2 DRACULA
La Rédemption de Dracula
Au sommet d’un immeuble se tenait une silhouette vêtu d’un long manteau noir. Il s’agissait d’un homme. Il attendait là, accroupi sur un petit muret. il observait les hommes aller et venir dans les rues, que cela soit à pied, à vélo ou en voiture. Le bruit des roues crissant sur l’asphalte, les klaxons réguliers entre automobilistes qui ne faisaient pas attention au code de la route, les voix d’innombrables hommes et femmes se répercutaient dans ses oreilles. Tant de bruit qu’il n’en percevait rien en particulier. Du moins dans l’immédiat, il entendait tout sans rien vraiment écouter. Il attendait juste et observait.
Le monde avait bien changé ces derniers siècles. Les humains s’étaient multipliés et la nature avait laissé la place à d’immenses cités de lumière qui transformaient la nuit en jour. Ce n’était pas plus mal pour lui qui ne pouvait plus en apprécier les rayons depuis bien longtemps. Il en avait oublié la chaleur exquise qui se glissait sur sa peau, quant à sa couleur, il l’avait seulement redécouverte dernièrement dans les salles de cinéma ou sur un écran de télévision. Et désormais bien sûr, ces petits objets portables qu’ils osaient encore appeler téléphone.
Un cri strident lui vrilla les tympans, rapidement suivi par quelques bruits étouffés. L’homme perché au sommet de son bâtiment se concentra et entendit des ricanements et des menaces suaves d’un voleur pervers.
L’homme se redressa et courut dans cette direction. Il bondit de toit en toit avec aisance et une certaine rapidité. C’était que l’incident se déroulait quand même à quelques blocs de là où il se tenait auparavant. Arrivé juste au-dessus des lieux, il remarqua bien rapidement qu’il ne s’agissait non pas d’un voleur pervers mais trois. Il n’avait pas entendu les deux autres car ils ne faisaient qu’observer et ricaner. Des prédateurs qui s’acharnaient sur une pauvre femme sans défense. D’un simple pas, il se laissa donc tomber de cinq étages et il atterrit avec souplesse à une dizaine de mètres d’eux.
— Je me trompe peut-être mais la dame ne semble pas apprécier qu’on la touche.
Les trois malotrus se retournèrent brusquement et le regardèrent approcher d’un pas calme et assuré.
— T’es qui, toi ? T’as pas l’air de savoir à qui t’as affaire !
— Bien au contraire, j’en ai une bonne idée. Par contre, vous, vous ne semblez pas savoir à quoi vous avez affaire…
Il étudia chacun d’eux avec attention et pourtant avec tant de rapidité que cela ne se remarqua pas. Les deux un peu plus à l’écart avaient sorti chacun un canif et se présentaient à lui. Le troisième s’était légèrement écarté de sa victime mais il la tenait toujours fermement d’un bras. Il ne voulait pas la lâcher…
Ils se voulaient dangereux et intimidants. Ils le seraient sûrement s’ils faisaient face à quelqu’un de normal. Mais voilà, l’homme n’était pas comme ces citoyens lamdba que l’on croisait par centaines de milles dans le monde entier. Il était bien plus que cela. Et bien pire surtout. Et ils allaient tous les trois le regretter…
— Tu n’aurais jamais du t’arrêter dans le coin, l’ami, fit l’un d’eux. Tu ne repartiras jamais vivant.
De l’assurance… Il l’entendait aux battements de cœurs qui s’étaient remis de la surprise de son apparition. Le seul encore emballé était celui de la femme terrorisée et qui lui suppliait du regard de la sauver.
— Pensez-vous vraiment pouvoir me dominer et me tuer ? Demanda-t-il en faisant un sourire.
Ce dernier n’était pas joyeux. Mais il n’était pas froid non plus. Il ne le faisait que dans un seul but, prévenir ses proies de sa nature et de leur mort imminente. Par ce simple sourire, ce déplacement des lèvres, il leur montrait en effet ses canines qui étaient bien plus longues que la moyenne. Il était en réalité un vampire.
Les hommes ricanèrent.
— Tu as des couilles, toi, commenta l’un d’eux. Freddy ?
— Buttez-le, ordonna celui qui devait être le chef de la bande.
Le vampire cessa de sourire et attendit. Il se concentrait dorénavant sur les respirations et les battements de coeur de ses deux premiers adversaires afin de déterminer qui attaquerait en premier. Normalement, il ne craignait rien de simple hommes mais il suffisait d’un détail d’apparence insignifiant pour qu’il perde l’avantage et même ses capacités. Alors il restait prudent.
Fort heureusement, aucun des deux ne sembla posséder de croix autour du cou. Ils ne sentaient pas non plus l’ail et plus personne ne se baladait avec de l’eau bénite en poche de nos jours. Sauf peut-être certains paranoïaques et fanatiques… Mais là, ce petit groupe n’était que des pervers sans la moindre jugeote et qui prenaient plaisir à faire du mal aux autres.
Il évita d’un pas le premier qui s’était élancé vers lui et cassa le bras armé du second d’un geste vif de la main. La seconde suivante, il avait laché le membre brisé pour frapper avec le coude le visage du premier assaillant. Il entendit l’os du nez craqué. L’odeur du sang lui vint rapidement, forte et alléchante. Il y résista pourtant. Il avait suffisamment de contenance pour cela. Juste le temps qu’il s’occupe du dernier misérable et s’assure que la femme aille bien.
Il repoussa les deux blessés plus loin et s’approcha du troisième en une seconde à peine. Il se saisit de lui par la gorge et le souleva comme s’il ne pesait rien. L’homme réagit comme il peut et il lui planta directement sa lame dans l’épaule. La morsure de fer en soi ne lui fit ni chaud ni froid. La présence de la lame dans son épaule par contre, elle était plus dérangeante. Il ne s’en formalisa pas. Ce serait très vite guéri.
— Qui est-ce que tu es ? Demanda l’homme dans un souffle haché.
— Moi ? Demanda le vampire. Oh… Pardonnez-moi, mon envie de vous arrêter m’a fait oublier les bonnes manières… Laissez-moi me présenter : je me nomme… Dracula.
Il vit les yeux de l’homme s’écarquiller de peur alors qu’il lui remontrait ses crocs, cette fois-ci bien visible à une vingtaine de centimètres de la gorge de sa désormais victime. Il n’attendit pas plus longtemps pour s’abreuver directement de ce liquide exquis et d’ordinaire porteur de savoirs. Il ignora les images ignobles et futiles de sa proie et termina rapidement son repas de la nuit. Il ne lui fallut pas plus d’un quart de minute.
Il la relâcha et se tourna vers l’humaine. Cette dernière le regardait, figée par la terreur. Il approcha lentement et récupéra son sac à main qui était tombé à terre. Il le lui rendit.
— Allez-vous bien, Gente dame ? Demanda-t-il.
— Vous… vous êtes …
Elle ne sut terminer sa phrase.
— Un vampire oui, termina-t-il à sa place.
— Est… est-ce que vous allez …
— Vous tuer ?
Elle hocha frénétiquement la tête.
— Non, la rassura-t-il.
Il tourna le regard sur la lame qu’il avait toujours dans l’épaule et l’arracha d’un geste vif avant de la nettoyer soigneusement avec un mouchoir.
— Je ne me repais que de ce genre de racailles, ajouta-t-il ensuite. Il y en a bien suffisamment dans le monde pour que j’épargne les honnêtes gens.
Le cœur de la dame ralentit pour prendre un rythme plus normal. Elle était désormais confuse et aussi curieuse.
— Pourtant vous avez dit être … Dracula.
— En effet.
— Mais Dracula n’est-il pas.
— Tout dépend de quel Dracula vous faites allusion, très chère … Je ne suis pas ce personnage de fiction comme vous pouvez retrouver dans les romans ou les films.
Il jeta un oeil aux deux autres scélérats qui gémissaient encore de douleur sur le sol.
— Je suis juste un être damné qui cherche sa rédemption…, dit-il dans un soupir alors qu’il avançait de quelques pas vers eux.
Il écrasa la main qui s’était emparée d’un téléphone, brisant ce dernier dans la même occasion. Il était dorénavant inutilisable.
— Je vous suggère de partir, ma chère, ajouta-t-il avec un sourire qu’il voulait rassurant. Il n’est pas nécessaire que vous voyez ce qui va suivre.
— Qu’allez-vous faire ?
— Manger.
La dame resta là quelques secondes sans bouger. Dracula la fixa alors dans les yeux. Il se concentra un instant avant de pencher la tête sur le côté.
— Partez, Gente dame, répéta-t-il d’une voix bien plus profonde, hypnotique.
De la suggestion. Elle cligna des yeux quelques secondes avant de se tourner et de partir sans poser de questions. Le vampire poussa un soupir avant de se tourner vers ses deux dernières proies. Il leur fit un sourire.
— Bien ! A nous trois maintenant.
Il fondit sur eux et leur arracha leur dernier soupir dans un repas délicieux.
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