Part. 2 - Dan
Dan c'était un ami ? Un pote ? Une connaissance ? Merde, je ne sais pas trop comment qualifier Dan. Disons un type que je rencontre parfois.
Des amis et des potes, j'en n'ai plus trop et j'ai pas trop envie de m'étendre sur le sujet. Non pas que je vais me mettre à pleurnicher en pensant aux soirées foot-pizza-bières, aux barbecues sur herbe verte, aux villas piscine-plancha-spa à Fréjus, aux séjours au ski avec fondue savoyarde et sauna le soir... enfin bref, tout ce qu'on fait avec des copains avec la conviction incroyable de vivre la vraie vie.
Des connaissances, j'en ai peut-être une, Sabrina Dupuis, ma conseillère à Pôle-Emploi. C'est une guerrière sans arme, elle veut terrasser seule et à mains nues la "malédiction du chômage". Elle me fait marrer, surtout quand elle dit qu'elle ne pourra y parvenir qu'avec mon aide. Sabrina ma chérie, je ne veux pas te décevoir, alors j'envoie des C.V en forme d'avions en papier imaginaires : Développeur Web, super ! Data Analyst, génial ! Traffic Manager, top ! Sabrina Dupuis est une connaissance qui par contre ne me connaît pas très bien.
Sinon, une fois, j'ai fait la connaissance d'un chômeur comme moi, à Pôle-Emploi justement. Il bloquait sur une page d'offres d'esclavage en CDD le genre "manutentionnaire grande distribution". 2 clics plus tard, il me trouvait génial. Eric il s'appelait. Au bar du coin de la rue, on a commencé à parler, enfin lui surtout. Au bout d'une heure j'avais envie de lui conseiller d'acheter une corde et j'étais même prêt à lui trouver un arbre dans cette putain de ville. Factures, huissiers, Restos du Cœur, femme qui veut plus baiser... Sabrina Dupuis lui aurait dit de "croire en son potentiel". Moi je l'ai laissé devant ses 3 tasses de café vides.
Mais revenons à Dan.
C'est le genre de gars qui tape sur l'épaule de tout le monde. Et tout le monde rigole en lui rendant son accolade. Avec moi, il met la main en l'air comme ceux qui prêtent serment dans les séries américaines et moi, check, je lui tape dans cette main de la vérité absolue.
On se voit toujours au Sloop parce que c'est comme chez moi. Et un peu chez lui apparemment.
Il me trouve "moins con que les autres" ce qui me plait bien je dois l'avouer. Moi je le trouve... je le trouve... intéressant. Bizarre aussi parce qu'il est toujours bien sapé et qu'au Sloop ça ne sert à rien. Intéressant parce qu'il paie pas mal de tournées.
Quand il me demande si je vais bien, je ne prends pas ça pour une question à la con. Je peux juste lui dire "bof" sans qu'il commence à me parler de mes recherches d'emploi, d'untel ou untel qu'il faudrait appeler, du moral qu'il faut garder. Lui il dit "ouais" et c'est tout. Moi je ne lui pose pas de question. Il me paie un verre. Je regarde au fond en clignant des yeux et c'est joli avec les petits rayons des lumières du bar sur les glaçons.
Un soir, j'avais une fille qui s'accrochait à mon bras comme si elle ne voulait pas que je m'envole, à moins que ce ne soit elle qui ait peur de décoller si elle me lâchait. Bref, cette fille pesait sur mon bras et je commençais à me demander si j'allais devoir me le couper pour me débarrasser d'elle parce que je n'avais pas l'intention de la ramener chez moi.
Dan se pointe et avance vers moi comme une boule de flipper qui rebondit sur les bumpers : accolade à droite, tape dans le dos à gauche, bourrade sur un côté, clin d'oeil à l'arrière. Check avec moi. Sacré Dan.
" C'est ta copine" me demande-t-il ? Je fais signe que non, que c'est juste un truc un peu collant sur mon avant-bras et il rigole.
Dan me dit : " T'es bien dans l'informatique toi ?" Je lui réponds " Vite fait, enfin ça fait un bail"
" Nickel ! Tu connais le Savannah, sur les hauts de Montoire, avant Ronge-sur-Soulas ? Viens jeudi vers 21h00"
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