fille ne voulait pas les revoir. Elle appréhendait leurs réactions si jamais elle débarquait comme si de rien était. Même pour les aider, elle imaginait bien la haine dans le regard de Lucas et Joyce ne pouvait pas s’y résoudre. Pas après tout ça.

– Est-ce que tu penses que l’on aura des nouvelles ? s’enquit la jeune fille.

Elle tenait le bras du voyant comme s’il pouvait lui donner la bonne réponse, la guider vers le meilleur choix. Joyce avait appris à faire confiance à Daniel. La jeune fille suivait sa maturité.

– Oui, on aura forcément des nouvelles. Quoi qu’il arrive, on finira par savoir ce qui se passe, assura le voyant.

Les deux jeunes observaient de loin le campus. Ils survolaient sur Aquadicum. De là haut, ils ne voyaient que des points, trop loin pour reconnaître les visages. Peut-être ses amis se trouvaient là…ils ne la considéraient sûrement plus comme une amie désormais.

– Alors partons, fit-elle par prononcer. Partons au Canada. Je n’ai plus rien à faire ici.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Starry Sky ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0