A new beginning
Stéphanie
ꪶꪮᦓ ꪖꪀᧁꫀꪶꫀᦓ- Août 2011
Pour se faire, je suis passée par d'innombrables aventures. Et début Décembre, je m'envole pour Los Angeles afin d'avoir cet entretien au Southern California Hospital, accompagnée de mon père et de Katelyn. Quelques jours plus tard, je reçois un e-mail indiquant que l'administration a égaré mon dossier. Résultat, je dois renvoyer une copie en express. Toutes mes chances semblent s'éteindre une à une mais je ne baisse pas les bras pour autant. Je passe mon examen d'Anglais comme prévu, quelques jours plus tard, encouragée par Ed et ma famille. Je n'ai pas démérité une seule seconde et je l'ai eu, au prix de nombreux efforts et d'un entraînement intensif : Ed et Kate m'interdisaient de parler une autre langue que l'Anglais, si bien que j'ai progressé de jour en jour. Fin Décembre, je reçois un e-mail informant que mon dossier est validé et notifié conforme par la CGFNS et le BOARD of NURSING. Une attente inespérée qui s'est soldée par un soulagement.
En début d'année, j'ai pu m'inscrire pour l'examen infirmier Américain, le N-CLEX. L'ultime et dernière étape. Le cadre des Urgences du Southern California Hospital m'a fait parvenir une réponse favorable à mon entretien d'embauche ainsi qu'un contrat de travail que j'ai signé et renvoyé en bonne et due forme. Il m'a assuré qu'il se chargerait d'envoyer sa copie à l'ambassade afin de faire une demande de visa H1B d'un an, pour commencer.
Début Avril, j'ai validé mon examen Infirmier et j'étais encore en attente de mon visa. Par ailleurs, le visa actuel étant encore d'actualité jusqu'au 20 Juillet, il m'était impossible d'obtenir le nouveau avant cette date. En attendant, je bossais au Memphis et Ed devait chercher une autre employée. C'est ainsi que fin Août, j'ai reçu mon nouveau visa et que ma nouvelle vie a enfin commencé.
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~Septembre 2011~ ꪶꪮᦓ ꪖꪀᧁꫀꪶꫀᦓ
Une nuit d'été, comme tant d'autres, mais pas n'importe laquelle. Celle qui annonce un nouveau départ, une autre vie. Un lieu où la chaleur n'est pas la même qu'en Floride et l'air est un peu plus sec et semblable à la Méditerranée.
L'appartement de Kate, situé sur Downtown, au w.5th.street, est assez grand et lumineux. Un mobilier en bois brut, de grands tapis shaggy de couleur sobre jetés sur le parquet, des voilures légères aux fenêtres laissant percer la luminosité et je me sens tout de suite à mon aise.
Mon père et Kate ont quitté Los Angeles, il y a deux heures et une légère angoisse me gagne déjà. Cette immensité oppressante sous mes yeux, avec ses avenues interminables, ses longs palmiers et son cadre de rêve. Je suis en Californie. Mais au milieu de tout cet engouement, un petit pincement persiste. En contemplant la ville illuminée d'une myriades de couleur, je me réconforte comme je le peux. Minette vient se frotter contre moi, réclamant mon attention.
Au moins, je ne suis pas seule dans cette ville gigantesque.
Dans cette ville inconnue, je me sens asphyxiée par ce cadre à perte de vu. L'impression d'être seule au monde. Bien que ce soit un changement que j'ai opéré moi-même, la solitude m'entoure lorsqu'en fin de journée, toute cette excitation retombe comme un soufflet. Même si elle est à 9000 km, j'échange avec ma mère par téléphone. En France, le jour suivant est déjà levé mais il est encore tôt. J'évite de lui raconter tout de suite que je me sens un peu perdue et solitaire — sentiments normaux, en somme — et j'opte pour la carte de la bonne humeur. C'est moi qui ait fait ce choix, alors je dois l'assumer. N'étant pas adepte des longues discussions par téléphone, je communiquais avec elle par Sms. Elle savait que je prévoyais de quitter Miami et n'était pas pour cette idée.
Plutôt que de m'entourer de tristesse, je décide d'égayer mon quotidien. La radio allumée, je zappe sur une onde locale : une musique rythmée qui met du baume au cœur. Une gorgée de mon thé préféré coule dans ma gorge pendant que je m'interroge sur ma journée de demain.
La nouveauté ouvre le champ des possibles. En quittant la France, je fuyais une relation sentimentale qui m'avait blessée. Partir sans me retourner était comme enterrer ce souvenir en me promettant de ne plus laisser un seul homme abuser de ma confiance. Je me suis jurée la prudence après cette rupture avec mon ex-petit-ami ; ne pas me laisser bercer par ce doux sentiment qu'est l'amour et éviter autant que possible d'être prise dans un étau et ne plus pouvoir en échapper. Dernière alerte : Ne plus user de gentillesse, aussi facilement.
La dernière fois que j'ai eu une relation avec un homme il a profité de ma bonté en se tirant avec une autre.
Laissant les idées peu productives de côté, je me glisse entre mes draps pour m'abandonner dans les bras de Morphée. Demain sera une grande journée et en même temps, je ne sais pas comment je vais réussir à assurer face à des patients anglophones, râleurs, douloureux et énervés. Mes doutes refont surface.
*****
Les Urgences du Southern California Hospital. Une grande enseigne et pas seulement. Les brancards vont et viennent, les urgentistes pressés me bousculent et j'ose à peine pénétrer dans le service. Des murs sinistrement blancs longent les couloirs éclairés d'une lumière tristement blafarde. Et des gens qui crient, se lamentent, des médecins occupés et des soignants qui passent d'un box à l'autre.
De tous côtés, du monde, dans tous les sens. Des bousculades et je ne sais pas à qui m'adresser. Cherchant un regard disponible, je trouve enfin une jeune soignante, le nez collé sur son smartphone, une bouteille d'eau sous le bras, déambulant d'un pas lent. Elle pianote sur l'écran tactile, dans sa bulle, se dirigeant sûrement en salle de pause. Je décide de rompre son moment de sérénité. Souriante, elle m'indique l'infirmerie. L'endroit où, accessoirement, je pourrai trouver Hayden Lewis mon guide pour la journée, comme le cadre me l'a indiqué.
Après avoir slalomé entre deux brancards abandonnés, j'arrive enfin au bureau des infirmiers. Vaste salle chargée d'ordinateurs, de paperasses et où des sonneries en tous genre retentissent. Il règne à l'intérieur un brouhaha ambiant difficilement intelligible, du moins, pour moi. Les soignants entrent et sortent. Aucune chance de repérer qui que ce soit.
Osant me présenter à l'entrée, une jeune femme me percute, manquant de verser son café sur moi. Sans une once d'excuse, elle lève un regard dédaigneux sur moi. Je n'ai pas le temps de m'exprimer qu'un grand brun l'écarte et se présente à moi, souriant.
— Salut ! Tu as besoin d'un renseignement?
— Bonjour, je suis Infirmière et je commence aujourd'hui. Mon nom est Stéphanie.
L'expression de son visage change aussitôt et il m'adresse un sourire.
— Hey ! Tu es en avance ! Moi c'est Hayden! On n'a pas encore eu la relève... mais viens je te montre les vestiaires ! s'exclame-t-il de bonne humeur.
— Aucun souci...
— Tu as trouvé facilement ? Pas trop de monde ce matin sur les routes ? m'interroge Hayden avec entrain.
— Je suis partie en avance pour éviter le trafic ! Les bouchons commençaient à se former, je réponds légèrement rassurée.
Ayant trouvé un visage ami, mon taux de stress redescend progressivement. Hayden me fait traverser le service en entier ; une succession de couloirs, tous aussi bruyants et bondés les uns que les autres. Devant la porte des vestiaires, mon futur acolyte me donne une tenue et s'en retourne vers l'infirmerie en lançant un « à tout l'heure » enjoué. Face à moi, je découvre d'abord une longue allée d'armoires sordides en métal, puis un endroit sale et négligé, dont les murs rongés par l'humidité ressemblent davantage à une cellule de prison. Une puissante odeur de renfermé envahit les lieux et je peine à croire que je vais laisser mes affaires ici.
Respire, ça va aller.
Déposant vêtements et chaussures dans le dernier casier libre, j'enfile une tenue un peu trop grande, des crocs puis remplie mes poches de stylos et de mon carnet avant de refermer avec un cadenas. Faisant un pas vers la sortie, me revoilà au milieu d'une nuée de monde, dans l'agitation incessante, et je me laisse guider vers l'infirmerie. Hayden m'y attend, patient et surtout dévoué à m'expliquer le fonctionnement du service.
Prenant des notes toute la matinée, je le questionne sur les points essentiels et entame une visite de l'accueil des urgences; la zone d'attente, la section infectieuse, les box patients, les zones dites à « prises en charge rapide » et enfin les salles de stockage du matériel. Au fur et à mesure, je fais la connaissance de mes futurs collègues de travail dont je retiendrai les prénoms plus tard.
En fin de matinée, je rencontre le chef de service : Mr Baker ; un homme assez sympathique évoluant dans un milieu débordant de papiers, de cartons composés d'équipements de toutes sortes, et dont l'environnement très encombré ne semble pas déranger le moins du monde. A l'image de son service, en somme. Je note qu'il ne doit pas recevoir souvent ses employés entouré d'une telle pagaille.
Quelques mots échangés, un contrat d'un an signé, et quelques explications sur les horaires et mon encadrement ensuite je suis invitée gentiment à rejoindre les couloirs agités du service. Mon acolyte se trouve entouré de deux jeunes femmes qui s'éclipsent aussitôt en me voyant approcher. Son sourire immense en dit long.
— Tu as fait la connaissance de David Baker ! Tu t'en remets ? ricane Hayden, en tapant amicalement mon épaule.
— Oui, réponds-je en m'asseyant à ses côtés.
— Tu verras ! Il est pro mais qu'est ce qu'il est bordélique ! continue-t-il en riant.
Je ne te le fais pas dire !
N'osant pas appuyer sur cette affirmation plus que vrai, je garde le silence et le laisse dire. Hayden finit par récupérer son sérieux et plonge alors son regard noisettes dans le mien.
— Tu bosseras sûrement avec moi et June, tu verras elle est super cool. Et si, en plus tu lui dis que tu es Française, elle va te kiffer grave !
Je hoche la tête en silence, impatiente de connaître cette deuxième collègue avec laquelle je vais bosser.
— Merci pour cet accueil !
— de rien, c'est normal. Tu vis seule sur LA? demande-t-il.
Je dois afficher un air drôlement bizarre car il réitère sa question.
— Tu vis seule sur Los Angeles ?
— Oui, ma famille est en France et à Miami.
Hayden ne se montre pas plus curieux . La pause dure une demi-heure pendant laquelle Hayden et moi ingurgitons un sandwich acheté au Coffee time juste en face. Durant tout ce temps, mon futur collègue se révèle être un véritable bavard, discutant de ses passions pour la boxe Anglaise et la moto.
L'après-midi, les heures s'égrènent, entre la récupération de mon badge, le planning et les rencontres avec les médecins. Sympathique, Hayden prend le temps de m'accompagner dans toutes mes démarches. Le grand brun au charme fou use d'un calme à toute épreuve, maîtrisant l'art de la plaisanterie et distribuant des sourires autour de lui.
En fin de journée, j'ai tellement accumulée d'informations que je suis épuisée. Regagner les vestiaires est un apaisement même si l'endroit est peu ragoûtant. Hayden se change dans la rangée juste derrière la mienne, pendant que je me dépêche de m'habiller. Ça me dérange un peu que mon binôme me croise en petite culotte. Lorsqu'il articule j'arrive à comprendre ses paroles. Côté à côté, nos chemins se séparent sur le parking. Un clin d'œil charmeur et il monte sur sa moto pour disparaître.
Après avoir affrontée les bouchons tout le long de la route, j'ai juste la force de me détendre sous une douche bien chaude, d'avaler quelques légumes pour ensuite aller me coucher. Je ne ferai rien de plus ce soir.
Allongée au fond de mon lit, les yeux braqués sur le plafond de mon appartement, mes pensées vont vers ma famille. Je ne perds pas courage, j'ai promis que je m'accrocherai et c'est ce que je vais faire.
~Bad Omens ~ Somebody else~
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