ADHARA *** II ***
PIROS - SALLE DE SPORT
Kylburt déchargea toute la tension accumulée depuis le début de leur voyage, ses poings martelant avec force le sac de frappe. Slikof était avec lui, mais se contentait de le regarder depuis le banc, l'air pensif. Le silence était rythmé par les coups puissants qu'il portait.
— Hey, Slikof ! appela Kylburt, s’essuyant le front d’un revers de main.
Celui-ci leva la tête dans sa direction, puis Kylburt lui jeta une paire de gants de boxe.
— Tiens ! Enfile ça !
— Pour quoi faire ? ricana Slikof.
— T'es tout rouillé, mon vieux. T’as besoin d’une bonne raclée.
— Tu n'as pas l’impression qu’on n’a pas le même gabarit ?
— Joue pas à ça avec moi... On sait très bien que tu peux me mettre au sol en un claquement de doigts, insista Kylburt, amusé. Mais ton manque de pratique finira par te jouer des tours.
Un élan de compétition s’empara de De Xylis. Cela lui ferait du bien de suer un peu. Kylburt avait raison. Il se leva et partit dans les vestiaires sans un mot, déterminé à ressortir prêt à lui flanquer une dérouillée.
— Allons-y, lança Slikof l’air impatient.
Une fois face à face, les deux hommes étaient prêts à en découdre. Slikof anticipa les mouvements de son ami, ne connaissant que trop bien ses vieilles habitudes. Il savait que Kylburt allait lui foncer dessus comme un taureau. Slikof tint sa garde, attendant l'offensive de Kylburt. Ce dernier pesait au moins quinze kilos de plus. C'était une armoire à glace ; il manquait de souplesse et d'endurance. Il n'était que force. Slikof était rapide, plus petit, plus sec, et surtout, il savait où frapper. Sans trop de surprise, Kylburt lança le premier coup : un énorme crochet du droit en direction des côtes. De Xylis, bien trop près, se décala vers l'arrière pour sortir de son angle d'attaque.
— Si prévisible, provoqua-t-il en ricanant.
Il en profita pour lui asséner un direct dans le plexus. Le coup était précis, puissant. Kylburt en eut le souffle coupé. Slikof en profita pour le déborder sur sa droite ; Kylburt était en position de faiblesse. Le maître des oiseaux de nuit décida de lui faire un jab. Le jab était une technique de boxe qui consistait à envoyer plusieurs directs rapides à hauteur du visage de son adversaire pour le perturber. Cela fonctionna ; Kylburt accusa les coups sans pour autant répliquer. Il tenta tant bien que mal d'assurer sa garde. Slikof savait qu'il pouvait le finir sur le prochain coup et enchaîna avec des fouettés au niveau des jambes. Kylburt essaya de se décaler, mais sans succès, et décida d'utiliser toute sa force dans un crochet du droit que Slikof esquiva sans aucune difficulté. Cela lui offrit même l'opportunité de contre-attaquer en lançant un redoutable uppercut. Kylburt se retrouva au sol, sonné.
— Putain de piaf de malheur, grogna-t-il en se tenant la mâchoire. Tu es toujours aussi redoutable.
Slikof continua de sautiller en maintenant sa garde.
— Je ne suis pas si rouillé que ça, on dirait, nargua-t-il tout guilleret.
Il lui tendit la main pour l'aider à se relever. Kylburt s'en saisit.
— Bon... Après l'effort, le réconfort ?
— De quel réconfort parle-t-on ? blagua-t-il, un sourcil aguicheur relevé.
Kylburt éclata de rire et poussa amicalement Slikof pour le déséquilibrer.
— Tu es très beau, Slikof, mais tu manques de poitrine à mon goût ! s'esclaffa-t-il en lui tapant l'épaule. Je parlais plutôt d'une bonne liqueur accompagnée de quelque chose à grignoter.
— Parfait. J'en suis, répondit-il, charmé par l'idée.
Kylburt enfila son bras autour du cou de son ami pour l'emmener avec lui.
— Après, pour le réconfort, tu peux peut-être y convier Binny ?
La taquinerie amusa Slikof, qui était d'humeur joueuse après sa victoire.
— Toujours là-dessus, à ce que je vois ?
ADHARA
Après trois jours, ils arrivèrent enfin à l'escale tant attendue de Binny. Son chez-soi. Sa maison. Lorsqu'elle descendit de l'appareil, ses yeux s'illuminèrent. Elle courut au milieu du champ de fleurs avant de s’y agenouiller, enfonçant ses doigts dans le sol, sa terre, comme pour y prendre racine. Elle ferma les yeux et prit une profonde inspiration. Sa planète était magnifique. Le paysage était vertigineux. Les montagnes qui se dressaient en face d’eux trônaient ici comme une force indestructible. Elle finit par se relever pour admirer leurs réactions.
— Alors ? N'est-ce pas merveilleux ? s’exclama-t-elle, le visage rayonnant.
Tout le groupe acquiesça avec un plaisir partagé. Dogast la rejoignit et glissa son bras autour de sa nuque.
— Alors ! C'est par où ? demanda le capitaine, un sourire complice aux lèvres.
Kylburt lança un regard taquin à Slikof avant de lui chuchoter à l'oreille.
— Merde... Tu n'es pas le seul sur le coup.
Son ami remua la tête en roulant des yeux.
— Suivez-moi ! ordonna-t-elle, déterminée, avant de s'élancer.
Sans attendre, elle partit d'un pas décidé. Après avoir traversé des paysages vierges et sauvages, ils arrivèrent devant ce qui semblait être une cité.
— Voici Nabhi, la capitale d'Adhara, annonça Binny en écartant ses bras avec fierté.
— C'est incroyable, Miss Ristoc, s’émerveilla Zorth, tout sourire.
— Oui, Binny. C'est incroyable, confirma Kylburt, le regard perdu sur ces paysages magnifiques.
Elle continua de les guider à travers les différents chemins qui s'offraient à eux. Alors qu’ils traversaient le pont qui menait à Nabhi, une voix s'éleva au loin.
— BIN !
Un jeune homme aux cheveux roses venait de l'interpeller, sous le choc.
— DOZIK ! s’écria-t-elle.
Ils coururent l'un vers l'autre avant que Binny ne lui saute dans les bras. Il la fit tourner dans les airs, riant ensemble comme deux enfants surexcités.
— Par le Saint ! T'es devenu un homme ! s’exclama-t-elle, les yeux embués de larmes.
Il ne put s'empêcher de la tenir dans ses bras.
— Tu as trouvé l'Oracle, grande sœur ? demanda-t-il, l'enthousiasme débordant.
— Oui !
Dozik n'en revint pas.
— C'est... Pas possible...
Le jeune Dozik relâcha son étreinte et la regarda dans les yeux, plein de fierté.
— Les Anciens ne vont pas en revenir !
Puis il tourna son regard vers nous, l'air circonspect.
—Qui sont ces gens, Bin ?
Elle tendit le bras pour nous présenter.
— Mes amis, répondit-elle, avec une assurance éclatante.
— Alors suivez-moi, les amis ! laçae-t-il avec enthousiasme. Nous avons du monde à voir !
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