2 - Romane : un moment de solitude
4 heures.
Le bébé avait été transféré en néonatalogie. Sophie Toutenu, la gynécologue, m’avait laissée seule pour le suivi post-partum de Léa. Une fois de plus. Je regardais cette femme étendue devant moi, son visage crispé malgré la dose de morphine que je lui avais administrée. La douleur s’accrochait à elle comme une ombre tenace. J'avais beau multiplier les gestes, vérifier les paramètres, ajuster les doses : rien n’y faisait.
Je me surprenais à ressasser l’intervention du Dr Létal. Combien de fois s’y était-il repris pour la péridurale ? Cinq, six ? Trop, en tout cas. Je pouvais encore entendre le bruit sec de l’aiguille qui percutait l’os, encore et encore, comme une insulte faite à ce corps déjà éprouvé.
Et moi, que faisais-je ici, seule, face à cette douleur ? Malgré mon expérience, je me sentais démunie. La vérité, c’est que personne ne se souciait vraiment de ce qui se passait après. Une fois le bébé sorti, le reste devenait l’affaire de la sage-femme. Toujours. Cette pensée me traversa comme une lame : c’était donc ça, mon rôle ? Être celle qui ramasse les morceaux ?
Je n’en pouvais plus. Léa souffrait, et moi, je tournais en rond dans cette chambre trop étroite, envahie par l’odeur métallique du sang et du désinfectant. Je ne savais plus quoi faire. Alors, presque malgré moi, mes jambes se mirent en mouvement. Je sortis de la chambre, traversai le couloir, descendis un étage. Les murs semblaient s’allonger à mesure que j’avançais, comme si l’hôpital entier s’amusait à me ralentir.
Quand j’arrivai devant la chambre médicale de garde, je m’arrêtai un instant. Ma main tremblait sur la poignée. À l’intérieur, j’espérais qu’il serait là, ce médecin qui ne ressemblait pas aux autres. Peut-être endormi, peut-être épuisé, mais présent. Je pris une inspiration, et frappai à la porte.
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