Pseudo : XXX       Titre : Samedi dernier

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AVERTISSEMENT - TEXTE A CARACTERE SEXUEL SENSIBLE


sur le quai de la ligne bleue — l’autre côté du périphérique —, j’ai vu une fleur-fuité-du-trottoir. je l’ai cueillie. dans le bus où personne ne se frôlait, un homme me rappelait Nijinski, inerte, vacillant — un fou lointain — ; et je le fixais, comme j’aurai fixé un parterre de cimetière, ou les cheveux de sylvia.

pour aller chez sylvia, il faut prendre le 285 (les bus à trois chiffres) sur trois arrêts puis longer le MLK. avec ses voisins, on a descendu son piano ; les cordes jouaient, involontaires : si-ré-si - … - oh-la-la !, et sylvia tapotait des doigts sur la rambarde. elle m’a embrassé ; mes yeux roulaient sur le piano & le trottoir nus. sa langue tournait ronde sur la mienne alanguie ; dans ma poche la fleur s’était fanée. je l’ai mise sur son oreille arrondie et elle a ri, si fort, j’ai cru qu’elle allait en mourir. elle n’est pas morte. nous avons mangé une glace vanille, dans le MLK, à l’ombre d’un chêne. je respirais fort. sylvia a dit ça va ? j’ai hoché la tête même si ça allait pas du tout, que mon chien venait de crever et que j’arrivais à rien faire sortir de mon corps à part des putains de plaques rouges sur toute ma peau.

j’ai demandé pourquoi elle avait jeté le piano. il appartenait à son ex ou l’ex de son ex, quelque chose dans ce genre, en fait elle n’en jouait pas ou peu. on a essayé de baiser violemment elle sur moi ses cuisses qui claquaient mes doigts dans ses hanches son souffle de lézard-Mojave un ciel blanc horizontal où tombaient les tourbillons de poussière & son cul. j’ai dit tiens tes cheveux, que je voie ton visage. on a dit : fesse-moi !, tais-toi !, parle-moi mal !, le lit me paraissait sec, très sec. les cloisons fines. un voisin gloussait sur une redif’ de MASH — la série, pas le film. ça me rendait mal à l’aise. elle est partie en criant, j’ai crié putain il fait chier ce con et je ne suis pas parti (à peine si j’avais bandé). j'ai quand même vérifié que la capote n’avait pas crevée. je l’ai jetée à même le sol. j'ai pensé au sida.

je suis sorti de l’immeuble tranquille. il faisait nuit. c’était calme. il ne restait qu’un pied du piano, dans le caniveau, le bois trempé. j'ai fumé trois blondes et j’ai couru jusqu’à une supérette qui abaissait ses stores pour acheter un Coca Light et des mandarines. je buvais ; l'épicier & son frère entonnaient des chants, dialecte éthiopien, en spirales, tribales, lentes : des chants d’enterrement. j'ai tapé dans le Coca Light, des allers-retours cliquesonnants, et j’ai encore fumé. clic-clac. le Coca Light gisait sur le bitume, éclaté. une voiture lui a roulé dessus. cling. une autre & une autre. canette / lame de rasoir. les mandarines, elles (comme toutes les mandarines) avaient le goût de la mort.

dans le lit une place, toujours sec, j’ai commencé à penser. sylvia dormait déjà ; j’ai caressé ses cheveux blonds.

Nijinski.

pied de piano.

lame de rasoir rouge.

litanies africaines.

mon chien.

le VIH de sylvia.

j’ai trop pensé et j’ai mal dormi, encore.

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