II

15 minutes de lecture

De retour chez lui Daniel Francoeur s’installa sur son canapé, perplexe. La journée lui avait semblé bien longue, deux morts insolites, un méga orage apparu sans prévenir dans le ciel bleu azur et pour couronner le tout, des acouphènes qui lui vrillaient la tête. Salem dans toute sa splendeur.

Chloé, de son côté, déambulait dans la ville, flâner lui calmait l’esprit et atténuait ses questionnements. Elle ne pouvait empêcher ses pensées de vagabonder, mille questions l’assaillaient, elle repensait journellement à sa petite vie, son enfance heureuse au sein d’une famille aimante.

Elle devait savoir, savoir pour comprendre, quelque chose manquait à son bonheur pour que sa vie soit parfaite. Ses pas la portèrent le long du port, l’air frais du large, les cris des mouettes apaisaient ses pensées obsédantes. Son regard calme et déterminé se concentra sur l’horizon infini ou se confondent le gris du ciel et de la mer. Son histoire, apparemment si limpide, recelait des zones, elles aussi grises. Pensive, elle continua sa promenade et retourna vers le centre-ville. Son esprit, obnubilé par ces mêmes interrogations éludées par ses parents, toujours des zones d’ombre, partout, toujours, ou qu’elle aille, cette ombre la rattrapait. Lorsqu’elle était partie vivre en Californie pour son soleil, elle n’avait pu en profiter, son corps avait mal réagi, exéma, brûlures, maux de têtes, migraines ophtalmiques, elle avait dû revenir vers Boston, cette réaction allergique était porteuse de sens, elle le sentait.

Daniel allongea ses jambes sur le canapé pour se reposer après cette longue journée, les yeux fermés, il laissa vagabonder son esprit dans l’espoir d’oublier ses maux de tête. La figure impassible de ce chien mort vint envahir ses pensées en recherche d’apaisement après cette journée si particulière.

Une idée étrange germa dans son esprit, des pratiques sorcières, à Salem, ce ne serait pas forcément étonnant. Les esprits cartésiens du monde moderne avaient rangé ces pratiques d’un autre âge dans la catégorie des superstitions païennes, depuis le « malleus maleficarum »[1]. Toutefois, étant donné son intérêt pour les univers parallèles et pour le fantastique en général, Daniel savait que ces pratiques, dites de sorcellerie, ne s’étaient pas éteintes, leur persistance dans le monde occidental en attestait.

Certes, pensa Daniel, mais sommes-nous bien sûrs que de telles pratiques peuvent avoir un effet sur des personnes ou des animaux. La question était finalement évidente, non, ce n’était pas possible au regard de nos connaissances scientifiques. Mais alors, pourquoi cela perdurait-il ?

Au 21ème siècle, cette question méritait-elle encore d’être posée. Daniel ne sut que répondre à sa propre interrogation et devant une telle équivoque, le sommeil le prit de court et il sombra dans les bras de Morphée.

Chloé sentait au fond d’elle-même l’attache avec cette ville au passé sulfureux. Depuis qu’elle avait, alors encore enfant, entendu parler de Salem et de son fameux procès, ce mystère historique lui parlait, elle se passionnait pour cette époque et inconsciemment, son instinct l’avait guidée vers la côte Est.

Elle flâna encore de longues minutes et ses pas l’emmenèrent naturellement dans le centre-ville de Salem. De déambulations en déambulations, elle s’immobilisa devant la bibliothèque municipale, abritée par l’ombre froide du bâtiment, elle hésita puis se dirigea sous le porche. Arrivée devant la porte, elle posa sa main sur le bec de cane, un courant électrique lui parcourut les doigts, irrigua le creux de sa main puis remonta le long de son bras jusqu’à l’épaule. Devant cet étrange phénomène, elle retira sa main et s’éloigna de la porte. Ses yeux se portèrent sur le fronton avec inquiétude, ce phénomène lui sembla être une manifestation énigmatique à laquelle elle devait réfléchir. Elle était attirée par ce lieu qui recélait toute l’histoire de la ville, ses alentours et peut-être, qui sait, une partie du passé de sa famille. Pourtant, cette manifestation, inexplicable au premier abord, l’avertissait d’un péril imminent.

De son côté, Daniel laissa échapper quelques ronflements, le soleil déclinait à l’horizon et la noirceur de la nuit pénétra dans la pièce, elle rejoignit les pieds de Daniel et remonta le long de ses jambes avec lenteur comme un feu couvant dévorant avec langueur sa proie immobile. Son corps s’agita, les poils de ses bras se dressèrent sous l’effet de l’ombre croissante. Son visage se raidit, sa tête pivota de droite à gauche et de gauche à droite, la sueur envahit son front et une multitude de gouttes coulèrent le long de ses joues comme un sanglot sans fin. Une voix grave résonna dans sa tête.

- Daniel, Daniel, c’est moi.

Daniel tourna frénétiquement sa tête comme pour échapper à la voix.

- Non, non, c’est faux, c’est faux.

- Daniel, tu te souviens ?

- Va-t’en, le passé n’existe plus, papa est mort, voilà tout, laisse-moi.

- Tu as encore besoin de moi, tu dois te réveiller.

Encore plus agité, ses traits plissèrent sous l’effet d’une souffrance imaginaire.

- Non, non, laisse-moi !

- Le danger est revenu, tu dois te réveiller, le combat va commencer.

- Pars, laisse-moi !

- Rappelle-toi, rappelle-toi qui tu es ? Ouvre les yeux sur le passé et tu pourras regarder l’avenir. L’étoile à cinq branches te protégera. Tu sais ce que tu dois faire.

La voix résonna dans les méninges de Daniel qui se réveilla en sursaut, la poitrine haletante. La voix s’était évaporée, a priori bienveillante, le ton calme taisait un avertissement, une menace qui échappait encore à Daniel. La suggestion de la voix « Tu sais ce que tu dois faire » relevait plus sûrement de la spéculation que de la réalité. Il tenta d’identifier la voix, masculine ou féminine, mais, ce n'était qu’un rêve.

Les yeux grands ouverts, la voix résonnait encore dans ses oreilles, lointaine et mélodieuse. Il se redressa, le plaid sur les genoux, la pièce plongée dans l'obscurité, seule la lueur de la lune éclairait faiblement les contours des meubles. Il tendit l'oreille, mais le silence était complet. Pourtant, il était sûr d’une chose, la voix allait revenir, omniprésente, prête à lui révéler un nouveau fragment de lui-même.

Chloé s’éloigna de la bibliothèque municipale, quelques nuages noirs s’étaient accumulés au-dessus du bâtiment, un vent aussi violent que soudain s’abattit sur le quartier. Le tonnerre gronda à plusieurs reprises, l’air chaud et humide rendait l’air difficilement respirable, la violence soudaine des éléments affola les badauds qui se réfugièrent dans les boutiques et les cafés environnants.

Chloé, soudain seule dans la rue, se retourna et regarda le fronton de ce bâtiment municipal, les sourcils froncés, seul le ciel orageux couvrait ce fronton, soudain menaçant. Le vent redoubla de force et le souffle de cet air la gifla. Ce lieu avait une âme malfaisante, l’air, soudain fétide, agressa ses narines. Elle tourna les talons, accélérera le pas, une fois loin, elle se retourna, le nuage noir avait disparu et tout semblait avoir retrouvé sa quiétude. Cette expérience intimidante fit réfléchir Chloé quant à son désir de connaitre mieux son histoire familiale. C’était patent, quelque chose ambitionnait de l’éloigner de ce lieu susceptible de recéler, au moins en partie, la vérité sur sa famille d’origine. N’y tenant plus, elle appela ses parents pour leur expliquer qu’elle viendrait ce week-end.

Daniel, quant à lui, ferma sa fenêtre et décida de sortir pour manger un morceau, ce cauchemar l’avait angoissé plus qu’il ne l’avait imaginé et il ne voulait pas rester seul pour l’instant, il avait besoin de voir du monde afin de ne pas se sentir isolé du reste des vivants. Une fois dehors, Daniel monta dans son pick-up et se dirigea vers le centre-ville. La solitude lui pesait, après son divorce, il avait voulu voir cette région historique, son goût pour le mystère avait pris le dessus, il avait toujours été attiré par ces lieux au parfum de soufre. A presque quarante ans, il était seul et sans enfant.

Cette question pesait sur sa conscience et son moral, raison pour laquelle il avait besoin de voir du monde et de goûter aux charmes de Salem ; la saison touristique battait son plein et les animations du soir allaient le ragaillardir, il en était sûr. La foule bigarrée vadrouillait avec langueur, les lumières criardes des restaurants et des bars illuminaient les rues. Daniel hésita, les idées se bousculaient dans sa tête, les images violentes de l’étrange meurtre et celui du chien hantaient ses pensées, un lien existait entre ces deux affaires, il en était certain. Son choix se posa sur un restaurant français bien connu dans la ville. Une fois assis, il s’empara du menu, son ventre criait famine.

Menu en main, il commanda un verre de champagne, une gougère au fromage en entrée, du pâté en croute aux morilles en plat et pour le dessert, il verrait après. Une fois son verre de champagne en main, son regard se fixa sur un chien, un dogue qui ressemblait étrangement à celui tué chez Monsieur Baker.

Le regard jaune fiévreux du chien se fixa sur celui curieux de Daniel. Comme figés, les quatre yeux se jaugèrent, à la curiosité succéda la surprise puis vint un sentiment de pitié, le regard du chien se fit moins agressif, plus interrogateur, il s’allongea, comme abattu, accablé, vidé de tout désir vital, comme vaincu par la vie. Daniel interpréta ce geste comme une sorte de cri de détresse inaudible à ses oreilles humaines, un sentiment de pitié le saisit. La ressemblance avec le dogue mutilé l’intrigua.

Daniel se leva et voulu rencontrer le propriétaire du chien pour s’enquérir de sa santé mais, à peine s’était-il levé, que le dogue était sorti de son champ de vision. Il balaya du regard l’endroit où le canidé était couché mais, il avait disparu comme par enchantement. Daniel se dirigea à l’endroit même où le chien s’était couché mais, il n’y avait plus aucune trace de son passage. Après avoir interrogé les clients du restaurant, malgré sa description précise de l’animal, cela n’évoqua aucun souvenir aux clients.

Daniel retourna à sa table et surveilla les environs au cas où ce pauvre dogue réapparaitrait. Il commença son repas mais, obnubilé par cet animal, son plaisir fut relatif au point où il mangea rapidement pour abréger sa sortie. Il prit le chemin du retour et une fois au-delà des rues touristiques, il remarqua que la nuit noire avait envahi la ville, celle-ci était plongée dans une obscurité indicible, aucun ilot de lumière pour éclaircir les lieux. Même la lune ne parvenait pas à éclairer les rues.

Soudain seul, Daniel frissonna, l’air était glacé pour la saison, il accéléra le pas pour retrouver son véhicule. Une silhouette se dessina au bout de la rue, il s’agissait d’une femme dont la frêle silhouette dans des lieux aussi sombre l’intrigua. Une fois à l’intérieur de sa voiture, il attendit qu’elle se rapproche pour mieux la voir. Instinctivement, il lui sembla qu’ un danger immédiat la menaçait, elle se rapprochait, sa silhouette se découpait mieux dans le rétroviseur. A sa grande surprise, il reconnut Chloé qui marchait seule dans la nuit. Inquiet, il vint à sa rencontre.

- Chloé ? Mais que fais-tu là toute seule ?

Elle répondit sur un ton maussade à la question et répliqua sans conviction.

- Je me sentais seule et je me suis rendue à la bibliothèque municipale pour lire un peu.

Daniel acquiesça sans mot dire, impassible, il l’écouta avec mansuétude, ne voulant pas paraitre indiscret.

- Finalement, je me suis ravisée et je déambule pour prendre l’air. Et toi ?

- Je me sentais un peu trop seul et plutôt que de manger à la maison, je suis ressorti pour prendre l’air et voir du monde.

- Tu as fait vite, dis-donc !

Daniel tourna la tête et fit un geste hasardeux pour expliquer sa situation.

- Oui, oui, mais en fait c’est plus compliqué que ça.

- Comprends pas ce que tu veux dire ?

- En fait, tu te souviens du chien mort ce matin.

Soudain intriguée, Chloé s’accouda à la portière pour écouter Daniel.

- Evidemment.

- Eh bien, alors que j’étais assis à la terrasse du restaurant que j’avais choisi, juste en face, j’ai vu un chien identique à celui de ce matin.

Intriguée, Chloé fronça les sourcils.

- Ah oui, d’ailleurs, on ne sait toujours pas ce qu’est devenu le second chien.

- Ben, justement, d’autant plus que ce chien avait l’air bien malheureux, j’ai trouvé ça bizarre.

Sur un ton interrogateur avec une pointe de reproche, Chloé le questionna sèchement. Daniel lui expliqua rapidement sa singulière expérience.

Circonspecte, Chloé fit la moue.

- Bizarre, en effet !

- Oui, honnêtement, je ne pense pas avoir rêvé, ce chien, je l’ai bien vu comme je te vois.

- Moi aussi, il m’est arrivé un truc bizarre.

Intrigué, Daniel se pencha vers sa portière pour écouter Chloé avec attention. Elle lui raconta en détail sa fin d’après-midi à la bibliothèque. Daniel acquiesça d’un mouvement de tête.

- Oui, j’ai remarqué que depuis quelques temps, les orages sont plus fréquents et soudains.

- La ville est aussi plus sombre et l’air plus froid.

Les sourcils froncés, le regard dans le vague, Daniel approuva.

- Oui, je ressens cela aussi, j’ai fait un rêve mystérieux et ce mirage avec le chien, j’ai l’impression d’être possédé, c’est fou.

- Qui sait ?

Daniel, sourire aux lèvres, répliqua sur un ton amusé.

- Non, je ne crois pas à ces sornettes moyenâgeuses, je suis du 21ème siècle, je suis rationnel, la sorcellerie n’existe plus depuis qu’on ne fait plus brûler les sorcières.

Chloé planta son regard dans celui de Daniel.

- Ce ne sont que des superstitions pour toi ?

Daniel la fixa à son tour et sûr de lui, il répliqua.

- Bien sûr, tu n’es pas d’accord ?

- Dans le doute, je ne m’abstiens pas de raisonner de façon aussi péremptoire, il se passe des choses tellement étranges parfois.

- Comme on dit, on ne sait jamais.

- Je suis désolée mais je dois rentrer, il se fait tard.

- Je te ramène à ta voiture ?

- D’accord, elle est à quelques rues.

- Allons-y, demain, tu vas faire quoi ?

- Je vais retourner à la bibliothèque, je veux en avoir le cœur net. Et toi ?

- Cette une idée qui m’a aussi traversé l’esprit, j’aviserai demain.

Après plusieurs minutes de route dans le silence le plus complet, Daniel déposa Chloé à sa voiture et ils rentrèrent chacun chez soi.

Chloé se félicita d’avoir eu le courage de lui raconter son étrange mésaventure, cela faisait du bien de ne pas être seule face à des phénomènes inexplicables. Devant son miroir, elle scruta son visage pour discerner les traits qui étaient susceptibles de lui rappeler ses parents. Après de longues et minutieuses observations, elle dut conclure qu’aucun des traits de son faciès n’était partagé avec ce couple bienveillant qui l’avait si bien élevée, elle fit la moue et estima qu’elle devait absolument aller se renseigner à la bibliothèque, et ce, malgré le phénomène qui l’avait dissuadée plus tôt dans la journée. Elle se coucha, un lourd sommeil vint cueillir ses doutes et sa conscience.

Les ronflements de Daniel résonnaient dans la chambre lorsqu’un rayon de lune réussit à s’immiscer entre les volets. La lumière blafarde se posa sur son visage. Il fronça les sourcils et le dogue vint au pied du lit, il gémit à l’adresse de Daniel, le regard triste, il monta sur le lit pour lui lécher le visage.

Les yeux de Chloé papillonnaient sous leurs paupières, son sommeil semblait absorbé par un ailleurs qui lui échappait. Alors qu’elle cherchait un ouvrage dans une grande bibliothèque, le dogue apparut et vint à elle, il jappa comme s’il retrouvait sa maîtresse. Chloé l’ignora et continua ses recherches, elle errait le long des travées, le chien s’assit en tenant un livre dans sa gueule. Elle n’y prit pas garde et continua avec ardeur sa recherche mais aucun des ouvrages choisi ne la satisfaisait. Elle vida les rayonnages un à un et jeta les livres au sol, le chien s’allongea avec le même livre dans sa gueule mais elle n’y prêta aucune attention.

La sonnerie du portable déchira la quiétude du petit matin et réveilla en sursaut Daniel qui émergea de sa nuit.

Les tympans de Chloé furent agressés par la sonnerie de son téléphone, elle ouvrit ses yeux d’un coup d’un seul et son buste se dressa en position assise par réflexe.

Daniel, la bouche encore pâteuse, bailla pour enfin décrocher.

- C’est Parker.

- Oh là, si tôt ?

- Quelque chose de bizarre a été aperçu dans les bois vers Glendale Cove. Il y aurait un pendu

Le ton dubitatif de Daniel fit réagir son interlocuteur.

- Ben en fait, ils n’ont pas voulu s’approcher mais visiblement c’est bizarre, c’est pour ça qu’on t’a appelé, la patrouille dit que ça a un lien avec ton enquête sur le chien.

- Bon, c’est bizarre en effet, j’arrive, Chloé est prévenue ?

- Oui, elle doit déjà être partie.

Daniel se leva lentement, le pas encore peu assuré de celui qui vient de se lever après une courte nuit. Ses vêtements rapidement enfilés, encore hanté par le rêve du dogue, il n’avait pas le temps de réfléchir, une épidémie de cadavre sévissait à Salem.

Déjà en route, Chloé repensa à son rêve avec le chien. Alors qu’elle approchait de Glendale Cove, Daniel l’avait rattrapée, il klaxonna à son adresse et elle lui répondit par un petit signe de la main. Arrivés en chœur à l’endroit indiqué, la patrouille de la route les héla et leur indiqua où se situait la raison pour laquelle ils avaient été appelés un samedi.

- Bonjour Daniel, bonjour Chloé, c’est là, un peu à l’intérieur du bois, vous voyez ?

Les deux collègues se regardèrent, intrigués par cette mise en scène barbare. Un cadavre était pendu à une dizaine de mètres du sol, suspendu à une branche. Les regards de Chloé et de Daniel se croisèrent, sidérés par la théâtralité sordide de l’acte. Chloé prit la parole.

- J’ai rêvé de ce chien cette nuit. C’est exactement le même.

- Toi aussi, j’ai rêvé que le dogue était chez moi et qu’il faisait tout pour me réveiller mais que je refusais d’ouvrir les yeux, insensible à ses appels de détresse.

Daniel s’exclama, presque en joie.

- On rêve des mêmes choses Chloé, il y a un problème !

Chloé se referma soudain et sa joie si vite apparue se dissipa soudain.

- Une prémonition ?

Petit rictus en coin, Daniel répondit aussitôt, sourire aux lèvres.

- Tu sais, tout est possible ici-bas.

Daniel demanda à la police technique de descendre le cadavre du chien. Une fois à terre, il constata que le molosse avait été tué avant d’être pendu et que là encore, l’ablation du muscle cardiaque avait été mise en œuvre. Daniel, intrigué, inspecta rapidement le cadavre.

- Il ressemble furieusement à l’autre chien que l’on a retrouvé chez M. Baker.

Elle ajouta cyniquement.

- Et aussi au dogue de notre cauchemar.

- Oui en effet, d’ailleurs, ses yeux tirent sur le jaune, c’est fou.

Le propriétaire du chien arriva et grimaçant devant le corps mutilé de son mâtin, il le reconnut instantanément. Il informa les enquêteurs qu’une puce électronique avait été insérée dans la peau de son oreille. Une fois les vérifications effectuées, plus aucun doute ne subsistait.

Arrivés au commissariat, le shérif attendait les enquêteurs de pied ferme. Son regard de rapace de mauvais augure les avait déjà scrutés, tête par tête. Quelques journalistes bien informés faisaient le pied de grue devant la porte de l’hôtel de ville. Chloé et Daniel se faufilèrent parmi les hommes de presse et ne répondirent à aucune de leurs demandes. Après quelques pas, ils pénétrèrent dans le hall de l’immeuble et se dirigèrent rapidement vers leur bureau. Le chef de la police vint à leur rencontre et leur demanda de venir dans son bureau illico presto.

- Malheureusement, les journalistes ont été mis au parfum, on va avoir en plus les défenseurs des animaux et il y a un risque de que les médias nationaux s’y intéressent. Alors, ma question est simple, avez-vous des pistes ?

Chloé et Daniel se regardèrent effarés.

- Chef, en si peu de temps, ce n’est pas vraiment possible.

- Je me doute mais au moins une théorie ?

Chloé secoua la tête.

- Désolé mais le premier corps a été découvert hier et aujourd’hui on trouve le second, on ne comprend pas le pourquoi de ces actes ignobles, alors des pistes pour le moment, c’est un peu tôt.

- Certes mais le pourquoi de ces actes, avez-vous au moins une idée, même saugrenue ?

Daniel prit la parole, l’air grave.

- Je suis quelqu’un de rationnel mais je suis, paradoxalement, passionné par tout ce qui a trait à l’ésotérisme, le fantastique, ce genre de choses…

- Et alors ? demanda le shérif sur un ton péremptoire.

- Eh bien, concernant les chiens, cela me fait penser à des rituels sataniques.

Le sheriff ferma les yeux, désespéré.

- Non, mais, c’est une blague, on est à Salem ici, et au vingt et unième siècle qui plus est, alors vos suppositions grotesques, vous vous les gardez Francoeur et surtout, rien à la presse, c’est bien clair ?

Les deux collègues répondirent en chœur positivement à cet ordre. Le shérif continua sur un ton cassant qui ne supportait aucune contradiction.

- Rien sur les ablations du cœur pour ces chiens et rien au sujet de la morte…je ne sais même pas comment dire, euh. Aucun lien ne doit être fait entre ces deux affaires, le meurtre de cette femme doit rester secret. J’y tiens.

Ils marmonnèrent entre leurs lèvres en guise d’accord et le shérif les remercia sur le champ.

- Au travail. On en reparle mardi.

Chloé et Daniel se regardèrent sourire en coin, de la nervosité dans l’air.

[1] Le Malleus Maleficarum, littéralement « le Marteau des sorcières », c’est-à-dire le marteau contre les sorcières, est un traité de démonologie des dominicains et inquisiteurs Henri Institoris et Jacques Sprenger, publié en Latin à Strasbourg en 1486 ou 1487.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Renaud ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0