JOVO *** II ***
JOVO - MAISON DES MONTY
Le débarquement se fit bien dans la nuit. Tout alla très vite : des présentations en bonne et due forme, la visite de la maison, puis ils se retrouvèrent autour d’un repas d’une abondance insensée. Le père d’Houda se révéla être très suspicieux. Il enchaîna de nombreuses questions plus pertinentes les unes que les autres. Mais Lilas et Zorth s’en sortirent à merveille. Leur facilité dans le domaine de la diplomatie et du noyage de poisson était tentaculaire. Félira se montra beaucoup plus avenante et impressionnée par le fait de recevoir une souveraine à sa table que son époux. Puis, lors d’une discussion sans importance, elle les laissa sans voix l’espace d’une seconde.
— Vous verrez ma fille demain. Elle et son amie seront certainement ravies de rencontrer une princesse !
La nouvelle de la présence d’Houda les figea un instant. Chacun chercha le regard des autres en tentant de ne pas trop laisser entrevoir qu’il y avait un problème. Zorth se reprit rapidement et se permit une question.
— Son amie ?
— Oui, une certaine Brizbi Varane. Une personne ma foi charmante, une ingénieure informatique, hésita-t-elle un instant.
— Hackeuse, corrigea sèchement Diago en enfournant une bouchée de son repas.
Ils perdirent un peu pied lorsqu’ils comprirent qu’elles étaient toutes les deux dans cette maison. Des questions fusèrent dans leur esprit.
Houda, était-elle en danger ? La princesse, était-elle en danger ? Est-ce un coup monté ? Tant d’interrogations sans réponses... Brizbi elle-même, était-elle un danger ?
Aucun d’eux trois n’avait l’air de comprendre leur présence ici. Diago, qui était très perspicace, remarqua que leurs réactions étaient étranges.
— Un problème ? soupçonna-t-il, sourcil froncé.
— Non, Guidant Monty, s’empressa de répondre Zorth. Aucun problème ! Je suis surpris de découvrir que vous avez une fille, voilà tout.
Lilas et Kybop haussèrent leurs sourcils de concert. Cette remarque pourrait bien être mal prise. Pourquoi Zorth s’était-il risqué à une telle tirade ? Sous-entendre que les Guidants ne mettaient pas en avant leur progéniture semblait très maladroit de sa part. Mais finalement, Diago se fendit d’un sourire.
— Oui. J’en suis surpris moi-même parfois, soupira-t-il. Notre fille n’est pas l’enfant le plus... Comment dire... Reconnaissant...
— Ha, les enfants ! Ce fardeau éternel, confirma-t-il comme s’il savait de quoi il parlait.
— Comme vous dites, Sieur Kidyne.
Kidyne venait de taper juste en parlant d’Houda comme d’un échec. Les Gudjaniens étaient décidément des parleurs hors pair. M. Monty venait de découvrir en lui un allié. Quelqu’un qui semblait le comprendre. Mais ce n’était qu’une vile traîtrise. Zorth n’en pensait pas un mot. Il saisissait juste une corde qu’il venait de lui tendre, pour grimper de manière insidieuse dans son estime. Lilas venait de saisir la main de Kybop sous la table. Elle sentait dans la pression qu’elle exerçait une certaine tension. Serait-elle inquiète ?
— Princesse, désiriez-vous dormir au manoir avec vos deux compagnons de voyage cette nuit ?
— Eh bien, nous ne voudrions pas abuser de votre hospitalité, répondit Lilas quelque peu gênée.
— Voyons ! Ce n’est pas tous les jours qu’une princesse nous rend visite ! s’exclama-t-elle, ravie de la situation.
— Oui. Vous pouvez rester pour la nuit, invita Diago. Si vous avez besoin de quoi que ce soit pour votre voyage, nous pouvons peut-être vous aider.
— Eh bien, il y a bien deux trois petites choses qui pourraient nous être utiles...
Zorth saisit cette occasion rêvée pour partir avec M. Monty, son nouvel allié. Les deux hommes partirent discuter autour d’un vieux whisky dans l’arrière-salon. Félira porta son attention sur Kybop et Lilas et les fit monter à l’étage.
Une fois devant la porte, elle leur chuchota quelques mots.
— Je pense que ma fille et son amie sont assoupies depuis un moment, mais je préfère ne pas faire trop de bruit.
Elle avait les yeux qui pétillaient. Elle dégageait une bienveillance naturelle. Simplement heureuse d’accueillir des étrangers, de faire connaissance, de partager un moment de convivialité.
— Vous pouvez prendre place dans cette chambre.
Elles la remercièrent en courbant l’échine avant de s’enfoncer dans la pièce.
PIROS
Zorth venait d'envoyer un message au reste de l'équipe :
"Houda et Brizbi sont dans la maison, elles dorment à l'étage."
— Quoi ? s'écria Fyguie, incrédule. Comment était-ce possible ?
— Nous avions demandé des renseignements sur le vaisseau qu'elle avait dérobé, expliqua la commissaire. Il était signalé sur la planète Bultania depuis hier.
— Brizbi Varane... Elle a dû pirater le système de bord, déduisit Milo en roulant des yeux.
— Oui, tu as raison. Cette fille est vraiment douée, concéda-t-elle à contrecœur. Elle a plus d'un tour dans son sac.
— Doit-on s'en méfier ? interrogea Slikof, cherchant à évaluer la situation.
— Comme de la peste. Vous n'imaginez pas de quoi elle est capable, répondit Birland en prenant une grande inspiration.
— Alors, pourquoi Houda est-elle toujours en vie ? contesta Sylice, les bras croisés.
— Elle doit avoir ses raisons. Elle a toujours quelque chose derrière la tête, un coup d'avance, supposa Birland avec assurance.
Analyser la situation depuis le Piros n'était pas une mince affaire.
— On doit aller la chercher ! ordonna Fyguie.
Slikof interrompit l'élan héroïque de Fyguie d'un simple mot.
— Non. On ne change pas les plans. Ce serait trop risqué pour la princesse. Dois-je vous rappeler qu'elles sont sous le même toit ?
Binny hocha la tête, approuvant Slikof.
— Nous devrions nous tenir prêts à intervenir, ajouta Kylburt.
— Oui, mettons en place une garde. Formons deux équipes, nous veillerions à tour de rôle.
— D'accord. Milo et moi partirons d'ici une heure pour Zoldello, ne nous comptez pas dans vos équipes.
De Xylis acquiesça, prêt à mettre son plan en œuvre.
— Madame Ristoc, si vous le voulez bien, j'aimerais que vous vous chargiez de réceptionner ce que les Guidants nous fourniront. Cela nous permettrait de nous concentrer sur la protection de la princesse et du reste de notre équipe.
— Comptez sur moi, répondit Tamy avec assurance.
Il la remercia d'un mouvement du menton.
— Dozik, Kylburt, Fyguie et Sylice, vous formerez la première équipe. Binny, Katany, Crylon et moi formerons la deuxième.
— Très bien, accepta Dozik, enthousiaste. Nous prendrons la relève dans combien de temps ?
— Dans trois heures, répondit De Xylis en consultant sa montre.
Chacun régla son visiocommunicateur selon les instructions du maître Espion.
— Au moindre mouvement suspect, à la moindre incartade, on se rejoint tous ici, précisa-t-il.
Annotations
Versions