X – La Tempérance et l’Anachorète

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Tu vois là-bas une mesa se détacher de la vaste assemblée de monolithes. Elle vous toise de sa kyrielle de cavités. Une d’elles est éclairée d’une flamme réconfortante, la renarde te le confirme : vous voilà à Thébaïde.

Vous escaladez alors des marches serrées qu’un vent mauvais lacère. Tu te perds un instant à contempler l’horizon, c’est une forêt de gris et de grès qui te rappelle d’où tu viens ; et au loin, tu crois voir trois panaches orangés.
Mais déjà ta féale t’exhorte, il n’y a pas de temps à perdre !, tant à faire !

Vous êtes accueillis par un homme courbé au-dessus du feu, l’œil creusé et figé sur les langues dansantes. Ses mains calleuses caressent l’air comme si un animal majestueux s’y trouvait, un fauve pour terrasser vermine et faramine !; et les froids soirs venus, se serrer…
Peut-être a-t-il par le passé été ami avec un tigre ou un lion ? Mais aujourd’hui, il ne reste que lui dans cette alcôve isolée.

Tu t’assois près de l’âtre, sans rompre la méditation de cet ancien qui a tant vu et entendu.
Et tu prends ton mal en patience, car tu sais déjà ton apprentissage long et exigeant.
Sur les étagères, il y a quelques graines qui attendent de pouvoir germer, et des pots de les accueillir. Tu lis une quiétude qui ne t’est pas inconnue et entends le crépitement qui endort la défiance.


« Oh… J’ai de la visite… C’est si rare ; je croyais être le dernier.
— Moi aussi, je croyais être le dernier. Mais voilà que je fais votre rencontre !
— Quel est ton nom, enfant ?
— Je m’appelle Εἰςβυσσόν. Et je quête l’Orbe d’Or, je veux parler comme l’Enfant du Soleil, et chanter aux étoiles ! »


Il acquiesce du regard, te scrutant d’haut en bas.


« Je vois… Tu périples jusqu’au bout de l’écoumène.
— Mais je manque de savoir. J’ai soif de connaissance. S’il vous plaît, apprenez-moi ! »


Il tend les mains vers le fond de la caverne ; là-bas, bordant la paillasse, tu vois ce qui ressemble à un instrument. Guitare ? Cornemuse ? Cithare ? Carnyx ? Rien ou tout ça à la fois ? À côté ; un pupitre où sont disposées nombre de feuilles jaunies par le temps, noircies par l’encre, et tachées de chagrin.


« J’ai voyagé, j’ai canté, j’ai joué, et j’ai croisé des gens. Que te manque-t-il, toi qui cherches tout ce qui chatoie ?
— Je ne fais que poursuivre, sans bruisser.
— Mais tu as partagé. »


Tu acquiesces, tes rencontres en tête.


« Alors il te reste à apprendre à te souvenir. »

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