-  Faut que tu te reprennes vieux ! Tu nous fais une grosse déprime là, ça va pas !

Mike ne répondit pas. Il était vautré sur son canapé, les yeux dans le vide. En face de lui, Jordan et un autre de ses amis, Adrien, étaient assis sur les chaises de la salle à manger attenante au salon. Une bière à la main, les deux hommes tentaient vainement de faire sortir leur ami de son apathie.

Ca faisait maintenant près d’une semaine que Mike avait téléphoné à Lola et qu’elle avait brutalement mis fin à leur relation. Depuis lors, Mike n’était pratiquemment pas sorti de chez lui. Il était resté enfermé à broyer du noir sans voir personne. Son comportement avait beaucoup inquiété ses amis, raison pour laquelle deux d'entre eux étaient venus lui rendre visite.

Mike posa les yeux sur le paquet de cigarettes posé sur la table basse. Il se pencha en avant pour l’attraper et en sortit une cigarette qu’il alluma et porta à ses lèvres.

 -  Vous inquiétez pas les gars, ça va ! dit Mike après avoir exhalé la fumée introduite dans ses poumons.

 -  Non, là tu as tout sauf l’air d’aller, lui répondit Adrien.

 -  Mike, tu devrais pas te mettre dans un état pareil pour une meuf et surtout pas pour une comme Lola. C'est pas pour te faire la morale mais dès le début on t’avait dit que c’était une connasse et qu’on la sentait pas. Tu mérites vraiment beaucoup mieux.

A entendre ce prénom, Mike sentit son cœur se serrer. Il savait que Jordan et Adrien voulaient l'aider mais pour le moment, lui n'avait qu'une envie : qu’ils sortent de chez lui tout de suite.

 -  Arrêtez de parler de ça, répliqua Mike sur un ton plein de colère. Vous êtes venus pour me changer les idées pas pour remuer le couteau dans la plaie.

 -  Ca fait une semaine que tu es en mode zombie. Tu n’es pas sorti une seule fois de chez toi. Ah si, pardon, tu es allé t’acheter ce foutu paquet de clopes, reprit Jordan.

En effet, depuis une semaine, la seule fois où Mike était sorti de chez lui, c'était trois jours auparavant. Il avait été pris d’une irrésistible envie de cigarettes et bien qu’il n’en ait pas touché une depuis plus de 5 ans, il était sorti à trois heures du matin pour aller s'acheter un paquet au night shop situé au bout de sa rue.

 -  On est passé par là aussi, on sait que ça fait mal. Mais on finit par se relever parce que la vie doit continuer. Et nous on est là pour toi aussi.

Mike eut un ricanement mauvais. Sa cigarette toujours à la main, il se leva et se dirigea vers la cuisine.

 -  Ouais, mais vous, vous n'avez pas vécu pendant plus de 3 ans avec la même fille. Aucun de vous n’a jamais réussi à tenir une relation aussi longtemps avec une meuf. Ah, oui c’est vrai, pardon Adrien. Ou avec un mec, ajouta Mike après s'être remémoré le fait que son ami était gay.

Une fois arrivé dans la cuisine, il ouvrit l’armoire où se trouvaient tous les alcools et en sortit la bouteille de vodka. Il avait terminé celle de whisky deux jours plus tôt. Il se servit un verre et le but cul-sec. Jordan et Adrien étaient restés assis et le regardaient faire d’un œil médusé et soucieux. Après s’être servi un second verre, Mike se tourna vers ses deux amis et leur en proposa un sans tenir compte du fait qu'ils avaient déjà chacun leur bière. Les deux hommes refusèrent et Mike revint s’asseoir en face d’eux.

- Tu… tu veux faire une partie de FIFA ? lui proposa Jordan.

- Non merci.

Mike se sentit tout à coup complètement épuisé. Il souffla et porta son verre de vodka à ses lèvres. Cependant, avant que le liquide ne coule dans sa bouche, il se ravisa et éloigna le verre de son visage. Il examina son contenu puis le reposa sur la table et contre toute attente, il se prit la tête dans les mains et fondit en larmes. C’était la première fois qu’il se laissait aller à ses sentiments depuis que Lola avait rompu. Jordan et Adrien, qui étaient à l’affût du moindre de ses mouvements, furent en quelque sorte soulagés. Enfin leur ami avait une réaction un peu moins malsaine. Ils échangèrent un regard et se rapprochèrent de Mike.

 -  Allez, ça va aller mec ! C'est bien que tu sortes ce que tu as en toi ! l’encouragea Jordan

A part lui donner quelques tapes dans le dos, les deux amis ne savaient pas vraiment quoi faire pour l'aider. Ils restèrent alors à ses côtés à lui exprimer des paroles encourageantes. Après quelques minutes, Mike se calma.

 -  Désolé les gars, vous n'y êtes pour rien. Je suis vraiment con ! C’est juste que… putain ça fait mal !

 -  Ne t’inquiète pas, on est avec toi, vieux ! On ne va pas te laisser tomber !

 -  Et puis tu verras maintenant que tu es célibataire, toutes les nanas de la ville vont vouloir te mettre le grapin dessus.

Mike eut un sourire triste. Il n'en avait rien à faire des autres filles, c’était une en particulier qu’il voulait.

Les trois amis continuèrent à parler pendant un moment. Jordan et Adrien étaient rassurés. Certes, Mike était triste mais au moins, il extériorisait. Ils préféraient de loin le voir dans cet état que comme le salaud aigrit qu’ils avaient trouvé en arrivant dans l’appartement. De son côté, Mike se sentait un tantinet mieux, plus léger. Pleurer faisait vraiment du bien et pouvoir enfin parler et mettre des mots sur ce qu’il ressentait était un meilleur remède contre sa peine que l’alcool et la cigarette.

Quand Jordan et Adrien durent rentrer chez eux, Mike les raccompagna à la porte d’entrée. Une fois dans le couloir, ils s’échangèrent encore quelques mots.

 -  Bon, appelle-nous si ça va pas et on rapplique, lui intima Adrien.

 -  Arrête Adrien, on sait tous très bien pourquoi tu veux revenir ici. Attend un moment avant d’essayer de lui sauter dessus, le chariat Jordan.

Adrien porta un coup de poing à l’épaule de Jordan qui fit mine de répliquer. Depuis la crise de larmes de Mike, l'ambiance s'était vraiment détendue.

- Allez, on y va, dit Jordan. On est là si tu as besoin. Surtout fait pas de bêtise hein ! rétorqua Jordan à son ami sur un ton mi-sévère mi-joyeux.

Mike sourit. Il se sentait un peu mieux. Après une semaine de grosse déprime, il se dit qu'il allait reprendre sa vie en main. Néanmoins, penser à Lola lui faisait beaucoup de mal. Il n'était pas prêt à l'oublier.