Chapitre 23 – Remède

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Elle le tenait dans sa toile. Enfin ! Le feu qui se dégageait du prince était-il dû uniquement à un mal qui l’avait forcé à rendre le contenu de son estomac ? Ou n’était-ce pas également l’effet tardif de l’attraction que la danseuse provoquait désormais sur lui ?

Ils avancèrent sans échanger le moindre mot, leur trajet ponctué des tintements de la chevelure de la Nymphe et des chausses claquant sur la pierre. R’yline prit conscience de la main dans la sienne. Un pétillement naquit au bout de ses doigts, remontant progressivement le long de son bras pour s’épanouir dans sa poitrine. Pourquoi, même malgré la froideur qu’il affichait depuis leur entrevue, devait-elle se sentir déstabilisée dès que leurs corps se touchaient ? Elle eut envie de rompre le contact, mais s’abstint. Ce qu’elle craignait par-dessus tout était que Kamal prenne conscience de l’effet qu’il produisait sur elle. Elle n’était sous la coupe de personne. C’est elle qui tirait les fils posés patiemment afin de mettre les plus fortunés dans sa couche. Le prince n’y ferait pas exception quoiqu’en dise sa fichue poitrine !

D’un coup, ses joues s’empourprèrent.

Elle réalisa qu’elle devait le mener dans sa chambre si elle voulait lui préparer la décoction. Aucun homme n’avait jamais mis un pied dans cette pièce. C’était sa bulle, son antre protecteur. Mais pouvait-elle faire machine arrière ?

Étrangement, la situation l’excitait autant qu’elle l’apeurait.

— Vous devrez vous contenter de ma chambre. Les ingrédients y sont stockés, lâcha-t-elle plus rudement qu’elle ne l’aurait voulu.

R’yline devait se reprendre et vite si elle ne voulait pas le faire fuir. Aucun homme n’appréciait se voir parler ainsi.

Pour toute réponse, le prince expira un grand coup.

Comment devait-elle interpréter cette réaction ?

Après tout, peu importait. Elle profiterait des soins pour établir un contact physique qui ferait vite oublier l’éventuel impair qu’elle avait pu commettre. En matière de plaisirs, il n’y avait pas plus experte dans tout le palais.

Elle l’installa sur son lit couvert d’un large drap de coton épais. Le prince se laissa faire, docile. Il était absorbé dans l’observation de la pièce qui permettait d’accueillir sa couche, une armoire, une coiffeuse et un large tapis moelleux, petit luxe que lui avait concédé le souverain et où trônait une baignoire en émail. Les murs ornés de mosaïques colorés semblaient fasciné Kamal. Elle caressa sa joue :

— Mon roi, je suis confuse de vous recevoir dans un tel endroit.

— Ça ne fait rien, répondit-il d’un air absent.

La communication fluide de la nuit passée avait disparu. La Nymphe ressentit un pincement qui lui serra le cœur et voûta un instant sa posture avant qu’elle ne se reprenne pour attraper un bol et un pilon.

Durant toute la préparation, l’Eflamme ne réagit pas, immobile, les yeux fixés sur l’arabesque florale face à lui. R’yline se concentra sur la recette. Dès qu’elle tentait de penser à la façon de séduire le prince, une désagréable sensation s’insinuait dans tout son être.

Ce n’est qu’une fois le breuvage servi, alors que Kamal posait distraitement ses mains sur celles de la favorite, que ce dernier sembla revenir à la vie. Il soupira de nouveau, but une gorgée puis articula à voix basse :

— Merci.

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