Retour et Renaissance
La lame de Sarah traça un arc mortel dans l'air nocturne, laissant derrière elle une traînée luminescente qui déchirait le tissu même de la réalité. L'entité principale tenta d'esquiver, mais trop tard. La dague la traversa de part en part, provoquant un hurlement qui n'avait rien d'humain – un son strident qui semblait venir de plusieurs gorges à la fois.
Là où la lame avait touché l'entité, une fissure lumineuse s'ouvrit, s'élargissant rapidement comme une déchirure dans un tissu fragile. L'être tentait désespérément de maintenir sa cohésion, ses contours ondulant frénétiquement.
"Impossible", gémit-il, sa voix fluctuant entre différents timbres et tonalités. "Cette lame... comment...?"
Sarah – ou la créature hybride qu'elle était devenue – sourit, un sourire qui n'atteignait pas ses yeux bicolores. "Surprise", murmura-t-elle. "Cette dague a été forgée avec les éclats du miroir principal. Elle ne tue pas seulement le corps, mais disperse l'essence même."
Les autres entités reculèrent, soudain méfiantes face à cette gardienne qui n'était clairement plus la novice hésitante qu'elles s'attendaient à affronter. Sarah pouvait sentir leur peur, un parfum enivrant qui nourrissait la part sombre en elle, lui donnant plus de force.
Prends le médaillon corrompu, souffla la voix de son double dans son esprit. Avec lui, nous serons invincibles.
Sarah sentit une vague de désir la traverser. Le médaillon corrompu. Tant de pouvoir contenu dans un si petit objet. Avec lui, elle pourrait non seulement vaincre ces entités, mais régner sur elles, les plier à sa volonté.
Mais une autre voix, plus faible mais plus claire, résonnait également en elle. Sa propre voix, celle de la gardienne qu'elle était destinée à être.
Non, pensa-t-elle fermement. Nous ne sommes pas venues pour conquérir, mais pour protéger.
La lutte intérieure faisait rage alors qu'elle affrontait les entités. Sa dague dansait dans la nuit, traçant des symboles complexes qui brillaient un instant avant de se refermer sur leurs cibles comme des filets lumineux. Chaque entité touchée se dispersait en particules argentées qui s'évanouissaient dans l'obscurité.
Mais elles étaient nombreuses, et Sarah, malgré sa nouvelle puissance, commençait à faiblir. La fusion avec son double drainait son énergie vitale à un rythme alarmant. Des points noirs dansaient à la périphérie de sa vision, et ses mouvements, d'abord fluides et mortels, devenaient plus lents, plus prévisibles.
Une entité particulièrement massive profita d'un moment d'inattention pour la frapper par derrière. Sarah fut projetée contre le mur de l'église, l'impact lui coupant le souffle. La dague lui échappa, tournoyant dans l'air avant de se planter dans le sol à plusieurs mètres de là.
"Tu es forte, gardienne", siffla l'entité, s'approchant lentement d'elle. "Plus forte que nous ne l'avions anticipé. Mais tu es seule, et nous sommes légion."
Sarah tenta de se relever, mais son corps refusait d'obéir. La douleur irradiait chaque cellule, chaque muscle. Elle pouvait sentir des côtes fêlées, peut-être même cassées, et un filet de sang chaud coulait le long de sa tempe.
Laisse-moi prendre complètement le contrôle, supplia son double. Je peux nous sauver. Je peux les détruire tous.
La proposition était tentante. Si tentante. Abandonner, laisser son double plus puissant, plus impitoyable, prendre les rênes. N'était-ce pas la solution la plus logique ? La seule qui garantissait leur survie ?
Mais Sarah savait ce que cela impliquait. Son double ne se contenterait pas de vaincre ces entités. Elle voudrait plus. Toujours plus. Le pouvoir était comme une drogue pour cette part sombre d'elle-même, un besoin insatiable qui ne connaissait pas de limites.
"Non", murmura-t-elle, le mot à peine audible même pour elle-même. "Pas comme ça."
L'entité était maintenant juste devant elle, sa forme brumeuse s'étirant comme pour l'engloutir. "Le médaillon", exigea-t-elle, tendant ce qui ressemblait vaguement à une main. « Donne-le-moi, et peut-être que nous épargnerons ton précieux gardien. »
M. Crowley. Dans la frénésie du combat, Sarah avait presque oublié la menace qui pesait sur lui. L'image du vieil homme, seul et vulnérable dans le cercle de protection compromis, lui donna un regain d'énergie né du désespoir.
Elle ferma les yeux, plongeant au plus profond d'elle-même, au-delà de la douleur, au-delà de la fatigue. Au-delà même de cette division artificielle entre elle et son double.
"Nous ne sommes pas deux entités séparées", réalisa-t-elle soudain. "Nous ne l'avons jamais été. Tu es moi, dans toute ma complexité. Ma force et ma faiblesse. Ma lumière et mon ombre."
Elle sentit quelque chose céder en elle, non pas comme une défaite, mais comme une acceptation. Une réconciliation profonde avec toutes les facettes de son être.
Quand elle rouvrit les yeux, l'entité recula instinctivement. Car ce n'étaient plus des yeux striés de vert et de noir qui la fixaient, mais des orbes d'un vert émeraude pur, brillant d'une intensité qui semblait transpercer les ténèbres elles-mêmes.
"Je suis Sarah Blackwood", dit-elle, sa voix résonnant avec une puissance nouvelle, celle d'une âme unifiée. "Dernière d'une lignée de gardiennes, protectrice du voile entre les mondes. Et vous n'êtes pas les bienvenus ici."
D'un geste qui semblait défier sa condition physique, Sarah tendit la main vers sa dague plantée au loin. L'arme vibra, puis s'arracha du sol, volant à travers l'air pour venir se loger parfaitement dans sa paume ouverte.
Les entités hurlaient maintenant, mais ce n'était plus des cris de menace ou de colère. C'était de la peur. Une terreur primale face à quelque chose qu'elles ne comprenaient pas, ne pouvaient pas comprendre.
Sarah se releva, chaque mouvement empreint d'une grâce surnaturelle. Le médaillon à son cou brillait d'un éclat si intense qu'il illuminait l'église entière, révélant les silhouettes déformées des entités qui tentaient de fuir vers les ombres.
"Trop tard", murmura Sarah. "Vous avez choisi ce combat. Assumez-en les conséquences."
Elle leva sa dague au-dessus de sa tête, récitant une incantation dans une langue plus ancienne que la civilisation elle-même. Les mots coulaient de ses lèvres comme de l'eau vive, chaque syllabe chargée d'un pouvoir qui faisait vibrer l'air autour d'elle.
Le médaillon corrompu, toujours serré dans ce qui tenait lieu de main à l'entité principale, commença à trembler violemment. Des fissures apparurent à sa surface, libérant une lumière rougeâtre qui s'échappait comme du sang d'une blessure.
"Non !" hurla l'entité, tentant désespérément de maintenir l'intégrité de l'artefact. "Tu ne sais pas ce que tu fais ! Si tu détruis ce médaillon, tu libéreras une force que même toi, tu ne pourras pas contrôler !"
Mais Sarah ne s'arrêta pas. L'incantation atteignait son apogée, sa voix s'élevant au-dessus des hurlements des entités, au-dessus même du rugissement du vent qui s'était levé, tourbillonnant autour d'elle comme une tempête surnaturelle.
Dans un dernier geste de défi, elle abaissa brusquement sa dague, traçant un symbole complexe dans l'air devant elle. Le symbole s'enflamma, projetant une lumière aveuglante qui engloutit tout – les entités, l'église, Sarah elle-même.
Un son assourdissant, comme le fracas de mille miroirs se brisant simultanément, déchira la nuit. Puis, le silence. Un silence si complet, si absolu, qu'il semblait presque tangible.
Lorsque la lumière s'estompa enfin, Sarah se tenait seule au milieu de l'église abandonnée. Les entités avaient disparu, ne laissant derrière elles que des traînées de brume argentée qui se dissipaient rapidement dans l'air nocturne.
Et là, à ses pieds, gisait le médaillon corrompu. Mais il n'était plus corrompu. La lueur rougeâtre malsaine avait disparu, remplacée par un éclat bleuté identique à celui de son propre médaillon.
Sarah le ramassa avec précaution, s'attendant presque à ce qu'il lui brûle les doigts. Mais au contraire, il était agréablement tiède au toucher, vibrant doucement comme en résonance avec le sien.
"Evelyn", murmura-t-elle, comprenant soudain. "Ce n'était pas un médaillon corrompu. C'était ton médaillon, purifié par ton sacrifice ultime."
Car dans ce moment de clarté parfaite, fusionnée complètement avec son double, Sarah avait accès à des souvenirs qui n'étaient pas les siens. Des souvenirs de sa famille, de sa lignée. De sa grand-tante Evelyn, qui n'avait pas trahi les Blackwood comme le prétendaient les entités, mais s'était sacrifiée pour infiltrer leur monde, pour comprendre leurs faiblesses de l'intérieur.
Un sacrifice que tous avaient mal interprété, transformant son nom en celui d'une traîtresse alors qu'elle était peut-être la plus courageuse des gardiennes.
Sarah serra les deux médaillons dans sa main, sentant leur pouvoir combiné pulser à travers elle comme une seconde vie. Elle avait une dette envers Evelyn, une dette qu'elle comptait bien honorer en rétablissant la vérité sur son histoire.
Mais d'abord, elle devait s'assurer que M. Crowley était sain et sauf.
Puisant dans cette nouvelle énergie qui l'habitait, Sarah ferma les yeux, visualisant le salon de sa maison, le cercle de protection où elle avait laissé le vieil homme. Parmi les connaissances acquises en fusionnant pleinement avec son double, elle découvrit la capacité de traverser l'espace sans l'aide d'objets comme le miroir de poche. Une capacité que seules les gardiennes ayant pleinement accepté leur double pouvaient maîtriser, expliquant pourquoi même sa grand-mère n'avait jamais pu l'utiliser. Dans un éclair de lumière bleue, elle disparut de l'église, se téléportant à travers l'espace avec une aisance qui l'aurait terrifiée quelques heures plus tôt.
Elle réapparut au centre du salon, juste à côté du cercle de protection. M. Crowley était toujours là, mais il n'était plus seul. Une femme se tenait près de lui, une femme que Sarah n'avait jamais vue mais qu'elle reconnut instantanément.
"Grand-mère", souffla-t-elle.
Eleonor Blackwood sourit, un sourire doux et triste à la fois. Elle n'était pas vraiment là, bien sûr. Son corps était translucide, comme fait de brume argentée, et Sarah pouvait voir les meubles du salon à travers elle.
"Ma chère enfant", dit Eleonor, sa voix semblant venir de très loin. "Tu as réussi. Tu as fait ce que des générations de gardiennes ont tenté de faire avant toi."
Sarah s'approcha d'un pas, hésitante, craignant presque que ce spectre ne disparaisse si elle s'en approchait trop. "Comment est-ce possible ? Comment êtes-vous ici ?"
Un sourire énigmatique flotta sur les lèvres d'Eleonor. "La barrière entre les mondes a été momentanément affaiblie par ton combat. J'ai saisi cette opportunité pour venir à toi, pour te protéger... et pour te féliciter."
Son regard se posa sur M. Crowley, qui semblait figé, comme suspendu dans le temps. "Ne t'inquiète pas pour lui", dit-elle, devinant la question de Sarah. "Il est simplement endormi. Les entités n'ont jamais vraiment réussi à l'atteindre. C'était une illusion, un piège pour te faire réagir émotionnellement."
"Et ça a marché", admit Sarah avec un petit rire sans joie. "J'étais prête à tout pour le protéger."
"C'est ce qui fait ta force, Sarah", dit doucement Eleonor. "Ton cœur. Ta capacité à aimer, à te sacrifier pour ceux qui te sont chers. C'est ce qui te distingue des entités que tu combats, ce qui te rend véritablement humaine."
Elle tendit une main vaporeuse vers les médaillons que Sarah tenait toujours serrés dans son poing. "Tu les as réunis. Les deux moitiés d'un tout, comme toi et ton double l'êtes devenues."
Sarah ouvrit sa main, regardant les deux artefacts identiques à présent dans leur éclat bleuté. "Que dois-je en faire ?"
"Les réunir", répondit simplement Eleonor. "Comme tu t'es réunie avec ton double. Compléter le cercle, rétablir l'équilibre."
Guidée par une intuition qui dépassait sa compréhension consciente, Sarah rapprocha les deux médaillons l'un de l'autre. Dès qu'ils entrèrent en contact, une lumière aveuglante jaillit entre ses doigts, si intense qu'elle dut fermer les yeux.
Quand elle les rouvrit, il n'y avait plus deux médaillons dans sa main, mais un seul. Plus grand, plus élaboré, gravé de symboles qu'elle n'avait jamais vus auparavant mais qu'elle comprenait instinctivement.
"Le Médaillon des Gardiens", murmura Eleonor, une note de révérence dans sa voix fantomatique. "Il n'avait pas été reconstitué depuis... depuis la création même du premier portail, il y a des millénaires."
Sarah sentait le poids de cet artefact, non pas physique mais métaphysique. Une responsabilité écrasante, un pouvoir qui pourrait aussi bien sauver que détruire.
"Est-ce... est-ce que ça veut dire que c'est fini ?" demanda-t-elle, osant à peine espérer. "Que les entités ne peuvent plus traverser ?"
Le visage d'Eleonor s'assombrit légèrement. "Rien n'est jamais vraiment fini, ma chérie. Les entités que tu as affrontées ce soir ont été dispersées, c'est vrai. Le portail qu'elles tentaient d'ouvrir a été fermé, peut-être définitivement. Mais..."
"Mais il y en aura d'autres", compléta Sarah, comprenant soudain. "D'autres entités, d'autres portails, d'autres menaces."
Eleonor hocha tristement la tête. "C'est la nature de notre rôle, Sarah. Les gardiennes ne connaissent pas de repos définitif. Mais avec le Médaillon des Gardiens, tu es mieux équipée que n'importe laquelle d'entre nous ne l'a jamais été."
Elle s'approcha, posant une main brumeuse sur la joue de Sarah. Étrangement, elle pouvait la sentir, une caresse fraîche comme une brise d'automne. "Je suis si fière de toi. De ce que tu es devenue, de ce que tu as surmonté."
Sarah sentit des larmes monter à ses yeux, un mélange de gratitude, de soulagement et d'une douleur sourde à l'idée de perdre à nouveau sa grand-mère. "Ne partez pas", supplia-t-elle. "J'ai encore tant de questions, tant de choses à apprendre."
Eleonor sourit, son corps devenant de plus en plus transparent. "Je serai toujours là, Sarah. Pas physiquement, mais dans ton sang, dans ton héritage. Dans le médaillon que tu portes maintenant. Et quand tu auras besoin de moi, vraiment besoin, tu sauras comment m'appeler."
Elle jeta un dernier regard à M. Crowley, une tendresse infinie dans ses yeux fantomatiques. "Prends soin de lui pour moi, veux-tu ? Ce vieux fou m'a aimée toute sa vie, sans jamais demander plus que ce que je pouvais lui donner."
"Je vous le promets", dit Sarah, la gorge serrée par l'émotion.
Eleonor hocha la tête, satisfaite. Puis, dans un dernier sourire, elle s'évanouit, se dissolvant comme de la brume sous le soleil du matin.
M. Crowley s'agita, revenant lentement à lui. Ses yeux s'ouvrirent, retrouvant leur clarté bleue habituelle. "Sarah ?" appela-t-il, confus. "Que s'est-il passé ? Les entités..."
"Vaincues", répondit simplement Sarah, essuyant discrètement ses larmes. "Du moins pour l'instant."
Elle l'aida à se relever, constatant avec soulagement qu'il semblait indemne, juste désorienté. Ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'ils se posèrent sur le nouvel artefact qui pendait au cou de Sarah.
"Est-ce...?" commença-t-il, n'osant pas terminer sa question.
Sarah hocha la tête. "Le Médaillon des Gardiens. Réunifié après des millénaires de séparation."
Le vieil homme semblait sur le point de s'évanouir à nouveau, mais de stupéfaction cette fois. "C'est... c'est incroyable. Les textes anciens parlaient d'une telle possibilité, mais je n'aurais jamais pensé... Comment as-tu...?"
"J'ai eu de l'aide", dit Sarah, un sourire énigmatique aux lèvres. "Disons simplement que j'ai finalement compris ce que signifie être une Blackwood. Ce que signifie être complète."
M. Crowley la dévisagea, remarquant pour la première fois le changement subtil mais indéniable en elle. Cette assurance nouvelle, cette sérénité qui émanait d'elle comme une aura presque tangible.
"Tes yeux", dit-il doucement. "Ils sont différents."
Sarah toucha son visage, surprise. "Différents ? Comment ça ?"
"Plus... vivants", expliqua-t-il, cherchant ses mots. "Comme si tu voyais vraiment le monde pour la première fois. Ou peut-être comme si tu le voyais enfin tel qu'il est réellement."
Sarah sourit, comprenant ce qu'il voulait dire. Car c'était exactement ce qu'elle ressentait. Comme si un voile avait été levé, lui révélant une réalité plus profonde, plus complexe qu'elle n'aurait jamais pu l'imaginer.
"Venez", dit-elle, lui tendant la main. "Il est tard, et nous avons tous les deux besoin de repos. Demain sera un nouveau jour, avec ses propres défis."
M. Crowley prit sa main, la serrant avec une affection paternelle. "Sarah Blackwood", dit-il, secouant la tête avec émerveillement. "Tu ne cesseras jamais de me surprendre, n'est-ce pas ?"
Elle rit, un son léger et cristallin qui semblait illuminer la pièce. "J'espère bien que non. Ce serait terriblement ennuyeux, vous ne croyez pas?"
Cette nuit-là, pour la première fois depuis son réveil après le rituel, Sarah dormit d'un sommeil profond et sans rêves. Le Médaillon des Gardiens reposait contre sa poitrine, pulsant doucement au rythme de son cœur, comme une promesse silencieuse de protection.
À l'aube, elle fut réveillée par un rayon de soleil filtrant à travers ses rideaux. Se levant, elle s'approcha de la fenêtre, observant la ville qui s'éveillait en contrebas. Millbrook semblait paisible, ignorante du drame qui s'était joué en son sein la nuit précédente.
Mais Sarah savait que cette paix était fragile, toujours menacée par des forces invisibles aux yeux ordinaires. Des forces qu'elle était désormais prête à affronter, non plus avec peur et hésitation, mais avec confiance et détermination.
Elle n'était plus fragmentée, plus divisée contre elle-même. Elle était entière, unifiée. Sarah Blackwood dans toute sa complexité, avec ses forces et ses faiblesses, sa lumière et son ombre, parfaitement équilibrées.
Son reflet dans la vitre lui sourit, un sourire qu'elle lui rendit sans crainte. Car ce n'était plus une adversaire qu'elle y voyait, mais une alliée. Une part essentielle d'elle-même, enfin acceptée, enfin embrassée.
"Un nouveau jour", murmura-t-elle, touchant le médaillon à son cou. "Un nouveau commencement."
Et quelque part, au-delà du voile ténu qui séparait les mondes, elle sentit la présence bienveillante de sa grand-mère, et de toutes les gardiennes qui l'avaient précédée. Une lignée ininterrompue de femmes fortes et courageuses, dont elle était maintenant le fier héritage.
Sarah Blackwood, dernière des gardiennes, première des gardiens unifiés, se détourna de la fenêtre, prête à affronter ce que l'avenir lui réservait. Car si elle avait appris une chose au cours de cette épreuve, c'était que la véritable force ne résidait pas dans la négation de nos parts d'ombre, mais dans leur acceptation et leur intégration.
Dans le miroir brisé de son âme, elle avait finalement trouvé, non pas des fragments isolés et dangereux, mais les pièces complémentaires d'un tout magnifique et puissant.
Et c'était peut-être là, finalement, la plus grande victoire de toutes.
Annotations
Versions