Scène II

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« Nous n’avons pas de bons souvenirs, tous les deux, murmura Javert, sentant son compagnon se tendre si fort contre lui.

- Non.

- Et si nous nous fabriquions de nouveaux souvenirs ?

- Comment cela ?

- J’ai envie de faire l’amour avec toi.

- Vraiment ? Ne sommes-nous pas trop vieux pour cela ?

- Cela dépend de ce que tu me permets de faire Jean.

- Tout ce que tu veux si tu peux éteindre la merde dans ma tête.

- Je peux te promettre cela.

- Alors faites inspecteur ! »

Javert avait fini sa cigarette. Il voulait oublier ses soucis et ses problèmes en s’envoyant en l’air.

Tout d’abord, il se coucha sur Valjean et lentement il embrassa le Frenchie, ravi de le sentir répondre aussitôt. Faire l’amour est un remède au désespoir.

Cela fit sourire Valjean.

Javert se chargea doucement des vêtements de Valjean, lui retirant son jogging, ses chaussettes, lui enlevant son t-shirt puis enfin son boxer. Et voyant son compagnon nu, Javert fit de même avec ses propres vêtements.

Un nouveau baiser, languissant, avant de partir en promenade sur le corps magnifique de Valjean, embrassant un mamelon, caressant un ventre à peine relâché, glissant ses doigts dans les poils grisonnants du torse...Javert savait y faire.

Valjean devait d’ailleurs le reconnaître. Ce Javert-là était le plus habile de tous. Il regardait le bel industriel français avec un regard égrillard avant de prendre l’érection à peine durcie de Valjean dans sa bouche.

Valjean se perdit aussitôt dans le plaisir.

Javert lui avait fait des fellations. Il lui en avait fait à Montreuil, à Paris… Aujourd’hui, avant… L’avait-il fait à Toulon ?

Le plaisir s’arrêta tout à coup et Valjean ouvrit les yeux, frustré, mais il fut hypnotisé par ce qu’il vit. Javert se doigtait avec soin. Il avait pris le lubrifiant et il se préparait pour la pénétration. Il avait du commencer en suçant Valjean.

Cela dura quelques minutes.

Valjean tendit la main et doucement il caressa le sexe dur et gonflé de Javert, le faisant gémir.

« Putain ! Attends ! Si tu...si tu me touches, je ne pourrais pas tenir…

- Tu es magnifique, » murmura Valjean, sincère.

Javert se mordait la lèvre pour ne pas gémir puis, fatigué de se contorsionner, il se redressa. Valjean ne savait pas ce que voulait faire Javert. Il attendait des directives. Puis il sut qu’il n’y en aurait pas. Javert avait enduit la bite de Valjean de lubrifiant puis il se plaça à genoux devant son amant et lentement le policier s’empala sur le sexe du Frenchie.

Dieu ! Que ce fut bon ! Douloureux mais bon. Même la douleur était bonne. Javert voulait cela depuis le début.

Valjean gémissait aussi, c’était si bon. Javert était si étroit, si serré, si chaud. Il devait se retenir pour ne pas le prendre brutalement. Il laissa Javert gérer la profondeur, la vitesse, le rythme.

« Tu es magnifique, répétait le Frenchie en caressant le bel homme qui prenait son plaisir de lui.

- Jean… »

C’était murmuré entre des dents serrées, par la douleur, par le plaisir, par la vague qui se construisait, lentement mais sûrement, et qui allait tout emporter. Les mains de Valjean se posèrent sur les hanches de Javert et restèrent là, à simplement le tenir, le suivre dans chaque mouvement.

« Plus fort, » gémit Javert.

Valjean serra ses doigts sur le policier et lui infligea des poussées plus rapides et plus profondes.

« Ouais, comme ça. Tu es si fort, Jean…

- Tu veux venir sur ma bite, comme ça ?, souffla Valjean, audacieux.

- Plus fort ! »

Valjean se redressa et saisit Javert pour le serrer contre lui. Il utilisa sa force en effet pour submerger le policier. Javert gémissait sans frein maintenant et ses doigts s’accrochèrent aux épaules de Valjean, ses ongles s’enfonçaient dans la peau.

« Viens, murmura Valjean. Viens, viens, mon amour. Fraco.

- Jean… Jean... »

Ils vinrent en s’embrassant. Valjean fut le premier à être brisé par la vague mais il pilonna encore Javert pour lui permettre de le suivre. Le lieutenant avait saisi sa propre bite et l’avait branlée efficacement.

Une fois leur besoin de proximité rassasié, les deux hommes se regardèrent. Ils n’étaient pas destinés à se trouver dans cette vie et dans ce monde.

Le Javert de Valjean dormait depuis presque deux cents ans dans un cimetière parisien.

Le Valjean de Javert vivait dans une ville située à des milliers de kilomètres de là.

Leurs lèvres se retrouvèrent et ils s’embrassèrent. Profondément.

Ils n’étaient pas destinés à se trouver dans cette vie et dans ce monde mais ils allaient briser le mauvais sort.

Ils ne quittèrent pas le baiser pendant de longues, très longues minutes.

Valjean murmura dans la courbure du cou de Javert, glissant ses mains dans le dos de son amant :

« Reste avec moi !

- Toute la vie, vraiment ?

- Je mourrais sans toi.

- Mais suis-je vraiment celui que tu veux ?

- Oui. »

Javert voulait croire Valjean. Il le voulait.

Car s’il perdait cela, que lui restait-il à part la Seine ?

« Très bien, je resterai Jean.

- Je t’aime, souffla Valjean. Et je parle bien de toi ! Lieutenant Fraco Javert, de la police de New-York !

- Je ne suis plus un flic !

- Pour le moment… Nous en reparlerons quand tu te sentiras prêt. Ou alors à ta guise ! Tu feras ce que tu souhaites.

- Je voudrais ma moto. »

Ce n’était pas ce que voulait Valjean mais il acquiesça sans rien dire.

« Tout ce que tu souhaites. »

Sa moto ?

C’était vraiment tout ce qu’il souhaitait ?

Javert ne sut jamais d’où venait cette réponse.

Les jours suivants furent doux et touchants. Les deux hommes apprenaient à vivre ensemble. Javert avait déjà connu la vie commune, mais il était le plus souvent absent. Là, sans métier, il errait à la maison, désœuvré. Valjean n’aimait pas cela, il aurait préféré voir le policier s’intéresser à quelque chose. Mais Javert était souvent assis, devant la télévision, s’abrutissant devant elle.

Valjean prit quelques jours de congé par l’intermédiaire de M. Laffitte. De toute façon, à son âge et vue sa position élevée dans la hiérarchie, son absence ou sa présence dans les locaux de la société ne changeait pas grand-chose. Les affaires se menaient très bien derrière un écran d’ordinateur avec un téléphone portable à la main.

En six mois, Valjean avait bien appris à se débrouiller.

Javert le regardait faire parfois, debout dans l’encadrement de la porte, révérencieux et impressionné.

« Continue Love, j’admire le maître ! »

Valjean souriait à son Love et reprenait les discussions avec quelques intermédiaires asiatiques ou américains.

Cosette et Marius furent heureux de revoir le policier américain. Cosette n’arriva pas à tenir dix minutes avant d’attaquer ce dernier sur son départ précipité :

« Vous avez fait énormément de mal à papa ! J’espère que vous avez prévu de rester cette fois ?

- Cosette !, lança Valjean, dépité.

- Tu as été malheureux papa ! Il faut le lui dire !

- Rassurez-vous, mademoiselle, asséna poliment Javert. J’ai moi aussi souffert de ma décision irréfléchie, je suis venu pour rester...si votre père veut encore de moi bien sûr.

- Bien sûr que je te veux ! »

Et les deux jeunes furent surpris par la vue du père de Cosette, si timide, si tranquille, saisir le policier et l’embrasser profondément.

« Voilà qui répond à toutes les questions, sourit Valjean lorsque le baiser s’arrêta enfin. Maintenant, où est le bœuf bourguignon que vous nous avez promis ?

- C’est Marius qui a trouvé la recette, se défendit Cosette.

- Il faudra être indulgent, Jean, lançait la voix amusée de George Laffitte, venu en compagnie de sa femme, encore un peu choquée par la scène qu’elle venait de voir.

- Mais ne le suis-je pas toujours ? »

On remarquait les mains entrelacées, les sourires heureux, les yeux scintillant de joie. Oui, Jean Valjean allait bien et manifestement il en allait de même de son policier américain, Fraco Javert.

Ils savaient si bien jouer la comédie tous les deux.

Le voleur et le mouchard.

Ils vécurent des jours de vie commune. Apprenant à se lever ensemble, à dormir ensemble, à regarder la télévision ensemble… Javert n’était pas un bon cuisinier mais Valjean le surprit.

« Un rôti bœuf au four ? Tu sais cuisiner le Frenchie ?

- Et des pommes de terre persillées. Je me débrouille.

- Et pour le dessert ? »

Javert avait demandé cela simplement dans la conversation, il ne comprit pas pourquoi Valjean pâlissait.

« Tu vas bien Jean ?

- Un simple vertige. Je suis vieux, sourit Valjean.

- Viens t’asseoir. Tu as travaillé toute la soirée. Je m’occupe du service et de la vaisselle.

- Mais tu…

- Je ne fais rien de mes dix doigts, laisse-moi au moins m’occuper de toi.

- Très bien, » répondit Valjean, retrouvant peu à peu des couleurs.

Il avait failli répondre à la voix douce et soyeuse : « des madeleines naturellement… »

Naturellement…

Un jour Javert trouva le courage d’envoyer un texto à Gregson :

« Hello.

- Content de te lire. Comment vas-tu ?

- Bien.

- Quand reviens-tu ?

- Je ne sais pas. »

Puis plusieurs minutes plus tard, il aborda la vraie raison de son appel :

« As-tu toujours la moto ?

- Oui.

- Envoie-la moi. [adresse transférée]

- Bien. Azelma veut savoir si tu es avec le Frenchie ?

- Oui. »

Javert le présumait et cela le fit sourire de n’attendre que quelques secondes avant l’arrivée d’un nouveau message rempli d’emojis :

« Super ! Je suis contente !

- Oui.

- Tu es heureux ?

- Oui.

- Quand reviens-tu ?

- Je ne sais pas.

- Alors envoie nous des photos !!! »

Javert ne savait pas que Valjean le regardait depuis la porte. Le vieux Frenchie arborait un sourire affectueux en contemplant son amant. Javert discutait sur son portable et portait une expression douce, joyeuse...comme il n’en avait pas eu depuis longtemps…

Javert patienta et un nouveau texto apparut. Un selfie d’Azelma avec Gregson et Anderson. On voyait le mur du commissariat sur lequel se tenaient les photos des flics travaillant dans l’agence. Et parmi les photos encadrées, Javert savait qu’il y avait la sienne.

Javert hésita puis conclut la discussion :

« Salut. Merci pour la photo.

- Content d’avoir de tes nouvelles ! Ecris-nous !

- Je n’y manquerai pas. »

Valjean s’était approché lentement et il s’assit aux côtés de Javert sur le canapé, il posa son bras sur les épaules du policier pour le réconforter.

Des jours passèrent...et puis un soir, Valjean revenait du travail, épuisé par une journée de palabres avec le conseil d’administration de son usine...enfin de sa société...et il vit Javert, livide, en train d’écouter son téléphone.

Il répondait à quelqu’un en anglais et Valjean sut immédiatement de qui il s’agissait.

« J’arrive. Je te le jure !

- …………….

- Ne fais rien de stupide ! Putain !

- …………….

- Ne t’affole pas ! Il ne peut rien faire !

- …………….

- DEMAIN ! Je n’ai qu’une parole ! »

Et Javert referma son téléphone, il avait les doigts qui tremblaient en sortant une cigarette d’un paquet dans sa poche. Ils n’arrivaient pas à se stabiliser pour utiliser le briquet. Valjean s’approcha doucement et l’aida à l’allumer. Javert prit une longue inspiration en fermant les yeux.

« Il y a un avion ce soir. Onze heures, annonça calmement le vieux Frenchie.

- Putain, Jean !

- Non. Il n’y a rien à dire. C’est ton Valjean. »

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