Prologue
Détroit, fierté industrielle de toute une nation, autrefois surnommée « The Motor City », devenue ville fantôme. C’est dans la tristesse silencieuse et déserte de ses rues délabrées qu’Owen Carter, hier encore ingénieur au talent reconnu, erre jour après jour, ombre solitaire au milieu d’une cité dont les trottoirs sales et usés semblent murmurer l’histoire déchirante d’une métropole devenue chimère.
Le voilà désormais, silhouette délaissée, à la merci des courants froids de la solitude et de l’abandon. Sa vie, quelques mois auparavant pourtant stable et prometteuse, s’est transformée en une vaste toile de regrets et de désespoirs, prélude douloureux à un concerto de détresses : la perte de son emploi, son mariage – véritable refuge autrefois – désormais englouti par le tiroir des souvenirs , et sa situation financière, à l’image d’une marée noire souillant tout sur son passage, laissant derrière elle un paysage gris, triste et désolé. Les trois piliers d’une existence bien ordonnée se sont décomposés, entraînant sa chute, à l’image des vestiges rouillés des usines qui l’avaient accueilli en héros 20 ans plus tôt.
Chaque nouveau jour que Dieu lui impose, il avance sans véritable but précis, seul parmi les ombres des bâtiments abandonnés, contemplant le crépuscule de ses rêves et la déchéance de sa propre existence. Les néons vacillants au-dessus des enseignes éteintes semblent se moquer de lui, projetant des ombres dansantes sur le sol terne, lui rappelant la déroute d’une euphorie passée.
Les pensées de l’ex-ingénieur, comme des échos dans une ruelle déserte, chancellent entre la fuite, la disparition et même le sinistre murmure du suicide. Pour l’homme tourmenté qu’il est devenu, chacune d’elles est une étoile filante, une tentative désespérée de s’évader de la noirceur implacable de son destin, sa vie antérieure apparaissant comme un mirage, toujours visible, à la fois proche et pourtant si lointaine.
Le décor est planté, plongeons maintenant dans le labyrinthe de son être, où le désir de liberté se heurte à l’ombre implacable de la réalité. Chaque pas, chaque pensée, chaque souffle devient une musique du hasard, une danse macabre, entre la lumière mourante et l’obscurité sans fin. Voici l’histoire d’Owen Carter, je la partage avec vous, telle qu’elle m’a été racontée.
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