À la fin des cours, je me rends à la bibliothèque pour étudier, comme à mon habitude. Je m'installe à une table, sors mes affaires et commence à faire mes devoirs.

Je réalise les exercices de mathématiques sans difficulté et passe au japonais. Nous devons écrire un haïku portant sur le sujet de notre choix, mais je ne me sens pas inspirée. J'ai beau me creuser les méninges, je ne trouve rien. Il y a des jours où c'est comme cela : l'inspiration m'abandonne pour ne revenir que plus tard, quand elle le souhaite.

Seulement, je n'ai pas le temps de l'attendre car nous devons rendre ce devoir demain. Il faut absoluent que je trouve quelque chose aujourd'hui ! Je réfléchis encore pendant quelques minutes, en vain. Je pousse un soupir de découragement.

Au même moment, j'entends une voix dans mon dos :

- Qu'est-ce qu'il y a ? Cela ne va pas ?

Je me retourne pour faire face à Mizuki. Son visage exprime de l'inquiétude. Je la rassure :

- Oh, ce n'est rien de grave. C'est juste qu'on doit écrire un haïku pour la leçon de japonais de demain, mais je ne parviens pas à trouver l'inspiration nécessaire.

- Est-ce qu'il y a un sujet précis à aborder ?

- Non, le sujet est libre.

- Tant mieux, cela te laisse une plus grande marge de réflexion.

- Oui, mais dans le cas présent, cela ne m'aide pas vraiment. J'ai beau réfléchir, je ne sais pas sur quoi écrire.

- Tu n'as qu'à écrire sur un sujet qui te passionne ou qui t'intéresse. Mieux encore : tu peux écrire sur une personne importante pour toi. C'est ce que j'adorais faire !

- Une personne importante pour moi . . . murmuré-je en la fixant du regard.

Elle soutient ce dernier en souriant. C'est alors qu'une idée me vient en tête :

- Je sais ! Je vais écrire un haïku portant sur l'amitié !

- Ah, bonne idée ! s'exclame-t-elle en tapant des mains.

- Oui, et c'est à toi que je la dois, ma très chère première amie. Merci pour tout !

- Oh, ce n'est rien. Dépêche-toi plutôt d'écrire ton haïku.

Je m'exécute et m'empare de mon crayon pour rédiger les vers sur la page de mon cahier :

"Un beau sourire

Un dévouement sans failles

Merci mon amie"

Mizuki se penche par-dessus mon épaule pour lire ce que j'ai écrit et approuve d'un hochement de tête :

- Il est magnifique !

- Et il t'est dédié, l'informé-je.

- Oh, merci ! s'exclame-t-elle, touchée.

Je n'ai pas le temps de lui dire "Je t'en prie" que la sonnerie annonçant la fermeture de l'école retentit. Je me dépêche de réunir mes affaires et de me lever pour quitter la salle. Mon amie me suit en flottant jusque devant la porte de l'établissement. Ce n'est qu'une fois arrivées ici qu'elle me salue :

- À demain, Kiyoko !

- Pourquoi ne viendrais-tu pas avec moi ? Je pourrai t'inviter à la maison.

- C'est vraiment gentil, mais je ne peux pas.

- Oh, ne sois pas si timide . . .

- Ce n'est pas ça, j'adorerai venir chez toi, mais j'en suis physiquement incapable. Je suis reliée à ce lieu et je ne peux pas le quitter. C'est comme si un fil invisible m'y rattachait. Je ne peux pas aller au-delà de cette porte.

- Comme c'est dommage ! remarqué-je.

- Oui, mais ce n'est pas si grave maintenant que je t'ai pour amie parce que je sais que tu reviendras me voir et que je ne serai plus jamais seule.

Je lui souris et lui adresse un petit signe de la main avant de m'éloigner. Sur le chemin du retour, je pense :

"Je ne pourrai hélas pas revenir la voir éternellement car l'an prochain, je quitterai cette école pour aller au collège. Et comme Mizuki est incapable de quitter cet établissement, elle s'y retrouvera à nouveau seule. La pauvre ! Il faut absolument que je fasse quelque chose pour elle !"