Scène XVI

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Et pourtant trois mois ensemble à Paris…

C'était dit. Cela brisa la belle ambiance et amena la tristesse sur leur front.

« Combien de temps prend le dépôt d'un brevet ?, reprit Javert.

- Normalement trois jours. Je peux arguer d'un retard et rester cinq. Mais davantage serait suspect.

- Je peux passer à l'université le matin pour prendre les sujets du jour. Je ne peux de toute façon pas suivre les cours magistraux. J'ai mon poste de sergent à gérer ! Mais j'ai de la lecture et des devoirs à faire.

- Je t'aiderai ! »

Cette exclamation véhémente fit revenir les sourires et les regards tendres.

« Tu me liras des passages du Code pendant que je te sucerai la bite. »

Une intense rougeur macula les joues de Valjean tandis qu'impassible le policier ouvrait la porte d'une auberge.

« Monsieur Javert !, s'exclama-t-on. Vous avez votre invité ?

- Voici M. Valjean. Il occupera la chambre durant cinq jours.

- Bien ! S'il veut bien signer le registre. Voulez-vous déjeuner ?

- Après. »

Un simple mot, aboyé sur un ton impératif. On acquiesça sans rien dire et Valjean reçut une clé. Javert entraîna Valjean dans l'escalier de l'auberge.

C'était plutôt une pension de famille. Les repas devaient être pris en commun. Quelque chose de simple et de familial. Pas cher.

La chambre se trouva être la 117, ce qui fit sourire Valjean. Javert, entreprenant et pressant, fit entrer le forçat dans la petite pièce avec force.

Juste le temps de fermer la porte à clé.

Juste le temps de retirer le bicorne pour le laisser tomber à terre.

Et Javert était contre Valjean, il l'embrassait avec un désir profond. Né de plusieurs mois d'abstinence et de besoin.

« J'ai envie de toi, avoua le policier. Tellement... Tu me rends fou.

- Ho Fraco...

- Tu m'as manqué... »

Il y eut des caresses de plus en plus appuyées. Valjean se mordait les lèvres, soumis à un plaisir de plus en plus intense. Son sexe en devenait douloureux de dureté.

Il ne fallut pas longtemps au policier pour ouvrir le manteau afin d'accéder au pantalon du forçat et en sortir le sexe, rouge d'excitation. Javert embrassait profondément Valjean, ses mains glissaient habilement sur le sexe, un mouvement de va-et-vient qui rendait fou le forçat.

« Fraco..., gémit Valjean.

- Dis-moi à quel point tu me veux... »

Une bouche dans son cou. Il souffla de frustration lorsque Javert lâcha son sexe.

« Je te veux...

- Mhmmmm Jean... »

Les mains revenaient pour défaire ses vêtements. Le manteau tomba à terre, la chemise fut retirée et dévoila le torse de Valjean, les mamelons furent aussitôt caressés et malmenés. Javert embrassa encore et encore Valjean. Il était ivre de ses baisers. Valjean se rebella enfin et déshabilla à son tour le policier.

Le collier de cuir, l'uniforme... Il fut surpris de voir à quel point dévêtir un policier de son uniforme excitait le forçat qu'il était.

« Tu es si beau... Fraco... »

Il caressa à son tour la poitrine, le ventre, descendant vers les cuisses encore vêtues de leur pantalon.

« Nu...nu... Je te veux nu..., » murmura Valjean.

Un rire un peu essoufflé.

Était-ce prudent ? Non ce n'était pas prudent ! Le mieux était de se satisfaire le plus vite possible. Avec les mains et la bouche.

Javert opta pour la bouche.

Il s'échappa des mains caressantes de Valjean pour se mettre à genoux. Et le forçat déglutit. Attendant l'instant magique où sa bite entrait dans la bouche chaude et humide du policier. Ce qui le fit gémir. Il glissa sa main dans sa bouche, mordant un peu pour se taire.

Javert faisait cela divinement bien. A croire qu'il s'était entraîné. La pensée ne plut pas du tout à Valjean. L'idée que Javert avait sucé d'autres bites que la sienne énerva le forçat qu'il était.

Ses mains saisirent violemment les cheveux du jeune sergent et tirèrent brutalement. Javert déglutit mais se lança encore plus hardiment dans sa tâche.

« Mhmmm... Petite salope de cogne..., » souffla Jean-Le-Cric.

Ce qui lui valut un mouvement terrible de la langue de Javert qui faillit le défaire à l'instant.

Javert abandonna la lutte contre lui-même.

Il s'était voulu stoïc, dévoué aux besoins de Valjean, mais son sexe douloureux le rappelait à l'ordre. Alors, Javert lâcha quelques instants la bite de Valjean pour ouvrir son pantalon. Il en sortit son sexe et se mit à le branler efficacement.

Un geste sûr et habitué.

Valjean regarda cela avec envie. L'envie de prendre Javert sur le champ, là contre le mur.

« Tu l'as fait en pensant à moi ?, demanda Valjean, laissant ses doigts caresser doucement, tendrement, les cheveux de Javert.

- Je pense constamment à toi. Ma bite à la main ou pas. »

Ce furent les seuls mots que daigna lancer Javert avant de reprendre la fellation endiablée qu'il avait commencée. Faisant gémir Valjean, la tête cognant contre le mur.

Il ne fallut pas longtemps pour venir.

Une dernière succion profonde, un dernier mouvement tordu du poignet et les deux hommes se laissèrent venir.

Javert avait glissé un mouchoir sur sa bite, histoire d'éviter les éclaboussures intempestives, quant à Valjean, il vint au plus profond de la gorge de Javert et ce dernier avala tout ce qu'il put.

C'était bon. Si bon.

Il fallut quelques minutes pour se reprendre. Lentement, Valjean caressa de nouveau les cheveux de Javert, émerveillé par leurs reflets presque bleuâtres dans la lumière du jour.

Enfin, le policier se redressa et essuya sa bouche. Il se tenait un peu incertain devant Valjean mais ce dernier le saisit par le cou et l'attira à sa bouche.

Un long baiser passionné.

« Putain, tu m'as manqué..., murmura le forçat.

- Il semblerait en effet. »

Un rire partagé.

Ils étaient amoureux et fous de désir.

Mais cette auberge était une auberge de bonne réputation. Il n'était pas concevable que deux hommes s'y aiment ou s'y livrent à des pratiques déviantes. Donc après un long, très long baiser, il fallut se lâcher et rejoindre la vie parisienne.

Dieu merci, la scène dans son entier, malgré son intensité et ses quelques gémissements, n'avait pas duré longtemps. Deux hommes qui discutaient longuement des détails concernant l'installation à Paris... Plausible...

Javert se reprit le premier, tout à coup conscient de son poste et de sa dignité. Il n'était plus le jeune garde-chiourme, perdu dans les affres de l'amour d'il y avait un instant à peine. Il était redevenu un policier et il connaissait maintenant les détails des lois contre l'exhibition sexuelle.

Même si les pratiques homosexuelles n'étaient plus interdites par la loi, un policier pris à ce jeu-là risquait fort la prison ou le renvoi. Et pareil pour un patron d'industrie venu déposer un brevet d'invention.

« Allons déjeuner, Jean. Nous ne pouvons pas nous aimer plus que cela. »

Rien que l'odeur de la pièce pouvait les trahir. Le policier s'éloigna des bras de Valjean et ouvrit les fenêtres pour aérer, jetant un regard critique sur leurs vêtements. Il glissa au fond de la poche de son manteau le mouchoir humide de sperme. Pièce à conviction ?

« Comment dans ce cas ?

- Il faudrait un endroit sûr... »

Valjean était frustré mais il se devait d'admettre la véracité des propos de Javert. Les deux hommes ne pouvaient pas s'aimer n'importe comment. Ce n'était pas une nuit anonyme dans une auberge de Toulon. Il y avait un policier et un patron d'industrie. Ils avaient des noms et des postes à responsabilité.

L'idée de devoir renoncer à Montreuil pour une simple histoire de sexe déplut infiniment à M. Madeleine.

« Je ne sais pas, avoua Javert. Un endroit sûr... Peut-être une baraque en dehors de la ville, à la sortie de la rue de Vaugirard, près de l'hospice militaire...

- Je te laisse me guider. »

Un sourire amusé, Javert revint embrasser Valjean pour faire disparaître ce sourire de la bouche de ce forçat. Valjean retrouva son goût mêlé à la salive de Javert.

« Te guider aux limites de la légalité. Je devrais t'enfermer en cellule pour tentative de corruption de fonctionnaire.

- Vraiment ?, fit Valjean, de sa voix la plus innocente.

- Corruption par des faveurs sexuelles. Je laisserais tous les gonzes te passer dessus.

- Vous seriez jaloux, monsieur l'inspecteur. »

Le titre tant désiré par Javert le fit frissonner.

« Qui te dit que je n'apprécierais pas le spectacle ? »

Nouveau baiser. La chaleur revenait. Il fallait partir. Javert grogna :

« Non, je n'aimerais pas et oui, je serais jaloux. Tu es à moi.

- Oui. A toi ! »

Une bouche dans son cou. N'était-ce pas comme cela que tout avait commencé ? Valjean repoussa Javert.

« Il faut descendre ! »

Et le policier acquiesça.

Oui, oui, oui... Descendons...

Descendons...

Le repas fut tranquille. L'aubergiste les servit peu de temps après que les deux hommes soient assis. Un repas simple, composé de pain, de fromage, d'une omelette avec des lardons. Et du vin.

Les deux hommes furent prudents, avec leur touche, avec leur regard, avec leurs propos, avec le vin. Prudents. Deux amis se retrouvant après une longue absence.

Javert vivait là, le temps de sa formation en droit. Valjean était impressionné par le sérieux du jeune policier. Il apprit aussi avec déplaisir sa témérité toujours présente.

Javert raconta quelques-unes de ses premières arrestations, avec une fierté de jeune homme. L'inspecteur Javert allait perdre ce sourire un peu suffisant et devenir plus modeste. Mais Javert avait quarante ans lorsqu'il retrouva Valjean à Montreuil. Quarante ans et des centaines d'arrestations à son actif.

Il avait vingt ans, un nouveau travail, il vivait dans une nouvelle ville, avec de nouvelles responsabilités. Une vie à vivre !

« Je suis fier de toi !, lança Valjean en souriant.

- Merci, monsieur, répondit Javert, amusé. Parle-moi de ton usine ! »

On parla quand même longtemps avant que le soir tombe. Une après-midi passée dans la salle obscure de l'auberge. Les tasses de café succédaient aux tasses de café. Puis, Javert examina sa montre et se leva, un peu abruptement.

« Une promenade Valjean ?

- Avec plaisir. »

Paris en 1800. La ville sous le Consulat. Une ville encore composée en grande partie de petites ruelles, malodorantes et vétustes. Seul le centre, autour de la cathédrale Notre-Dame et la Seine était un peu aéré.

Il fallait attendre les grands travaux de Napoléon Ier et surtout de Napoléon III pour que la ville devienne ce qu'elle était aujourd'hui. Une ville faite de parcs verdoyants et de rues larges, de monuments magnifiques et de magasins luxueux. Paris...

Valjean marchait auprès de la Seine, en compagnie du policier. Le Pont-au-Change attira ses regards. Il s'accouda au parapet, imité par Javert, totalement inconscient, bien entendu, des pensées de Valjean.

Dans trente ans, un inspecteur de police déraillé et désespéré allait mettre fin à ses jours du haut de ce pont. Par sa faute.

Javert fut saisi en voyant le regard ébloui que lui jeta Valjean.

« Jure-moi une chose, Fraco.

- Quoi donc ? Que se passe-t-il ?

- Jure-moi que si un jour quelque chose devait tourner mal, tu viendrais me parler avant.

- Avant ?

- Avant tout.

- Avant quoi ? Tu es incompréhensible Jean ! As-tu abusé du vin ? »

Javert voulut traiter cela avec désinvolture. Il sourit en regardant la Seine couler sous leurs pas. C'était un endroit dangereux de la Seine. Le Pont-au-Change était l'endroit le plus utilisé par les suicidés, on était sûr d'y rester. La force de l'eau empêchait quiconque de s'en sortir soi-même ou même d'être sauvé par un tiers. La force de l'eau frappant sur les larges piles du pont et provoquant de vastes remous faisait de cet endroit un piège mortel.

Javert n'était là que depuis quelques mois, par les bonnes grâces de M. Chabouillet, mais cela avait suffi pour que le policier voie de nombreux suicidés par noyade.

Une mort horrible mais incontournable.

« Jure-le moi je t'en prie ! »

Une telle détresse ! Cela affola Javert qui, oubliant toute prudence, glissa ses doigts sur ceux de Valjean posés bien à plat sur le parapet de pierre. Une rapide caresse puis les mains reprirent leur position inoffensive.

« Je te le jure.

- Ne l'oublie jamais !

- Je ne risque pas ! »

Javert ne comprit jamais pourquoi cette promesse tenait tant au cœur de Valjean...

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