Chapitre 3 : Possession
Elle avait été grandiose !
Personne ne pouvait le remettre en question. La sensation de pouvoir qu'elle en retirait l'exaltait et lui donnait la force de supporter les caprices du roi. Une ombre tenta un instant d'obscurcir ce moment de joie, elle la repoussa loin dans son inconscient. Elle avait le droit. Non, elle se devait de profiter de l'instant.
Avant de sortir de la salle de réception, R'yline aperçut les doigts de plusieurs hôtes pointés dans sa direction et le refus poli mais ferme du roi. Il n'était pas homme à partager. La Naïadienne savait d'avance que les négociations des invités seraient vaines. Depuis son arrivée, presqu'un solemnum plus tôt, le souverain ne l'avait jamais présentée en société. Elle restait au gynécée, pouvait se promener dans les jardins, toujours accompagnée, et se présentait à son maître dès que ce dernier la faisait quérir.
Pourquoi un tel changement de ses habitudes ? Certainement la venue des O'rocs. Peut-être pouvait-elle tirer parti de la situation ? Il lui fallait examiner les possibilités qui s'offraient à elle. La Naïadienne commença par lister mentalement les raisons officielles de cette entrevue avant de mettre bout à bout les bribes de commérage qu'elle avait pu glaner afin d'en percevoir les enjeux cachés.
Une pensée vint se déposer, tel un petit insecte bruyant, minuscule et ridicule mais ô combien contrariant ! Impossible de mettre cette idée de côté : le prince et sa parfaite indifférence. Cela venait la piquer chaque fois qu'elle tentait d'analyser les opportunités envisageables avec le Peuple de la Terre.
Ses lèvres se plissèrent, des éclairs illuminaient ses yeux. Pourquoi un tel détachement ? D'ailleurs, comment cela se faisait-il qu'elle ne l'eut pas rencontré avant ? Avait-il trouvé une perle encore plus rare pour expliquer son désintérêt ? Mieux valait ne pas y penser, cela serait un mauvais présage pour son futur. Personne ne devait ébranler sa position de favorite, ni aujourd'hui, ni demain.
Peut-être était-il simplement trop timide ? Ce masque d'indifférence reposait sur ses traits pour masquer son inconfort. Ce devait être cela. C'était la seule et unique façon d'expliquer un tel détachement en sa présence. Un sourire étira les lèvres délicates d'R'yline. Son esprit accepta cette hypothèse comme un fait établi, le prince était d'une introversion excessive, raison pour laquelle il esquivait tout contact, en particulier avec la gente féminine. Elle se ferait un plaisir de le mettre à son aise. Restait à savoir comment s'y prendre pour ne pas être vus du roi. Sa jalousie était excessive, sa colère dangereuse.
À cette pensée, sa main se posa sur son flanc. Son corps était marquée de la douloureuse expérience. La Naïadienne frissonna. Comment oublier cette soirée où le neveu du roi avait posé ses yeux sur elle ? Un bel homme, bien plus que le souverain ne le serait jamais. Et prévenant. Elle ne savait plus de quelle façon ils avaient réussi à se retrouver seuls dans les jardins. Les yeux du jeune Eflamme avaient trahi son désir, elle avait alors osé un baiser. Chaque contact de leurs lèvres les avaient électrisé. Un besoin charnel les avait possédé à leurs corps défendants.
Puis le hurlement de rage. Impérieux. Bestial.
Le neveu sommé de quitter les lieux. Seuls, le roi avait juré, menacé, rassuré, avant d'asséner à son corps frêle plusieurs coups de poing dans le ventre. Puis l'éclat d'une lame. Le liquide rouge sur le sol. Une vive douleur sur le flanc. La surprise l'avait cueillie empêchant la moindre réaction. C'est lorsqu'elle s'était retrouvée seule que la danseuse avait longuement pleuré, gémit sous la douleur provoquée au moindre mouvement, cauchemardé des solaris durant. R'yline en avait tiré leçon : elle était le joyau de sa majesté, sa possession.
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