Chapitre 29 – Trois mots
Comment avait-il pu dire cela avec autant de facilité ? La Naïadienne sentait le barrage céder, les vannes se desserrer. Quand était-ce arrivé pour la dernière fois ?
Longtemps. Si longtemps.
Lorsqu'elle avait découvert le métier auquel ses parents l’avait condamnée. Puis elle avait posé le masque sur son visage et ne l’avait jamais ôté. Pourtant, en quelques mots, cet homme faisait voler en éclats des solemnum de maîtrise et de contrôle de soi.
Paralysée.
Son corps telle une statue de glace figée sous la bise.
Animée.
Son esprit telle une flamme dansante en train de s'envoler vers les hauteurs.
Ses défenses refusaient de céder, mais son âme ne pouvait le repousser. Qu’attendait-il de sa part ? Que pouvait-elle lui offrir ? Que devenait sa place au sein du palais ? Les questions se bousculaient, l’ancrant davantage dans cet immobilisme mortifère. Il lui offrait la vie. Elle n’avait rien à donner en retour. Ce fut ce constat implacable qui la fit basculer. Un liquide tiède glissa sur ses joues, mouilla son nez avant de s’infiltrer au coin de ses lèvres. Le flot doubla d’intensité. Son corps trembla. Sa respiration se hacha.
Puis des bras serrés autour d’elle. Le contact d’un visage contre le sien. Et quelques mots :
— Je vais te sortir de là. Par n’importe quel moyen !
Kamal demeura auprès d’elle jusqu’à ce que les larmes s’épuisent. R’yline sentit son corps céder sous la fatigue mais ne chuta pas. Kamal l’attrapa et la porta sur le lit.
— Je fais le serment de nous offrir un avenir meilleur.
R’yline cacha son visage entre ses mains. Le prince écarta ses doigts un à un puis releva délicatement son menton. Quelques larmes perlèrent à nouveau. Le paradoxe de sentiments la submergeait de confusion : survoltée de se sentir aimer pour qui elle était, terrorisée de s’abandonner à cet amour, exaltée par la promesse, furieuse lorsque des souvenirs de son passé traversaient son esprit. La danseuse se surprit de s’autoriser à croire en lui, à espérer une vie à deux, à aimer de tout son être.
— Je… Je t’aime ! Tu seras ma destruction ou bien mon salut et ma libération.
Elle le voulait pour elle seule. Elle le désirait de tout son être, et sans plus réfléchir s’abandonna à nouveau dans ses bras. Ils s’embrassèrent avec passion, faisant voler les vêtements avec l’urgence de sentir l’autre contre soi. Cette union scellait la promesse formulée un instant plus tôt.
Annotations
Versions